Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

AFFAIRE INTÉRESSANT L’OPPOSITION de

Trefimétaux, Société anonyme, à la demande numéro 868183 produite par Thyssen Canada Limited en vue de l’enregistrement de la marque de commerce TMX.

 

 

Le 3 février 1998, Thyssen Canada Limited (la requérante) a produit une demande en vue de l’enregistrement de la marque de commerce TMX (la marque) en liaison avec des services de distribution de produits de métal non ferreux et de plastique semi‑finis pour utilisation industrielle; de fabrication sur commande et de traitement de produits de métal non ferreux et de plastique semi‑finis pour utilisation industrielle (les services). Cette demande se fonde sur l’emploi projeté. Elle a subséquemment été annoncée dans le Journal des marques de commerce le 26 mai 1999 en vue de la procédure d’opposition.

 

Le 14 juillet 1999, Trefimétaux, Société anonyme (l’opposante), a produit une déclaration d’opposition. Le 9 septembre 1999, la requérante a signifié et déposé en réponse à la déclaration d’opposition une contre‑déclaration dans laquelle elle nie chacun des moyens d’opposition avancés par l’opposante dans sa déclaration d’opposition. L’opposante a déposé une demande d’autorisation en vue de modifier sa déclaration d’opposition et, par une décision rendue le 18 janvier 2002, la Commission a fait droit à cette demande. La requérante n’a pas produit de contre‑déclaration modifiée. Je ne renverrai dorénavant qu’aux seuls motifs d’opposition soulevés dans la déclaration d’opposition modifiée.

 

Ces motifs peuvent se résumer ainsi :

 

a)                  La demande n’est pas conforme aux dispositions de l’article 30 de la Loi sur les marques de commerce (la Loi) pour les raisons suivantes :

 

(i)                 La requérante avait déjà employé la marque, en tout ou en partie, au Canada;

(ii)               La requérante n’a jamais eu l’intention d’employer la marque au Canada ou elle l’a abandonnée en tout ou en partie;

(iii)             À la lumière des faits énoncés ci‑après, la requérante a faussement déclaré qu’elle était autorisée à employer la marque au Canada;

 

b)                  La marque n’est pas susceptible d’enregistrement selon les dispositions de l’alinéa 12(1)d) de la Loi pour les raisons suivantes :

 

(i)                 Elle crée de la confusion avec la marque de commerce déposée « TMX » de l’opposante et le dessin y afférent, laquelle est illustrée ci‑après et porte le numéro d’enregistrement LMC 523744 (la marque de commerce déposée de l’opposante) en liaison avec des métaux communs et leurs alliages, nommément laiton et cuivre; matériaux de construction métalliques, nommément bandes avec ou sans traitement de surface pour : toitures et façades, gouttières, tuyaux d’évacuation d’eau, semi‑conducteurs, électroménagers, chauffage solaire, l’électronique et l’électricité; barres pleines et creuses et profilées pour : la robinetterie, l’industrie électrique, l’industrie automobile, la fabrication d’articles ménagers, la micromécanique et l’optique, l’industrie du matriçage et la décoration intérieure, tubes en cuivre pour l’industrie de l’air conditionné et de la réfrigération, la robinetterie et les raccords, l’électrotechnique, les appareils de mesure et l’industrie médicale; matériaux métalliques pour les voies ferrées; câbles et fils métalliques non électriques; tuyaux métalliques; coffres‑forts; produits métalliques non compris dans d’autres classes, nommément, ronces, grillages, treillis, caillebotis, billes d’acier, fers à cheval, clous et vis, plomb, enclumes, rails; minerais (les marchandises de l’opposante);

c)                  La requérante n’est pas une personne admise à l’enregistrement de la marque aux termes des dispositions du paragraphe 16(3) de la Loi pour les raisons suivantes :

 

(i)                 À la date de la production, la marque créait de la confusion avec la marque de commerce TMX antérieurement employée ou révélée au Canada par l’opposante ou son prédécesseur en titre en liaison avec les marchandises de l’opposante;

