Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2015 COMC 46

Date de la décision : 2015-03-17

TRADUCTION

DANS L'AFFAIRE DE L'OPPOSITION produite par FGL Sports Ltd. à l'encontre de la demande d'enregistrement no 1,451,996 pour la marque de commerce SOCCER EXPERTS au nom de Soccer Experts Inc.

[1]               FGL Sports Ltd. (l'Opposante) s'oppose à l'enregistrement de la marque de commerce SOCCER EXPERTS (la Marque), qui fait l'objet de la demande no 1,451,996.

[2]               La demande a été produite par Soccer Experts Inc. (la Requérante) le 16 septembre 2009 et, initialement, la Requérante revendiquait l'emploi de la Marque depuis au moins le 30 octobre 1998, en liaison avec : [traduction] « l'exploitation de magasins de vente au détail d'équipement de sport, d'accessoires vestimentaires, d'accessoires de sport et d'équipement de soccer; commandite d'équipes de soccer » (ci-après collectivement appelés « les Services ») ainsi qu'avec divers articles de sport. Par la suite, la Requérante a, de sa propre initiative, modifié la demande afin d'en supprimer tous les produits et restreindre la demande aux seuls Services.

[3]               L'Opposante allègue que la Marque n'est pas enregistrable aux termes de l'article 12(1)d) de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi), que la Marque n'est pas distinctive au sens de l'article 2 de la Loi et que la Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la Marque aux termes de l'article 16(1)a) de la Loi parce que la Marque crée de la confusion avec, entre autres, la marque de commerce déposée SPORTS EXPERTS de l'Opposante, laquelle a été antérieurement employée au Canada par l'Opposante pendant plus de 40 ans en liaison avec, entre autres, des services de vente au détail dans le domaine des articles de sport. Les détails de cet enregistrement ainsi que ceux des autres enregistrements que l'Opposante invoque au soutien de son opposition (ci-après, parfois collectivement appelés « la famille de marques de commerce EXPERTS de l'Opposante) sont présentés à l'Annexe A des présentes. L'Opposante allègue également que la demande pour la Marque n'est pas conforme aux exigences de l'article 30 de la Loi pour diverses raisons, l'une d'elles étant que la Requérante n'emploie pas la Marque en liaison avec les Services depuis la date de premier emploi revendiquée.

[4]               Pour les raisons exposées ci-après, la demande est repoussée.

Le dossier

[5]               La déclaration d'opposition a été produite par le prédécesseur en titre de l'Opposante, à savoir The Forzani Group Ltd., le 23 décembre 2011. À la suite d'une fusion survenue le 1er janvier 2012, The Forzani Group Ltd. est devenu FGL AcquisitionCo Limited, laquelle a, à son tour et le même jour, changé son nom pour celui de l'Opposante. Chacun de ces changements a été inscrit au registre par le registraire le 14 mars 2012. Sauf indication contraire, j'emploierai le terme « Opposante » pour désigner indistinctement ces trois entités.

[6]               La Requérante a produit une contre-déclaration dans laquelle elle conteste l'ensemble des motifs plaidés.

[7]               Comme preuve, l'Opposante a produit l'affidavit de son vice-président, Jean-Stéphane Tremblay, assermenté le 4 juillet 2012, ainsi que des copies certifiées de chacun des enregistrements énumérés à l'Annexe A et des demandes de marque de commerce pendantes suivantes : VÉLO EXPERTS (demande no 1,332,531), SKI EXPERTS (demande no 1,332,530), et TENNIS EXPERTS (demande no 1,520,292). L'affidavit Tremblay fournit des renseignements généraux sur l'entreprise de l'Opposante ainsi qu'une preuve de l'emploi de sa marque de commerce SPORTS EXPERTS et de ses marques de commerce apparentées au Canada.

[8]               Au soutien de sa demande, la Requérante a produit les affidavits de son président, Farès Abi-Saleh, assermenté le 6 février 2013, et de Nancy Bombardier, une recherchiste employée par une société de recherche d'entreprises et de marques de commerce dont les services ont été retenus par les agents de la Requérante, assermentée le 8 février 2013. L'affidavit Abi-Saleh fournit des renseignements généraux sur l'entreprise de la Requérante ainsi qu'une preuve de l'emploi de la Marque au Canada. L'affidavit Bombardier vise à présenter une preuve de l'état du registre relativement aux marques de commerce qui comprennent le mot EXPERTS au Canada. M. Abi-Saleh et Mme Bombardier ont tous deux été contre-interrogés au sujet de leur affidavit et les transcriptions de leur contre-interrogatoire ont été versées au dossier.

[9]               Seule l'Opposante a produit un plaidoyer écrit. Les parties étaient toutes deux représentées à l'audience qui a été tenue.

Fardeau de preuve incombant à chacune des parties

[10]           L'Opposante a le fardeau de preuve initial d'établir les faits allégués à l'appui de chacun des motifs d'opposition. Une fois que l'Opposante s'est acquittée de ce fardeau initial, la Requérante doit s'acquitter du fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que la Marque est enregistrable [voir John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst.); et Dion Neckwear Ltd c Christian Dior, SA et al (2002), 20 CPR (4th) 155 (CAF)].

Analyse des motifs d'opposition

Motifs d'opposition liés à la non-conformité de la demande aux exigences de l'article 30 de la Loi

[11]           L'Opposante allègue que la demande pour la Marque n'est pas conforme aux exigences des articles 30a), b), et i) de la Loi. J'analyserai d'abord le motif d'opposition fondé sur l'article 30b).

Motif d'opposition fondé sur l'article 30b)

[12]           L'Opposante allègue que la demande contrevient aux dispositions de l'article 30b) de la Loi parce que la Requérante n'emploie pas la Marque au Canada en liaison avec chacun des Services au sens de l'article 4 de la Loi depuis la date revendiquée, à savoir le 30 octobre 1998.

[13]           La date pertinente pour l'examen des circonstances relatives à ce motif d'opposition est la date de production de la demande [voir Georgia-Pacific Corporation c Scott Paper Ltd (1984), 3 CPR (3d) 469 (COMC)]. À cet égard, l'alinéa 30b) de la Loi exige qu'il y ait eu emploi continu de la Marque depuis la date revendiquée [voir Labatt Brewing Co c Benson & Hedges (Canada) Ltd (1996), 67 CPR (3d) 258 (CF 1re inst)]. Dans la mesure où les faits pertinents relatifs à un motif d'opposition fondé sur l'article 30b) de la Loi sont plus facilement accessibles à la Requérante, le fardeau de preuve qui incombe à l'Opposante relativement à ce motif est moins exigeant [voir Tune Master c Mr Ps Mastertune Ignition Services Ltd (1986), 10 CPR (3d) 84 (COMC)]. En outre, l'Opposante peut s'acquitter de son fardeau de preuve en s'appuyant sur la preuve de la Requérante, du moment que la preuve de la Requérante est clairement incompatible avec les prétentions contenues dans la demande [voir Labatt Brewing Co c Molson Breweries, A Partnership (1996), 68 CPR (3d) 216 (CF 1re inst)].

[14]           En l'espèce, l'Opposante s'appuie sur l'affidavit Abi-Saleh pour démontrer que la Requérante n'emploie pas au Canada la Marque qui est visée par la demande depuis la date de premier emploi revendiquée. L'Opposante soutient que la Requérante a elle-même admis ne pas avoir commencé à employer la Marque dans la forme qui est visée par la demande, c.-à-d. à titre de marque nominale, à la date revendiquée. La preuve de la Requérante est plutôt à l'effet que lorsqu'elle a commencé à exercer des activités de vente au détail en 1998, elle employait la marque mixte reproduite ci-dessous sur son enseigne de magasin, laquelle est formée d'éléments graphiques distinctifs et frappants qui comprennent le dessin d'un joueur de soccer assorti des éléments nominaux « SOCCER EXPERTS INC. » dans lesquels la lettre « O » du mot « SOCCER » est remplacée par un dessin de ballon de soccer, lequel est graphiquement relié au mouvement de botté du joueur qui est représenté (ci-après appelée « la marque logo SOCCER EXPERTS ») :

[affidavit Abi-Saleh, pièce 7]

[15]           L'Opposante soutient que la Requérante n'a commencé à employer les mots « SOCCER EXPERTS » sur l'enseigne de son propre magasin qu'en 2002 [voir le contre-interrogatoire de M. Abi-Saleh, questions 557 à 559]. Il n'y a pas non plus la moindre preuve que la Marque qui est visée par la demande figurait sur les factures de ventes à cette époque. La facture la plus ancienne que la Requérante a été en mesure de produire en preuve pour démontrer que des ventes au détail d'articles de sport ont eu lieu date de mai 2001 et montre que c'était la marque logo SOCCER EXPERTS qui était employée [voir le contre-interrogatoire de M. Abi-Saleh, questions 172 et 173]. L'Opposante soutient en outre que les exemples de publicités pour les services de vente au détail de la Requérante les plus anciens qui ont été fournis, lesquels datent de l'an 2000, montrent, eux aussi, l'emploi de la marque logo, par opposition à la simple marque nominale « SOCCER EXPERTS » [voir l'affidavit Abi-Saleh au para. 18; pièce 7].

