Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2011 COMC 40

Date de la décision : 2011-03-04

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION produite par Brown-Forman Corporation, Jack Daniel’s Properties, Inc., Finlandia Vodka Worldwide Ltd. et Southern Comfort Properties, Inc. à l’encontre de la demande d’enregistrement no 1202335 pour la marque de commerce JACK DANIEL’S au nom de Robert Marcon

[1]               Le 29 décembre  2003, Robert Marcon (le Requérant) a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce JACK DANIEL’S (la Marque), fondée sur l’emploi projeté de la Marque au Canada en liaison avec de la « salsa » et de la « sauce barbecue » (les Marchandises).

[2]               La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 24 octobre 2007. Le 2 janvier 2008, Brown-Forman Corporation, Jack Daniel’s Properties, Inc. (JDPI), Finlandia Vodka Worldwide Ltd. et Southern Comfort Properties, Inc. (collectivement désignée l’Opposante) ont produit une déclaration d’opposition. Le 7 février 2008, le Requérant a produit et signifié une contre‑déclaration dans laquelle il nie les allégations de l’Opposante.

[3]               L’Opposante a produit les affidavits des représentants David S. Gooder et Jeremy Shepherd, de la responsable d’études de marché Sarah Carnegie (nos 1 et 2), des recherchistes en marques de commerce Mary P. Noonan (nos 1 et 2) et Generosa Castiglione, ainsi que de Robert White. Le Requérant a produit l’affidavit de Robert V. Marcon à l’appui de sa demande.

[4]               Monsieur Marcon a été contre‑interrogé au sujet de son affidavit et de la transcription, et des réponses à des engagements ont été produites.

[5]               L’Opposante a produit une preuve en réponse, à savoir les affidavits de Mary P. Noonan et de Shirley Sereney.

Les motifs d’opposition

[6]               Les motifs d’opposition se résument comme suit :

(1)  Alinéa 38(2)a) de la Loi

La demande n’est pas conforme aux exigences des alinéas 30e) et i) parce que le Requérant a affirmé à tort qu’il avait l’intention d’employer la Marque au Canada et qu’il était convaincu d’avoir le droit d’employer la Marque visée par la demande au Canada en liaison avec les Marchandises alors qu’en réalité, à la date de production de la demande, le Requérant :

          n’avait aucune entreprise légitime;

          a probablement l’intention de « faire le commerce » de marques de commerce;

          n’a aucun antécédent de bonne foi;

          connaît les marques bien connues;

          cherche à exploiter l’achalandage de marques bien connues, comme JACK DANIEL’S;

          agit de mauvaise foi;

          ne pouvait être convaincu d’avoir le droit d’employer la Marque.

 

 

 

(2)  Alinéa 38(2)b) de la Loi

La demande n’est pas enregistrable suivant l’al. 12(1)d), au motif que la Marque visée par la demande crée de la confusion avec chacune des marques de commerce déposées de l’Opposante (appelées tout au long de la présente décision les marques de commerce de l’Opposante ou les marques de commerce JACK DANIEL’S et figurant à l’annexe A).

 

(3)       Alinéas 38(2)a) et c) de la Loi

Contrairement aux alinéas 16(3)a) et c), le Requérant n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement puisqu’à la date de production, la Marque créait de la confusion avec chacune des marques de commerce de l’Opposante telles qu’elles sont énumérées à l’annexe A, ainsi qu’avec le nom commercial JACK DANIEL’S, lesquels ont tous été antérieurement employés et révélés au Canada par l’Opposante et étaient ou auraient dû être connus du Requérant.

 

(4)       Alinéa 38(2)b) de la Loi

Contrairement à l’al. 16(3)b), le Requérant n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement puisqu’à la date de production, la Marque créait de la confusion avec chacune des demandes de l’Opposante qui avaient déjà été produites au Canada (comme l’indique l’annexe A).

 

(5)  Alinéa 38(2)d) de la Loi

La Marque visée par la demande n’est pas distinctive des Marchandises du Requérant.

 

[7]               Il incombe au Requérant d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. Toutefois, l’Opposante a le fardeau initial de présenter suffisamment d’éléments de preuve admissibles à partir desquels on pourrait raisonnablement conclure à l’existence des faits allégués à l’appui de chaque motif d’opposition [voir John Labatt Ltd c. Molson Companies Ltd. (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.), p. 298; Dion Neckwear Ltd. c. Christian Dior, S.A. et al. (2002), 20 C.P.R. (4th) (C.A.F.)].

[8]               Les dates pertinentes applicables aux motifs d’opposition sont les suivantes :

         art. 30 – la date de production de la demande [voir Georgia-Pacific Corp. c. Scott Paper Ltd. (1984), 3 C.P.R. (3d) 469 (C.O.M.C.), p. 475];

         alinéa 12(1)d) – la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. et Le registraire des marques de commerce (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.)];

         paragraphe 16(3) – la date de production de la demande [voir le par. 16(3)];

         absence de caractère distinctif – la date de production de l’opposition [voir Metro‑Goldwyn-Mayer Inc. c. Stargate Connections Inc. (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (C.F.)].

 

 

La preuve de l’Opposante

Affidavit de David S. Gooder

[9]               Dans son affidavit, David Gooder atteste qu’il est l’administrateur délégué de JDPI et est chargé de la protection, de l’exécution et de l’octroi de licences de ses marques de commerce. JDPI est une filiale à cent pour cent de Brown-Foreman (BFC) et représente le whisky JACK DANIEL’S pour la commercialisation mondiale. JDPI autorise la distillerie Jack Daniel à produire les boissons alcoolisées portant la marque JACK DANIEL’S et à les vendre à BFC, qui les commercialise ensuite à l’échelle mondiale.

[10]           Dans son affidavit, M. Gooder fournit un contexte historique visant à établir la notoriété de la marque de commerce de l’Opposante au Canada et ailleurs. Monsieur Gooder affirme que la distillerie Jack Daniel est la première distillerie enregistrée aux États-Unis; elle produit du whisky depuis 1866. Tous les whiskys de marque JACK DANIEL’S vendus depuis cette date ont été produits et embouteillés à cette distillerie. Ce produit est vendu dans plus de 150 pays, dont au Canada; les autres produits vendus par la distillerie sont les suivants : JACK DANIEL’S COUNTRY COCKTAILS, GENTLEMAN JACK et JACK DANIEL’S Single Barrel Tennessee whiskey.