(ii)               À la date de la production, elle créait de la confusion avec une marque de commerce à l’égard de laquelle une demande d’enregistrement avait été antérieurement produite au Canada, à savoir la demande numéro 883170 visant la marque de commerce TMX et dessin en liaison avec les marchandises de l’opposante;

(iii)             La demande n’est pas conforme aux dispositions de l’article 30 de la Loi en ce qu’elle aurait dû se fonder sur l’emploi puisqu’elle a été employée ou abandonnée, selon le cas, et n’est pas susceptible d’enregistrement;

 

d)                 La marque n’est pas distinctive au sens de l’article 2 de la Loi puisqu’elle ne distingue pas les marchandises de la requérante de celles de l’opposante, ni n’est adaptée à les distinguer ainsi, pour les raisons suivantes :

 

(i)                 L’adoption, l’emploi, la révélation et l’enregistrement des célèbres marques de commerce de l’opposante;

(ii)               Par suite du transfert de la marque, il subsistait, chez deux ou plusieurs personnes, des droits à l’emploi de la marque qui ont été exercés par ces personnes de façon simultanée, contrairement aux dispositions du paragraphe 48(2) de la Loi;

(iii)             La requérante a autorisé des tiers à employer la marque au Canada et ces derniers l’ont effectivement utilisée, mais sans bénéficier de la protection qu’offre l’article 50 de la Loi lorsque l’emploi fait l’objet d’une licence.

 

La preuve produite par l’opposante consiste en un certificat d’authenticité de la demande numéro 883170 visant la marque de commerce TMX et dessin et en l’affidavit de Dimitri DiDedda. La requérante n’a pas présenté de preuve. Aucune des parties n’a déposé d’observations écrites. Seule l’opposante a comparu à l’audience.

 

Au cours de l’audience, l’opposante s’est appuyée sur l’article 44 des Règles pour demander, de vive voix, l’autorisation de produire, à titre d’élément de preuve supplémentaire, un certificat d’authenticité de l’enregistrement numéro 523744 visant la marque de commerce déposée de l’opposante afin d’étayer son motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d) de la Loi. Comme la requérante n’était pas présente à l’audience, j’ai requis l’opposante de produire cette demande par écrit et d’en transmettre une copie à l’agent de la requérante. Par lettre datée du 1er décembre 2003, j’ai demandé à la requérante de me soumettre des observations au sujet de cette demande, mais elle a omis de fournir une réponse. Comme la question de l’enregistrement susmentionné a été soulevée dans la déclaration d’opposition modifiée de l’opposante, la requérante n’est pas prise au dépourvu par la production de cette preuve supplémentaire. Je fais donc droit à la demande de l’opposante de produire, à titre de preuve supplémentaire, le certificat d’authenticité de l’enregistrement numéro 523744 visant la marque de commerce déposée de l’opposante.

 

Monsieur DiDedda travaille chez l’opposante depuis les quinze (15) dernières années. Depuis 1993, l’opposante vend au Canada divers métaux communs et leurs alliages en liaison avec la marque de commerce TMX. Le 2 juillet 1998, l’opposante a produit une demande, portant le numéro 883170, en vue de l’enregistrement de la marque de commerce TMX et dessin en liaison avec ses marchandises. Par suite de cette demande, le certificat d’enregistrement numéro 523744 a été délivré le 13 janvier 2000.

 

Des brochures illustrant les divers produits vendus par l’opposante en liaison avec la marque de commerce TMX sont jointes à l’affidavit de M. DiDedda comme pièce A‑1. Or, la preuve ne permet nullement de savoir quand et à qui ces brochures ont été distribuées au Canada. De plus, la présence d’une marque de commerce sur des brochures ne constitue pas, à elle seule, une preuve régulière de l’emploi d’une marque [voir la décision Clairol International Corp. c. Thomas Supply & Equipment Co. Ltd. (1968), 55 C.P.R. 176].

