Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

AFFAIRE INTÉRESSANT LOPPOSITION

de Kraft Foods Holdings, Inc. et Kraft Canada Inc.

à la demande numéro 861,626 produite par

Barbaras Bakery, Inc en vue de lenregistrement

de la marque de commerce SHREDDED OATS

 

Le 14 novembre 1997, la requérante, Barbaras Bakery, Inc., a demandé lenregistrement de la marque de commerce SHREDDED OATS (avoine filamentée). Sa demande était fondée sur lemploi de la marque au Canada depuis le 7 janvier 1997, en liaison avec les marchandises suivantes :

Céréales, nommément céréales de petit déjeuner, céréales transformées, céréales non transformées; barres de goûter, nommément barres Granola. 

La requérante a modifié sa demande une première fois pour se désister de lusage exclusif des mots SHREDDED et OATS et, ensuite, pour limiter le désistement au seul mot OATS. La demande a par la suite été annoncée pour fin dopposition le 14 février 2001.

 

Lors de laudition de lopposition, lagente de la requérante a demandé dêtre autorisée à modifier létat des marchandises en en retranchant les mots « barres de goûter, nommément barres Granola » et en ajoutant une restriction aux marchandises restantes. Jai autorisé les modifications, et létat des marchandises est maintenant libellé ainsi :

[traduction] Céréales, nommément céréales de petit déjeuner, céréales transformées, céréales non transformées, faites de farine d’avoine entière obtenue par extrusion.

 

 


Les opposantes, Kraft Foods Holdings, Inc. (Kraft Foods) et Kraft Canada Inc. (Kraft Canada), ont produit une déclaration dopposition le 13 juillet 2001, dont copie a été transmise à la requérante le 25 septembre 2001. Suivant le premier motif dopposition, la demande denregistrement nest pas conforme aux exigences de larticle 30 de la Loi sur les marques de commerce (la Loi) parce que les mots SHREDDED OATS ne sont pas une marque de commerce. Le deuxième motif dopposition est que la demande nest pas conforme à lalinéa 30b) de la Loi parce que la requérante na pas employé la marque au Canada depuis le 7 janvier 1997, ainsi quelle la prétendu.

 

Le troisième motif dopposition énonce quaux termes de lalinéa 12(1)b) de la Loi, la marque de commerce en cause nest pas enregistrable parce quelle donne une description claire ou une description fausse et trompeuse, en anglais de la nature ou de la qualité des marchandises. Selon les opposantes, la marque de la requérante [traduction] « décrit clairement ou décrit erronément ou mensongèrement que les marchandises sont constituées davoine filamentée ou comprennent cet ingrédient ».

 

Les opposantes font valoir comme quatrième motif que la marque de commerce nest pas enregistrable, aux termes de lalinéa 12(1)c) de la Loi, parce quil sagit du nom, en anglais, des marchandises visées par la demande denregistrement. Suivant le cinquième motif, la marque nest pas enregistrable, aux termes de larticle 10 et de lalinéa12(1)e) de la Loi, parce que les mots SHREDDED OATS sont reconnus au Canada, en raison d'une pratique commerciale ordinaire et authentique, comme désignant le genre de marchandises en liaison avec lesquelles la requérante prétend avoir employé sa marque.


 

Le sixième motif énonce que la marque de commerce en cause ne distingue pas les marchandises de la requérante parce quelle est clairement descriptive ou parce quelle donne une description fausse et trompeuse des marchandises visées. Dans le septième motif, les opposantes soutiennent que la demande denregistrement nest pas conforme aux exigences de lalinéa 30i) de la Loi parce que la requérante ne pouvait être convaincue quelle avait le droit demployer la marque en cause au Canada.