[16]           L'Opposante soutient que ces différences entre la marque logo SOCCER EXPERTS et la Marque qui est visée par la demande ne peuvent pas être considérées comme mineures. Elle soutient que les éléments graphiques, à savoir le dessin d'un joueur de soccer qui occupe une place considérable et le ballon de soccer qui remplace la lettre « O » dans le mot « SOCCER », ressortent de façon frappante. Elle soutient que l'élément visuel dominant de la marque dans son ensemble est le mouvement de botté du joueur, qui frappe le ballon avec son pied tout en se jetant au sol afin de réussir son tir. L'élément nominal supplémentaire « INC. » a pour effet de différencier encore plus les deux marques. En outre, l'Opposante soutient que les mots « SOCCER EXPERTS » seraient probablement perçus par les consommateurs comme faisant partie intégrante du dessin d'ensemble de la marque logo SOCCER EXPERTS et, donc, comme un élément d'un tout, plutôt que comme une marque de commerce distincte.

[17]           L'Opposante soutient que, même si l'on considérait qu'il s'agit là de différences mineures, il n'en resterait pas moins qu'il n'y a pas la moindre preuve que, à la date de premier emploi revendiquée, l'Opposante exploitant son magasin de détail en liaison avec la Marque, sans le mot « INC. » et les éléments graphiques représentant un joueur de soccer et un ballon de soccer. Je ne souscris pas à la vision de l'Opposante.

[18]           Pour l'application de l'article 30b) de la Loi, une marque de commerce sera considérée comme ayant été employée si la marque de commerce qui est véritablement employée ne diffère pas substantiellement de celle à l'égard de laquelle une demande a été produite ou, en d'autres termes, si les différences présentes dans la marque qui est visée par la demande sont [traduction] « à ce point minimes qu'elles n'induiraient pas les acheteurs en erreur » [voir Coastal Culture Inc c Wood Wheeler Inc (2007), 57 CPR (4th) 261 (CF) au para. 54]. L’emploi d’une marque de commerce en conjugaison avec des mots ou des éléments supplémentaires constitue un emploi de la marque visée par la demande si, sous le coup de la première impression, le public y voit un emploi de la marque de commerce en soi. Il s’agit là d’une question de fait qui dépend de celle de savoir si la marque de commerce se démarque des éléments additionnels et si la marque demeure reconnaissable [voir Nightingale Interloc Ltd. c Prodesign Ltd (1984), 2 CPR (3d) 535 (COMC) à 538; et Promafil Canada Ltee c Munsingwear Inc (1992), 44 CPR (3d) 59 (CAF)].

[19]           En règle générale, une marque nominale confère à son propriétaire la protection la plus large qui soit, de même qu'une certaine latitude dans la façon d'employer la marque, pourvu qu'elle conserve son identité [voir Le Registraire des marques de commerce c Compagnie Internationale pour linformatique CII Honeywell Bull (1985), 4 CPR (3d) 523 (CAF); et Nightingale, précitée]. Il est indiqué dans Stikeman, Elliot c Wm Wrigley Jr Co (2001), 14 CPR (4th) 393 (COMC) à 395, que :

[traduction]
« [...] dans le cas d’une marque nominale, l’emploi du mot ou des mots servant de marque, qu’importe la forme ou la couleur employées, peut être considéré comme un emploi de la marque déposée. »

[20]           En l'espèce, les mots « SOCCER EXPERTS » figurent bien en vue dans une police et une taille de caractères différentes de celles des mots « Boutique » et « INC. ». Compte tenu du caractère dominant des mots « SOCCER EXPERTS », de la nature descriptive des mots « Boutique » et « INC. » et de la probabilité que la marque logo SOCCER EXPERTS soit identifiée verbalement par les mots « SOCCER EXPERTS », je considère que l'emploi de la marque logo constitue un emploi de la marque nominale SOCCER EXPERTS. Les éléments graphiques supplémentaires qui représentent un joueur de soccer et un ballon de soccer ne modifient pas l'identité de la Marque en soi, en ce sens que les mots SOCCER EXPERTS demeurent reconnaissables et se démarquent de l'ensemble de la marque logo. Je le répète, rien n'empêche d'employer une marque de commerce en conjugaison avec des mots ou des éléments supplémentaires si, sous le coup de la première impression, le public y voit un emploi de la marque de commerce en soi.

[21]           Compte tenu de ce qui précède, j'estime que l'Opposante ne s'est pas acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait à l'égard de ce motif d'opposition.

[22]           En conséquence, le motif d'opposition fondé sur l'article 30b) est rejeté.

Motif d'opposition fondé sur l'article 30a)

[23]           L'Opposante allègue que la demande contrevient aux dispositions de l'article 30a) de la Loi, parce que les services décrits dans la demande comme la « commandite d'équipes sportives » ne sont pas définis dans les termes ordinaires du commerce ni identifiés comme acceptables dans le Manuel des marchandises et des services de l'OPIC (le Manuel) et que, par conséquent, il est impossible de savoir clairement en quoi consistent véritablement ces services.

[24]           En général, la date pertinente pour l'examen d'un motif d'opposition fondé sur l'article 30a) de la Loi est la date à laquelle la demande a été produite.

[25]           Le fait qu'un mot ou une expression ne figurent pas dans le Manuel ne signifie pas nécessairement que ce mot ou cette expression ne sont pas des termes ordinaires du commerce. Le Manuel contient une liste représentative de produits et de services considérés comme acceptables au titre de l'article 30a) de la Loi. Cette liste n'est pas exhaustive. Je souligne, en outre, que l'Opposante n'a formulé aucune observation, ni dans son plaidoyer écrit ni à l'audience, relativement à sa prétention voulant que les services ne soient pas définis comme acceptables dans le Manuel.

[26]           L'Opposante s'appuie sur le témoignage du témoin de la Requérante, M. Abi-Saleh. L'Oposante est d'avis que les activités de « commandite » de la Requérante ne correspondent pas à ce qu'on entend habituellement par « commandite », soit, selon elle, un don philanthropique d'argent ou de biens, car les activités de commandite de la Requérante consisteraient simplement à offrir de temps à autre un rabais sur le prix d'articles vendus à profit. Je ne suis pas de cet avis.

[27]           Comme l'a souligné la Requérante à l'audience, la définition du dictionnaire pour le mot « sponsor » [commanditaire] que l'Opposante elle-même a invoquée ne limite pas les moyens par lesquels l'activité de commandite peut être exercée. Le dictionnaire Oxford définit « Sponsor » [commanditaire] de la manière suivante : [traduction] « une personne ou une organisation qui assume une partie ou la totalité des coûts liés à la tenue d'un événement sportif ou artistique en échange de publicité ». C'est exactement ce que fait la Requérante.

[28]           M. Abi-Saleh affirme au paragraphe 24 de son affidavit que la Requérante a commandité de multiples tournois, ligues et équipes de soccer au fil des ans. Pour étayer ses dires, il a joint, comme pièce 12, diverses publicités imprimées et photographies. Après examen de cette pièce, je souligne que la Marque figure bien en vue dans des publicités imprimées annonçant divers tournois de soccer, parmi les noms et logos d'autres commanditaires. Elle figure également sur les uniformes de soccer des équipes commanditées par la Requérante. En contre-interrogatoire, M. Abi-Saleh a expliqué que la Requérante accorde un rabais sur le prix des uniformes de soccer qu'elle vend en échange du droit d'apposer la Marque sur ces uniformes [voir le contre-interrogatoire de M. Abi-Saleh, question 294].

