Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION de Hola, S.A. à la demande no 1164867 produite par Rui Pereira en vue de l’enregistrement de la marque de commerce HELLO & Dessin

 

Le 20 janvier 2003, Rui Pereira (le « Requérant ») a produit une demande d’enregistrement relative à la marque de commerce HELLO & Dessin (la « Marque ») telle qu’illustrée ci‑après,

fondée sur l’emploi projeté de la Marque au Canada en liaison avec les services suivants visés par la demande modifiée le 17 mars 2004, à savoir des « services de production de contenu vidéo et multimédia diffusé en continu, y compris diffusion par satellite et radiodiffusion vidéo MPEG-4 en flux continu ».

 

La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 12 mai 2004. Le 12 octobre 2004, Hola, S.A. (l’« Opposante ») a produit une déclaration d’opposition à l’encontre de la demande. Le Requérant a produit et signifié un document intitulé [traduction] « déclaration en réponse », lequel a été admis à titre de contre‑déclaration. Le 19 juillet 2007, l’Opposante a obtenu l’autorisation de produire une déclaration d’opposition modifiée. Je souligne que, dans sa contre‑déclaration, le Requérant n’a pas expressément nié les allégations formulées contre lui concernant les motifs d’opposition fondés sur l’absence d’intention d’employer sa Marque ou sur l’absence de caractère distinctif. Toutefois, il semble nier de façon générale les autres motifs d’opposition.

 

La preuve de l’Opposante est constituée des affidavits de Sally Amanda Cartwright, de Stefan Picard et de Aaron Edgar. L’Opposante a également produit l’affidavit de Margaret Kruszewski à titre de contre‑preuve. La preuve du Requérant consiste en son propre affidavit. Seul le Requérant a été contre‑interrogé relativement à son affidavit. L’Opposante a produit dans les délais prescrits la transcription de ce contre‑interrogatoire et les engagements à cet égard, lesquels font partie de la preuve au dossier.

 

Le Requérant et l’Opposante ont chacun produit un plaidoyer écrit. Le Requérant a joint deux pièces à son plaidoyer écrit. Toutefois, suivant la décision du registraire en date du 17 octobre 2007 à l’égard de cette question, ces pièces sont inadmissibles puisqu’elles n’ont pas été présentées en preuve. Je ferai donc abstraction des paragraphes du plaidoyer écrit du Requérant qui y font référence.

 

Les parties ont toutes les deux demandé la tenue d’une audience, laquelle a eu lieu le 12 décembre 2008.

 

Les motifs d’opposition

L’Opposante est propriétaire des marques de commerce déposées suivantes, à savoir HELLO! & Dessin, LMC484633, en liaison avec des magazines et des périodiques, et HOLA, LMC251915, en liaison avec des agendas, des livres, des revues ainsi que des publications littéraires et artistiques.

 

Les motifs d’opposition sont résumés comme suit :

1.      S’appuyant sur l’al. 38(2)b) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T‑13 (la « Loi »), l’Opposante fait valoir que la Marque du Requérant n’est pas enregistrable en vertu de l’al. 12(1)d) de la Loi, car elle crée de la confusion avec les marques de commerce susmentionnées de l’Opposante.

2.      S’appuyant sur l’al. 38(2)c) de la Loi, l’Opposante prétend que le Requérant n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement en vertu du par. 16(3) de la Loi, puisqu’à la date de production de sa demande, sa marque de commerce créait de la confusion avec les marques de commerce précitées de l’Opposante, lesquelles ont été antérieurement employées au Canada.

3.      S’appuyant sur l’al. 38(2)d) de la Loi, l’Opposante soutient que la marque de commerce susmentionnée du Requérant n’est pas distinctive, car elle ne distingue pas véritablement et n’est pas adaptée à distinguer les services du Requérant de ses marchandises.

4.      S’appuyant sur l’al. 38(2)a) de la Loi, l’Opposante fait valoir que la demande du Requérant no 1164867 ne satisfait pas aux exigences de l’al. 30e) de la Loi, car il n’a jamais eu l’intention d’employer, lui‑même ou pas l’entremise d’un licencié, la marque de commerce au Canada.

 

Décision

Le Requérant a fait plusieurs aveux pendant l’instance et au cours de l’audience, déclarant et répétant que la Marque telle qu’indiquée dans la demande, telle que déposée et telle qu’annoncée dans le Journal des marques de commerce n’est pas la Marque qu’il a l’intention ou qu’il avait l’intention d’employer. Sur le fondement de la preuve invoquée, les motifs d’opposition fondés sur les al. 38(2)a) et 30e) de la Loi sont admis, et la demande d’enregistrement relative à la marque HELLO & Dessin (1164867) est repoussée conformément au par. 38(8) de la Loi.