[11]           Monsieur Gooder indique que le whisky JACK DANIEL’S est le whisky le plus vendu aux É.‑U. Les ventes de whisky JACK DANIEL’S à étiquette noire aux États-Unis sont supérieures à 4,7 milliards de dollars américains depuis 1995. Le whisky JACK DANIEL’S est vendu au Canada depuis au moins 1970; les ventes totales au Canada, de 2001 jusqu’à aujourd’hui, dépassent 60 millions de dollars américains; depuis 1996, plus de 8  300 000 caisses de boissons alcoolisées JACK DANIEL’S ont été vendues au Canada. En général, les ventes de whisky depuis 1995 sont supérieures à 7,7 milliards de dollars américains et le whisky JACK DANIEL’S est actuellement le deuxième whisky le plus vendu dans le monde.

[12]           Le déposant affirme que les marques de commerce JACK DANIEL’S ont également été employées en vertu d’une licence aux États-Unis, au Canada et ailleurs pendant de nombreuses années en liaison avec différents produits autres que des boissons, notamment des produits alimentaires comme des marinades et d’autres types de sauces, des vêtements comme des t-shirts et des pulls ainsi que d’autres articles comme des briquets et des verres à liqueur. Les ventes au détail à l’échelle mondiale de produits faisant l’objet d’une licence autres que des boissons sont supérieures à 1,5 million de dollars américains par année. La marque JACK DANIEL’S a été reconnue comme l’une des meilleures marques au monde par des publications comme Impact, Business, Week, Adweek, Brandweek et Mediaweek, et sa valeur est estimée à plus d’un milliard de dollars américains.

[13]           Les marques de commerce JACK DANIEL’S ont fait l’objet d’une licence au Canada et à l’échelle internationale pendant bon nombre d’années en liaison avec une multitude de produits, comme :

          Des produits alimentaires comme des sauces pour grillades, de la sauce barbecue, de la sauce à steak, des marinades, des marinades sèches, de la moutarde, d’autres types de sauces, des pacanes et des arachides, des brioches et des confiseries;

          Des produits liés à l’alimentation, comme des chopes, des carafes, des flasques, de la verrerie, des plats de service, des outils pour le barbecue et des emballages pour la cuisson au four, à la vapeur et sur le gril;

          Des vêtements et des chaussures, notamment des t-shirts, des casquettes, des chemises polos, des chemises tissées, des pulls, des vestes, des vestes isothermes, des manteaux de cuir, des slips, des foulards de tête, des shorts, des caleçons boxeurs, des kimonos, des vestes de pyjamas, des cravates, des bas, des pantalons en molleton, des chandails débardeurs, des chapeaux, des bracelets, des boucles de ceinture ainsi que des bottes de motocyclisme et de cowboy;

          Des articles personnels et des objets de collection, comme des briquets, des répliques de bouteilles, des répliques d’autos et de camions miniatures moulés sous pression, des drapeaux, des chaînes de porte‑clés, des jetons de casino, de l’équipement de golf et des boules de quilles;

          Des fournitures et accessoires de bar, comme des tabourets, des verres à liqueur, des miroirs muraux, des enseignes et des lumières, des tables, des tables et des accessoires de billard, des cibles et des accessoires de fléchettes et des dessous de verres;

          Des pièces de motocyclette, comme des carters primaires, des carters de distribution, des couvercles de filtre à air, des couvercles d’accumulateur, des couvercles de plaque d’immatriculation, des couvre-klaxons, des poignées de guidon, des pièces rapportées pour appui-dos, des coussinets pour appui-dos, des repose‑pieds, des couvercles de réservoir d’huile, des miroirs, des boîtes a outils pour marchepieds, des bavettes garde‑boue, des couvre‑guidons et autres pièces.

[14]           Le programme d’octroi de licences compte plus de 70 licenciés basés aux États‑Unis, au Canada, en Europe et en Australie. Annuellement, la valeur au détail mondiale des produits autres que des boissons faisant l’objet d’une licence est supérieure à 15 millions de dollars américains.

[15]           Au Canada, la marque JACK DANIEL’S fait l’objet d’une licence pour des sauces faisant partie du menu des restaurants TGI Friday’s, menu qui comporte une section de grillades JACK DANIEL’S, dans laquelle on retrouve différents types de steaks et d’autres grillades servies avec la sauce portant la marque JACK DANIEL’S. TGI Friday’s est autorisée à employer la marque depuis 1999. Monsieur Gooder joint un exemple de la section du menu des grillades JACK DANIEL’S (pièce DG-26), et je remarque qu’elle comporte notamment des [traduction] « côtes levées et crevettes Jack Daniel’s » et des « côtes levées glacées au Jack Daniel’s ». La description sur la page indique ce qui suit : [traduction] « Un coup de pouce de notre bon ami Jack pour donner la saveur riche et fumée du Tennessee à notre nourriture ». Les côtes levées sont décrites comme des [traduction] « savoureuses côtes levées glacées au Jack Daniel’s ». Je remarque qu’il y a au moins un TGI Friday’s au Canada (affidavit de Sarah Carnegie ci‑après analysé).

[16]           S’agissant de la publicité et de la promotion, il semble que la publicité du whisky JACK DANIEL’S est diffusée continuellement depuis 1955. Depuis cette date, plus de 469 millions de dollars (américains) ont été dépensés pour la publicité et la promotion de JACK DANIEL’S aux É.‑U. Plus de 976,4 millions de dollars ont été dépensés mondialement pour la publicité et la promotion de la marque JACK DANIEL’S depuis 1996 et cette publicité a été diffusée au Canada pendant bon nombre d’années.

[17]           La preuve révèle que la promotion et la publicité de la marque JACK DANIEL’S au Canada (et partout dans le monde) ont été assurées de différentes manières :

          Par des annonces publicitaires publiées dans des magazines imprimés distribués aux É.‑U., au Canada et dans d’autres pays (pièce DG-29); par exemple : Cosmopolitan, EXPN Total Sports, Food & Wine, Fortune, Golf Illustrated, Maxim, Newsweek, Playboy, Rolling Stone, Ski, Sports Illustrated, Time, TV Guide et US.