[29]           Compte tenu de ce qui précède, j'estime que l'Opposante ne s'est pas acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait à l'égard de ce motif d'opposition.

[30]           En conséquence, le motif d'opposition fondé sur l'article 30a) est rejeté.

Motif d'opposition fondé sur l'article 30i)

[31]           L'Opposante allègue que la demande contrevient aux dispositions de l'article 30i) de la Loi, parce que, à la date de production de la demande et à la date de premier emploi alléguée, la Requérante avait connaissance des droits détenus par l'Opposante à l'égard de sa famille de marques de commerce EXPERTS antérieurement employées et enregistrées au Canada en liaison avec des services d'une nature identique ou similaire à celle des Services.

[32]           Plus particulièrement, l'Opposante allègue que, étant donné que la Requérante et l'Opposante sont des concurrentes au sein de l'industrie de la vente au détail d'articles de sport et qu'elles sont généralement au fait de leur publicité et de leurs services respectifs, la demande est une tentative pour tirer avantage de la grande renommée acquise par la famille de marques de commerce EXPERTS de l'Opposante et amener les consommateurs à croire à tort que les Services de la Requérante sont liés ou associés à l'Opposante ou qu'ils ont reçu son approbation. Elle prétend qu'à ce titre, la Requérante ne pouvait pas et ne peut pas à bon droit faire la déclaration relative au droit d'employer la Marque prévue à l'article 30i).

[33]           Lorsqu'un requérant a fourni la déclaration exigée par l'article 30i), un motif d'opposition fondé sur l'article 30i) ne devrait être accueilli que dans des circonstances exceptionnelles, comme lorsqu'il existe une preuve que le requérant est de mauvaise foi [voir Sapodilla Co Ltd c Bristol-Myers Co (1974), 15 CPR (2d) 152 (COMC)]. Il n'y a pas la moindre preuve de cette nature en l'espèce.

[34]           Le simple fait que la Requérante connaissait l'existence des marques de commerce de l'Opposante au moment où elle a produit la demande, tel qu'il est apparu lors du contre-interrogatoire de M. Abi-Saleh, ne l'empêchait pas de faire la déclaration exigée par l'article 30i) de la Loi, notamment parce qu'elle pouvait être d'avis que la Marque ne créait pas de confusion avec les marques de commerce de l'Opposante.

[35]           Compte tenu de ce qui précède, j'estime que l'Opposante ne s'est pas acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait à l'égard de ce motif d'opposition.

[36]           En conséquence, le motif d'opposition fondé sur l'article 30a) est rejeté.

Motifs d'opposition liés à la probabilité de confusion

[37]           Comme je l'ai indiqué précédemment, l'Opposante allègue que la Marque n'est pas enregistrable aux termes de l'article 12(1)d) de la Loi, que la Marque n'est pas distinctive au sens de l'article 2 de la Loi, et que la Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la Marque aux termes de l'article 16(1)a) de la Loi, compte tenu de la probabilité de confusion avec, entre autres, la marque de commerce déposée SPORTS EXPERTS de l'Opposante. J'analyserai d'abord le motif d'opposition fondé sur l'article 12(1)d).

Motif d'opposition fondé sur la non-enregistrabilité

[38]           L'Opposante allègue que la Marque n'est pas enregistrable eu égard aux dispositions de l'article 12(1)d) de la Loi en ce qu'elle crée de la confusion avec la marque de commerce déposée SPORTS EXPERTS de l'Opposante, ainsi qu'avec ces autres marques de commerce déposées.

[39]           J'ai exercé le pouvoir discrétionnaire du registraire, et je confirme que ces enregistrements sont en règle à la date d'aujourd'hui, laquelle est la date pertinente pour l'examen d'un motif fondé sur l'article 12(1)d) [voir Park Avenue Furniture Corp c Wickers/Simmons Bedding Ltd (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)].

[40]           L'Opposante s'étant acquittée de son fardeau de preuve initial, il incombe à la Requérante de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu'il n'existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et ces marques de commerce déposées de l'Opposante.

[41]           Sauf indication contraire, j'axerai mon analyse sur l'enregistrement no LMC206,403 de la marque nominale SPORTS EXPERTS de l'Opposante. Cet enregistrement constitue l'argument le plus solide de l'Opposante. Si cette marque ne permet pas à lOpposante dobtenir gain de cause, les autres marques qu'elle a invoquées ne le lui permettraient pas davantage. J'ajouterai, à cet égard, que l'emploi de la marque figurative enregistrée sous le no LMC449,394 équivaut à un emploi de la marque nominale SPORTS EXPERTS, laquelle constitue l'élément dominant de la marque.

Le test en matière de confusion

[42]           L'article 6(2) de la Loi porte que :

Lemploi dune marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce, lorsque lemploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

[43]           Ainsi, cet article ne porte pas sur la confusion entre les marques de commerce elles-mêmes, mais sur une confusion qui porterait à croire que les produits ou les services d'une source proviennent d'une autre source.

[44]           Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. Comme l'a fait observer le juge Denault dans Pernod Ricard c. Molson Breweries (1992), 44 CPR (3d) 359, à 369 :

[traduction]
Les marques de commerce devraient être examinées du point de vue du consommateur moyen qui a un souvenir non pas précis, mais général de la marque précédente. Il s'ensuit que les marques ne devraient pas être disséquées ni soumises à une analyse microscopique en vue d'apprécier leurs ressemblances et leurs différences. Elles devraient plutôt être envisagées globalement et évaluées en fonction de leur effet sur le consommateur moyen en général.

[45]           Lorsqu'il applique le test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce, y compris celles expressément énoncées à l'article 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de produits, services ou entreprises; d) la nature du commerce; e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Cette liste n'est pas exhaustive et il importe de prendre en considération tous les facteurs pertinents. En outre, le poids qu'il convient d'accorder à chacun de ces facteurs n'est pas nécessairement le même et varie en fonction des circonstances [voir Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc (2006), 49 CPR (4th) 321 (CSC); Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée (2006), 49 CPR (4th) 401 (CSC); et Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc (2011), 92 CPR (4th) 361 (SCC) pour une analyse plus approfondie des principes généraux qui régissent le test en matière de confusion].

Examen des facteurs énoncés à l'article 6(5)

Le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[46]           Les marques de commerce en cause sont toutes deux des marques intrinsèquement faibles étant donné leur connotation descriptive ou hautement suggestive dans le contexte des produits ou des services auxquels elles sont liées.

[47]           Le fait que d'autres marques de commerce EXPERTS soient inscrites au registre des marques de commerce n'entre pas en ligne de compte lorsqu'il s'agit d'évaluer le caractère distinctif inhérent des marques des parties en soi. La preuve de l'état du registre constitue cependant une circonstance pertinente de l'espèce qu'il convient d'examiner à titre de circonstance additionnelle dans le cadre du test en matière de confusion. Je reviendrai donc sur ce point un peu plus loin.

[48]           Une marque de commerce peut acquérir une force accrue si elle devient connue par la promotion ou l'emploi. En l'espèce, la preuve démontre que les marques de commerce des parties ont toutes deux été employées et sont toutes deux devenues connues au Canada, quoique dans une mesure nettement moindre dans le cas de la Marque, tel qu'il appert de mon examen des points saillants des affidavits Tremblay et Abi-Saleh respectivement, ci-dessous.

