Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2014 COMC 129

Date de la décision : 2014-06-25

TRADUCTION

DANS L'AFFAIRE DE L'OPPOSITION produite par Maurices Incorporated à l'encontre de la demande d'enregistrement no 1,477,758 pour la marque de commerce MAURICE au nom de Dollarama L.P.

[1]               Maurices Incorporated s'est opposée à l'enregistrement de la marque de commerce MAURICE visée par la demande sous le no 1,477,758 en liaison avec une gamme de produits de rangement et d'accrochage de différentes sortes d'articles comme des vêtements, des accessoires de vêtement, des articles chaussants, des bijoux et de la literie.

[2]               La demande d'enregistrement a été produite par Dollarama L.P. (la Requérante) le 21 avril 2010. Elle est fondée sur un emploi projeté de la marque de commerce MAURICE (la Marque) au Canada.

[3]               L'opposition a été produite par Maurices Incorporated (l'Opposante) en vertu de l'article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi) par voie d'une déclaration d'opposition produite le 21 mars 2011.

[4]               Chaque partie a produit une preuve et un plaidoyer écrit, et était représentée à l'audience.

[5]               La question déterminante en l'espèce est de savoir si la Marque crée de la confusion avec la marque de commerce MAURICES de l'enregistrement no LMC776,138 de l’Opposante pour des cosmétiques, des bijoux, des sacs, des vêtements et des articles chaussants, de même que des services de magasin de détail spécialisé dans les vêtements et articles chaussants pour femmes. Les détails de l'enregistrement sont reproduits en annexe.

[6]               Pour les raisons qui suivent, je considère que l'opposition doit être rejetée.

Les motifs d'opposition

[7]               La déclaration d'opposition, comme produite à l'origine, invoque sept motifs d'opposition. Toutefois, au paragraphe 18 de son plaidoyer écrit, l'Opposante indique qu'elle retire quatre motifs d'opposition, nommément ceux fondés sur la non-conformité de la demande d'enregistrement avec les articles 30b), e) et i) de la Loi, et l'absence de droit à l'enregistrement en vertu de l'article 16(3)c) de la Loi. Ce dernier reposait sur une allégation de confusion entre la Marque et le nom commercial MAURICES de l'Opposante.

[8]               Les trois autres motifs d'opposition reposent sur des allégations de confusion entre la Marque et la marque de commerce MAURICES de l'Opposante. Les questions suivantes ont été soulevées :

1.   La Marque est-elle enregistrable?

2.   La Requérante était-elle la personne ayant droit à l'enregistrement de la Marque à la date de production de la demande?

3.   La Marque était-elle distinctive des marchandises de la Requérante à la date de production de la déclaration d'opposition?

La preuve au dossier

[9]               La preuve de l'Opposante est composée des affidavits de Brian Thun, vice-président et contrôleur de l'Opposante, souscrit le 18 novembre 2011, et de Giuseppe Anzuino, un parajuriste au sein du cabinet d’agents de marques de commerce représentant l’Opposante, souscrit le 24 novembre 2011. M. Thun et M. Anzuino n'ont pas été contre-interrogés.

[10]           Le 20 février 2013, l'Opposante a demandé l’autorisation de produire des preuves supplémentaires composées d'un deuxième affidavit de M. Thun et d'un affidavit de Thomas J  Karis. Comme la demande de l'Opposante était pendante lorsque l'Opposante a produit son plaidoyer écrit, ces affidavits font l'objet de références dans le plaidoyer écrit de l'Opposante. Toutefois, la demande de l'Opposante a été refusée par le registraire le 12 mars 2013; ce qui a été reconnu par l'Opposante lors de l'audience. Par conséquent, je n'ai pas tenu compte de ces deux affidavits ou de toute référence à ceux-ci dans le plaidoyer écrit de l'Opposante.

[11]           La preuve de la Requérante est composée des affidavits de Geoffrey Robillard, vice-président directeur de la division de l'importation de la Requérante, souscrit le 21 mars 2012, et de Celine Wong, une secrétaire juridique au sein du cabinet d'agents de marques de commerce de la Requérante, souscrit le 1er mars 2012. M. Robillard et Mme Wong n'ont pas été contre-interrogés.

Le fardeau ultime et le fardeau initial

[12]           C'est à la Requérante qu'incombe le fardeau ultime de démontrer que la demande d'enregistrement ne contrevient pas aux dispositions de la Loi invoquées dans la déclaration d'opposition. Cela signifie que, si une conclusion déterminante ne peut être tirée une fois que toute la preuve a été présentée, la question doit être tranchée en sa défaveur. Toutefois, l’Opposante doit, pour sa part, s'acquitter du fardeau initial de prouver les faits sur lesquels elle appuie ses allégations. Le fait qu'un fardeau de preuve initial soit imposé à l'Opposante signifie qu'un motif d'opposition ne sera pris en considération que s'il existe une preuve suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l'existence des faits allégués à l'appui de ce motif d'opposition [voir John Labatt Ltd c. Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst.); Dion Neckwear Ltd c. Christian Dior, SA et al. (2002), 20 CPR (4th) 155 (CAF); et Wrangler Apparel Corp c. The Timberland Company (2005), 41 CPR (4th) 223 (CF)].

L'examen des questions

[13]           J'examinerai tour à tour les questions soulevées pour les trois motifs d'opposition restants.

La Marque est-elle enregistrable?

[14]           Cette question découle du motif d'opposition alléguant que la Marque n'est pas enregistrable en vertu de l'article 12(1)d) de la Loi, parce qu'elle crée de la confusion avec la marque de commerce MAURICES de l'Opposante sous le no LMC776,138.