          Par de la publicité au point de vente distribuée dans des commerces où l’alcool est consommé sur place et dans des commerces où l’alcool est à emporter au Canada et aux É.‑U., notamment des articles comme des affichettes de gondole, des porte-cartes, des étalages aux caisses de sortie et des affiches pour les commerces où l’alcool est à emporter et des cartes‑chevalets, des bannières, des affiches, des miroirs, des enseignes au néon, des articles de nouveauté, des cadeaux publicitaires et des marchandises comme des briquets, des t-shirts, des montres, des chaînes de porte‑clés et des lunettes de soleil pour les commerces où l’alcool est consommé sur place (pièce DG‑30).

          Sur Internet par l’entremise des sites Web suivants, qui sont tous accessibles à partir du Canada :

o    www.jackdaniels.com, qui donne des renseignements s’adressant précisément aux Canadiens et qui compte le Canada parmi les trois pays d’origine qui visitent le plus souvent le site depuis au moins 2002 (pièce DG-34);

o    www.jackdanielssauces.com, qui porte principalement sur les différentes sauces et marinades disponibles de marque JACK DANIEL’S et leur utilisation;

o    www.jackdanielsracing.com et www.jackdanielsgoods.com.

          Par de la publicité générale en ligne depuis au moins 1999 accessible aux Canadiens (pièce DG-35).

          Lors d’événements et par des commandites, comme le JACK DANIEL’S World Championship Invitational Barbecue annuel a eu lieu à Lynchburg, au Tennessee, pendant près de 20 ans. Des équipes canadiennes ont été invitées à y prendre part (une équipe canadienne a récemment gagné un prix).

          Par du placement de produits dans des films vus par des millions de téléspectateurs partout dans le monde, dont au Canada. Une longue liste de films est fournie comme pièce DG‑38, avec un DVD de bandes-annonces. Dans la liste, on retrouve des films populaires, comme « Pearl Harbor », « Presque célèbre », « Des hommes d’honneur », « Sur la route de Madison », « Parfum de femme », « Casino » « Jerry Maguire », « Un monde sans terre » et « Basic Instinct ».

Affidavit de Jeremy Shepherd

[18]           L’affidavit de M. Shepherd se rapporte aux activités précises de l’Opposante au Canada. Monsieur Shepherd est le directeur général, Canada, de l’Opposante BFC, et ce, depuis mai 2008. Avant cette date, il a occupé le poste de gestionnaire commercial, Canada, de BFC, et était précédemment chef de marque et responsable régional des ventes, Canada atlantique, à Bacardi Canada Inc., le distributeur désigné de BFC au Canada à cette époque. Monsieur Shepherd est responsable de tous les aspects de la stratégie de marque mondiale de BFC au Canada, y compris la valorisation stratégique de la marque, la gestion de la marque et la gestion de l’équipe des ventes et de mise en marché. Monsieur Shepherd est également responsable de la gestion de M2Universal, l’agence de publicité nommée par BFC par laquelle toute la publicité‑médias commerciale pour la marque JACK DANIEL’S au Canada est diffusée.

[19]           Monsieur Shepherd indique que le whisky JACK DANIEL’S est vendu sans cesse partout au Canada depuis au moins 1970. Depuis cette date, beaucoup de produits portant la marque JACK DANIEL’S ont été introduits au Canada et ailleurs à différents moments, dont l’alcool JACK DANIEL’S COUNTRY COCKTAILS, des produits alimentaires comme des sauces barbecue JACK DANIEL’S et des articles portant la marque JACK DANIEL’S BRANDED comme des vêtements, des accessoires et des articles d’équipement ménager.

[20]           Depuis mai 2001, les ventes de whisky JACK DANIEL’S au Canada ont totalisé plus de 60 millions de dollars américains. Le whisky de l’Opposante est vendu au Canada dans toutes les provinces et tous les territoires depuis 1970. D’avril 1997 à avril 1998, les ventes étaient supérieures à 80 millions de dollars américains, et pour l’exercice financier qui s’est terminé en 2008, les ventes ont excédé  14,5 millions de dollars américains. Le chiffre d’affaires brut total de whisky au Canada a excédé 3 millions de dollars américains pour chaque exercice financier depuis l’exercice s’étant terminé en avril 1997.

[21]           Monsieur Shepherd indique que la promotion et la publicité du whisky JACK DANIEL’S ont été assurées activement au Canada de différentes manières :

          Par des plans de promotion distribués annuellement aux agents de vente partout au Canada pour assurer une approche uniforme et contrôlée, en particulier :

o    Pour les années 2007-2009, l’objectif précis dans les commerces où l’alcool est consommé sur place a été le placement de produits dans des menus chez 50 % des clients qui servent de la nourriture, comme les produits alimentaires portant la marque JACK DANIEL’S employés par la chaîne de restaurant TGI Friday’s.

          Parmi d’autres promotions assurées tout au long des années 2007-2009, on retrouve les campagnes « JACK & COKE », « paint the town JACK » et « JACK DANIEL’S Namedropper », dont un élément clé est la production d’articles promotionnels portant les marques de commerce JACK DANIEL’S à distribuer aux points de vente.

          Par l’utilisation, depuis au moins 2000, d’étalages et de marchandises promotionnelles dans des points de vente à distribuer à des magasins et dans des commerces où l’alcool est consommé sur place, par exemple durant les campagnes promotionnelles susmentionnées et durant des promotions visant précisément le barbecue. La liste d’articles promotionnels de marque JACK DANIEL’S distribués est complète et comprend des pots de moutarde, des barbecues, des granulés de bois, des dessous de bouteille, des chaînes de porte-clés, des vêtements, des miroirs et des cartes à jouer, pour ne nommer que ceux‑là.

          Au moyen de concours et de promotions liés au barbecue depuis au moins 2000, en particulier (pièces JS 12-15) :

o   Une campagne où un paquet-cadeau lié au barbecue contenant une bouteille de whisky JACK DANIEL’S, des pinces à barbecue, des granulés de bois et un livre de recettes lié au barbecue était en promotion;

o   Une campagne s’adressant uniquement aux résidents du Canada, où le prix à gagner était un barbecue de marque Napoleon et où il fallait entrer au moyen d’une étiquette de col volante apposée sur les bouteilles de whiskey JACK DANIEL’S vendues au Canada ou par l’entremise d’un site Web canadien consacré précisément au concours;

o   Une campagne en 2007 où Caseys’ Bar and Grill offrait des cocktails et des sauces inspirés du whisky JACK DANIEL’S dans ses restaurants, y compris une sauce barbecue faite avec du whiskey JACK DANIEL’S au Canada et un condiment JACK DANIEL’S, et où les bouteilles de whisky JACK DANIEL’S portaient une étiquette de col volante contenant la recette de sauce barbecue Stillhouse JACK DANIEL’S.