L'affidavit de M. Tremblay

[49]           M. Tremblay témoigne essentiellement de ce qui suit :

  • l'Opposante est la plus grande entreprise de vente au détail d'articles de sport au Canada, elle offre à ses clients une vaste gamme d'articles vestimentaires, d'articles chaussants, d'équipement et d'accessoires destinés à être utilisés dans la pratique d'une multitude de sports et d'activités récréatives, y compris le soccer, le hockey et le golf. L'Opposante exerce ses activités de vente au détail partout au Canada par le truchement de plus de 500 magasins de vente au détail d'articles de sport exploités sous différentes bannières, dont SPORTS EXPERTS, HOCKEY EXPERTS, GOLF EXPERTS, SPORT CHEK, SPORT MART, ATMOSPHERE, ATHLETES WORLD, etc. [affidavit Tremblay au para. 3; pièce A];
  • la chaîne de magasins de vente au détail d'articles de sport SPORTS EXPERTS de l'Opposante a été lancée en 1967 par le prédécesseur en titre de l'Opposante, Sports Experts Inc. Fondée par huit hommes d'affaires qui détenaient individuellement des magasins locaux indépendants de vente au détail d'articles de sport dans la région de Montréal, la chaîne de magasins d'articles de sport SPORTS EXPERTS est la première chaîne de vente au détail d'articles de sport d'envergure a avoir été créée au Canada [affidavit Tremblay aux para. 4 et 5];
  • dès le début, les activités de vente au détail exercées sous la bannière SPORTS EXPERTS ont bénéficié d'une publicité intégrée et d'un marketing centré sur les prix spéciaux que SPORTS EXPERTS offrait à ses clients sur différents types d'articles de sport, ce qu'elle était en mesure de faire parce qu'elle achetait ses produits auprès de grossistes, en quantités considérables. Cette publicité a pris la forme de circulaires distribuées par l'intermédiaire de journaux locaux et de journaux à grand tirage au Québec; ces circulaires ont joué un rôle clé dans le succès de l'entreprise SPORTS EXPERTS et de son modèle d'affaires novateur pour la vente d'articles de sport au Canada [affidavit Tremblay au para. 6];
  • depuis l'ouverture du premier magasin de détail SPORTS EXPERTS en 1967, la bannière SPORTS EXPERTS est devenue la plus grande entreprise de vente au détail d'articles de sport au Québec et exploite aujourd'hui des magasins de détail d'un bout à l'autre du Canada. À l'heure actuelle, 69 magasins SPORTS EXPERTS sont en exploitation en Alberta, en Colombie-Britannique, au Nouveau-Brunswick, en Ontario et au Québec [affidavit Tremblay aux para. 7 et 8; pièce B];
  • la marque de commerce SPORTS EXPERTS de l'Opposante figure bien en vue sur les enseignes extérieures et intérieures des magasins, les sacs dans lesquels les articles vendus sont remis au client, les reçus de caisse ainsi que dans les publicités et sur les divers sites Web de l'Opposante, y compris les sites de médias sociaux [affidavit Tremblay aux para. 10 et 11, et 15 et 16; pièces D, E-1 à E-7, F et G];
  • les ventes réalisées sous la bannière SPORTS EXPERTS depuis 1997 au Canada s'élèvent à plus de 3,3 milliards de dollars, et des ventes annuelles de centaines de millions de dollars ont été réalisées chaque année de 1997 à 2005 [affidavit Tremblay au para. 12, lequel comprend un graphique montrant les ventes approximatives réalisées chaque année];
  • de 2006 à 2012 (année partielle) les ventes réalisées sous la bannière SPORTS EXPERTS de l'Opposante ont connu une croissance soutenue, et se sont élevées à plus de 1,5 milliard de dollars au total [affidavit Tremblay au para. 13];
  • à elles seules, les ventes de produits de soccer, c.-à-d. l'équipement, les accessoires, les vêtements de soccer et les articles chaussants pour le soccer, réalisées dans les magasins exploités sous la bannière SPORTS EXPERTS s'élèvent à plus de 33 millions de dollars depuis 2004, et une part importante des ventes de ces produits a été réalisée au cours des dernières années [affidavit Tremblay au para. 14, lequel comprend un graphique montrant les ventes approximatives réalisées chaque année];
  • l'Opposante a dépensé des millions de dollars pour promouvoir et annoncer la marque SPORTS EXPERTS au Canada [affidavit Tremblay au para. 17, lequel comprend un graphique montrant les sommes dépensées de 2005 à 2012 par type de média (c.-à-d. journaux; circulaires; radio; télévision; magazines; et autres];
  • la méthode publicitaire la plus importante parmi celles utilisées pour promouvoir les services de magasins de détail SPORTS EXPERTS de l'Opposante est la distribution de circulaires imprimées. Depuis la fin des années 1960, des circulaires imprimées ont été distribuées à des millions de Québécois et de Canadiens à titre d'encarts aussi bien dans des journaux régionaux que dans des journaux à grand tirage. Aujourd'hui, environ 1 450 000 copies de circulaires dans lesquelles la marque de commerce SPORT EXPERTS figure bien en vue sont distribuées aux Canadiens par l'intermédiaire de journaux régionaux et de journaux à grand tirage chaque fois qu'a lieu un événement marketing. L'Opposante distribue également au Québec près de 1 800 000 copies de circulaires par l'intermédiaire du Publi-Sac à chaque événement marketing. Au fil des ans, les circulaires de l'Opposante ont souvent annoncé des ventes de produits de soccer [affidavit Tremblay aux para. 18 à 20; pièces H et I];
  • depuis au moins 2001, l'Opposante distribue également son propre magazine, Fusion, qui est pour elle un moyen de promouvoir la marque SPORTS EXPERTS. Ce magazine qui s'adresse aux consommateurs contient des articles sur des sujets liés à la santé et à la mise en forme, annonce divers accessoires et articles de sport, y compris des produits de soccer, et fait la promotion des magasins de détail SPORTS EXPERTS. Le magazine Fusion est distribué à raison d'environ 2 000 000 de copies par année par l'intermédiaire de journaux régionaux et à grand tirage au Québec, en Ontario et au Nouveau-Brunswick, ainsi que par l'intermédiaire de journaux locaux dans certaines parties de l'Alberta. Il est également offert aux clients en magasin, et peut être consulté en version électronique sur le site Web de l'Opposante, au www.sportsexperts.ca [affidavit Tremblay au para. 21; pièce J];
  • la marque de commerce SPORTS EXPERTS et les services de vente au détail offerts en liaison avec cette marque de commerce ont également été annoncés dans le cadre de publicités télévisées diffusées au Canada de 2009 à 2011 [affidavit Tremblay au para. 22; pièce K];
  • la marque de commerce SPORTS EXPERTS et les services de vente au détail sont également annoncés en ligne sur le site Web de l'Opposante, lequel a été lancé en 2004 et a reçu, ces dernières années, des millions de visites. La marque de commerce SPORTS EXPERTS figure également bien en vue sur le site corporatif de l'Opposante au www.fglsports.com, et sur la page Facebook de l'Opposante, qui a été lancée en octobre 2011. Plus particulièrement, par l'entremise de la page Facebook de l'Opposante, les utilisateurs Facebook peuvent participer à un « office soccer pool » [« pool » de soccer du bureau] qui est annoncé au moyen de la phrase « ARE YOU A SOCCER EXPERT? » [Êtes-vous un expert du soccer?] aussi bien en français qu'en anglais [affidavit Tremblay aux para. 11 et 23; pièces L-1 et L-2];
  • l'Opposante a régulièrement accordé des commandites dans le milieu du soccer. De 2003 à 2011, l'Opposante a été une commanditaire de l'équipe de soccer professionnelle l'Impact de Montréal et elle a investi environ 453 600 $ dans cette commandite; en échange, la marque SPORTS EXPERTS a figuré sur les articles médias imprimés officiels de l'Impact de Montréal, tels que les billets de match, les affiches, les brochures, les guides-médias, les documents de concours ainsi que sur le site Web, elle était également mentionnée dans le cadre de messages publicitaires à la radio, et apparaissait sur le tableau d'affichage et dans des publicités diffusées sur grand écran lors des matchs et des pratiques publiques de l'Impact. L'Opposante a également commandité l'Association canadienne de soccer (ACS) de 2008 à 2012, en échange de quoi la marque SPORTS EXPERTS a figuré dans les documents imprimés de l'ACS distribués partout au Québec et est apparu dans des publicités télévisées diffusées lors des Championnats d'Europe de football de 2008 et 2012 et lors de Coupe du monde de la FIFA de 2010 [affidavit Tremblay au para. 24; pièces M-1 à M-6]; et

         depuis 1979, l'Opposante a également été activement impliquée dans d'autres programmes de commandite nationaux, dont des fondations et des événements caritatifs, des organisations et des événements sportifs communautaires et nationaux, des programmes d'entreprise et des équipes sportives professionnelles. Parmi les événements et les équipes commandités figurent les Jeux du Canada, les Jeux olympiques spéciaux, les Jeux du Québec, le Tour de lîle de Montréal, l'équipe de hockey Les Canadiens de Montréal, l'équipe de football Les Alouettes de Montréal, etc. [affidavit Tremblay, para. 38 à 40; pièces W-1 à W-4; et Y-1 et Y-2].