[15]           La date pertinente pour l'examen du motif d'opposition invoqué en vertu de l'article 12(1)d) est la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd et le registraire des marques de commerce (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)].

[16]           Ayant exercé le pouvoir discrétionnaire du registraire, je confirme que l'enregistrement nLMC776,138 est en règle. Par conséquent, l'Opposante s'est acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait. Il reste donc à déterminer si la Requérante s'est acquittée de son fardeau ultime d'établir, selon la prépondérance des probabilités, qu'il n'existe aucune probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et la marque de commerce déposée MAURICES de l'Opposante.

[17]           Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. L'article 6(2) de la Loi indique que l'emploi d'une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l'emploi des deux marques dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

[18]           Dans l'application du test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce, y compris celles précisément énumérées à l'article 6(5) de la Loi, nommément : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle chaque marque a été en usage; c) le genre de marchandises, services ou entreprises; d) la nature du commerce; et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation, le son ou les idées qu'elles suggèrent. Le poids qu'il convient d'accorder à chacun de ces facteurs n'est pas nécessairement le même. [Voir Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc., (2006), 49 CPR (4th) 321 (CSC); Veuve Clicquot Ponsardin c. Boutiques Cliquot Ltée et al, (2006), 49 CPR (4th) 401 (CSC); Masterpiece Inc. c. Alavida Lifestyles Inc. (2011), 92 CPR (4th) 361 (CSC)] pour un examen poussé des principes généraux régissant le test en matière de confusion.]

[19]           Dans la décision Masterpiece, précitée, la Cour suprême du Canada a déclaré que le degré de ressemblance entre les marques, bien qu'il s'agisse du dernier facteur énoncé à l’article 6(5) de la Loi, est souvent susceptible d'avoir la plus grande incidence sur l'examen de la confusion; la Cour a décidé de commencer son analyse en examinant ce facteur. Par conséquent, je passe à l'examen des facteurs énoncés à l'article 6(5), en commençant par le degré de ressemblance entre les marques.

Article 6(5)e) – le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation, le son ou les idées qu’elles suggèrent

[20]           La Requérante ne conteste pas que les marques de commerce sont essentiellement identiques et que ce facteur favorise clairement l'Opposante.

Article 6(5)a) – le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[21]           Je considère que la Marque possède un caractère distinctif inhérent faible puisqu'elle est formée du prénom MAURICE [voir, par analogie, le commentaire du juge Binnie dans Mattel, Inc, précité, para 3, quant au fait que le nom Barbie, une contraction commune du prénom Barbara, ne possède pas en soi de caractère distinctif inhérent]. J'ajouterais que la faiblesse de la Marque en tant que prénom a été reconnue par la Requérante lors de l'audience.

[22]           Lors de l'audience, l'Opposante a reconnu que la marque de commerce MAURICES, bien que se terminant par la lettre « s », pourrait être perçue comme le prénom Maurice.

[23]           En fin de compte, je considère que les marques de commerce en question ne possèdent pas de caractère distinctif inhérent fort.

[24]           Une marque de commerce peut acquérir un caractère distinctif en devenant connue au Canada par l'emploi ou la promotion. Par conséquent, j'examinerai la preuve au dossier concernant la promotion et l'emploi des marques de commerce des parties, en commençant par la preuve de l'Opposante.

L'affidavit de Brian Thun

[25]           Pour commencer, je remarque que l'Opposante a reconnu lors de l'audience que la preuve produite par l'affidavit de M. Thun n'établit pas l'emploi de la marque de commerce MAURICES au Canada en liaison avec ses marchandises et services. L'Opposante fait valoir, toutefois, que sa preuve appuie la conclusion que la marque de commerce MAURICES est devenue bien connue au Canada en raison de son emploi aux États-Unis et des campagnes de publicité à grande échelle au Canada.

[26]           Le témoignage de M. Thun à propos des affaires de l'Opposante peut être résumé comme suit [para 5 et 11 de l'affidavit] :

      l'Opposante est une entreprise basée aux États-Unis qui œuvre dans l'industrie des vêtements et des accessoires de vêtement depuis environ 1931. Elle a commencé comme une petite boutique de vêtements pour femmes à Duluth au Minnesota et s’est développée pour atteindre les 783 magasins de vêtements pour femmes dans 44 États sur l'ensemble des États-Unis;

      en plus des vêtements, l'Opposante vend une gamme de marchandises y compris des cosmétiques, des bijoux, des sacs et des articles chaussants sous sa marque maison MAURICES;

      l'Opposante exploite un site Web actif au www.maurices.com depuis au moins 2004. Le site Web propose une boutique en ligne, qui permet aux consommateurs de commander en ligne depuis au moins aussi tôt qu’octobre 2009 [pièce BHT-1]. Le site Web de l'Opposante aurait été visité par 180 991 Canadiens entre le 22 septembre 2009 et le 30 septembre 2011 [pièce BHT-2];

      l'Opposante compte plus de 200 000 suiveurs sur le média social Facebook [pièce BHT-3];

      l'Opposante a constitué une entreprise en Ontario sous le nom de Maurices Canada Stores Limited le 26 octobre 2010. La date de la constitution est le seul renseignement fourni par le déposant au sujet de cette entreprise.

[27]           M. Thun fournit un résumé du chiffre d'affaires brut de l'Opposante [traduction] « (y compris les ventes faites à des Canadiens) des marchandises arborant la marque de commerce MAURICES » pour chaque année de 2002 à 2011. Ces ventes vont de 354 562 028 $ US à 776 485 373 $ US [para 17 de l'affidavit]. Selon les dossiers des relations clients de l'Opposante, environ 14 000 Canadiens auraient magasiné dans les magasins de l'Opposante; ce chiffre ne comprend que les Canadiens ayant accepté de fournir leurs coordonnées [para 19 de l'affidavit].

