Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

PROCEDURE EN VERTU DE LARTICLE 45

MARQUE DE COMMERCE : PARA

No DENREGISTREMENT : 166 848

 

 

 

Le 8 juin 2000, à la demande de MM. Smart et Biggar, le registraire a donné un avis suivant l’article 45 à JemPak Canada Inc., le propriétaire inscrit de la marque de commerce enregistrée susmentionnée.

 

La marque de commerce PARA est enregistrée en ce qui concerne son emploi en liaison avec les marchandises suivantes : « détersifs ».

 

Conformément à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, le propriétaire inscrit de la marque de commerce est tenu d’établir que la marque de commerce a été employée au Canada en liaison avec chacune des marchandises ou chacun des services que spécifie l’enregistrement, à un moment quelconque au cours de la période de trois ans qui précède immédiatement la date de l’avis, ou dans la négative, la date où elle a été ainsi employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date.

 

En réponse à l’avis, l’affidavit de M. Richard O’Kopniak, accompagné de pièces, a été produit.  Seule la partie requérante a produit un argument écrit. Une audition orale n’a pas été demandée dans la présente affaire.


Dans son affidavit, M. O’Kopniak a indiqué que le titulaire de l’enregistrement est une société relativement nouvelle et que dès sa constitution, le 12 décembre 1997, certains actifs et diverses marques de commerce ont été acquis de la société Witco Canada Inc., notamment la marque de commerce PARA.  Il signale que le fait d’être une société nouvellement constituée, beaucoup d’efforts et de temps ont dû être consacrés aux opérations quotidiennes nécessaires pour maintenir et renforcer la gamme des produits courants.  Il indique que jusqu’à aujourd’hui (il a été assermenté, aux fins de son affidavit, le 30 août 2000), le titulaire de l’enregistrement n’a pas été en mesure de faire la promotion et de réaliser des ventes des détersifs en liaison avec la marque de commerce PARA.  Il explique que le but du titulaire de l’enregistrement est de développer un marché au Canada pour ses détergents PARA dans un délai d’un an et que, pour ce faire, ce dernier a distribué à des clients éventuels des échantillons des détersifs qu’il souhaite vendre en liaison avec la marque de commerce et que le titulaire de l’enregistrement s’attend à ce que des commandes lui soient faites pour le produit en raison des échantillons distribués.  Comme pièce A, M. O’Kopniak a produit une enveloppe contenant une copie de l’étiquette, une copie du connaissement qui accompagnait l’un de ces envois d’échantillons, une copie de la correspondance électronique échangée entre le personnel chez le titulaire de l’enregistrement qui reflète les efforts déployés par le titulaire de l’enregistrement pour développer un détersif commercialisable qui serait vendu en liaison avec la marque de commerce.  Il termine en indiquant que depuis qu’il a acquis la marque de commerce concernée et d’autres marques de commerce de Witco, les efforts du titulaire de l’enregistrement pour établir des marchés pour les divers produits ont été déployés sans relâche et il croit que si des ventes n’ont pas été conclues, ce n’est pas la faute du titulaire de l’enregistrement.


La partie requérante fait valoir que les éléments de preuve n’établissent ni l’emploi durant la période pertinente ni l’existence de circonstances spéciales qui justifient le défaut d’emploi.  En me basant sur les éléments de preuve produits, j’arrive à la conclusion que ceux-ci n’établissent pas l’emploi durant la période pertinente.  Par conséquent, la question qui se présente est de savoir si le défaut d’emploi est attribuable à des circonstances spéciales qui excusent le défaut d’emploi.

 

Ce qui constitue des circonstances spéciales a été examiné par la Cour d’appel dans RTM c. Harris Knitting Mills Ltd., 4 C.P.R. (3d) 488 (C.A.F.).  Aux pages 492 et 493 de l’arrêt, la Cour déclare: 

Suivant l’article 44 [maintenant l’article 45], lorsqu’il appert de la preuve fournie au registraire que la marque de commerce n’est pas employée, le registraire doit ordonner la radiation de l’enregistrement de cette marque à moins que la preuve ne révèle que le défaut d’emploi “a été attribuable à des circonstances spéciales qui le justifient” (“due to special circumstances that excuse such absence of use”).  La règle générale, c’est donc que le défaut d’emploi d’une marque est sanctionné par la radiation.  Pour que l’on puisse faire exception à cette règle, il faut, suivant le paragraphe 44(3) [maintenant l’article 45(3)], que le défaut d’emploi soit attribuable à des circonstances spéciales qui le justifient ou l’excusent.  Au sujet de ce texte, remarquons d’abord que les circonstances dont il parle doivent justifier ou excuser le défaut d’emploi en ce sens qu’elles doivent permettre de conclure que, dans un cas particulier, le défaut d’emploi ne doit pas être “puni” par la radiation.  Ces circonstances doivent être “spéciales” car il doit s’agir de circonstances qui ne se retrouvent pas dans la majorité des cas de défaut d’emploi d’une marque.  Enfin, ces circonstances spéciales qui justifient le défaut d’emploi doivent, suivant le paragraphe 44(3) [maintenant l’article 45(3)], être des circonstances auxquelles le défaut d’emploi est attribuable.  C’est dire que pour juger, dans un cas donné, si le défaut d’emploi doit être excusé, il faut s’interroger sur les motifs du défaut d’emploi et se demander si ces motifs sont tels qu’il faille faire exception à la règle générale suivant laquelle l’enregistrement d’une marque non employée doit être radié.  Jajoute enfin que le défaut demploi qui doit être ainsi justifié est le défaut demploi avant que le propriétaire ne reçoive lavis du registraire.