[50]           En somme, je suis convaincue, après examen de l'affidavit Tremblay et des pièces qui l'accompagnent, que la marque de commerce SPORTS EXPERTS de l'Opposante est devenue connue, voire notoirement connue, au Canada en liaison avec les services de magasins de détail de l'Opposante. J'estime que cette notoriété est particulièrement grande dans la province du Québec, étant donné l'emploi à grande échelle et la publicité massive dont la bannière SPORTS EXPERTS de l'Opposante a fait l'objet dans cette province au cours des 40 dernières années. Comme l'a souligné l'Opposante, la Requérante ne semble pas contester ce constat, tel qu'il appert de l'extrait du contre-interrogatoire de M. Abi-Saleh qui est reproduit ci-dessous :

[traduction]
Q. 80 Alors, sachant que vous avez grandi à Montréal et y avez fondé une famille, je suppose qu'il vous est arrivé de visiter des magasins Sports Experts de temps à autre, n'est-ce pas?

R. Oui. Bien sûr que oui.

[…]

Q. 82 Et, aurais-je raison de penser que les membres de votre famille ont également fait des achats dans ces magasins Sports Experts?

R. Je suppose qu'ils y ont fait des achats, oui.

[51]           Cela m'amène à examiner la preuve de la Requérante concernant l'emploi et la promotion de la Marque.

L'affidavit et le contre-interrogatoire de M. Abi-Saleh

[52]           M. Abi-Saleh témoigne essentiellement de ce qui suit :

  • la Requérante a été constituée en personne morale le 28 octobre 1998. Depuis ses débuts, elle se spécialise dans la vente au détail de produits liés au soccer, tels que des souliers de soccer, des ballons de soccer, des sacs de sport, des uniformes d'équipe, des uniformes de camps d'entraînement, des uniformes de gardien de but, des uniformes d'arbitre, de l'équipement et des accessoires pour les terrains de soccer, et de l'équipement et des accessoires d'entraînement pour les joueurs de soccer, les entraîneurs et les arbitres au Québec et en Ontario [affidavit Abi-Saleh au para. 4];
  • actuellement, la Requérante n'exploite qu'un seul magasin, qui est situé à Kirkland, au Québec. Au fil des ans, la Requérante a exercé ses activités en divers emplacements de la région de Montréal, mais elle n'a jamais exploité plus de 1 à 3 emplacements, toutes époques confondues [affidavit Abi-Saleh aux para. 8 et 9; pièces 3 à 5];
  • l'entreprise de la Requérante cible aussi bien les clients institutionnels que les acheteurs au détail. En ce qui concerne les acheteurs au détail, le magasin de la Requérante attire un vaste segment de consommateurs, aussi bien ceux à la recherche de produits et de vêtements d'athlétisme que les supporters d'équipes sportives professionnelles qui désirent se procurer des articles à l'effigie de leur équipe favorite [affidavit Abi-Saleh au para. 11 et 12; contre-interrogatoire de M. Abi-Saleh aux questions 450 à 454];
  • la Marque de la Requérante figure bien en vue sur l'enseigne extérieure du magasin, les reçus de caisse, les factures et la papeterie, ainsi que dans des publicités et sur le site Web de la Requérante, au www.soccerexperts.ca [pièces 3 à 6, et 10];
  • d'octobre 1998 à 2012 (année partielle), les ventes totales réalisées par la Requérante se sont élevées à près de 9 millions de dollars [affidavit Abi-Saleh au para. 13 et 14, lesquels comprennent un graphique montrant les ventes approximatives par année];
  • les dépenses publicitaires que la Requérante a engagées au cours de cette même période ont été de l'ordre de 700 000 $. La Requérante a annoncé et fait connaître sa Marque principalement par l'intermédiaire de journaux locaux et communautaires et de publicités radiophoniques dans la région de Montréal, excepté en 2010 où quelques publicités télévisées ont été diffusées sur une période d'un mois pendant la Coupe du monde de la FIFA [affidavit Abi-Saleh aux para. 17 à 23, lesquels comprennent un graphique montrant les dépenses approximatives par année; pièces 7 à 11]; et
  • au fil des ans, la Requérante a commandité divers tournois, ligues et équipes de soccer, tels que La ligue intérieure de la Coupe du Monde Bell 1999-2000, le Tournoi de la ligue maison de Pointe-Claire 2004, le Tournoi de Soccer Île-Bizard 2010-2011, etc. [affidavit Abi-Saleh au para. 24 et 25; pièce 12].

[53]           En somme, je suis convaincue, après examen de l'affidavit Abi-Saleh et des pièces qui l'accompagnent, que la Marque est devenue connue dans une certaine mesure au Canada. Toutefois, la preuve de la Requérante montre seulement que, ces dernières années, la Requérante a offert ses services de vente au détail d'articles de sports dans un à trois magasins situés dans la région de Montréal. De même, la publicité et la promotion de la Marque faites par la Requérante se sont limitées à des journaux locaux et communautaires et à des messages publicitaires à la radio dans la région de Montréal, exception faite d'un petit nombre de publicités télévisées diffusées sur une période d'un mois en 2010.

[54]           Par conséquent, l'examen global de ce premier facteur, qui concerne à la fois le caractère distinctif inhérent et le caractère distinctif acquis des marques des parties au Canada, favorise indéniablement l'Opposante.

La période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

[55]           Bien que l'affidavit Tremblay n'établisse pas nécessairement l'emploi de la marque de commerce SPORTS EXPERTS en liaison avec chacun des produits et services spécifiés dans l'enregistrement de l'Opposante depuis la date de premier emploi indiquée dans ce même enregistrement, je suis convaincue, après une lecture objective de l'affidavit et des pièces qui l'accompagnent, que l'on peut raisonnablement conclure que la marque de commerce SPORTS EXPERTS est employée au Canada en liaison avec les services de magasins de détail de l'Opposante depuis plus de quatre décennies.

[56]           En comparaison, l'affidavit Abi-Saleh établit l'emploi de la Marque depuis la fin des années 1990.

[57]           Par conséquent, l'examen global de ce deuxième facteur favorise l'Opposante. J'estime toutefois que l'importance de ce facteur est relativement moindre, car les marques de commerce ont toutes deux été en usage pendant une période considérable. En effet, la Marque est en usage depuis plus d'une décennie, ce qui n'est pas négligeable.

Le genre de produits, services ou entreprises; et la nature du commerce

[58]           Pour évaluer le genre des produits, services ou entreprises et la nature du commerce, je dois comparer l’état déclaratif des services qui figure dans la demande de la Requérante avec l’état déclaratif des produits et services qui figure dans l'enregistrement invoqué par l'Opposante [voir Henkel Kommanditgesellschaft Auf Aktien c Super Dragon Import Export Inc (1986), 12 CPR (3d) 110 (CAF); et Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd (1987), 19 CPR (3d) 3 (CAF)]. L’examen de ces états déclaratifs doit, cependant, être effectué dans l'optique de déterminer le genre probable d’entreprise ou de commerce envisagés par les parties, et non l’ensemble des commerces que le libellé est susceptible d’englober. La preuve relative aux commerces véritablement exercés par les parties est utile à cet égard [voir McDonald's Corp c Coffee Hut Stores Ltd (1996), 68 CPR (3d) 168 (CAF); Procter & Gamble Inc c Hunter Packaging Ltd (1999), 2 CPR (4th) 266 (COMC); et American Optical Corp c Alcon Pharmaceuticals Ltd (2000), 5 CPR (4th) 110 (COMC)].

[59]           Comme l'a souligné l'Opposante, les services des parties et leurs voies de commercialisation se recoupent directement.

[60]           En effet, les services de la Requérante comprennent « l'exploitation de magasins de vente au détail d'équipement de sport, d'accessoires vestimentaires, d'accessoires de sport et d'équipement de soccer [l'italique est de moi]. Ces services sont d'un genre identique à celui des services en liaison avec lesquels la marque de commerce SPORTS EXPERTS de l'Opposante est enregistrée (et qui sont décrits de la manière suivante : « Lopération dune entreprise commerciale offrant pour vente divers articles de sports »).