[28]           M. Thun fournit également un résumé des frais de publicité pour la promotion en Amérique du Nord des marchandises et services en liaison avec la marque de commerce MAURICES. Ces frais [traduction] « comprennent les frais de publipostage, de séances photos, de la signalisation en magasin, de l'inauguration de magasins, des services de médias sociaux, des services professionnels de GRC et de sous-traitance du système, de la paie et des avantages sociaux selon la région, des activités spéciales (concours en magasin), des déplacements, de la publicité dans des magazines, etc. » Ces frais pour chaque année de 2002 à 2011 vont de 3 715 544 $ US à 15 983 401 $ US [para 25 de l'affidavit].

[29]           Finalement, la preuve documentaire produite par M. Thun à l'appui de son témoignage concernant l'emploi et la promotion de la marque de commerce MAURICES de l'Opposante comprend :

      des photographies de supports à pantoufles et à ceintures arborant la marque de commerce MAURICES [pièce BHT-7]. Ces supports sont offerts aux consommateurs comme partie intégrante de leur achat [para 16 de l'affidavit];

      des copies de photographies de magasins de l'Opposante qui illustrent l'emploi de la marque de commerce MAURICES dans la signalisation extérieure [pièce BHT-8];

      des exemples d'étiquettes volantes qui apparaissent sur les marchandises vendues dans les magasins de l'Opposante ou y sont attachées [pièce BHT-9];

      des copies de photographies montrant l'emploi typique de la marque de commerce MAURICES sur différentes marchandises vendues par l'Opposante [pièce BHT-10];

      des photographies d’un article de rangement pour bijoux vendu par l'Opposante [pièce BHT-11];

      des extraits de magazines fournissant des [traduction] « exemples typiques de magazines distribués au Canada qui ont fait mention » de la marque de commerce et des marchandises de l'Opposante, nommément : Cosmopolitan, mai 2009; O The Oprah Magazine, janvier 2010; Glamour, avril 2010; Seventeen, août 2011; All you, juin 2011; et Redbook, juillet 2011 [pièce BHT-12];

      une copie d'une publicité dans l'édition de septembre 2010 du magazine InStyle [pièce BHT-13];

      une liste de publications dans lesquelles des [traduction] « brochures » concernant les marchandises et services offerts sous la marque de commerce de l'Opposante ont été insérées [pièce BHT-14].

[30]           Pour les raisons qui suivent, je ne suis pas d'accord avec l'Opposante que sa preuve démontre que la marque de commerce MAURICES est bien connue au Canada.

[31]           Je n'accorde aucun poids à la preuve concernant la présence de l'Opposante sur le média social Facebook. Il suffit de dire que nous ne connaissons pas le nombre d’« abonnés » du Canada.

[32]           Dans la mesure où le site Web de l'Opposante est concerné, je souligne que l'Opposante n'a pas contesté ne pas avoir produit de preuve d'achat de marchandises par des Canadiens par l'entremise de sa boutique en ligne proposée sur son site Web depuis octobre 2009. Également, M. Thun ne fait aucune déclaration claire que la marque de commerce MAURICES illustrée dans le coin supérieur gauche des copies papier est conséquente avec la façon dont la marque de commerce aurait été affichée sur le site Web de l'Opposante depuis 2004. Quoi qu'il en soit, il n'y a aucune preuve que des Canadiens ont visité le site Web avant le 22 septembre 2009. Finalement, j'accorde peu de poids à la déclaration de M. Thun que le site Web aurait été visité par 180 991 Canadiens entre le 22 septembre 2009 et le 30 septembre 2011. Outre le fait que la pièce BHT-2, qui représente le fondement de la déclaration de M. Thun, semble provenir d'un tiers, il n'y a aucune indication qu'il s'agisse de 180 991 visiteurs uniques canadiens. Autrement dit, le nombre fourni peut comprendre des utilisateurs Internet situés au Canada qui ont « visité » le site Web à plusieurs reprises.

[33]           J'aimerais également souligner que je peux voir une description sous chaque illustration d'article de la boutique en ligne, mais je ne peux pas lire ces descriptions en raison de la qualité de la reproduction. Par conséquent, je ne peux pas établir si tous les articles sont uniquement en liaison avec la marque de commerce MAURICES ou s'ils sont liés à d'autres marques de commerce.

[34]           Examinant maintenant le chiffre d'affaires brut, il faut souligner qu'il n'est pas ventilé par marchandises ou, tout au moins, par catégorie de marchandises, comme les cosmétiques, les bijoux, les sacs, les vêtements et les articles chaussants. De plus, il n'y a aucune indication à savoir quelle partie du chiffre d'affaires des marchandises arborant la marque de commerce MAURICES est attribuable à des Canadiens chaque année entre 2002 et 2011. Par conséquent, il ne me reste que la preuve de M. Thun concernant les Canadiens qui ont magasiné dans les magasins de l'Opposante aux États-Unis.

[35]           Nous ignorons la période couverte par les données de l'Opposante censées démontrer qu'environ 14 000 Canadiens ont magasiné dans les magasins de l'Opposante. Également, nous ignorons comment ce chiffre a été obtenu. Reflète-t-il 14 000 Canadiens différents? Est-ce possible que le chiffre reflète des acheteurs canadiens réguliers? Même si j'accepte qu'un nombre approximatif minimal de Canadiens différents aient magasiné dans les magasins de l’Opposante aux États-Unis au fil des ans jusqu'à la date de l'affidavit de M. Thun, je ne suis pas prête à conclure que ce chiffre en lui-même est suffisant pour démontrer que la marque de commerce MAURICES est devenue bien connue au Canada en liaison avec les marchandises et services de l'Opposante.