          Sur Internet depuis au moins 1995 par l’entremise a) du site Web www.jackdaniels.com accessible à partir du Canada, lequel, le cas échéant, comporte des pages précises pour le Canada accessibles uniquement à partir du Canada dans le cadre des promotions précises pour le Canada, ainsi que par l’entremise b) d’autres sites Internet qui offrent des produits de marque JACK DANIEL’S faisant l’objet d’une licence, comme : www.jackdanielsapparel.ca, www.ebay.ca et www.thegameroomstore.com.

          Par de la publicité qui entre au Canada en provenance des États‑Unis et d’ailleurs, comme des magazines de publicité américains diffusés au Canada, de la publicité sur des postes de télévision américains diffusés au Canada, des enseignes, des tableaux d’affichage, des documents et matériels de promotion qui sont distribués dans des points de vente aux États‑Unis et dont les Canadiens qui voyagent aux États‑Unis et qui visitent la distillerie Jack Daniel’s à Lynchburg, au Tennessee, peuvent bénéficier.

          Par de la publicité payante affichée dans des publications imprimées au Canada, y compris :

o   Food & Drink Magazine et Flavours Magazine, lesquels sont produits par la Régie provinciale des alcools de l’Ontario et par la Régie provinciale des alcools de la Colombie‑Britannique, de l’Alberta, de la Saskatchewan et du Manitoba respectivement;

o   Les programmes de matchs officiels d’équipes de sports, comme les Blue Jays de Toronto, une équipe des ligues majeures de baseball; les Canucks de Vancouver, les Flames de Calgary, les Oilers d’Edmonton et les Sénateurs d’Ottawa, des équipes de la NLH; et l’annuaire officiel 2006/2007 des Maple Leafs de Toronto, une équipe de la LNH.

          Par de la publicité à la télévision diffusée au Canada en français et en anglais sur un grand nombre de canaux conventionnels, spécialisés ou numériques, dont Sportsnet, le Discovery Channel, la chaîne de films Showcase, la chaîne Comedy et la chaîne Much Music.

          Par de la publicité à la radio diffusée au Canada, en particulier à JACK fm à Toronto, Vancouver et Calgary, à The Fan 590 et The Fan 960 à Toronto et à Calgary respectivement, et à 102.1 The Edge à Toronto. Habituellement, ce genre de publicité est diffusé conjointement avec un concours pour gagner différents prix, comme une visite à la distillerie Jack Daniel au Tennessee.

          Par de l’affichage faisant la promotion de la marque JACK DANIEL’S à l’extérieur d’immeubles au Canada depuis au moins 2000.

          Par la commandite d’événements au Canada depuis au moins 2000, en particulier :

o   Le Calgary Stampede, à titre de commanditaire officiel en 2000 et 2001 et à titre de commanditaire officieux depuis 2002, dont la commandite de la marque est généralement supérieure à 60 000 $ US par année.

o   Les événements du Professional Bull Riders, qui ont lieu partout en Amérique du Nord et qui sont souvent télévisés partout dans le monde, à titre de commanditaire officiel dont la commandite de la marque est généralement supérieure à 60 000 $ US par année.

o   Le Show Harley, un événement annuel de deux jours qui se déroule à Montréal, Québec, et qui a lieu depuis environ 30 ans, à titre de commanditaire officiel dont la commandite de la marque est généralement supérieure à 10 000 $ US par année;

o   Par la commandite d’une écurie NASCAR, dont toutes les courses sont diffusées au Canada et dont certaines ont lieu au Canada, ainsi que par l’entremise d’un site Web consacré à l’écurie commanditée : www.jackdanielsracing.com.

Premier affidavit de Sarah Carnegie

[22]           Madame Carnegie est candidate au doctorat en anthropologie et effectue, présente et rapporte des recherches littéraires et d’observation depuis sept ans.

[23]           Madame Carnegie a effectué une recherche visant à établir le lien entre le whisky JACK DANIEL’S et d’autres spiritueux et des produits alimentaires. Elle indique qu’il y a deux restaurants TGI Friday’s à Niagara Falls, en Ontario, tous deux vendant des sacs de glaçage JACK DANIEL’S à utiliser pour la cuisson. Elle joint des menus provenant d’un certain nombre de restaurants qui offrent des produits comme de la moutarde à l’ancienne pour steak JACK DANIEL’S, de la sauce au poivre vert pour steak JACK DANIEL’S et/ou de la sauce BBQ à l’érable JACK DANIEL’S. La déposante joint également un menu du TGI Friday’s comprenant une section entière consacrée aux grillades JACK DANIEL’S (pièces SC 2‑8).

[24]           Madame Carnegie fournit des éléments de preuve démontrant qu’un certain nombre de magasins de détail à Toronto vendent des produits alimentaires comportant du whisky ou d’autres spiritueux, dont des sauces barbecue comportant du whisky et des moutardes comportant du gin, de la téquila ou de la vodka. Elle a démontré de nombreux sites Web qui fournissent des recettes comprenant du whisky JACK DANIEL’S (pièces SC 12 -16). La déposante a également fourni en preuve des extraits de la version en ligne du magazine Food & Drink de la Régie des alcools de l’Ontario (LCBO), qui comprend des recettes comportant des spiritueux, dont du whisky et du rhum.

[25]           Il existe une multitude de livres et de livres de recettes en vente au Canada visant à cuisiner avec le whisky de marque JACK DANIEL’S ou qui contiennent des recettes comportant du whisky JACK DANIEL’S. Je remarque que les dates de publication et/ou de droits d’auteur des pages de titre fournies sont antérieures à la date de production de la présente demande. Voici des exemples de livres de recettes dédiés à l’utilisation du whisky JACK DANIEL’S : JACK DANIEL’S Spirit of Tennessee Cookbook; JACK DANIEL’S Old Time Barbecue Cookbook et JACK DANIEL’S Hometown Celebration Cookbook. De plus, Mme Carnegie fournit en preuve des livres dans lesquels certaines recettes nécessitent d’autres types de spiritueux (plutôt que le whisky de l’Opposante précisément), y compris d’autres types de whisky (pièces SC 21-35).