 

Des certificats concernant la réception de produits ont été présentés en liasse comme pièce A‑2, mais ils ont tous été délivrés en 1999. La pièce A‑3 consiste en des factures qui ont également été établies en 1999. Enfin, des étiquettes portant la marque de commerce TMX ont été produites comme pièce A‑4. Il n’y a donc aucun élément de preuve établissant l’« emploi », au sens de la définition donnée à l’article 4 de la Loi, antérieurement à 1999 de la marque de commerce TMX ou de la marque de commerce déposée en liaison avec les marchandises de l’opposante [voir les décisions Bombardier Ltd. c. British Petroleum Co. Ltd., (1973), 10 C.P.R. (2d) 21, Conde Nast Publications Inc. c. Union des Éditions Modernes (1979), 46 C.P.R.(2d) 183, et Hughes Aircraft Co. c. Fairchild Camera & Instrument Corp. (1990), 33 C.P.R. (3d) 500].

 

Bien que la requérante assume la charge ultime de prouver que sa demande respecte les dispositions de l’article 30 de la Loi, il incombe à l’opposante la charge de présentation initiale d’établir les faits qu’elle invoque à l’appui de ses motifs d’opposition. Lorsque cette charge initiale est acquittée, il appartient alors à la requérante de prouver que les motifs d’opposition particuliers ne devraient pas faire obstacle à l’enregistrement de la marque [voir les décisions Joseph E. Seagram & Sons Ltd. et al. c. Seagram Real Estate Ltd., 3 C.P.R. (3d) 325, p. 329 et 330; et John Labatt Ltd. c. Molson Companies Ltd., 30 C.P.R. (3d) 293].

 

Le moment pertinent pour examiner la question de l’absence de droit à l’enregistrement fondée sur le paragraphe 16(3) de la Loi est la date de production de la demande (3 février 1998) [article 16 de la Loi]. Il est habituellement considéré que la date pertinente pour apprécier la question du caractère distinctif est celle de la production de l’opposition (14 juillet 1999), tandis que la question de l’enregistrabilité aux termes de l’alinéa 12(1)d) doit être examinée à la date de ma décision [voir les décisions Andres Wines Ltd. et E&J Gallo Winery (1975), 25 C.P.R. (2d) 126, p. 130 (C.A.F.), et Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 413, p. 424 (C.A.F.)].

 

Aucun élément de preuve n’ayant été présenté au soutien des motifs d’opposition a), c) (iii) et d) (ii) et (iii) susmentionnés, ils sont tous rejetés.

 

Comme il est précisé plus haut, l’« emploi », au Canada, de la marque de commerce TMX antérieurement à la date de production de la demande n’a fait l’objet d’aucune preuve régulière de la part de la requérante. Par conséquent, le motif d’opposition c) (i) est rejeté. Quant au motif d’opposition c) (ii), la demande numéro 883170 n’a pas été produite avant la présente demande de la requérante et ce motif d’opposition doit donc également être rejeté.

 

La question de la confusion est fondamentale à la résolution des autres motifs d’opposition, à savoir l’enregistrabilité [alinéa 12(1)d)] et le caractère distinctif de la marque. Au moment de décider si la marque crée de la confusion avec la marque de commerce déposée de l’opposante, il faut suivre les prescriptions du paragraphe 6(5) de la Loi, lequel oblige le registraire à tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris :

i)             le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus;

ii)            la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage;

iii)           le genre de marchandises, services ou entreprises;

iv)                       la nature du commerce;

v)                         le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent.

 

Il est établi que les critères énumérés au paragraphe 6(5) de la Loi ne sont pas exhaustifs et qu’il n’est pas nécessaire d’accorder un poids égal à chacun d’eux [voir les décisions Clorox Co. c. Sears Canada Inc. (1992), 41 C.P.R. (3d) 483 (C.F. 1re inst.), et Gainers Inc. c. Marchildon (1996), 66 C.P.R. (3d) 308 (C.F. 1re inst.)]. Je vais donc appliquer ces principes à la preuve que les parties ont déposée au dossier.