[36]           Quoique les frais de publicité pour l'Amérique du Nord soient importants, cette preuve comporte trop de lacunes dans l'ensemble pour tirer une conclusion favorable à l'Opposante. Tout d'abord, avec égards pour l'Opposante, selon moi, les frais de publicité sont déformés par l'inclusion de dépenses qui ne peuvent pas raisonnablement être attribuées à la publicité, dont [traduction] « la paie et les avantages sociaux selon la région » et « les déplacements ». De plus, nous ignorons quelle partie des « frais de publicité » comprend la publicité au Canada, qu'elle soit directe ou induite. Quoi qu'il en soit, compte tenu de la preuve au dossier, je dois conclure que les frais [traduction] « de signalisation en magasin », « d'inauguration de magasins » et « d'activités spéciales (concours en magasin) » ne s'appliqueraient pas au Canada. Finalement, puisque l'Opposante n'a fourni aucune ventilation des frais pour les différentes sortes de publicités, nous ignorons le montant dépensé en publicité pertinente, comme la publicité dans des magazines distribués au Canada. Cela m'amène aux pièces BHT-12 à BHT-14 de l'affidavit de M. Thun.

[37]           Je remarque que je peux admettre d'office le fait que certains magazines ont une certaine circulation au Canada [voir, par analogie, Timberland Co c. Wrangler Apparel Corp (2004), 38 CPR (4th) 178 (COMC)]. Même si j'accepte d'admettre d’office la circulation au Canada des magazines Cosmopolitan, O The Oprah Magazine, Glamour, Seventeen et InStyle, je considère la preuve insuffisante pour démontrer la réputation de la marque de commerce MAURICES au Canada. Il suffit de dire que nous ne disposons d'aucune preuve de la quantité ou de la valeur des publicités faites dans ces magazines au fil des ans; nous ne disposons que d'un exemple de publicité pour chaque magazine [pièces BHT-12 et BHT-13]. J'ajouterai que les publicités de Cosmopolitan et O The Oprah Magazine font mention de maurices.com et non de la marque de commerce. Également, la publicité dans Cosmopolitan est pour de la lunetterie de marque FANTASEYES. Finalement, en plus de l'absence d'exemples de « brochures » insérées dans les publications énumérées en pièce BHT-14, il n'y a aucune preuve que ces publications ont été diffusées au Canada ou sont accessibles aux Canadiens.

[38]           Même si j'accepte que la preuve de l'Opposante puisse être suffisante pour démontrer que la marque de commerce MAURICES est devenue connue au Canada dans une certaine mesure, je considère que cela est insuffisant pour démontrer que la marque de commerce est devenue bien connue. Quoi qu'il en soit, compte tenu de la preuve de la Requérante, que j'examinerai ci-après, je ne considère absolument pas que la preuve de l'Opposante démontre que la marque de commerce MAURICES est devenue plus connue que la Marque.

L'affidavit de Goeffrey Robillard

[39]           Le témoignage de M. Robillard à propos des affaires de la Requérante et l'emploi de la Marque peut être résumé comme suit [para 3 à 5 et 8 à 10 de l'affidavit] :

      la Requérante exploite des magasins à prix réduit à travers le Canada sous le nom commercial Dollarama;

      la Requérante est le plus grand détaillant au Canada d'articles à 2 $ ou moins. Une liste de tous les magasins Dollarama au Canada est jointe en pièce 1;

      à la fin janvier 2010, la Requérante a adopté la Marque pour désigner une gamme de produits de rangement à vendre dans ses magasins de détail;

      depuis la production de la demande d'enregistrement, la Requérante a commencé à vendre les produits de rangement en liaison avec la Marque dans tous ses magasins de détail Dollarama à travers le Canada, la Marque apparaît sur l'emballage ou sur les affichettes de chaque produit de rangement.

      M. Robillard produit des exemples de chacun des produits de rangement vendus en liaison avec la Marque, nommément : [traduction] « cintres en métal; cintres en bois; crochets de suspension pour porte; cintres à pantalons; articles de rangement; boîte à chaussure en plastique; sacs de rangement à glisser sous le lit; supports à crochets pour porte; grands sacs pour couverture; sacs pour aspirateur suspendus; crochets doubles à usages multiples; crochet mural en métal; crochet à manteaux tournant; pinces à crochet à usages multiples; cintres intelligents; cintres en plastique; cintres pour presse à pantalons; cintres à pantalons de velours et anneau porte-serviette » [pièces 2 à 20]. Je remarque que, dans tous les cas, l'exemple montre la Marque affichée sur l'emballage ou sur une affichette et qu'

      environ 2 667 477 unités de produits de rangement en liaison avec la Marque ont été vendues dans les magasins de détail Dollarama entre le 22 avril 2010 et le 29 février 2012.

[40]           En fin de compte, je suis d'accord avec la Requérante que sa preuve permet de conclure que la Marque est devenue connue au Canada dans une plus grande mesure que la marque de commerce de l'Opposante.

