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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2013 COMC 147

                                                                                          Date de la décision : 2013-09-03

                                                                                          TRADUCTION

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45, engagée à la demande de Cameron MacKendrick, visant l’enregistrement no LMCDF51,661 de la marque de commerce ARCTIC au nom de Phoenix Brands Canada Laundry LLC.

[1]               Le 9 mars 2011, à la demande de Cameron MacKendrick (la Partie requérante), le registraire a donné l’avis prévu à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce L.R.C. 1985, ch. T-13 (la Loi) à Phoenix Brands Canada Laundry LLC (l’Inscrivante), la propriétaire inscrite de l’enregistrement no LMCDF51,661 de la marque de commerce ARCTIC (la Marque).

[2]               La Marque est enregistrée pour emploi en liaison avec les marchandises suivantes :

[TRADUCTION]
(1) Savons de toutes sortes, y compris savon à lessive et savon de toilette sous forme de pains, de barres, de paillettes, de copeaux, de poudre, de granules ou de liquides.
(2) Détergent et nettoyant tout usage.

[3]               L’article 45 de la Loi exige que la propriétaire inscrite d’une marque de commerce indique si la marque de commerce a été employée au Canada en liaison avec chacune des marchandises et chacun des services décrits dans l’enregistrement à un moment quelconque au cours des trois années précédant la date de l'avis et, dans la négative, qu’elle précise la date où la marque a été ainsi employée en dernier lieu et la raison de son défaut d'emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour établir l’emploi de la Marque s'étend du 9 mars 2008 au 9 mars 2011.

[4]               La définition pertinente d’« emploi » en liaison avec des marchandises est énoncée au paragraphe 4(1) de la Loi :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des marchandises si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces marchandises, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les marchandises mêmes ou sur les colis dans lesquels ces marchandises sont distribuées, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux marchandises à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[5]               En réponse à l’avis, l’Inscrivante a produit l’affidavit de E. Mark Landry, président et chef de la direction de l’Inscrivante, souscrit le 10 octobre 2011. Seule l’Inscrivante a produit des représentations écrites; aucune audience n’a été tenue.

[6]               Dans son affidavit, M. Landry affirme que l’Inscrivante est un fabricant et distributeur de produits ménagers de grande consommation, qui concentre ses efforts sur [TRADUCTION] « la fabrication et la distribution de produits pour la lessive commercialisés sous une même famille de marques ». S’agissant des marchandises visées par l’enregistrement, il atteste uniquement la vente [TRADUCTION] « de détergent à lessive en poudre et de détergent à lessive liquide » en liaison avec la Marque et fournit une preuve qui se limite à cet emploi.

[7]               M. Landry précise que, depuis 2007, les détergents à lessive de l’Inscrivante sont fabriqués aux États-Unis par [TRADUCTION] « des licenciés autorisés… conformément aux normes et aux spécifications établies par [l’Inscrivante] » et que l’Inscrivante les distribue ensuite à ses clients canadiens qui, à leur tour, les revendent aux consommateurs canadiens. M. Landry atteste qu’au cours de la période pertinente, l’Inscrivante a enregistré des recettes de ventes supérieures à 24 millions de dollars annuellement et engagé des dépenses publicitaires considérables. Il joint à son affidavit 11 factures portant une date comprise dans la période pertinente, qui, atteste-t-il, sont représentatives des ventes que l’Inscrivante a réalisées auprès de clients canadiens au cours de cette période. Je souligne, au vu des abréviations « PWD » [powdered] et « LQD » [liquid] qui figurent dans les descriptions des produits, que ces factures établissent aussi bien la vente de détergents à lessive en poudre que la vente de détergent à lessive liquide.

[8]               La question en l’espèce, cependant, est celle de savoir si ces ventes de détergents à lessive ont été faites en liaison avec la Marque telle qu’elle est enregistrée. À cet égard, M. Landry affirme que la Marque était apposée directement sur l’emballage des détergents à lessive et fournit, aux pièces B et C, des photographies des contenants utilisés. Il fournit également, aux pièces E et F, des exemples de coupons que l’Inscrivante a distribués au Canada au cours de la période pertinente. Des parties des pièces B et E sont reproduites ci-dessous; elles illustrent la façon dont la Marque était représentée au cours de la période pertinente :

       

(Pièce B)                                                         (Pièce E)

[9]               Dans ces représentations écrites, l’Inscrivante prétend que la Marque est employée telle qu’elle est enregistrée ou que, si tel n’est pas le cas, la différence est tellement minime qu’elle est sans conséquence.

[10]           Relativement à la première prétention, je suis d’avis que le public croirait, sous le coup de la première impression, que la marque de commerce est « Arctic Power » représentée en caractères stylisés. Sur les contenants, les mots « Arctic » et « Power » sont représentés dans les mêmes caractères et dans les mêmes couleurs, et sont entourés d’une bordure blanche qui unit les deux mots en un seul dessin. Je souligne que le fait que le symbole de marque déposée soit placé à la suite du mot « Power », mais à l’extérieur de la bordure blanche, renforce cette impression.

[11]           En outre, et même si j’admettais que les coupons étaient, selon toute probabilité, associés aux détergents à lessive lors du transfert, je souligne que la marque de commerce qui figure sur les coupons est aussi « Arctic Power » et que le symbole de marque déposée apparaît à la suite du mot « Power », aussi bien sur les contenants, comme sur la photo ci-dessus, que dans le texte des coupons.