 

La requérante a produit et signifié une contre‑déclaration. Les opposantes ont soumis en preuve les affidavits de Scott Ellis et Viktoria Egyed et, la requérante, celui de John Stalker ainsi que trois affidavits de Kelly Ann Brady. En contre-preuve, les opposantes ont déposé un deuxième affidavit souscrit par Scott Ellis. Les deux parties ont produit un plaidoyer écrit. Laudience sest tenue le 27 avril 2006, et les deux parties y étaient représentées.

 

La preuve des opposantes 

Dans son premier affidavit, M. Ellis se présente comme le directeur commercial de la Section céréales de Kraft Canada, entreprise spécialisée dans la confection et la vente de plus de cent marques de produits alimentaires. Il exerce ces fonctions depuis le mois de janvier 2001. Avant cette date, il était directeur du marketing à la clientèle pour Kraft Canada.

 


M. Ellis a déclaré que Kraft Canada est titulaire dune licence concédée par Kraft Foods, lautorisant à fabriquer et vendre divers produits, dont des céréales prêtes à manger qui sont commercialisées sous la marque maison POST. Sont vendus sous cette marque les produits SHREDDIES, THE ORIGINAL SHREDDED WHEAT et RAISIN BRAN.

 

M. Ellis a fait lhistorique de lemploi de lexpression « shredded wheat » (blé filamenté) par Kraft et les prédécesseurs de celle‑ci. À lorigine, on confectionnait ces céréales en recourant à un procédé breveté de pressage du blé en filaments dont on formait des biscuits que lon cuisait ensuite. Lutilisation descriptive de lexpression qua faite le propriétaire du brevet pendant que celui-ci était en vigueur lui a conféré un sens générique et lui a fait perdre toute connotation de marque de commerce : voir Canadian Shredded Wheat Co. c. Kellogg Co., [1938] 2 D.L.R. 145; [1938] 1 All E.R. 618 (C.P.).

 

Selon laffidavit de M. Ellis, Kraft et ses prédécesseurs vendent des produits à base de blé filamenté au Canada depuis le début du siècle dernier. Pour la période 1997‑2001, le chiffre daffaires tiré de la vente en gros au Canada de ces produits commercialisés sous la marque POST excède 67 millions de dollars et, pour la période 1993-1997, 40 millions de dollars. M. Ellis a déclaré que les produits à base de blé filamenté de Kraft sont vendus dans environ 3 500 épiceries de détail au Canada. Les dépenses engagées pour la publicité de ces produits au Canada pour la période 1993-2001 dépassent 21 millions de dollars.

 

La pièce G jointe au premier affidavit souscrit par M. Ellis consiste en un extrait du Websters New Collegiate Dictionary dans lequel on peut lire la définition des termes suivants :

 

« shredded »                [traduction] découper, couper ou déchirer en morceaux et mettre en morceaux ou en lambeaux.


 

« shredded wheat »     [traduction] céréale de petit déjeuner à base de blé cuit et partiellement séché qui est ensuite mis en filament et façonné en biscuits qui sont alors cuits au four et grillés.

 

 

 

 

 

M. Ellis a affirmé que Kraft considère que les mots « shredded wheat » constituent une expression descriptive se rapportant à un produit particulier de céréales. Lemballage représentatif afférent à son premier affidavit et déposé sous la cote D corrobore cette assertion.

 

La pièce H jointe au premier affidavit de M. Ellis est constituée de photocopies de deux enregistrements de marque de commerce obtenus par des tiers, comportant les mots « shredded wheat » dans létat des marchandises. La pièce J, elle, se compose déchantillons demballage démontrant lemploi descriptif des mots « shredded wheat », notamment à légard du produit « BARBARAS 100% Natural Shredded Wheat » de la requérante.

 

M. Ellis a expliqué que ses fonctions lamènent à se tenir au courant des céréales prêtes à manger de la concurrence. Il connaît les produits de la requérante, notamment ses produits à base de blé filamenté. Avant le début de la présente opposition en 2001, cependant, il ignorait quelle vendait au Canada un produit à base davoine filamentée.