L'examen des facteurs énoncés à l'article 6(5)a)

[41]           J'estime le caractère distinctif inhérent des marques de commerce des parties au même degré; aucune des marques de commerce n'est particulièrement forte. Toutefois, la preuve m'amène à conclure que la Marque est connue au Canada dans une plus grande mesure que la marque de commerce de l'Opposante. Par conséquent, l'examen global du facteur énoncé à l'article 6(5)a), lequel concerne à la fois le caractère distinctif inhérent et le caractère distinctif acquis des marques de commerce des parties, favorise la Requérante.

Article 6(5)b) – la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

[42]           L'enregistrement de l'Opposante a été accordé en fonction de l'enregistrement et de l'emploi de la marque de commerce MAURICES aux États-Unis et il n'y a aucune preuve d'emploi de la marque de commerce au Canada. Par contre, la preuve de la Requérante démontre l'emploi de la Marque au Canada après la production de la demande d'enregistrement.

[43]           Par conséquent, la période pendant laquelle la Marque a été en usage au Canada ne favorise pas la Requérante.

Article 6(5)c) – le genre de marchandises, services ou entreprises

Article 6(5)d) – la nature du commerce

[44]           Ce sont les états déclaratifs des marchandises de la demande d'enregistrement de la Marque et des marchandises et services de l'enregistrement de l'Opposante qui doivent être considérés pour l'examen des facteurs énoncés aux articles 6(5)c) et d) en vertu du motif d'opposition fondé sur l'article 12(1)d) [voir Mr Submarine Ltd c. Amandista Investments Ltd (1987), 19 CPR (3d) 3 (CAF); et Miss Universe, Inc c. Bohna (1994), 58 CPR (3d) 381 (CAF)]. Cependant, l'examen de ces états déclaratifs doit être effectué dans l'optique de déterminer le genre probable d'entreprise ou la nature du commerce envisagé par les parties, et non l'ensemble des commerces que le libellé est susceptible d'englober. Ceci a récemment été réitéré par la Cour fédérale dans l'arrêt Bridgestone Corporation c. Campagnolo SRL, 2014 CF 37 alors que la Cour a déclaré ce qui suit aux paragraphes 55 et 56 :

[traduction]
[55]  D'autres précisions ont été données par la Cour fédérale dans l'arrêt Movenpick Holdings AG c. Exxon Mobil Corp, 2013 CAF 6, au para 6, où la Cour a cité avec approbation les commentaires du registraire : « L'état déclaratif des services des parties respectives doit être examiné avec l'objectif de déterminer le genre d'entreprise ou de commerce que les parties ont vraisemblablement eu l'intention d'établir plutôt de répertorier tous les commerces que le libellé pourrait englober (voirMcDonald’s Corp c. Coffee Hut Stores Ltd. (1994), 55 CPR (3d) 463 (CF 1re inst). »

[56]  Je considère que le registraire a suivi les directives de la Cour d'appel en tenant compte de toutes les voies commerciales prévisibles et habituelles par lesquelles les produits pourraient être vendus plutôt que toutes les voies hypothétiques.

[45]           L'état déclaratif des marchandises de la demande d'enregistrement de la Marque, tel qu'il a été modifié le 15 septembre 2010, est libellé comme suit :

[traduction]
Supports à crochets pour porte, crochets avec pinces, étagères de rangement, paniers à linge à suspendre, crochets autocollants et à visser, range-tiroirs, crochets pour chaussettes, supports à cravates et à ceintures, sacs de rangement à glisser sous le lit, crochets de suspension pour porte, cintres, cintres pour presse à pantalons et à chemises, crochets pour vêtements, sacs pour couvertures, supports pour dessous d'étagère, cintres pliables, cintres en métal, cintres à épaulettes, supports pour crochets, étagères en treillis, cintres en cèdre, cintres en bois, article de rangement, article de rangement en mailles suspendu, support mural avec crochets, porte-chaussures, contenants de rangement, articles de rangement pour bijoux, portemanteaux.

[46]           L'enregistrement no LMC776,138 de l'Opposante couvre les cosmétiques, les bijoux, les sacs, les vêtements et les articles chaussants, et les services de magasins de détail spécialisés dans les vêtements et les articles chaussants pour femmes [voir l'annexe de ma décision].

[47]           Il convient de souligner que les parties ont consacré une bonne partie de leurs observations à traiter des facteurs énoncés aux articles 6(5)c) et d), particulièrement lors de l'audience, à examiner la preuve au dossier et la jurisprudence appuyant leurs cas respectifs.

[48]           Aux fins de l’examen des facteurs énoncés aux articles 6(5)c) et d), je résumerai tour à tour les observations de l'Opposante, l'affidavit de M. Anzuino, les observations de la Requérante et l'affidavit de Mme Wong. Je conclurai par une discussion de ces facteurs.

Les observations de l'Opposante

[49]           Bien qu’elles soient longues, je considère que la meilleure façon de résumer les observations de l'Opposante est de reproduire les extraits suivants de son plaidoyer écrit :

[traduction]
90.   Les marchandises respectives des parties sont intimement liées par leur genre et les marchandises respectives des parties arborant les marques de commerce MAURICES et MAURICE seront sans aucun doute perçues comme provenant de la même source. À tout le moins, dans l'esprit du consommateur, c'est certainement un prolongement naturel pour un détaillant de vêtements et d'articles chaussants d'offrir des produits de rangement pour les vêtements et les articles chaussants comme ceux visés par la demande d'enregistrement de la Requérante;

91.       Le consommateur pertinent s'attendrait à retrouver les marchandises respectives des parties dans les mêmes magasins, c'est-à-dire des magasins offrant des vêtements et des articles chaussants spécialisés, et la preuve des deux parties démontre que c'est le cas;

92.       Plus particulièrement, la preuve de l'Opposante démontre clairement qu'il est courant pour des détaillants exploitant des magasins du même genre que les magasins de détail de l'Opposante d'offrir une gamme de marchandises, y compris des articles de ménage comme des articles de rangement, en plus de vêtements.