[61]           Tout comme ceux de la Requérante, les produits que l'Opposante vend dans ces magasins SPORTS EXPERTS comprennent des produits liés au soccer, tels que des vêtements, des articles chaussants et de l'équipement.

[62]           La clientèle ciblée par les magasins de détail respectifs des parties est la même, en ce sens qu'elle comprend un vaste segment de consommateurs de tous âges, y compris des athlètes et des non-athlètes, qui peuvent acheter des vêtements pour eux-mêmes ou de l'équipement sportif en vue d'en faire cadeau à d'autres [voir le contre-interrogatoire de M. Abi-Saleh aux questions 440 à 454].

[63]           Les magasins SPORTS EXPERTS de l'Opposante ont été annoncés et publicisés via des canaux de publicité imprimée qui, pour certains, sont les mêmes que ceux utilisés pour promouvoir les magasins de la Requérante. L'Opposante souligne qu'il est arrivé au moins une fois que la publicité imprimée de la Requérante et celle de l'Opposante pour ses magasins SPORTS EXPERTS se retrouvent affichées côte à côte dans un journal local [voir l'affidavit Abi-Saleh, pièce 7 – « Chronicle Sports – Mercredi 14 février 2001 »]. De même, dans un article paru en 2006 qui portait sur les ventes de produits de soccer pendant la Coupe du monde de soccer, le magasin de la Requérante et les magasins SPORTS EXPERTS de l'Opposante étaient tous deux mentionnés [voir affidavit Abi-Saleh au para. 19; pièce 8]. Je reviendrai sur cet article dans mon examen des autres circonstances de l'espèce.

[64]           Enfin, tel qu'il appert de mon examen de l'affidavit Tremblay ci-dessus, l'Opposante a régulièrement accordé des commandites dans le milieu du soccer. Bien que ces activités ne soient pas, comme telles, spécifiées dans l'enregistrement de l'Opposante, j'estime qu'elles montrent que les services visés par la demande de la Requérante qui sont décrits comme la « commandite d'équipes sportives » ne sont pas si loin des services visés par l'enregistrement de l'Opposante. En effet, elles montrent que la commandite d'activités sportives peut être connexe à l'exploitation de magasins de vente au détail d'articles de sport.

[65]           En somme, l'examen global de ces troisième et quatrième facteurs favorise la Requérante.

Le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'elles suggèrent

[66]           Comme l'a fait observer la Cour suprême dans Masterpiece, précité, au paragraphe 49, « il arrive souvent que le degré de ressemblance soit le facteur susceptible d’avoir le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion, et ce même s’il est mentionné en dernier lieu [à l'article] 6(5) [de la Loi] [...] si les marques ou les noms ne se ressemblent pas, il est peu probable que l’analyse amène à conclure à la probabilité de confusion même si les autres facteurs tendent fortement à indiquer le contraire ».

[67]           En outre, comme je l'ai mentionné précédemment, il est bien établi dans la jurisprudence que la probabilité de confusion est une question de première impression et de souvenir imparfait. À cet égard, [traduction] « [m]ême s'il faut examiner la marque comme un tout (et non la disséquer pour en faire un examen détaillé), il demeure possible de s’attarder à des caractéristiques particulières de la marque susceptibles d’avoir une influence déterminante sur la perception du public » [voir Pink Panther Beauty Corp c United Artists Corp (1998), 80 C.P.R. (3d) 247 (CAF), au para. 34]. L'approche à privilégier consiste à se demander d'abord si l'un des aspects de la marque de commerce est particulièrement frappant ou unique [voir Masterpiece, précité, au paragraphe 64].

[68]           M'appuyant sur ces principes, j'estime qu'il existe en l'espèce une ressemblance considérable entre les marques des parties.

[69]           Les marques des parties ont la même « architecture ». Elles sont toutes deux formées de deux mots et ont en commun le second de ces mots, c'est-à-dire « EXPERTS ». Dans le contexte des services auxquels elles sont respectivement liées, les marques des parties suggèrent toutes deux l'idée d'une expertise dans la vente d'articles de sports. La marque de commerce SPORTS EXPERTS de l'Opposante évoque les sports et l'athlétisme en général, tandis que la Marque de la Requérante évoque un sport en particulier : le soccer.

Autres circonstances de l'espèce

La famille de marques de commerce EXPERTS de l'Opposante

[70]           L'Opposante soutient que l'existence de sa famille de marques de commerce EXPERTS est une circonstance additionnelle qui accroît la probabilité que le consommateur croit que la Marque de la Requérante désigne simplement un autre volet de la chaîne de magasins de détail de l'Opposante qui est exploitée en liaison avec la famille de marques de commerce EXPERTS.

[71]           Dans une procédure d'opposition, on ne peut pas simplement présumer de l'existence d'une famille de marques de commerce. La partie qui cherche à établir l'existence d'une famille de marques doit démontrer qu'elle emploie plus d'une ou deux marques appartenant à la famille alléguée (un enregistrement ou une demande ne suffisent pas pour établir l'emploi) [voir Techniquip Ltd c Canadian Olympic Assn (1998), CanLII 7573 (CF); et Now Communications Inc c CHUM Ltd (2003), 32 CPR (4th) 168 (COMC)].

[72]           En l'espèce, je conviens avec l'Opposante qu'elle a établi l'existence d'une famille de marques de commerce EXPERTS. Bien qu'elle n'ait pas établi l'emploi de chacune des marques de commerce déposées qui sont énumérées à l'Annexe A, elle a démontré qu'elle emploie sa marque nominale et sa marque figurative HOCKEY EXPERTS et sa marque nominale GOLF EXPERTS, en plus de sa marque de commerce SPORTS EXPERTS.

[73]           En effet, l'affidavit Tremblay établit ce qui suit :

En ce qui concerne les marques de commerce HOCKEY EXPERTS de l'Opposante :

  • depuis 2005, l'Opposante exploite également une chaîne de magasins d'articles de sport sous la bannière HOCKEY EXPERTS. Avec près de 20 magasins de détail au Québec, la chaîne HOCKEY EXPERTS offre une vaste gamme de produits de hockey. En 2007, l'Opposante a étendu ses activités exercées sous la bannière HOCKEY EXPERTS à l'extérieur du Québec et exploite maintenant sous cette bannière 71 points de vente de plus sous la forme soit de magasins de détail autonomes ou de boutiques aménagées à l'intérieur des magasins de détail SPORT CHEK dans les provinces suivantes du Canada : Alberta, Colombie-Britannique, Manitoba, Terre-Neuve-et-Labrador, Nouveau-Brunswick, Nouvelle-Écosse, Ontario et Saskatchewan [affidavit Tremblay aux para. 25 et 26; pièces N et O];
  • la marque de commerce HOCKEY EXPERTS de l'Opposante figure bien en vue sur les enseignes extérieures et intérieures des magasins, les sacs dans lesquels les articles vendus sont remis au client, les reçus de caisse ainsi que sur les publicités [affidavit Tremblay au para. 28; pièce Q];
  • les ventes réalisées dans les magasins de détail exploités sous la bannière HOCKEY EXPERTS au fil des ans sont également impressionnantes. Les ventes réalisées dans la province de Québec depuis 2005 s'élèvent à plus de 75 millions de dollars, tandis que les ventes réalisées dans les magasins situés ailleurs au Canada depuis 2008 s'élèvent à plus de 76 millions de dollars [affidavit Tremblay aux para. 30 et 31]; et
  • l'Opposante a fait la promotion des marques de commerce HOCKEY EXPERTS et des services de magasins de détail qui sont fournis en liaison avec ces marques de commerce en distribuant des circulaires et au moyen de publicités télévisées, de même que par le biais d'activités promotionnelles qui se sont déroulées en ligne ces dernières années. Depuis 2006, des centaines de milliers de dollars ont été dépensées pour promouvoir la marque HOCKEY EXPERTS tant au Québec que dans le reste du Canada [affidavit Tremblay aux para. 29 et 32 à 37; pièces R-1 à R-6, S-1, S-2, T-1, T-2, U et V].