 


La pièce N jointe au premier affidavit de M. Ellis se compose dune photocopie de lemballage du produit SHREDDED OATS de la requérante, lequel porte linscription « Barbaras Bakery Bite Size Shredded Oats Crunchy Wholegrain Cereal », où les mots SHREDDED OATS sont suivis des lettres TM (MC), ainsi quune photo montrant de petits biscuits texturés.

 

Dans laffidavit quelle a souscrit, Mme Egyed se présente comme recherchiste travaillant pour le cabinet dagents de marque de commerce des opposantes. Elle a joint comme annexe A à son affidavit des pages contenant le résultat de recherches faites dans la base de données CD-NameSearch au sujet de divers enregistrements de marques de commerce visant des céréales prêtes à manger.

 

La preuve de la requérante

Laffidavit de M. Stalker présente son auteur comme le vice-président et directeur général de Weetabix of Canada Limited, une société soeur de la requérante. Weetabix of Canada Limited et la requérante sont toutes deux la propriété de Weetabix Limited.

 

M. Stalker a déclaré que lentreprise qui lemploie confectionne les SHREDDED OATS de la requérante. Il a décrit la méthode employée pour produire ces céréales, laquelle comporte les étapes suivantes :

1. mélanger la farine davoine, la farine de blé et les granules de mélasse;

2. humidifier le mélange et le cuire dans un extrudeur;

3. forcer le passage du mélange à travers les têtes dextrusion pour former le produit;

4. créer de minces fils ou filaments formant un tube côtelé;

5. couper ou gaufrer les tubes en forme doreiller.

 


Le premier affidavit de Mme Brady sert simplement à produire en preuve des définitions de dictionnaires pour les termes anglais « extrude », « extruded », « shred » et « shredded ».

 

Dans son deuxième affidavit, Mme Brady décrit le résultat des achats de céréales quelle a effectués en mars 2003 dans des épiceries dOttawa. Ses instructions étaient de trouver des emballages portant les mots « shredded oats », « oat », « oats » ou « oaty » ou un nom décrivant la forme du produit de céréale. Elle na pas trouvé le produit de la requérante, pas plus que demballage portant les mots « shredded oats ». Le produit qui se rapprochait le plus de ce quelle cherchait a été NATURES PATH SHREDDED OATY BITES, quelle sest procuré dans une boutique appelée The Natural Food Pantry.

 

Le troisième affidavit de Mme Brady explique le résultat de ses recherches dans lInternet sur lexpression « shredded oats ». La plupart des résultats semblaient provenir de sites américains et se rapportaient au produit de la requérante. La pièce D jointe à laffidavit revêt un intérêt particulier; elle comporte des pages extraites du site Web de lentreprise The Weetabix Company, Inc. de Clinton, au Massachusetts, une société quon peut présumer affiliée à lentreprise pour laquelle M. Stalker travaille. Il appert de ce site Web que lentreprise américaine fabrique divers produits à base de céréales pour des tiers qui les vendent sous leur propre marque de distributeur, dont les céréales dites « granola », les carrés de blé et lavoine filamentée organique. La photographie illustrant les céréales à base davoine filamentée organique montre ce qui paraît être des céréales pour le petit déjeuner se présentant sous forme de bouchées carrées texturées, cuites au four.


  

La contre-preuve des opposantes

Dans son deuxième affidavit, M. Ellis formule ses commentaires au sujet de laffidavit de M. Stalker et du troisième affidavit de Mme Brady. La plupart de ces commentaires relèvent de lévidence ou constituent des opinions qui ne peuvent être reçues en preuve.

 

Les motifs dopposition

Le premier motif dopposition nest pas bien fondé. Il ne repose sur aucune allégation de fait, et les opposantes nindiquent pas sur quel alinéa de larticle 30 elles sappuient. Il est donc écarté.