[26]           La recherche de Mme Carnegie révèle également que des produits non liés à la nourriture de marque JACK DANIEL’S sont disponibles par Internet sur des sites Web comme www.ebay.ca, www.craigslist.ca et www.buysell.ca. Elle affirme qu’une chanson a été écrite à propos de la marque JACK DANIEL’S et que de nombreux articles et sujets se rapportant à la marque JACK DANIEL’S sont disponibles en ligne à partir du Canada.

Deuxième affidavit de Sarah Carnegie

[27]           Le deuxième affidavit de Mme Carnegie vise des recherches effectuées sur Internet en mai 2008 relativement à Robert Marcon, Robert V. Marcon et Robert Victor Marcon, en liaison avec la marque JACK DANIEL’S (et d’autres marques sans doute bien connues pour lesquelles le Requérant a présenté une demande d’enregistrement au Canada). La déposante affirme qu’elle n’a pas été en mesure de trouver un lien entre le Requérant et la Marque; de même, elle a effectué des recherches pour trouver un lien entre la sauce barbecue, la salsa et le nom du Requérant, mais n’a rien trouvé. 

[28]           Madame Carnegie fournit également des copies de magazines distribués au Canada en 2003 se trouvant à la Toronto Public Library, dans lesquels était affichée de la publicité JACK DANIEL’S, notamment des éditions du Rolling Stone Magazine, du Sports Illustrated et du Field and Stream.

Premier affidavit de Mary P. Noonan

[29]           Madame Noonan est recherchiste en marques de commerce employée par les agents de l’Opposante. Madame Noonan joint des copies d’enregistrements et de demandes pour des marques de commerce JACK DANIEL’S ainsi que deux demandes produites par le Requérant, dont l’une fait l’objet de la présente procédure d’opposition.

Deuxième affidavit de Mary P. Noonan

[30]           Madame Noonan fournit des éléments de preuve concernant le lien entre les spiritueux et la nourriture et affirme qu’un certain nombre de marques de commerce appartenant à des tiers ont été enregistrées au Canada en liaison avec des spiritueux et des produits alimentaires. Voici des exemples : CANADIAN CLUB enregistrée en liaison avec du whisky et des sauces; SOUTHERN COMFORT enregistrée en liaison avec des liqueurs, de la moutarde et des sauces, nommément des sauces barbecue et des marinades; et GOLDEN SUN enregistrée en liaison avec des spiritueux, nommément du whisky, du gin et de la liqueur ainsi qu’avec de la moutarde et des sauces, nommément des sauces barbecue.

[31]           À cet égard, je remarque que la liste de demandes d’enregistrement de marques de commerce de l’Opposante figurant à l’annexe A comprend une demande d’enregistrement pour la marque JACK DANIEL’S en liaison avec des [traduction] « sauces barbecue, des marinades, des sauces pour bifteck et des sauces pour grillades ».

[32]           Madame Noonan fournit des renseignements concernant l’historique de la production de demandes du Requérant et remarque qu’en mai 2008, il a produit vingt-quatre demandes de marques de commerce au Canada, dont neuf ont été abandonnées et, parmi les marques actives restantes, sept ont fait l’objet d’une opposition. La déposante indique que parmi les sept marques de commerce produites au Canada par le Requérant et ayant fait l’objet d’une opposition, chacun des opposants en question est le propriétaire d’une multitude d’enregistrements et de demandes de marque de commerce au Canada qui sont identiques à la Marque visée par la demande de M. Marcon ou qui contiennent la Marque à titre de composante. Madame Noonan fournit des éléments de preuve démontrant que la situation est semblable en ce qui concerne les demandes de marque de commerce que le Requérant a produites aux États‑Unis.

[33]           Madame Noonan a également effectué une recherche en mai 2008 sur la base de données NUANS, un système de recherche sur Internet qui compare une marque de commerce ou une dénomination sociale proposée avec des bases de données de marques de commerce ou de personnes morales existantes au Canada; elle n’a pas été en mesure de trouver une entreprise appartenant à quiconque s’appelant Robert Marcon, Robert V. Marcon ou Robert Victor Marcon, ni aucun site Web ayant un tel nom de domaine.

Contre-interrogatoire de M. Marcon

[34]           La transcription du contre‑interrogatoire a été produite en pièce jointe à l’affidavit de Shirley Sereney. Durant son contre‑interrogatoire, M. Marcon était sans aucun doute au courant de l’existence de la marque JACK DANIEL’S au moment de la production de la présente demande et du fait que la marque était disponible dans des restaurants et des bars au Canada avant 2003. Le contre‑interrogatoire confirme que M. Marcon n’a pas employé sa Marque et qu’aucun produit portant la Marque n’a été fabriqué. Monsieur Marcon n’avait pas non plus une recette précise en tête de salsa ou de sauce barbecue à vendre sous la Marque; il affirme qu’il n’était pas certain de fabriquer et de vendre les marchandises lui‑même ou de procéder par l’entremise d’un licencié.

Affidavit de Generosa Castiglione

[35]           Madame Castiglione est recherchiste en marques de commerce employée par les agents de l’Opposante. Elle a joint à son affidavit des copies des déclarations d’opposition et des affidavits des opposants respectifs (sans preuve) provenant des procédures d’opposition se rapportant à des demandes de M. Marcon, y compris les suivantes : BEEFEATER (demande no 1168023); CORONA (demande no 1168019); L’OREAL PARIS (demande no 1201383); CHANEL (demande no 1202435); EVIAN (demande no 1188155); et BAYER (demande no 1201366).

[36]           Je remarque à ce stade‑ci que des décisions ont été rendues dans toutes les procédures suivantes; les oppositions ont toutes été accueillies [voir Allied Domecq Spirits & Wine Ltd. c. Marcon (2009) 74 C.P.R. (4th) 311 (C.O.M.C.) (BEEFEATER); Cerverceria Modelo, S.A. c. Marcon (2009), 70 C.P.R. (4th) 355 (C.O.M.C.) (CORONA); L’Oréal c. Marcon, 85 C.P.R. (2010) (4th) 381 (C.O.M.C.) (L’OREAL PARIS); Chanel S. de R.L. c. Marcon (2010), 85 C.P.R. (4th) 399 (C.O.M.C.) (CHANEL); Société Anonyme des Eaux Minerales D’Evian c. Marcon, (2010) T.M.O.B. 83 (EVIAN); et Bayer Aktiengesellschaft c. Marcon (2011) T.M.O.B. 9 (BAYER)].