[...]

99.       Dans [la décision ERA Display Co Ltd c. Global Upholstery Co Ltd (1994), 58 CPR (3d) 429], la Commission des oppositions des marques de commerce était d'avis qu'il serait raisonnable de présumer qu'un fabriquant de cintres, de présentoirs, de tablettes et autres aurait été impliqué dans l'approvisionnement d'articles comme des tables et des chaises à employer dans les aires de vente des vêtements.

100.     De même, dans les procédures d'oppositions en l'espèce, l'Opposante fait valoir qu'un consommateur canadien présumerait naturellement qu'un fabriquant et détaillant de vêtements, d'articles chaussants et d'accessoires connexes serait impliqué dans l'approvisionnement de cintres pour vêtements et de produits de rangement pour la vente, qui sont de la même catégorie générale et sont en fait des accessoires connexes des vêtements et des articles chaussants.

[50]           Je remarque au passage que l'Opposante, dans son plaidoyer écrit, a déclaré ne pas comprendre la pertinence et l'utilité de l'affidavit de Mme Wong, dont je discuterai plus tard. L'Opposante a déclaré qu'elle [traduction] « se pencherait davantage sur [l'affidavit], si nécessaire, lors de l'audience après avoir pris connaissance du plaidoyer écrit de la Requérante au sujet de cet affidavit » [para 56 du plaidoyer écrit]. Toutefois, l'Opposante n'a pas commenté l'affidavit de Mme Wong lors de l'audience.

[51]           À l'appui de ses observations, l'Opposante se fonde sur :

      les déclarations de M. Thun qu'il est courant pour des magasins de détail du même genre que les magasins de l'Opposante d'offrir une gamme de marchandises, en plus des vêtements, et que bien des magasins de vêtements et grands magasins au Canada offrent dans leurs magasins, en plus des vêtements, des meubles pour la maison et des articles de ménage, y compris les marchandises visées par la demande d'enregistrement de la Marque [para 15 de l'affidavit de M. Thun]. À l'appui de ses déclarations, M. Thun a produit des extraits des sites Web de magasins des vêtements Forever 21 et Urban Outfitters et du grand magasin La Baie [pièce BHT-6]. Lors de l'audience, l'Opposante a reconnu que tous les prix indiqués sur le site Web d'Urban Outfitters sont en livres sterling (£), mais l'Opposante a souligné que le dernier extrait énumère des magasins de Québec et de Montréal;

      le fait que tous les propriétaires de magasins de vêtements utilisent des cintres et des présentoirs pour suspendre et présenter les vêtements et les articles chaussants en vente dans leurs magasins;

      les observations de M. Robillard que des articles chaussants et des vêtements sont vendus dans les magasins de détail de la Requérante, en plus des produits de rangement [para 11 et 12 de l'affidavit de M. Robillard]. L'Opposante fait valoir que les [traduction] « sandales » et les « pantoufles » énumérées par M. Robillard parmi les articles chaussants vendus dans les magasins de détail de la Requérante sont couvertes par son enregistrement comme la majorité des articles énumérés par M. Robillard comme des vêtements vendus dans les magasins de détail de la Requérante;

      l'affidavit de Giuseppe Anzuino, dont je discuterai plus bas. L'Opposante fait valoir que cet affidavit démontre qu'il est courant qu'au moins une partie des marchandises de l'Opposante et une partie des marchandises de la Requérante se recoupent dans les mêmes enregistrements et demandes d'enregistrement, confirmant que les voies commerciales des parties se recoupent sur le marché.

L'affidavit de Giuseppe Anzuino

[52]           M. Anzuino produit comme preuve les résultats de ses recherches dans le registre des marques de commerce, qu'il a faites avec le moteur de recherche Onscope.

[53]           M. Anzuino a fait une première recherche (recherche A) pour trouver des demandes d'enregistrement de marques de commerce ou des enregistrements de marques de commerce actifs qui comprennent dans l'état déclaratif des marchandises au moins un des termes suivants qui, je souligne, sont des termes qui se retrouvent dans l'état déclaratif de la demande d'enregistrement de la Marque [para 4 de l'affidavit].

Crochet; étagères; cintres; rangement; étagères; cintre; paniers [et] linge; crochets; tiroirs; séparateurs; organisateurs; cintres; rangement; sacs; tablette; cintre [et] épaulettes; support; mur; support; porte [et] chaussures; rangement [et] contenants; bijoux [et] rangements.

[54]           La recherche a donné 804 entrées [para 5 et pièce GA1 de l'affidavit].

[55]           M. Anzuino a fait une deuxième recherche (recherche B) pour trouver des demandes d'enregistrement de marques de commerce ou des enregistrements de marques de commerce actifs qui comprennent dans l'état déclaratif des marchandises au moins un des termes ou une combinaison des termes qui se retrouvent dans l'état déclaratif des marchandises de l'enregistrement de l'Opposante [para 6 de l'affidavit]. La recherche a donné 36 009 entrées [para 7 et pièce GA1 de l'affidavit].

[56]           Combinant les résultats des deux recherches, M. Anzuino a trouvé 568 entrées de demandes d'enregistrement de marques de commerce ou d'enregistrements de marques de commerce actifs qui comprennent dans l'état déclaratif des marchandises au moins un des termes de la recherche A et au moins un des termes de la recherche B (recherche C) [para 8 et 9 et pièce GA1 de l'affidavit]. M. Anzuino a produit un CD comprenant un résumé du rapport des 568 entrées de la recherche C, en plus d'extraits du registre pour chaque demande d'enregistrement de marque de commerce et enregistrement de marque de commerce correspondant [para 10 et pièce GA2 de l'affidavit].