 


Relativement au deuxième motif, il appartient à la requérante de démontrer que sa demande satisfait aux exigences de lalinéa 30b) de la Loi : voir la décision en matière dopposition Joseph Seagram & Sons c. Seagram Real Estate (1984), 3 C.P.R. (3d) 325, p. 329‑330, et la décision John Labatt Ltd. c. Molson Companies Ltd. (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.). Les opposantes doivent toutefois sacquitter du fardeau de prouver leurs allégations de fait. Ce fardeau de preuve est plus léger à légard de la non‑conformité à lalinéa 30b) de la Loi : voir la décision en matière dopposition Tune Masters c. Mr. P's Mastertune (1986), 10 C.P.R. (3d) 84, p. 89. De plus, lalinéa 30b) exige que la marque de commerce dont lenregistrement est demandé ait été employée de façon continue dans le cours normal du commerce, depuis la date alléguée : voir Labatt Brewing Company Limited c. Benson & Hedges (Canada) Limited et Molson Breweries, a Partnership (1996), 67 C.P.R. (3d) 258, p. 262 (C.F. 1re inst.). Enfin, les opposantes peuvent sacquitter de leur fardeau de preuve en sappuyant sur la preuve de la requérante : voir Labatt Brewing Company Limited c. Molson Breweries, a Partnership (1996), 68 C.P.R. (3d) 216 à la p. 230 (C.F. 1re inst.).

 

En lespèce, M. Ellis a établi que, du fait des fonctions quil exerce chez Kraft Canada, il connaît le marché des céréales prêtes à manger au Canada. Il affirme, notamment, quil connaît la requérante ainsi que ses produits, dont sa marque de céréales de blé filamenté. La présente opposition a fait connaître à M. Ellis le produit davoine filamentée de la requérante en 2001, mais avant cette date, il ignorait que ce produit était vendu au Canada.

 

Lagente de la requérante fait valoir que cette ignorance est sans grande conséquence puisque M. Ellis na commencé à travailler dans le secteur des céréales quen 2001. Toutefois, comme la signalé lagent des opposantes, M. Ellis occupait, avant cette date, le poste de directeur du marketing à la clientèle chez Kraft Canada, et on pouvait donc penser quil était au courant des produits de son employeur et de ceux de la concurrence, y compris les céréales prêtes à manger.

 

Laffidavit de John Stalker, dont lentreprise est affiliée à la requérante et fabrique les céréales davoine filamentée pour cette dernière, est également pertinent. Bien que M. Stalker y explique en détail la méthode de fabrication employée par lentreprise, il est étonnamment silencieux pour ce qui est de lendroit où le produit est fabriqué ou du moment où la fabrication a débuté.

 


Enfin, revêt aussi une certaine importance le deuxième affidavit de Mme Brady. Ses recherches dans des épiceries dOttawa ont révélé lexistence de divers produits à base de céréales dont le nom comprenait lun des mots OAT, OATS ou OATY ou renvoyait à la forme du produit. Le produit à base davoine filamentée de la requérante ne figurait pas parmi les produits quelle avait relevés.

 

Compte tenu des trois remarques précédentes sur la preuve, je suis davis que les opposantes ont fait la preuve qui leur incombait relativement au deuxième motif. Bien quisolément, aucun de ces éléments de preuve naurait été suffisant, ensemble, ils permettent aux opposantes de sacquitter de leur léger fardeau de preuve.

 

Par conséquent, il fallait que la requérante apporte des éléments de preuve positifs établissant lemploi continu de sa marque depuis la date alléguée. Or, elle ne la pas fait. Le troisième affidavit de Mme Brady énumère des sites Web offrant en vente la céréale davoine filamentée. Toutefois, cette liste a été établie en 2003 et semble concerner principalement le marché américain.