Affidavit de Robert White

[37]           Monsieur White est le vice-président directeur, Canada, de l’Audit Bureau of Circulations. Il fournit des données sur la diffusion des diverses publications qui, selon les éléments de preuve, comportent des annonces publicitaires pour le whisky JACK DANIEL’S. Ces données confirment la diffusion substantielle de ces publications au Canada.

[38]           Compte tenu de tous les éléments de preuve qui précèdent, je n’ai aucune hésitation à conclure que JACK DANIEL’S est une marque de commerce bien connue au Canada en liaison avec du whisky et que sa réputation substantielle transcende l’industrie de l’alcool, particulièrement en ce qui concerne la préparation alimentaire, les articles liés au barbecue, les sauces barbecue et ainsi de suite.

Preuve du Requérant

Affidavit de Robert Marcon

[39]           Monsieur Marcon est le propriétaire de la demande d’enregistrement de la marque en cause. Son affidavit semble viser principalement à établir que la Marque possède un caractère distinctif inhérent faible. Il fournit la définition des noms « Jack, John et Daniel » et une liste des inscriptions téléphoniques comportant les noms Daniel et Daniels comme nom de famille au Canada et aux États‑Unis. Je remarque que dans son contre‑interrogatoire, il reconnaît qu’aucune des personnes énumérées dans la liste des inscriptions téléphoniques n’est affiliée à lui ou liée à son choix du nom Jack Daniel relativement à sa demande et, qu’à sa connaissance, aucune personne dénommée Jack Daniel n’est liée à la demande.

[40]           Il fournit des imprimés provenant d’Internet de plusieurs sociétés ou entreprises qui emploient le nom « Jack Daniel » dans leur dénomination sociale ou nom commercial. Je remarque que ces entreprises semblent se rapporter à la sécurité publique et aux communications sans fil, aux services de sténographes judiciaires, à un concessionnaire d’automobiles et à un parc‑hôtel. Aucune preuve n’indique la portée des activités ou la réputation, le cas échéant, de ces entreprises au Canada.

[41]           Monsieur Marcon présente en preuve d’autres marques identiques appartenant à différents propriétaires en liaison avec différentes marchandises à l’appui de son argument selon lequel sa Marque et celle de l’Opposante devraient être autorisées à coexister puisqu’il n’y aurait aucune confusion entre du « whisky », de la « salsa » et de la « sauce barbecue », compte tenu de la différence dans la nature des marchandises et leurs voies de commercialisation, ou [traduction] « créneau commercial », comme il le dit. Je n’ai pas accordé beaucoup de poids à cette preuve puisque ces exemples ne sont manifestement pas pertinents compte tenu de l’absence de preuve entourant l’emploi desdites marques, ou la portée de l’emploi et leur caractère distinctif acquis et les possibilités de transcender la nature habituelle des marchandises et des voies de commercialisation. J’ai accordé le même traitement aux éléments de preuve semblables que le Requérant a présentés dans les procédures d’opposition susmentionnées; la question de la confusion entre la Marque et les marques de commerce de l’Opposante doit être tranchée selon les faits particuliers de l’affaire; chaque cas doit être jugé selon ses circonstances propres [voir les commentaires de la présidente Carreau dans la décision L’OREAL PARIS, précitée, au par. 19].

Le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d)

[42]           La date pertinente pour évaluer la probabilité de confusion à l’égard de ce motif est la date de ma décision [Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. et Registraire des marques de commerce, 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.)]. L’Opposante a fait valoir que la Marque n’est pas enregistrable parce qu’elle crée de la confusion avec ses marques de commerce telles qu’elles sont énoncées à l’annexe A; j’ai exercé le pouvoir discrétionnaire du registraire pour confirmer que ces marques sont en règle. Par conséquent, l’Opposante s’est acquittée de son fardeau initial à l’égard de l’al. 12(1)d) de la Loi.

[43]           Il incombe au Requérant d’établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a aucune probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et les marques de commerce de l’Opposante. L’argumentation la plus solide de l’Opposante se rapporte à ses marques de commerce qui consistent en les mots – JACK DANIEL’S – uniquement et, pour les besoins de l’analyse des motifs liés à la confusion, j’appellerai les marques de commerce de l’Opposante la marque de commerce JACK DANIEL’S tout simplement.

[44]           Le test applicable en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait d’un consommateur pressé. Le paragraphe 6(2) de la Loi indique que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

[45]           Lorsqu’il applique le test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles qui sont mentionnées au par. 6(5) de la Loi, soit : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de marchandises, services ou entreprises; d) la nature du commerce et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son ou dans les idées qu’elles suggèrent. Cette liste n’est pas exhaustive; tous les facteurs pertinents doivent être examinés, et tous n’ont pas nécessairement un poids équivalent.  Le poids qu’il convient d’accorder à chacun varie en fonction des circonstances [voir en général Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc. (2006), 49 C.P.R. (4th) 321 (C.S.C.); Kellogg Salada Canada Inc. c. Maximum Nutrition Ltd. (1992), 43 C.P.R. (3d) 349]. En appliquant le test en matière de confusion, j’ai estimé qu’il s’agissait d’une question de première impression et de souvenir imparfait. L’acheteur éventuel est décrit comme le consommateur occasionnel plutôt pressé (Mattel, par. 58). La question est celle de savoir si ce consommateur mythique ayant un souvenir imparfait de la première marque, au vu de la deuxième marque, aura comme première impression que les marchandises en liaison avec lesquelles la seconde marque est employée sont d’une quelconque façon associées aux marchandises de la première marque [United States Polo Assn. c. Polo Ralph Lauren Corp., [2000] 9. C.P.R. (4th) 51 (C.A.F.), p. 58].

[46]           Si je tiens compte de la preuve solide de la réputation de la marque de l’Opposante, du fait que les marques de commerce en cause sont identiques, que l’Opposante a établi que la marque de commerce JACK DANIEL’S est présente dans l’industrie de l’alimentation et que, en général, il y a un certain chevauchement dans les commerces entre le whisky, les spiritueux et les préparations alimentaires, l’analyse suivante de la confusion sera par conséquent brève et directe.