Les observations de la Requérante

[57]           La Requérante soutient qu'il n'y a pas le moindre recoupement entre le genre des marchandises et services respectifs des parties. Elle soutient également que la nature des commerces respectifs des parties est assez différente.

[58]           Venant à peine de discuter de l'affidavit de M. Anzuino, je remarque tout d'abord que la Requérante soutient que très peu d’importance, s'il en est, devrait être accordée à l'affidavit, comme preuve de recoupement de la nature des commerces des parties.

[59]           La Requérant fait essentiellement valoir que les résultats de la recherche C ne reflètent pas précisément l'existence de demandes d'enregistrement et d'enregistrements de marque de commerce comprenant au moins une des marchandises visées par la demande d'enregistrement de la Marque et au moins une des marchandises qui se trouvent dans l'enregistrement de la marque de commerce de l'Opposante parce que le nombre d'entrées trouvées est gonflé par la façon dont M. Anzuino a procédé aux recherches A et B. À cet égard, la Requérante souligne que :

      en menant la recherche A, dans bien des cas, le déposant a employé des termes de l'état déclaratif des marchandises visées par la demande d'enregistrement de la Marque plutôt que d'employer la formulation exacte des marchandises. Par exemple, le déposant a employé le terme « crochet » plutôt que les marchandises supports à crochets pour porte, crochets à visser, supports pour crochets et support mural avec crochets;

      en menant la recherche B, parfois le déposant a employé des termes de l'état déclaratif des marchandises couvertes par l'enregistrement de la marque de commerce de l'Opposante, plutôt que d'employer la description exacte des marchandises. Par exemple, le déposant a employé le terme « gels » plutôt que les marchandises [traduction] « traitements pour les yeux sous forme de crèmes, de gels et de lotions ».

[60]           Autrement, la Requérante a fait valoir lors de l'audience que les demandes d'enregistrement de marques de commerce de la recherche C ne devraient pas être prises en compte parce que nous ignorons quelles marchandises se retrouveront dans les enregistrements accordés. La Requérante a également examiné une douzaine d'enregistrements pour démontrer que ce ne sont pas tous les enregistrements trouvés par la recherche C qui couvrent au moins une des marchandises de la Requérante et au moins une des marchandises enregistrées de l'Opposante.

[61]           Dans le même ordre d'idée, la Requérante fait valoir que les extraits des sites Wen de Forever 21, Urban Outfitters et La Baie n'étayent pas l'affirmation de l'Opposante qu'il existe un recoupement dans la nature des commerces des parties. Il suffit de dire que la Requérante, dans son plaidoyer écrit, a examiné en détail les extraits des sites Web, soulignant que ce ne sont pas toutes les marchandises présentées qui sont couvertes par sa demande d'enregistrement de marque de commerce ou par l'enregistrement de marque de commerce de l'Opposante. La Requérante a également souligné que certaines des marchandises présentées sur les sites Web sont en liaison avec des marques de commerce de tiers, et non pas avec les marques de commerce des détaillants Forever 21, Urban Outfitters ou La Baie.

[62]           Retournant aux observations générales de la Requérante, je les résumerai comme suit :

         la demande d'enregistrement de la Marque n'est en liaison avec aucune des marchandises ni aucun des services enregistrés de l'Opposante;

         compte tenu des différences importantes entre les marchandises des parties, il n’est pas raisonnable pour l'Opposante de faire valoir qu'elles entrent dans la même catégorie générale, pas plus qu'il n'était raisonnable pour l'Opposante de faire valoir lors de l'audience que les « sacs » couverts par son enregistrement de marque de commerce, c'est-à-dire [traduction] des « sacs-pochettes, sacs à bandoulière et fourre-tout » correspondent à des produits de rangement; il n'y a clairement aucun point commun entre les sacs couverts par l'enregistrement de marque de commerce de l'Opposante et les marchandises [traduction] « sacs de rangement à glisser sous le lit, grands sacs pour couverture et sacs pour aspirateur suspendus » de la Requérante [pièces 8, 10 et 11 de l'affidavit de M. Robillard];

         l'Opposante cherche de façon inappropriée à obtenir le monopole de la marque de commerce MAURICES pour tout ce qui peut avoir à faire avec ses vêtements;

      la Requérante exploite des magasins à prix réduits où elle vend, entre autres, des produits de rangement en liaison avec la Marque. Quoique des vêtements et des articles chaussants sont disponibles dans les magasins de la Requérante, ces marchandises se trouvent dans des allées des magasins différentes des allées où les produits de rangement en liaison avec la Marque sont vendus [para 14 de l'affidavit de M. Robillard].

      les femmes ne visitent pas des magasins à prix réduits comme ceux de la Requérante pour trouver des vêtements à la mode;

      l'Opposante exploite des magasins de détail spécialisés dans les vêtements et les articles chaussants pour femmes, où elle vend des cosmétiques, des produits pour les lèvres, des bijoux, des vêtements et des articles chaussants en liaison avec la marque de commerce MAURICES;

      l'affidavit de Mme Wong démontre que des produits de rangement du genre de ceux couverts par la demande d'enregistrement de la Marque ne risquent pas d'être vendus dans des magasins de vêtements pour femmes.

L'affidavit de Celine Wong

[63]           Mme Wong produit en preuve les résultats de plusieurs recherches qu'elle a faites sur les directives du conseiller juridique de la Requérante.