J’explique maintenant les motifs de ma décision.

 

 

Motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30e)

La date pertinente en ce qui concerne le motif fondé sur l’art. 30 est la date de production de la demande, soit le 20 janvier 2003 [voir Georgia-Pacific Corp. c. Scott Paper Ltd. (1984), 3 C.P.R. (3d) 469 (C.O.M.C.), à la page 475]. Il incombe au Requérant de démontrer que sa demande satisfait à l’art. 30 de la Loi. Toutefois, l’Opposante doit s’acquitter du fardeau de preuve initial en prouvant les allégations de faits invoqués dans sa déclaration d’opposition [Joseph E. Seagram & Sons Ltd. c. Seagram Real Estate Ltd. (1984), 3 C.P.R. (3d) 325]. Pour s’acquitter de son fardeau de preuve concernant un motif précis, l’Opposante doit présenter suffisamment de preuve admissible à partir de laquelle on pourrait raisonnablement conclure à l’existence des faits allégués à l’appui de ce motif [John Labatt Ltd. c. Molson Cos. (1990), 30 C.P.R. (3d) 293]. Cependant, le fardeau de l’Opposante est moins lourd quant au motif fondé sur le non-respect de l’alinéa 30e), étant donné que le Requérant est bien au courant des faits qui permettent de soutenir qu’il n’a pas l’intention d’employer la Marque [Molson Canada c. Anhauser-Busch Inc. (2003), 29 C.P.R. (4th) 315,  Labatt Brewing Co. c. Molson Breweries, a Partnership (1996), 68 C.P.R. (3d) 216]. Cependant, s’il est vrai qu’elle peut se fonder sur la preuve du Requérant pour satisfaire au fardeau qui lui incombe relativement à ce motif, l’Opposante doit établir que cette preuve est « manifestement » incompatible avec les prétentions qu’il a formulées dans sa demande.

J’estime que l’Opposante s’est acquittée de son fardeau initial, car la preuve démontre que le Requérant a clairement avoué qu’il n’a jamais eu l’intention d’employer la Marque telle que décrite dans sa demande, ce qui est manifestement incompatible avec les prétentions qui y sont formulées.

Puisque l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve, il incombe maintenant au Requérant d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que sa marque est enregistrable. Cela signifie que, s’il est impossible d’arriver à une conclusion définitive une fois l’ensemble de la preuve produite, il faut rendre une décision défavorable au Requérant [John Labatt Ltd. c. Molson Companies Ltd. (1990), 30 C.P.R. (3d) 293].

 

Analyse

Il incombe au Requérant de démontrer que sa demande est conforme à l’al. 30e) de la Loi, c’est‑à‑dire qu’elle satisfait aux exigences de forme de l’al. 30e), et que les déclarations y figurant sont véridiques [Home Quarters Warehouse, Inc. c. Home Depot, U.S.A., Inc. (1997), 76 C.P.R. (3d) 219].

La demande du Requérant répond aux exigences de forme de l’al. 30e), car ce dernier y a inclus une déclaration portant qu’il a l’intention d’employer la Marque au Canada lui‑même ou par l’entremise d’un licencié. La question est maintenant de savoir si la demande du Requérant respecte les exigences de fond de l’al. 30e), c’est‑à‑dire si la déclaration qui y est formulée est véridique.

Le Requérant admet que la Marque visée par la demande n’est pas la Marque qu’il a l’intention ou avait l’intention d’employer. Ces aveux sont récurrents dans la preuve, notamment lors du contre‑interrogatoire relatif à son affidavit et au moyen de son propre témoignage. Le Requérant a également fait ces aveux dans sa contre‑déclaration et de vive voix à l’audience.

 

 

 

Contre‑interrogatoire de M. Rui Pereira

M. Pereira (le Requérant) a été contre‑interrogé sans l’aide d’un avocat, ce qui peut expliquer, sans toutefois justifier, certaines déclarations qu’il a formulées lors de son contre‑interrogatoire.

Durant son contre‑interrogatoire, le Requérant a admis à plusieurs reprises que la Marque pour laquelle il avait demandé l’enregistrement à la date de production n’est pas la Marque qu’il avait l’intention d’employer. 