[47]           Manifestement, malgré tout argument qui pourrait être invoqué selon lequel la Marque est dénuée de caractère distinctif inhérent, la preuve démontre que la marque de commerce de l’Opposante est devenue bien connue au Canada et ainsi, on doit conclure qu’elle a acquis un caractère distinctif marqué. Toutefois, le Requérant n’a pas employé la Marque du tout. 

[48]           La marque de commerce de l’Opposante est en usage au Canada depuis 1970 et est employée en vertu d’une licence en liaison avec des sauces barbecue et d’autres produits depuis 1999. Différents types de publicité imprimée, télévisuelle et en ligne, ainsi que de la publicité pour la promotion d’événements, ont eu lieu au Canada; des millions de dollars ont été dépensés sur cette publicité et cette promotion. S’agissant de la nature des marchandises et du commerce, je suis convaincue que l’Opposante a établi un chevauchement entre l’industrie de la boisson alcoolisée et l’emploi d’alcool dans des sauces barbecue, des condiments et des préparations alimentaires. À cet égard, je souligne la preuve des restaurants au Canada qui servent de la nourriture avec des sauces JACK DANIEL’S et les nombreux livres de recettes JACK DANIEL’S et d’autres livres de recettes qui comportent du whisky et des spiritueux. Le lien entre la marque de commerce de l’Opposante et l’industrie de l’alimentation, et l’emploi de la marque de commerce sur des sauces barbecue et ainsi de suite, est clairement établi; le fait que sa demande pour la marque JACK DANIEL’S à employer en liaison avec des [traduction] « sauces barbecue, des marinades, des sauces pour bifteck et des sauces pour grillades » ait été produite après la date de production n’est pas pertinent. En l’absence de toute preuve démontrant si ou comment le Requérant a l’intention d’employer la Marque d’une manière qui peut différer de celle de l’Opposante, je ne vois rien qui puisse me permettre de conclure que les marchandises et les voies de commercialisation ne se chevaucheraient pas. En somme, étant donné que les marques en cause sont identiques dans la présentation, le son ou dans les idées qu’elles suggèrent, le Requérant n’a manifestement pas établi qu’il n’y a aucune probabilité raisonnable de confusion; en fait, il semblerait qu’il y a une forte probabilité de confusion, voire une certitude.

[49]           Ayant tenu compte de toutes les circonstances de l’espèce, j’accueille donc le motif d’opposition fondé sur l’al. 12(1)d).

Les motifs d’opposition fondés sur le paragraphe 16(3)

[50]           La date pertinente pour évaluer le droit à l’enregistrement suivant le par. 16(3) est la date de production de la demande en cause (29 décembre 2003). L’Opposante a fait valoir que le Requérant n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque suivant les al. 16(3)a), b) et c), au motif que la Marque crée de la confusion avec les marques de commerce déposées de l’Opposante, avec son nom commercial JACK DANIEL’S, lequel a été antérieurement employé et révélé au Canada par l’Opposante, et avec ses demandes d’enregistrement de marque de commerce produites avant la date de production de la demande en cause.

[51]           Pour que ces motifs d’opposition soient examinés, l’Opposante doit s’acquitter du fardeau de preuve initial en établissant que les marques de commerce (al. 16(3)a)) et le nom commercial (al. 16(3)c)) sur lesquels elle s’appuie étaient en usage et que les demandes (al. 16(3)b)) ont été produites avant la date de production de la demande en cause. L’Opposante doit également établir qu’elle n’avait pas abandonné sa marque à la date de l’annonce de la demande du Requérant (art. 16). Bien que je ne sois pas convaincue que l’Opposante a établi l’emploi de son nom commercial au Canada, la preuve démontre clairement qu’elle s’est acquittée du fardeau à l’égard des al. 16(3)a) et b). Pour rendre cette décision, je n’ai évidemment pas tenu compte des demandes de l’Opposante produites après la date de production du Requérant.

[52]           Comme la différence entre les dates pertinentes pour les motifs d’opposition fondés sur l’al. 12(1)d) et le par. 16(3) ne concerne pas mon analyse précédente selon laquelle j’ai conclu qu’il existe une probabilité de confusion suivant le par. 6(5) entre les marques en cause dans la présente affaire, les motifs d’opposition fondés sur les al. 16(3)a) et b) sont également accueillis. 

L’absence de caractère distinctif

[53]           Pour ce qui est du motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif en vertu de l’art. 2 de la Loi, l’Opposante doit avoir démontré qu’au moment de la production de l’opposition, la marque JACK DANIEL’S était devenue suffisamment connue pour enlever tout caractère distinctif à la marque visée par la demande [Motel 6, Inc. c. No. 6 Motel Ltd. (1981), 56 C.P.R. (2d) 44 (C.F. 1re inst.), p. 58; Re Andres Wines Ltd. and E. & J. Gallo Winery (1975), 25 C.P.R.(2d) 126 (C.A.F.), p. 130; Bojangles International, LLC c. Bojangles Café Ltd (2006), 48 C.P.R. (4th) 427)]. Comme je l’ai expliqué précédemment, l’Opposante s’est acquittée de ce fardeau également. Au vu de la preuve présentée et comme j’ai déjà tranché la question de la confusion (la différence dans les dates pertinentes ne concerne pas la présente analyse), le motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif est accueilli.

Alinéas 30e) et 30i)

[54]           S’agissant des motifs d’opposition fondés sur les al. 30e) et 30i), l’Opposante a déployé de nombreux efforts pour établir que le Requérant n’avait aucune intention d’employer la Marque et que ses activités constituent de la mauvaise foi; cependant, puisque l’Opposante a déjà eu gain de cause à l’égard des motifs de la confusion, l’existence de la mauvaise foi ne modifiera pas l’issue de la présente procédure. De plus, comme j’ai déjà statué sur les autres motifs d’opposition, il n’est pas nécessaire de rendre une décision concernant le présent motif.

Décision

[55]            Compte tenu de ce qui précède, et conformément au pouvoir qui m’est délégué en vertu du par. 63(3) de la Loi, je repousse la demande conformément au par. 38(8).

 

_____________________________

P. Heidi Sprung

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

Traduction certifiée conforme

Mylène Boudreau, B.A. en trad.

 

 


ANNEXE A

TABLEAU DES MARQUES DE COMMERCE APPARTENANT À L’OPPOSANTE JDPI

 

Marque de commerce

No d’enregistrement

Date d’enregistrement

Marchandises et services

JACK DANIEL’S

LMC276433

11 février 1983

MARCHANDISES :

(1) Whiskey.