L’opposante s’est acquittée de son fardeau initial de la preuve en déposant le certificat d’enregistrement numéro 523744 visant la marque de commerce TMX et dessin en liaison avec ses marchandises. Il appartient donc à la requérante de convaincre le registraire, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existait pas de risque de confusion entre la marque et la marque déposée de l’opposante aux dates pertinentes susmentionnées [voir les décisions Sunshine Biscuits Inc. c. Corporate Foods Ltd. (1982), 61 C.P.R. (2d) 53, et Christian Dior, S.A. c. Dion Neckwear Ltd, [2002] 3 C.F. 405].

i)                Caractère distinctif inhérent des marques de commerce et mesure dans laquelle ils sont devenus connus

 

La preuve déposée au dossier établit l’« emploi » de la marque de commerce TMX par l’opposante depuis le 28 janvier 1999, tandis que la requérante n’a produit aucun élément de preuve relatif à l’emploi de la marque. À ce titre, la marque de commerce TMX de l’opposante a acquis un certain caractère distinctif, même s’il s’agit d’une marque faible parce qu’elle est formée de lettres de l’alphabet. En conséquence, le premier facteur énoncé plus haut joue manifestement en faveur de l’opposante.

 

ii)   Période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage

 

Ce critère est également favorable à l’opposante puisque cette dernière a établi l’« emploi » de la marque de commerce TMX depuis le 28 janvier 1999, tandis que l’emploi de la marque par la requérante ne fait l’objet d’aucune preuve.

 

iii) et iv)     Genre de marchandises, services ou entreprises et nature du commerce

 

Il ressort de la comparaison entre la description des services et les marchandises de l’opposante qu’il y a chevauchement entre ces services et ces marchandises. La requérante a omis de présenter des éléments de preuve, quels qu’ils soient, visant à distinguer les voies commerciales utilisées pour ses services des voies commerciales empruntées par l’opposante pour vendre ou offrir en vente ses marchandises. En outre, M. DiDedda allègue dans son affidavit, et cette preuve n’est pas contredite, que la requérante est un important compétiteur de l’opposante. Par conséquent, les troisième et quatrième facteurs susmentionnés jouent également en faveur de l’opposante.

 

v)                  Degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent

 

Sur le plan de la présentation, du son et des idées qu’elle suggère, la marque est identique à la partie constituée de mots de la marque déposée de l’opposante. Le cinquième critère est donc lui aussi favorable à l’opposante.

 

J’arrive à la conclusion que la requérante ne s’est pas acquittée de son obligation de prouver, selon la prépondérance des probabilités, que l’emploi de la marque en liaison avec les services ne risque pas de créer de la confusion entre la marque de commerce déposée de l’opposante et sa marque de commerce TMX. Je reconnais donc le bien‑fondé du motif d’opposition b) (i) énoncé plus haut.

 

La différence dans les dates pertinentes pour évaluer la preuve relative au motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif ne change nullement la conclusion que j’ai tirée ci‑dessus. Comme ma conclusion touchant la question de la confusion s’applique également au motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif de la marque, j’accueille le motif d’opposition d) (i) susmentionné puisque la marque n’est pas adaptée à distinguer les services de la requérante des marchandises de l’opposante.

 

En conséquence, comme le registraire m’a délégué ses pouvoirs en application du paragraphe 63(3) de la Loi, je repousse la demande présentée par la requérante en vue de l’enregistrement de la marque en liaison avec les services, conformément au paragraphe 38(8) de la Loi.

 

FAIT À MONTRÉAL (QUÉBEC), LE 15 JANVIER 2004.

 

 

Jean Carrière

Commissaire

Commission des oppositions des marques de commerce

 

 

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