Voici les parties les plus pertinentes du contre‑interrogatoire :

 

[traduction]

[108]                       Q. Monsieur, j’ai examiné ces parties de votre site Web que l’on peut voir à la pièce RP2. Est-il vrai que vous employez en tout temps la marque de commerce TVHello et Dessin?

R. Il s’agit de la marque TVHello, comme le logo de la chaîne.   

    [109]            Q. Alors, le logo que vous employez est TVHello?

       R. Oui.

[110]                       Q. Ce logo comprend le mot TVHello et certains éléments graphiques, si je peux me permettre de les désigner ainsi?

R.  En tant que symbole graphique, oui, ce sont des éléments graphiques.

[111]           Q. Pour les besoins de la preuve, vous parlez bien de ce qui est illustré sur le haut de la première page dans le coin droit, n’est‑ce pas?

                   R. Oui.

[112]           Q. Vous parlez du logo TVHello?

                   R. C’est exact.

[113]           Q. Donc, j’imagine que vous n’employez pas le mot « hello » seul à titre de marque ou de logo?

                   R. Non, cela n’a jamais été notre intention.

[114]           Q. Votre intention a toujours été d’employer TVHello comme partie intégrante du logo?

                   R. C’est exact.

[115]           Q. Est-ce juste de dire qu’il s’agit du logo TVHello que vous voulez déposer à titre de marque de commerce ?

                   R. Tout à fait.

[116]           Q. Et non pas le logo « Hello » tout seul?

R.    Non, pas Hello.

 

Le témoignage du Requérant corrobore également ces déclarations. À cet égard, je renvoie au paragraphe 8 de l’affidavit du Requérant souscrit le 10 mars 2006, où il mentionne la pièce « C », soit une copie papier des pages du site Web de TVHello. Cette pièce démontre clairement que la marque de commerce illustrée à cet égard n’est pas la marque telle que décrite dans la demande et telle qu’annoncée. Au paragraphe 10, le Requérant admet que [traduction] « la demande d’enregistrement relative à la marque TVHello est pour TVHello et non pas Hello […] ». De plus, les parties pertinentes de la contre‑déclaration du Requérant se trouvent au paragraphe f : [traduction] « l’emploi projeté de la marque est de diffuser une émission de télévision, comme l’indique l’utilisation du mot “tv” devant le mot “Hello” […] » Ces aveux étayent la conclusion selon laquelle les déclarations formulées par le Requérant dans sa demande concernant son intention d’employer la Marque telle que décrite dans sa demande ne sont pas exactes, ni véridiques. Par conséquent, le Requérant ne s’est pas acquitté de son fardeau de démontrer que sa demande satisfait à l’al. 30e) de la Loi. J’ajouterais que le défaut du Requérant de s’acquitter de son fardeau dans ces conditions ne peut être considéré comme un simple détail technique de nature administrative, ni comme une simple omission. Le non‑respect de l’al. 30e) de la Loi n’est pas un simple détail technique, et la fausse déclaration de M. Pereira rend d’emblée la présente demande invalide. Par conséquent, la demande est repoussée en raison de ce seul motif [Cellular One Group, a Partnership c. Brown (1996), 69 C.P.R. (3d) 236].

Compte tenu de ce qui précède, il n’est pas nécessaire d’examiner les autres motifs d’opposition. Je dirais cependant que ces autres motifs reposent essentiellement sur la seule question de la confusion entre la Marque et celles précédemment mentionnées de l’Opposante. Si j’avais examiné ces autres motifs d’opposition, j’aurais été portée à conclure que la Marque crée de la confusion avec au moins la marque déposée de l’Opposante HELLO! & Dessin, LMC484633, en liaison avec des magazines et des périodiques. Cette conclusion aurait découlé, en majeure partie, du caractère distinctif inhérent de la marque de l’Opposante, de la ressemblance frappante entre les marques dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent, ainsi que de la preuve démontrant que la marque de l’Opposante est employée depuis des années, de la mesure dans laquelle elle est devenue connue au Canada et des voies de commercialisation qui se chevauchent.

 

Compte tenu de ce qui précède, je repousse la demande du Requérant.

 

Dispositif

En vertu des pouvoirs qui me sont délégués par le registraire des marques de commerce en application du paragraphe 63(3) de la Loi, je repousse la demande conformément aux dispositions du paragraphe 38(8).

 

FAIT À GATINEAU (QUÉBEC), LE 23 DÉCEMBRE 2008.

 

Lynne Pelletier

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

 

 

Traduction certifiée conforme

Mylène Boudreau

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