(2) Souvenirs de distillerie, nommément porte‑clefs, boîtes métalliques, couteaux de poche, thermomètres, lampes électriques, cadrans, montres, flacons, jeux de cartes, housses pour complets, fourre‑tout, miroirs, coffres en bois, plateaux de service, verres à boire, pots, carafes, tasses, éponges, pichets, porte‑bouteilles, fanions, serviettes, casquettes, vestes, tabliers, chandails, ceintures, chemises, T‑shirts, survêtements, jeans, boucles de ceintures, tapis, jeux de poker, jetons de poker, jeux de tee et de serviettes, boîtes d’allumettes, allumettes et briquets.

(3) Boissons alcoolisées contenant de l’eau-de-vie distillée.

(4) Aimants décoratifs; couvercles pour plaques d’interrupteurs.

 

SERVICES :

(1) Quincaillerie et vente au détail par commande postale.

 

Employée au CANADA depuis au moins aussi tôt que 1970 en liaison avec les marchandises mentionnées sous (1).

Employée au CANADA depuis au moins aussi tôt que 1976 en liaison avec les marchandises mentionnées sous (2) et en liaison avec les services.

Employée au CANADA depuis au moins aussi tôt que le 14 mars 1996 en liaison avec les marchandises mentionnées sous (3).

JACK DANIEL’S

LMC712882

25 avril 2008

MARCHANDISES :

(1) Pièces de motocyclette

JACK DANIEL’S COUNTRY COCKTAILS

LMC520008

29 novembre 1999

MARCHANDISES :

(1) Boissons alcoolisées, nommément, cocktails alcoolisés prémélangés.

 

Employée au CANADA depuis au moins aussi tôt que le 13 mars 1996.

JACK DANIEL’S & DESSIN

JACK DANIEL'S & DESIGN

LMC475223

25 avril 1997

MARCHANDISES :

(1) Whisky.

 

Employée au Canada depuis au moins aussi tôt que 1970.

JACK DANIEL’S & DESSIN

JACK DANIEL'S & DESIGN

LMC460137

12 juillet 1996

MARCHANDISES :

(1) Vêtements, nommément casquettes, vestes, tabliers, chandails, ceintures, chemises, tee‑shirts, pulls d’entraînement, salopettes et jeans.

 

Employée au Canada depuis au moins aussitôt que 1976.

JACK DANIEL’S COUNTRY COCKTAILS & DESSIN

JACK DANIEL'S COUNTRY COCKTAILS & DESIGN

LMC483799

8 octobre 1997

MARCHANDISES :

(1) Boissons alcoolisées contenant de l’eau-de-vie distillée.

 

 

Marque de commerce

No d’enregistrement

Date d’enregistrement

Marchandises et services

JACK DANIEL’S OLD NO. 7 & DESSIN

JACK DANIEL'S OLD NO. 7 & Design

LMC643280

29 juin 2005

MARCHANDISES :

(1) Aimants décoratifs; couvercles pour plaques d’interrupteurs.

GENTLEMAN JACK & DESSIN (Étiquette 2007)

GENTLEMAN JACK & Design (Label 2007)

LMC711516

 9 avril 2008

MARCHANDISES :

(1) Boissons alcoolisées, nommément whisky.

 

GENTLEMAN JACK & DESSIN (Logo 2007)

GENTLEMAN JACK & Design (Logo 2007)

LMC708787

4 mars 2008

MARCHANDISES :

(1) Boissons alcoolisées distillées et spiritueux, nommément whiskey.

GENTLEMAN JACK & DESSIN

GENTLEMAN JACK & DESIGN

LMC484860

29 octobre 1997

MARCHANDISES :

(1) Boissons alcoolisées distillées.

 

Employée au CANADA depuis au moins aussi tôt que juin 1996.

GENTLEMAN JACK & DESSIN

GENTLEMAN JACK & DESIGN

LMC465172

25 octobre 1996

MARCHANDISES :

(1) Whisky.

 

JACK LIVES HERE

LMC561620

9 mai 2002

MARCHANDISES :

(1) Boissons alcoolisées, nommément eaux‑de‑vie distillées.

GENLEMAN JACK

LMC460523

26 juillet 1996

MARCHANDISES :

(1) Whisky.

 

JACK DANIEL’S & Cartouche Design (Logo noir)

JACK DANIEL'S & Cartouche Design (Black Logo)

LMC677031

16 novembre 2006

MARCHANDISES :

(1) Pièces de motocyclette.

JACK LIVES HERE

LMC562451

24 mai 2002

MARCHANDISES :

(1) Articles chaussants, nommément

chaussettes; coiffures, nommément casquettes, chapeaux,

bandeaux, chapeaux de paille, visières, bandanas; vêtements,

nommément tabliers, bracelets, tee-shirts, polos de golf,

chandails de baseball, hauts, débardeurs, pulls d’entraînement,

pantalons de survêtement, tenues de jogging, pantalons, vestes,

manteaux, ceintures, cravates, cravates et cache-cols, foulards,

bretelles, vestes de cuir, ensembles imperméables, gilets, parkas,

gants, cravates.

Marque de commerce

No de la demande

Date de la production

Marchandises et services

JACK DANIEL’S

1335194

13 février 2007

MARCHANDISES :

(1) Sauces barbecue, marinades, sauces pour bifteck, sauces pour grillades.

JACK DANIEL’S & Dessin (Étiquette noire 2001)

JACK DANIEL'S & Design (Black Label 2001)

1255930

29 avril 2005

MARCHANDISES :

(1) Boissons alcoolisées distillées, nommément whisky.

 

Employée au CANADA depuis au moins aussi tôt que le 1er janvier 2002.

GENTLEMAN JACK BOTTLE (avec l’étiquette de 2007)

GENTLEMAN JACK BOTTLE (with 2007 label)

1335196

13 février 2007

MARCHANDISES :

(1) Boissons alcoolisées, nommément whisky.

MISC. DESIGN - JACK DANIEL’S BOTTLE (avec l’étiquette de 2001)

MISC. DESIGN - JACK DANIEL'S BOTTLE (w/label 2001)

1299709

28 avril 2006

MARCHANDISES :

(1) Boissons alcoolisées, nommément whisky.

 

 

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