En ce qui concerne la marque GOLF EXPERTS de l'Opposante :

  • depuis 2008, l'Opposante exploite également une chaîne de magasins d'articles de golf de luxe sous la bannière GOLF EXPERTS en Colombie-Britannique, sous la forme soit de magasins autonomes soit de boutiques aménagées dans des magasins de détail SPORT CHEK [affidavit Tremblay aux para. 42 à 44; pièce AA];
  • la marque de commerce GOLF EXPERTS figure bien en vue sur l'enseigne des magasins [affidavit Tremblay aux para. 42 à 44; pièce AA];
  • les ventes réalisées, de 2009 à 2011, dans les magasins exploités sous la bannière GOLF EXPERTS se sont élevées à plus de 3,3 millions de dollars [affidavit Tremblay au para. 45]; et
  • la marque de commerce GOLF EXPERTS et les services de magasins de détail qui sont fournis en liaison avec cette marque de commerce ont été annoncés de multiples manières, y compris par la distribution de circulaires, et en liaison avec la bannière SPORT CHEK de l'Opposante [affidavit Tremblay aux para. 46 et 47; pièces BB, CC-1 et CC-2].

[74]           Comme l'a souligné l'Opposante, les marques de commerce HOCKEY EXPERTS et GOLF EXPERTS de l'Opposante sont similaires à la Marque de la Requérante dans la présentation, dans le son et dans les idées suggérées. Ces marques comprennent toutes l'élément courant « EXPERTS », la seule différence étant que chacune commence par le nom d'un sport différent. Là encore, ces marques suggèrent toutes trois l'idée d'une expertise dans la vente d'articles de sport.

[75]           Je conviens avec l'Opposante qu'il s'agit là d'une circonstance additionnelle qui lui est définitivement favorable en l'espèce.

[76]           Avant de passer à l'analyse d'une autre circonstance additionnelle de l'espèce, j'ajouterai que l'Opposante a également produit des demandes d'enregistrement à l'égard des marques de commerce VELO EXPERTS, SKI EXPERTS et TENNIS EXPERTS, comme en témoignent les copies certifiées de ces demandes mentionnées précédemment. L'Opposante soutient que ces demandes de marque de commerce s'inscrivent dans l'expansion continue des marques EXPERTS de l'Opposante et sont le signe de la diversification de l'Opposante au sein de l'industrie des articles de sports. Aussi vrai que cela puisse être, je ne suis pas disposée à accorder de poids à la simple production de ces demandes (qui ont toutes été produites après la date de premier emploi de la Marque revendiquée par la Requérante), car ces demandes en elles-mêmes n'établissent pas l'existence d'une famille de marques de commerce.

Preuve de l'état du registre

[77]           Comme je l'ai indiqué précédemment, l'affidavit Bombardier vise à présenter une preuve de l'état du registre relativement aux marques de commerce qui comprennent le mot EXPERTS au Canada.

[78]           La preuve de l'état du registre a pour but de démontrer le caractère commun ou le caractère distinctif d'une marque ou d'une partie d'une marque par rapport à l'ensemble des marques inscrites au registre. La preuve de l'état du registre n'est pertinente que dans la mesure où l'on peut en tirer des conclusions quant à l'état du marché, et de telles conclusions sur l'état du marché ne peuvent être tirées que si un nombre significatif d'enregistrements pertinents est repéré [voir Ports International Ltd c Dunlop Ltd (1992), 41 CPR (3d) 432 (COMC); Welch Foods Inc c Del Monte Corp (1992), 44 CPR (3d) 205 (CF 1re inst.); et Maximum Nutrition Ltd c Kellogg Salada Canada Inc (1992), 43 CPR (3d) 349 (CAF)].

[79]           En l'espèce, la Requérante soutient que l'affidavit Bombardier fournit la preuve qu'il existe au moins 12 marques de commerce déposées qui comprennent le mot « EXPERT » au Canada, à savoir : [traduction]

         BUCK EXPERT (LMC555,481) pour des produits et articles de chasse;

         EXPERT AU TRAVAIL (LMC715,415) pour des magasins de détail de chaussures, de vêtements et d’équipement de protection personnel;

         FX FEET EXPERT (LMC618,699) pour des services de magasin de détail spécialisés dans les semelles faites sur mesure, produits orthétiques faits sur mesure, produits orthétiques préfabriqués, chaussures orthopédiques, produits pour les soins des pieds et produits d’entretien des chaussures;

         JEANS EXPERT (LMC467,075) pour des vêtements pour hommes et femmes, nommément jeans, pantalons, hauts et vestons;

         MOTHERHOOD MATERNITY THE EXPERTS (LMC718,466) pour des services de magasin de vente au détail, services de catalogue de vente par correspondance et services informatisés de vente au détail en ligne de vêtements de maternité, de vêtements dallaitement et daccessoires;

         MOVIE EXPERTS (LMC632,379) pour, entre autres, des services de magasin de détail, services de vente en gros, service de magasin de détail en ligne et services de location en rapport avec les marchandises suivantes : films et films cinématographiques;

         THE BACKYARD LIVING EXPERTS (LMC602,940) pour, entre autres, des produits de loisirs extérieurs et daménagement paysager;

         THE DOWN EXPERTS (LMC763,944) pour des vêtements et vêtements dextérieur, nommément manteaux, vestes, parkas, chandails, etc., et couvre-lits, couvertures, etc.;

         THE OUTERWEAR EXPERTS. SINCE 1920 (LMC800,937) pour des anoraks; manteaux; vestes en duvet; etc.; et service de commande par catalogue dans le domaine des vêtements, des sacs à dos, des vêtements d'extérieur, des gants, des lunettes de soleil, des pantoufles, des pyjamas, etc.;

         THE TITANUM EXPERTS (LMC650,829) pour des pièces structurales et composants pour fauteuils roulants; cadres de bicyclette et composants connexes; et services de vente par correspondance, services de vente par catalogue, exploitation dun site Web de vente au détail en ligne et exploitation dun point de vente au détail, tous spécialisés dans les fauteuils roulants, les bicyclettes, et les pièces et accessoires connexes;

         THE WORLDS ROPE SKIPPING EXPERTS (LMC497,870) pour, entre autres, des cordes à sauter; conseils en lien avec des programmes de cordes à sauter, etc.

[80]           La Requérante soutient que la preuve ci-dessus montre que les Canadiens ont l'habitude de voir le mot « EXPERT » dans des marques de commerce qui sont liées à des services de magasins de détail de nature spécialisée. C'est la raison pour laquelle le mot « EXPERT » fait partie du nom de ces magasins. À titre d'exemple, la Requérante soutient qu'une femme enceinte peut très bien faire des achats au magasin de détail MOTHERHOOD MATERNITY THE EXPERTS, puis dans un des magasins de détail SPORTS EXPERTS de l'Opposante sans confondre l'un et l'autre.

[81]           L'Opposante, pour sa part, soutient que cette preuve n'établit pas le moindre emploi par un tiers d'une marque de commerce comprenant l'élément « EXPERTS » en liaison avec des services de vente au détail dans le domaine des articles de sport et que, par conséquent, elle n'aide en rien la Requérante à réfuter l'existence d'une probabilité de confusion entre les marques des parties. L'Opposante fait observer que Mme Bombardier a elle-même admis en contre-interrogatoire qu'aucune des marques de commerce visant la catégorie internationale 28 qu'elle a repérées n'était inscrite au registre en liaison avec des services de magasins de vente au détail d'articles de sport. L'Opposante souligne également qu'en tout état de cause, Mme Bombardier a admis qu'elle ne savait pas si les marques de commerce qu'elle a repérées lors de sa recherche faisaient ou non l'objet d'un emploi sur le marché et qu'elle n'a pas effectué la moindre recherche dans Internet, par téléphone ou en se rendant directement dans des magasins pour trouver des preuves d'un tel emploi. Elle a toutefois affirmé qu'elle connaissait les magasins SPORTS EXPERTS de l'Opposante et qu'elle avait déjà elle-même effectué des achats dans des magasins SPORTS EXPERTS [contre-interrogatoire de Mme Bombardier aux questions 160 à 162, 43 à 49, et 51 à 57]. L'Opposante fait également remarquer que M. Abi-Saleh a admis en contre-interrogatoire que, mis à part l'Opposante, il ne connaissait pas d'autres détaillants d'articles de sport exerçant ses activités sous un nom ou une marque comprenant le mot « EXPERTS » [contre-interrogatoire de M. Abi-Saleh à la question 166].