 

Il naurait pas été difficile pour la requérante de présenter laffidavit de lun de ses dirigeants attestant lemploi de la marque SHREDDED OATS. Elle aurait également pu contre‑interroger M. Ellis sur ses déclarations selon lesquelles la marque de la requérante navait pas été employée avant 2001. Toutefois, elle na rien fait de cela. Jestime quelle na pas prouvé, comme il le lui incombait, quelle avait employé sa marque de façon continue depuis la date alléguée. Jaccueille donc le deuxième motif dopposition.

 


Il convient de signaler, à propos du troisième motif dopposition, que suivant la décision Fiesta Barbeques Limited c. General Housewares Corporation (2003), 28 C.P.R. (4th) 254 (C.F. 1re inst.), fondée sur larrêt Lightning Fastener Co. c. Canadian Goodrich Co. [1932] S.C.R. 189, de la Cour suprême du Canada, la date pertinente pour lexamen de motifs dopposition relevant de lalinéa 12(1)b) de la Loi est et a toujours été la date du dépôt de la demande denregistrement. En outre, il y a lieu daborder les questions relevant de cet alinéa du point de vue de lutilisateur moyen des services. Enfin, il convient de ne pas décomposer la marque en ses éléments constitutifs pour lanalyser en détail, mais de lexaminer dans son ensemble en tenant compte de limpression immédiate qui sen dégage :  voir Wool Bureau of Canada Ltd. c. Registraire des marques de commerce (1978), 40 C.P.R. (2d) 25, p. 27‑28 et Atlantic Promotions Inc. c. Registraire des marques de commerce (1984), 2 C.P.R. (3d) 183, p. 186.

 

Compte tenu du sens ordinaire des mots « shredded » et « oats », on peut penser que le consommateur moyen considérerait que les céréales et les barres de goûter de la requérante ont comme ingrédient de lavoine filamentée. La preuve établit en outre que lexpression « blé filamenté » est un terme générique désignant un type déterminé de céréales prêtes à manger qui sont vendues au Canada depuis une centaine dannées. Le chiffre des ventes de ces céréales et le montant des dépenses publicitaires les concernant sont substantiels. La preuve démontre aussi que les céréales ainsi vendues se présentaient sous la forme de biscuits texturés de grande taille ou de format bouchée semblables à ceux des produits davoine filamentée de la requérante.

 


En raison de limportance des ventes et de la publicité se rapportant aux produits de blé filamenté de Kraft et dautres producteurs alimentaires, les consommateurs associent lexpression « blé filamenté » (shredded wheat) à un biscuit texturé. La première impression des consommateurs devant une céréale appelée SHREDDED OATS serait quil sagit de biscuits texturés à base davoine. Comme il en a été fait mention, une société américaine probablement affiliée à la requérante emploie lexpression « organic shredded oats » (avoine filamentée organique) comme description générale dune telle céréale quelle soffre à confectionner pour le compte de clients qui la vendent ensuite sous leur propre marque de distributeur.

 

La signification de la marque SHREDDED OATS de la requérante en relation avec le procédé de fabrication employé pour produire ces céréales a fait lobjet dun débat entre les parties. Les opposantes relèvent que le processus décrit par M. Stalker ne comporte pas de déchiquetage (shredding), ce qui donne à penser que la marque donne une description fausse et trompeuse de la marchandise. Il est peu probable, toutefois, que les consommateurs soient au courant du procédé utilisé pour préparer les céréales de la requérante.

 


La requérante soutient que le mot « shredded » ne renvoie pas à une qualité inhérente de son produit à base de céréale, mais indique plutôt la technique de traitement employée pour le produit ou pour lun de ses ingrédients, ce qui constitue une caractéristique accessoire du produit. Toutefois, la preuve établit que ce nest pas ce que le consommateur moyen pense quand il voit les mots « shredded oats » employés en liaison avec un produit à base de céréales. Puisque les céréales de blé filamenté lui sont familières depuis longtemps, il penserait immédiatement que les céréales SHREDDED OATS sont un produit de même type, cest‑à‑dire un biscuit texturé composé principalement davoine. Sil sagit dun produit analogue, alors la marque en donne une description claire et, si ce nest pas le cas, alors elle en donne une description fausse et trompeuse.

