Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

AFFAIRE INTÉRESSANT L’OPPOSITION

de Canderm Pharma Inc. à la demande

no 1196107 concernant la marque de commerce

ADVANCED SOLUTIONS produite par

Neutrogena Corporation                                      

 

 

 

 

Le 13 novembre 2003, Neutrogena Corporation a déposé une demande en vue de l’enregistrement de la marque de commerce ADVANCED SOLUTIONS, sur le fondement d’un emploi projeté au Canada, en liaison avec les produits cosmétiques suivants :

Savons; parfums; eau de Cologne; eau de toilette; cosmétiques, nommément fond de teint, cache-cerne, maquillage liquide et en crème, fard à joues, rouge à lèvres, poudre libre et poudre compacte pour le visage, mascara et ombre à paupières; huiles essentielles; produits de toilette non médicamenteux, nommément lotions, crèmes, tonifiants, nettoyants et hydratants; poudres de talc pour usage personnel;

rouge à lèvres; préparations pour les cheveux; shampoings; conditionneurs; shampoings anti-pellicules et conditionneurs; fixatifs; traitements du cuir chevelu; accessoires de mise en plis; préparations non médicamenteuses pour les soins de la peau; crèmes et hydratants pour le visage et le corps; lotions pour le visage et le corps; émulsions pour le visage et le corps; gels pour le visage et le corps; nettoyants pour le visage et le corps; tonifiants pour le visage et le corps; masques de beauté, masques pour le visage, préparations pour le soin des ongles, vernis à ongles; huiles de bain, huiles de massage, huiles pour le visage, poudres pour le visage et le corps, préparations pour le bain et la

douche, gel pour le bain, produit de lavage corporel hydratant, brume pour le corps, poudres pour le corps, lotions rafraîchissantes pour le corps et huile sèche pour le corps en vaporisateur; produits de bronzage, écrans solaires, filtres solaires, lotions de protection solaire, crèmes de protection solaire, vaporisateurs, lotions et crèmes autobronzants pour le corps et le visage, produit bronzant pour le visage; antisudorifiques, déodorants pour usage personnel; hydratants pour les lèvres; baumes non médicamenteux; crème pour les pieds, hydratants; onguents, crèmes et nettoyants protecteurs et hydratants non médicamenteux; nettoie-pores, bandes, masques, désincrustants et astringents tonifiants pour nettoyer les pores; crèmes, lotions et gels anti-âge; traitements et conditionneurs pour les cils; fard à cils.

 


La marque en cause a été publiée à des fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 20 octobre 2004, et Canderm Pharma Inc. a produit une déclaration d’opposition le 15 décembre 2004. La Commission a avisé l’opposante que la déclaration d’opposition n’exposait pas suffisamment de détails, et elle a donné à l’opposante la possibilité de modifier son acte de procédure, ce que l’opposante a fait. La Commission a ensuite transmis une copie de la déclaration d’opposition modifiée à la requérante le 25 janvier 2005. La requérante a répondu en signifiant et en produisant une contre-déclaration dans laquelle elle niait de manière générale les motifs d’opposition et contestait la pratique de la Commission consistant à permettre à une opposante de parfaire son acte de procédure.

 

La preuve de l’opposante se compose de l’affidavit de Barry Vogel, président de la société opposante. La preuve de la requérante se compose des affidavits de James S. Colleran, un haut dirigeant de la société requérante, et de Mary Talbot, secrétaire. Seule la requérante a produit des observations écrites. Ni l’une ni l’autre des parties n’a demandé d’audience.

 

Déclaration d’opposition

 

Deux motifs d’opposition sont allégués :

 

(a)        La requérante n’a pas le droit d’enregistrer la marque visée par la demande, en vertu de l’alinéa 16(3)b) de la Loi sur les marques de commerce, parce qu’à la date de la production de la demande en cause, la marque ADVANCED SOLUTIONS créait de la confusion avec la demande de marque de commerce produite antérieurement par l’opposante concernant ADVANCED DERMO SYSTEMS. À cet égard, la demande de l’opposante concernant la marque ADVANCED DERMO SYSTEMS a été produite le 24 octobre 2003, elle se fonde aussi sur un emploi projeté au Canada, et elle vise les marchandises suivantes : « nettoyants pour le visage, crèmes pour le visage et gommages liquides ».