[82]           Je tends à convenir avec l'Opposante que les 12 enregistrements énumérés ci-dessus ne sont pas d'un grand secours pour la Requérante en l'espèce. De façon générale, les enregistrements invoqués par la Requérante ne visent pas des « articles de sport » du même genre que ceux vendus par la Requérante ou l'Opposante, pas plus qu'ils ne se rapportent à la vente au détail de tels articles de sport. En outre, bien que je reconnaisse que certains des produits visés par ces enregistrements comprennent des vêtements et des articles chaussants, ou des bicyclettes et des cordes à sauter, aucune des marques de commerce déposées énumérées ci-dessus ne s'approche autant de la marque de commerce SPORTS EXPERTS de l'Opposante (ou de ses marques de commerce HOCKEY EXPERTS et GOLF EXPERTS) que celle de la Requérante.

Cas de confusion réelle

[83]           L'Opposante soutient qu'une autre circonstance de l'espèce tient à ce que des cas de confusion ont été observés, comme en témoigne M. Tremblay au paragraphe 50 de son affidavit, lequel est formulé comme suit :

[traduction]
« […] ces dernières années, [l'Opposante a] observé des situations dans [ses] magasins de l'Ouest-de-l'Île de Montréal où des clients disaient avoir visité ou entendu parler du magasin « de l'Opposante » appelé « Soccer Experts », et croyaient à tort que ce magasin fait partie de l'entreprise de [l'Opposante] ».

[84]           L'Opposante fait remarquer que ces cas de confusion réelle ont, sans surprise, été observés dans l'Ouest-de-l'Île de Montréal, qui correspond au marché très local ou à la zone géographique restreinte où la Requérante exploite son entreprise. L'Opposante soutient que ces déclarations de M. Tremblay demeurent non contestées puisque la Requérante a choisi de ne pas contre-interroger M. Tremblay.

[85]           La Requérante soutient, pour sa part, que ces déclarations de M. Tremblay constituent une preuve par ouï-dire. La Requérante soutient que les cas de confusion allégués auraient pu être documentés ou mieux expliqués par M. Tremblay. La Requérante soutient, en outre, que M. Abi-Saleh affirme au paragraphe 27 de son affidavit qu'il y a eu aucun cas de confusion réelle entre les marques en cause :

« Aucun cas de confusion entre la Marque et les marques de lOpposante na été porté à ma connaissance par mes clients ou fournisseurs ».

[86]           Comme l'a souligné l'Opposante, le fait que la Requérante n'ait eu connaissance d'aucun cas de confusion réelle entre les marques des parties ne signifie pas que l'Opposante n'a pas reçu les plaintes auxquelles M. Tremblay fait référence. Il demeure toutefois que M. Tremblay n'a fourni ni détails ni dates relativement aux cas de confusion allégués. Cela étant, j'estime qu'il convient de n'accorder que peu de poids aux déclarations de M. Tremblay.

[87]           Avant de conclure, je souhaite revenir sur l'article de journal paru en 2006 qui est joint comme pièce 8 à l'affidavit Abi-Saleh. Comme je l'ai indiqué précédemment, cet article porte sur les ventes de produits de soccer pendant la Coupe du monde de soccer : La fièvre [du Mondial] vide les boutiques. Dans cet article, le magasin de la Requérante et les magasins SPORTS EXPERTS de l'Opposante sont tous deux identifiés comme des endroits où se procurer des articles de soccer. La Requérante est d'avis que cet article ainsi que les exemples de publicités imprimées joints comme pièce 7 à l'affidavit Abi-Saleh montrent que la Marque et la marque de commerce SPORTS EXPERTS de l'Opposante ont coexisté sans que cela ne donne lieu à quelque plainte que ce soit. L'Opposante soutient, pour sa part, que ces pièces montrent que les entreprises des parties ciblent les mêmes consommateurs. En d'autres termes, elles montrent qu'il existe un point d'intersection majeur entre les deux. Je suis d'accord avec l'Opposante.

Conclusion quant à la probabilité de confusion

[88]           Comme je l'ai indiqué précédemment, la Requérante a le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. Le fait que le fardeau ultime incombe à la Requérante signifie que s'il est impossible d'arriver à une conclusion déterminante une fois que toute la preuve a été présentée, la question doit être tranchée à l'encontre de la Requérante.

[89]           Comme l'a souligné l'Opposante à l'audience, la question n'est pas de savoir si l'Opposante doit se voir accorder un monopole sur le mot « EXPERT » au Canada, mais si une personne n'ayant qu'un souvenir imparfait de la marque de commerce SPORTS EXPERTS de l'Opposante, employée en liaison avec les services de magasins de détail de l'Opposante, croirait, en se fondant sur sa première impression et son souvenir imparfait, que les Services de la Requérante proviennent de la même source. J'estime qu'une telle situation pourrait se produire.

[90]           En effet, je suis d'avis que la preuve de l'Opposante soulève des doutes suffisants quant à la probabilité de confusion entre les Services de la Requérante et les services de magasins de détail de l'Opposante. Je reconnais que les marques des parties sont intrinsèquement faibles et que la Marque est employée dans la région de Montréal depuis plus d'une décennie. Néanmoins, étant donné les ressemblances qui existent entre les marques des parties et compte tenu du fait que la marque de commerce SPORTS EXPERTS de l'Opposante a acquis une notoriété très importante au Canada en liaison avec les services de magasins de détail de l'Opposante au cours des 40 dernières années, du fait que l'Opposante a établi l'existence d'une famille de marques de commerce EXPERTS comprenant les marques de commerce HOCKEY EXPERTS et GOLF EXPERTS, lesquelles ont toutes une « architecture » identique à celle de la Marque, du fait que les services des parties concernent dans les deux cas l'exploitation de magasins de détail dans le domaine des articles de sport, et du fait que les voies de commercialisation des parties sont les mêmes ou se recoupent clairement, j'en arrive à la conclusion que la Requérante ne s'est pas acquittée de son fardeau ultime de démontrer qu'il n'existe pas de probabilité raisonnable qu'une personne ayant un souvenir imparfait de la marque de commerce SPORTS EXPERTS conclut, en se fondant sur sa première impression et son souvenir imparfait, que les Services de la Requérante proviennent de la même source ou qu'il existe une certaine entente entre les parties.

[91]           En conséquence, le motif d'opposition fondé sur l'article 12(1)d) est accueilli.

Motif d'opposition fondé sur l'absence de caractère distinctif

[92]           L'Opposante allègue que la Marque ne distingue pas les Services de la Requérante des services de l'Opposante, et qu'elle n'est pas non plus adaptée à les distinguer, étant donné l'emploi et l'enregistrement antérieurs par l'Opposante au Canada de sa famille de marque de commerce EXPERTS.

[93]           Pour s'acquitter du fardeau de preuve qui lui incombe à l'égard d'un motif d'opposition fondé sur l'absence de caractère distinctif, un opposant doit démontrer que, à la date de production de sa déclaration d'opposition (en l'espèce, le 23 décembre 2011), sa marque de commerce était devenue connue dans une mesure suffisante pour faire perdre à la marque visée par la demande son caractère distinctif [voir Motel 6, Inc c No. 6 Motel Ltd (1981), 56 CPR (2d) 44 (CF 1re inst.)]. Tel qu'il appert de mon examen de l'affidavit Tremblay ci-dessus, l'Opposante s'est acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait à l'égard de sa marque de commerce SPORTS EXPERTS, ainsi qu'à l'égard de ses marques de commerce HOCKEY EXPERTS et GOLF EXPERTS.

[94]           Le fait que la date pertinente qui s'applique ne soit pas la même na pas dincidence substantielle sur mon analyse du motif dopposition fondé sur l'article 12(1)d) exposée ci-dessus.

[95]           En conséquence, le motif d'opposition fondé sur l'absence de caractère distinctif est accueilli.

Motif d'opposition fondé sur l'absence de droit à l'enregistrement

[96]           Comme j'ai déjà repoussé la demande pour deux motifs, je n'examinerai pas ce dernier motif d'opposition.

Décision

[97]           Compte tenu de ce qui précède, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions du paragraphe 63(3) de la Loi, je repousse la demande d’enregistrement.

______________________________

Annie Robitaille

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Judith Lemire, trad.


Annexe A

(Tableau tiré du plaidoyer écrit de l'Opposante)

 

 

 

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