 

Lors de laudience, lagente de la requérante a invoqué ce quelle a appelé le principe de la dissociation, selon lequel deux éléments clairement descriptifs peuvent néanmoins former une marque de commerce enregistrable sils ont des fonctions différentes. Elle a concédé quon pouvait, en lespèce, présenter SHREDDED comme un terme clairement descriptif de lapparence du produit de la requérante, et que le mot OATS donne une description claire de la composition du produit, mais elle a soutenu que la combinaison anormale des deux mots confère un caractère distinctif inhérent à la marque de commerce, même sil est faible.

 

Largument de la requérante ne sapplique pas en lespèce. Nous navons pas affaire à une marque de commerce comme COFFEE CRISP, qui ne produit pas une description unitaire cohérente. SHREDDED OATS constitue plutôt un syntagme conceptuellement et grammaticalement logique qui, en rapport avec des céréales, suggère immédiatement quelles sont faites davoine filamentée ou quelles se présentent sous la forme dun biscuit semblable aux biscuits de blé filamenté, même si elle est à base davoine.

 


Cela ne veut pas dire que la marque de la requérante ne peut constituer une marque de commerce. De fait, la requérante sest efforcée dinformer le public quelle considère les mots SHREDDED OATS comme sa marque de commerce, en les faisant suivre des lettres TM (MC) sur son emballage. Mais cette mesure, seule, nest pas suffisante. Lorsquune marque  nest pas conforme à lalinéa 12(1)b) de la Loi, il incombe à la requérante de satisfaire aux exigences élevées du paragraphe 12(2). En lespèce, la requérante na pour ainsi dire rien fait pour satisfaire à ces exigences.

 

Jestime par conséquent que la requérante ne sest pas déchargée de son obligation de prouver que sa marque SHREDDED OATS ne donne pas une description claire ou une description fausse et trompeuse de sa marchandise. Par conséquent, jaccueille le troisième motif dopposition.

 

Relativement au quatrième motif, les opposantes nont pas établi que dautres commerçants ont donné le nom de « shredded oats » à un produit à base de céréale. Ce motif est donc écarté.

 

Il na pas non plus été prouvé que les mots « shredded oats » sont reconnus comme désignant un type particulier de céréales. Le cinquième motif dopposition est donc écarté lui aussi.

 


Pour ce qui est du sixième motif, cest à la requérante quil incombe de prouver que sa marque distingue véritablement ses marchandises de celles dautres personnes au Canada ou est adaptée à les distinguer : Muffin Houses Incorporated c. The Muffin House Bakery Ltd. (1985), 4 C.P.R. (3d) 272 (C.O.M.C.). La date pertinente pour lexamen de cette question est la date du dépôt de lopposition (soit le 13 juillet 2001) : voir E. & J. Gallo Winery c. Andres Wines Ltd. (1975), 25 C.P.R. (2d) 126, p. 130; [1976] 2 C.F. 3 (C.A.F.) et Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 412, p. 424 (C.A.F.).

 

De façon générale, les conclusions que jai tirées concernant le troisième motif dopposition sappliquent également à ce motif. Je suis davis quà la date pertinente, la marque de la requérante donnait soit une description claire soit une description fausse et trompeuse de la nature des marchandises visées. Par conséquent, en labsence de preuve contraire, je ne puis conclure quelle était distinctive. Je donne donc raison aux opposantes relativement au sixième motif.

 

Les opposantes nayant allégué aucun fait à lappui de leur septième motif, celui‑ci ne peut être considéré comme bien fondé, et il est rejeté.

 

En conséquence, en vertu du pouvoir qui ma été délégué en application du paragraphe 63(3) de la Loi, je rejette la demande denregistrement.

 

FAIT À GATINEAU (QUÉBEC), LE 8 MAI 2006.

 

 

David J. Martin

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

 

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