 

(b)        Eu égard à l’article 2 de la Loi sur les marques de commerce, la marque ADVANCED SOLUTIONS visée par la demande n’est pas distinctive des marchandises de la requérante et n’est pas adaptée à les distinguer des marchandises de l’opposante vendues sous sa marque ADVANCED DERMO SYSTEMS.

 

 

La preuve de l’opposante

Le témoignage par affidavit de M. Vogel peut se résumer comme suit. L’opposante a lancé ses produits vendus sous sa marque ADVANCED DERMO SYSTEMS en mars 2004. Les ventes depuis le lancement jusqu’au début de septembre 2005 ont totalisé environ 3 millions de dollars. Les dépenses directes de publicité et de mise en marché liées au lancement ont totalisé environ 1,75 millions de dollars. Les éléments de preuve matérielle joints à l’affidavit de M. Vogel comprennent différentes publicités des produits ADVANCED DERMO SYSTEMS. M. Vogel note qu’à une époque qu’il ignore, la requérante a lancé ses marchandises ADVANCED SOLUTIONS au Canada et qu’il s’agit (i) des mêmes produits (ii) vendus aux mêmes clients (iii) par les mêmes voies commerciales que l’opposante. En outre, M. Vogel note que (iv) les deux parties mettent en vedette le mot ADVANCED sur leurs emballages et que (v) les emballages des produits présentent des similarités, à savoir que le côté du contenant est bleu et le dessus du contenant est gris. Au soutien des affirmations de M. Vogel, des éléments de preuve matérielle composés d’emballages de produits ADVANCED SOLUTIONS de la requérante ont été produits.

 

La preuve de la requérante

La preuve de M. Colleran peut se résumer comme suit. La requérante est une société basée aux États-Unis d’Amérique, qui vend et distribue ses produits au Canada ainsi que dans son propre pays. La société de M. Colleran a agi de bonne foi en choisissant la marque ADVANCED SOLUTIONS, comme en fait foi un rapport de son avocat américain selon lequel il n’y aurait [traduction] « aucun risque sérieux de conflit […] » (voir la pièce B jointe à l’affidavit de M. Colleran). En outre, six concepts de mise en marché ADVANCED SOLUTIONS ont été mis au point pour les produits de la requérante, et la combinaison de couleurs finalement retenue était semblable à une combinaison de couleurs que la requérante avait d’abord mise au point en 1999. La même combinaison de couleurs est actuellement utilisée en liaison avec d’autres produits de la requérante. L’emballage des produits ADVANCED SOLUTIONS utilisé au Canada est essentiellement identique à l’emballage utilisé aux États‑Unis. La requérante a commencé à élaborer ses plans de mise en marché de ses produits ADVANCED SOLUTIONS au Canada et aux États-Unis avant la date de la production de la demande de l’opposante concernant sa marque ADVANCED DERMO SYSTEMS.

 

La requérante a commencé à vendre ses marchandises au Canada sous la marque visée par la demande en novembre 2004. Les ventes depuis cette époque jusqu’en mars 2006 ont totalisé environ 7 millions de dollars. La requérante a fait la publicité de ses produits ADVANCED SOLUTIONS au Canada dans différentes publications canadiennes dont Canadian Living, Elle Canada, Elle Quebec, et Chatelaine. Les dépenses liées à ces publicités ont dépassé 3,9 millions de dollars pour la période allant de novembre 2004 à mars 2006.

 

L’affidavit de Mme Talbot sert à produire en preuve des copies de plusieurs enregistrements de marques de commerce de tiers, reliées à des produits cosmétiques, qui comprennent entre autres la composante ADVANCED. Mme Talbot affirme aussi qu’elle s’est rendue dans différents magasins de vente au détail de la chaîne Shoppers Drug Mart dans la ville de Toronto, où elle a constaté que les produits de soins pour la peau étaient regroupés, par marque, dans la même section générale du magasin. Les marchandises de la requérante, notamment ses produits ADVANCED SOLUTIONS, étaient regroupés avec les autres produits Neutrogena, tandis que les marchandises de l’opposante, notamment ses produits ADVANCED DERMO SYSTEMS, étaient regroupés avec des produits Canderm Pharma Inc. (de sa gamme de produits NEOSTRATA).