[12]           Je ferai remarquer également que, dans les descriptions de produits qui figurent sur les factures, seules des variantes de « Arctic Power » (telles que « A/POWER », « A/PWR » et « ARCTIC PWR ») sont employées; le mot « Arctic » n’est pas employé seul.

[13]           Par conséquent, je n’accepte pas la prétention de l’Inscrivante selon laquelle la Marque a été employée telle qu’elle est enregistrée. La question qu’il convient de se poser ensuite dans les affaires comme celle-ci, c’est-à-dire lorsque la marque qui est employée diffère de la marque qui est enregistrée, est celle de savoir si la marque a été employée d’une manière telle qu’elle a conservé son identité et est demeurée reconnaissable malgré les différences entre la forme sous laquelle elle a été employée et la forme sous laquelle elle est enregistrée [Canada (Registraire des marques de commerce) c. Cie International pour l’informatique CII Honeywell Bull (1985), 4 C.P.R. (3d) 523 (C.A.F.), (Honeywell Bull)]. Pour trancher cette question, il faut se demander si les « caractéristiques dominantes » ont été préservées [Promafil Canada ltée c. Munsingwear Inc, 44 C.P.R. (3d) 59 (C.A.F.)]. Enfin, l’emploi d’une marque de commerce en conjugaison avec d’autres mots ou éléments constitue un emploi de la marque déposée si le public y voit, sous le coup de la première impression, l’emploi de la marque de commerce en soi [Nightingale Interloc Ltd c. Prodesign Ltd, (1984), 2 C.P.R. (3d) 535 (C.O.M.C.)]. 

[14]           Dans ses observations écrites, l’Inscrivante soutient que l’ajout du mot POWER constitue une différence [TRADUCTION] « tellement mineure et sans importance qu’il est peu probable que cela porte à croire…que les [détergents à lessive] proviennent d’une source autre que Phoenix Brands ». Pour appuyer ses dires, l’Inscrivante cite des décisions antérieures démontrant que dans certaines circonstances une marque de commerce comportant des différences mineures peut être jugée acceptable [Hofbauer Associates c. Toronto-Dominion Bank (2001), 14 C.P.R. (4th) 395 (C.O.M.C.); Norman M Cameron Law Corporation c. CMS Cameron McKenna, 2009 CarswellNat 5044 (C.O.M.C.); Aesus Systems Inc c. Sleever International Company (2009), 76 C.P.R. (4th) 401 (C.O.M.C.)].

[15]           Or, la question de savoir si les différences entre les marques sont « à ce point minimes qu’un acheteur non averti conclurait, selon toute probabilité, qu’elles identifient toutes deux, malgré leurs différences, des marchandises ayant la même origine » est une question de fait [Honeywell Bull, p. 525]. Par conséquent, la jurisprudence citée par l’Inscrivante est peu utile dans les circonstances de l’espèce. Par exemple, dans CMS Cameron Mckenna, la différence tenait à l’ajout d’un élément graphique par rapport à la marque enregistrée, et il a été déterminé que les consommateurs, sous le coup de la première impression, percevraient l’élément graphique comme une marque de commerce distincte. De même, dans Sleever International, il a été déterminé que l’ajout du mot « INTERNATIONAL » à la suite de la marque déposée « SLEEVER » ne constituait pas une modification de l’élément dominant de la marque de commerce déposée et qu’il n’était pas de nature à induire les consommateurs en erreur. De façon similaire, dans Hofbauer, des éléments descriptifs supplémentaires et une différence de graphie mineure dans la marque de commerce employée n’ont pas été considérés comme constituant des modifications substantielles des caractéristiques dominantes de la marque de commerce déposée « FUTURLINK ».

[16]           En l’espèce, cependant, j’estime que l’ajout du mot POWER fait en sorte que la caractéristique dominante de la marque de commerce n’est pas préservée. L’ajout du mot POWER modifie de façon substantielle la caractéristique dominante de la marque de commerce telle qu’elle est enregistrée, aussi bien sur les plans visuels et phonétiques que dans les idées suggérées. Rien dans la preuve dont je dispose n’appuie la thèse de l’Inscrivante selon laquelle le consommateur moyen percevrait le mot « Power » comme un simple « terme élogieux ». De même, je ne dispose d’aucun élément de preuve confirmant que la marque de commerce telle qu’elle est employée fait partie d’une gamme de détergents à lessive de marque ARCTIC et que, par conséquent, le consommateur moyen percevrait les détergents à lessive ARCTIC POWER comme provenant de la même source que d’autres détergents à lessive de marque ARCTIC.

[17]           Par conséquent, compte tenu de ce qui précède, je ne peux conclure que l’Inscrivante a démontré l’emploi de la Marque en liaison avec les marchandises au sens des articles 4 et 45 de la Loi. En outre, l’Inscrivante n’a produit aucune preuve de circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi.

Décision

[18]           En conséquence, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, l’enregistrement sera radié selon les dispositions de l’article 45 de la Loi.

 

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Andrew Bene
Agent d’audience
Commission des oppositions des marques de commerce
Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

Traduction certifiée conforme
Judith Lemire

 

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