 


Il est impossible de dire de façon précise ce que doivent être les circonstances dont parle le paragraphe 44(3) [maintenant l’article 45(3)] pour justifier le défaut d’emploi d’une marque.  On peut cependant souligner l’importance à cet égard de la durée du défaut d’emploi et de la probabilité qu’il se prolonge longtemps; en effet, des circonstances peuvent justifier un défaut d’emploi pour un bref laps de temps sans pour autant justifier un défaut d’emploi prolongé.  Il est capital, aussi, de savoir dans quelle mesure le défaut d’emploi est attribuable à la seule volonté du propriétaire de la marque plutôt qu’à des obstacles indépendants de lui.  On ne voit pas bien pourquoi on excuserait le défaut d’emploi attribuable à la seule volonté du propriétaire de la marque.        

 

 

Dans l’arrêt Professional Gardener Co. Ltd. c. Registraire des marques de commerce, 5 C.P.R. (3d) 568 la Cour déclare à la page 573:

It has been established that such special circumstances must involve something unusual, or exceptional arising from forces external to the voluntary acts of the registrant (see John Labatt Ltd. v. The Cotton Club Bottling Co., 25 C.P.R. (2d) 115 at 123-5.

 

      

 

Dans l’affaire présente, nous n’avons pas été informé de la dernière fois où la marque a été employée ou si la marque a déjà été employée.  Ce qui est clair, c’est que depuis son acquisition de la marque de commerce, en décembre 1997, le nouveau titulaire de l’enregistrement n’a pas commencé à employer la marque de commerce.  Selon la jurisprudence, dans le cas d’une acquisition récente, la période de non-emploi commence, en général, à courir à partir de la date de l’acquisition de la marque de commerce (voir Sim & McBurney c. Hugo Boss A6, 67 C.P.R. (3d) 269, et Arrowhead Water Corp. c. Arrowhead Spring Water Ltd., 47 C.P.R. (3d) 217).  En conséquence, dans le cas qui nous occupe, JemPak Canada Inc. n’a qu’à fournir la raison du défaut d’emploi depuis le 12 décembre 1997 et montrer qu’il avait sérieusement l’intention avant la date de l’avis de reprendre sous peu l’emploi de la marque de commerce.


En ce qui concerne la raison du défaut d’emploi, M. O’Kopniak n’a pas été très informatif.  Il a simplement indiqué que JemPak Inc. étant une société nouvellement constituée, les efforts et le temps ont été consacrés principalement aux opérations quotidiennes nécessaires pour maintenir et renforcer la gamme des produits courants.  Ensuite, il a indiqué que jusqu’à aujourd’hui, le titulaire de l’enregistrement n’a pas été en mesure d’affecter les ressources nécessaires sur le plan de la commercialisation pour promouvoir et pour réaliser des ventes de détersifs en liaison avec la marque de commerce PARA.

 

Je reconnais qu’une société nouvellement constituée peut avoir besoin d’un certain temps pour établir son entreprise.  Par ailleurs, en tant que nouveau propriétaire de la marque depuis décembre 1997, le titulaire devait démontrer qu’il avait clairement l’intention de commencer à employer la marque de commerce dans un avenir immédiat.  D’après la preuve, il semble que le propriétaire n’a fait aucun effort au cours de la période de décembre 1997 au 8 juin 2000 (la date où l’avis a été donné) pour mettre en marché un détersif en liaison avec la marque de commerce au Canada.  Il semblerait que le propriétaire a plutôt choisi de renforcer sa gamme de produits courants qui peut possiblement ne pas avoir englobé la marque de commerce PARA et les marchandises présentes que spécifie l’enregistrement.  Ceci apparaît être une décision voulue et volontaire de la part du nouveau propriétaire et est donc insuffisant pour me permettre de conclure que le non-emploi était dû à “something unusual, or exceptional arising from forces external to the voluntary acts of the registrant”. 

 


De plus, comme l’a fait justement valoir la partie requérante, le titulaire de l’enregistrement était tenu de montrer qu’il avait une intention sérieuse et ce, au moyen de mesures concrètes, avant que lavis ne soit donné. (Voir Lander Co. Canada Ltd. v. Alex & MacRae & Co., 46 C.P.R. (3d) 417 à la page 421.)  Ce que la preuve établie, c’est que le propriétaire a décidé de prendre certaines démarches mais seulement après avoir reçu l’avis.  Ceci n’est pas satisfaisant.

 

Vu la preuve fournie, j’arrive à la conclusion que le titulaire de l’enregistrement ne s’est pas acquitté du fardeau de la preuve qui lui incombait d’établir que le défaut d’emploi était attribuable à des circonstances spéciales qui excusaient le non-emploi.

 

Pour ces motifs, conformément au paragraphe 45(5) de la Loi, l’enregistrement no 166 848 sera radié.

 

FAIT À HULL, QUÉBEC, CE      20e       JOUR DE DÉCEMBRE 2001.            

 

D. Savard

Agente d’audience principale

Article 45

 

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