 

Observations de la requérante au sujet de la preuve de l’opposante

            Dans ses observations écrites, la requérante soutient que la marque ADVANCED DERMO SYSTEMS ne distingue pas les marchandises de l’opposante des marchandises d’autres propriétaires, parce que l’opposante ne peut pas prétendre que la marque ADVANCED DERMO SYSTEMS est employée à son profit. À cet égard, la requérante note que le terme « NEOSTRATA Canada » figure de manière proéminente sur l’emballage des produits de l’opposante et dans les publicités relatives à ces produits. La requérante conclut que les consommateurs croiraient que la source des marchandises est « NEOSTRATA Canada » plutôt que l’opposante Canderm Pharma Inc. L’argument de la requérante n’est pas dépourvu de tout fondement, en particulier puisque le terme NEOSTRATA figure effectivement de manière proéminente sur l’emballage des produits ADVANCED DERMO SYSTEMS et dans les publicités relatives à ces produits, à proximité du mot « Canada », moins proéminent. Cependant, je note que le nom de l’opposante, Canderm Pharma Inc., apparaît aussi sur des emballages et dans des publicités où NEOSTRATA est désigné comme une « gamme » de produits. Je suis d’accord avec la requérante dans la mesure où certains consommateurs pourraient être amenés à croire que « NEOSTRATA Canada » est un nom commercial ou une entité adapté aux fins de la distribution des produits ADVANCED DERMO SYSTEMS. Cependant, je ne peux conclure, à la lumière des éléments de preuve dont je dispose, que « NEOSTRATA Canada » serait perçu comme une entité distincte de l’opposante Canderm Pharma Inc. En outre, l’on peut tout aussi bien soutenir que NEOSTRATA serait simplement perçu comme une marque maison de Canderm Pharma Inc. Même si je devais donner raison à la requérante concernant l’effet de l’emploi du terme « NEOSTRATA Canada », une telle conclusion ne profiterait pas à la requérante relativement au premier motif d’opposition, à l’égard duquel la date pertinente est le 13 novembre 2003, ce qui correspond à une époque antérieure à toute vente de produits ADVANCED DERMO SYSTEMS de l’opposante au Canada.

 

La question principale à trancher

La question déterminante dans la présente instance est celle de savoir si la marque ADVANCED SOLUTIONS visée par la demande crée de la confusion avec la marque ADVANCED DERMO SYSTEMS de l’opposante. Les dates pertinentes pour apprécier la question de la confusion sont a) la date de la production de la demande, soit le 13 novembre 2003, relativement au premier motif d’opposition alléguant l’absence de droit, et b) la date de l’opposition, soit le 15 décembre 2004, relativement au motif d’opposition alléguant le caractère non distinctif; pour un examen de la jurisprudence concernant les dates pertinentes dans une procédure d’opposition, voir American Retired Persons c. Canadian Retired Persons (1998), 84 C.P.R.(3d) 198 aux pp. 206 - 209 (C.F. 1re inst.). En l’espèce, il n’y a aucune contestation quant à la date pertinente à laquelle la question de la confusion doit être appréciée.

Fardeau de preuve

En vertu de la loi, il incombe à la requérante de démontrer qu’il n’y aucune probabilité raisonnable de confusion, au sens du paragraphe 6(2) de la Loi sur les marques de commerce, entre la marque ADVANCED SOLUTIONS visée par la demande et la marque ADVANCED DERMO SYSTEMS de l’opposante. Du fait du fardeau de preuve à la charge de la requérante, il s’ensuit que s’il est impossible de parvenir à une conclusion claire au vu de tous les éléments de preuve, une décision doit être rendue contre la requérante : voir John Labatt Ltd. c. Molson Companies Ltd. (1990) 30 C.P.R.(3d) 293 aux pp. 297‑298 (C.F. 1re inst.). Le critère de la confusion est une question de première impression et de souvenir vague. Pour déterminer si deux marques créent de la confusion, il faut notamment prendre en compte les facteurs énumérés au par. 6(5) de la Loi sur les marques de commerce, soit : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenus connues; la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; le genre de marchandises, services ou entreprises; la nature du commerce; le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent. Tous les facteurs n’ont pas nécessairement le même poids. Le poids à accorder à chacun dépend des circonstances : voir Gainers Inc. c. Tammy L. Marchildon and The Registrar of Trade‑marks (1996), 66 C.P.R.(3d) 308 (C.F. 1re inst.).

 

Examen des facteurs énumérés au paragraphe 6(5)

La marque ADVANCED DERMO SYSTEMS de l’opposante possède un degré inhérent de caractère distinctif relativement faible parce qu’elle suggère une méthode de pointe de traitement de la peau. De même, la marque ADVANCED SOLUTIONS visée par la demande possède un degré inhérent de caractère distinctif relativement faible parce qu’elle suggère des préparations de pointe pour résoudre des problèmes d’ordre cosmétique. Ni l’une ni l’autre des marques n’avait acquis de réputation à la première date pertinente (le 13 novembre 2003), tandis que la marque de l’opposante avait acquis une certaine réputation à la deuxième date pertinente (le 15 décembre 2004) en raison d’un usage et de publicités reliés à la marque à partir de mars 2004. La période pendant laquelle les marques en cause ont été en usage favorise légèrement l’opposante dans la mesure où celle-ci a commencé à employer sa marque ADVANCED DERMO SYSTEMS environ huit mois avant que la requérante commence à employer sa marque ADVANCED SOLUTIONS. La nature des marchandises des parties et les voies commerciales des parties sont essentiellement les mêmes et, comme en fait foi le témoignage par affidavit de Mme Talbot, on peut s’attendre à retrouver les marchandises des parties à proximité les unes des autres dans les rayons des cosmétiques des magasins de détail. Cependant, je conviens avec la requérante que le fait de regrouper ensemble tous les produits cosmétiques provenant d’un même manufacturier tend à réduire les probabilités de confusion.

 

Les marques en cause se ressemblent dans la mesure où elles ont toutes deux la même composante initiale ADVANCED. Habituellement, c’est la première composante d’une marque de commerce qui est plus importante à des fins de distinction : voir Conde Nast Publications Inc. c. Union Des Editions Modernes (1979), 26 C.P.R.(2d) 183 à la p. 188 (C.F. 1re inst.). Cependant, dans un cas comme celui-ci, où la première composante est un mot courant qui est aussi quelque peu élogieux, l’importance du premier mot est moins grande. C’est-à-dire que le consommateur moyen aura tendance à accorder moins d’importance à la première partie et à se concentrer davantage sur les autres composantes des marques des parties. Lorsque l’on tient compte de ce qui précède, il ressort que les marques prises dans leur ensemble sont considérablement plus dissemblables que semblables dans leur présentation et leur son, et dans les idées qu’elles suggèrent. À mon avis, la même conclusion s’ensuivrait, quoiqu’à un degré moindre, même si l’on ne tenait pas compte de l’importance moindre accordée à la première partie des marques.

 

Les éléments de preuve joints à l’affidavit de Mme Talbot et concernant des enregistrements par des tiers de marques de commerce commençant par le mot ADVANCED sont insuffisants pour avoir une force probante et ne sont pas utiles à la cause de la requérante.

 

Décision

Compte tenu de ce qui précède, je conclus que la requérante s’est acquittée du fardeau qui lui incombait de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a pas de probabilité raisonnable de confusion entre les marques en cause. En conséquence, l’opposition de l’opposante est rejetée. Puisque la requérante a obtenu gain de cause sur le fond, je m’abstiendrai de commenter les objections de la requérante au sujet de la politique de la Commission, évoquée plus haut, consistant à permettre à une opposante de parfaire son acte de procédure.

 

FAIT À GATINEAU, AU QUEBEC, LE 6 FÉVRIER 2008.

 

 

Myer Herzig,

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

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