[64]           Mme Wong a fait des recherches sur la Base de données sur les marques de commerce canadiennes pour trouver toute marque de commerce déposée ou demande d'enregistrement de marque de commerce pendante qui couvre au moins une des marchandises couvertes par la demande d'enregistrement de la Marque et un des services suivants : magasins de vêtements pour femmes; magasins de détail de vêtements pour femmes; magasins d'articles chaussants pour femmes; magasins de détail d'articles chaussants pour femmes; magasins d'habillement féminin; magasins de mode pour femmes [para 2 et 220 de l'affidavit].

[65]           Selon les pièces 2 à 286 de l'affidavit, toutes les recherches faites par Mme Wong en combinant chacune des marchandises avec chacun des services n'a donné aucun résultat [para 5 à 219 et 222 à 291 de l'affidavit].

[66]           Mme Wong a également fait différentes recherches en ligne pour identifier le propriétaire de marques de commerce spécifiques pour des marchandises spécifiques [para 292 à 306, pièces 287 à 297 de l'affidavit]. Il suffit de dire que la Requérante se fonde sur les résultats de ces recherches pour appuyer ses observations, dont j'ai déjà discutées, que certaines des marchandises présentées dans les extraits des sites Web de Forever 21, Urban Outfitters et La Baie sont en liaison avec des marques de commerce de tiers.

La discussion

[67]           Je remarque en commençant que les décisions invoquées par l'Opposante lors de l'audience sont pertinentes dans la mesure où elles impliquent des procédures d'opposition et abordent les principes qui gouvernent le test en matière de confusion. Toutefois, c'est un principe de droit bien connu que chaque cas doit être tranché en fonction des circonstances qui lui sont propres. Par exemple, les procédures en l'espèce se distinguent de la décision ERA Display Co Ltd, précitée, ne serait-ce que par le fait que le requérant n'a pas produit de preuve dans ce cas; ce dont le registraire a clairement tenu compte [voir la page 432].

[68]           Malgré les observations de l'Opposante, je ne suis pas prête à conclure que les marchandises en liaison avec la Marque et ses marchandises enregistrées sont « de la même catégorie générale ». Cela étant dit, je suis consciente que l'article 6(2) de la Loi déclare qu'une marque de commerce peut créer de la confusion avec une autre marque de commerce « que les marchandises ou les services soient ou non de la même catégorie générale ».

[69]           J'accepte de toute évidence que les cintres et les présentoirs soient employés pour suspendre et présenter les vêtements et les articles chaussants en vente dans les magasins de détail. Je reconnais également que l'Opposante a produit des photographies de supports à pantoufles et à ceintures arborant la marque de commerce MAURICES qui sont offerts aux consommateurs comme partie intégrante de leur achat [para 16 et pièce BHT-7 de l'affidavit de M. Thun]. Toutefois, avec égards pour l'Opposante, je ne suis pas d'accord avec son observation que cela démontre que les « vêtements » et les « supports » forment une seule et même entité. De plus, je considère que les Canadiens qui voient la marque de commerce de l'Opposante sur ces supports risquent davantage de croire que la marque de commerce est en liaison avec les pantoufles ou les ceintures achetées plutôt qu'avec les supports. Il se pourrait également qu'ils associent la marque de commerce MAURICES sur les supports avec les services de magasins de détail de l'Opposante.

[70]           Je crois qu'en faisant valoir que les vêtements, les supports et les produits de rangement sont en fait des accessoires associés aux vêtements et aux articles chaussants, l'Opposante n'avait pas l'intention de suggérer qu'il s'agissait d'accessoires de vêtement. De toute évidence, ils n'en sont pas. Selon moi, les accessoires de vêtement sont des articles qui contribuent de façon secondaire à l'habillement de quelqu'un.

[71]           Cela étant dit, dans la mesure où les marchandises en liaison avec la Marque sont employées pour suspendre ou ranger des vêtements et des accessoires de vêtement, il est raisonnable de penser qu'elles sont liées aux vêtements et aux accessoires de vêtement. Pour des raisons semblables, il est raisonnable de conclure que les [traduction] « porte-chaussures » sont liés aux articles chaussants et les [traduction] « articles de rangement pour bijoux » aux bijoux. Autrement dit, je suis prête à accepter que certaines des marchandises couvertes par la demande d'enregistrement de la Marque jouent un rôle en liaison avec les marchandises enregistrées de l'Opposante. Toutefois, dans cette logique, les marchandises qui sont de genre très différent pourraient être considérées comme en liaison avec les marchandises de l'Opposante. Par exemple, on pourrait donc dire que le détergent à lessive est en liaison avec les vêtements puisqu'il sert à les laver.

[72]           Cela m'amène à me pencher sur les observations des parties concernant la force probante des résultats des recherches faites par M. Anzuino dans le registre des marques de commerce.

[73]           Comme susmentionné, l'Opposante soutient que la recherche C démontre un recoupement entre la nature des commerces des parties étant donné que la recherche a trouvé des demandes d'enregistrement et des enregistrements de marques de commerce couvrant certaines des marchandises visées par la demande d'enregistrement de la Marque et des marchandises de l'enregistrement de la marque de l'Opposante. L'Opposante, dans son plaidoyer écrit, souligne des entrées de la recherche C en indiquant les numéros de référence du résumé du rapport de recherche, mais elle ne souligne pas les parties pertinentes des états déclaratifs de ces entrées. Toutefois, lors de l'audience, l'Opposante a souligné des parties pertinentes des états déclaratifs des marchandises de douze entrées [nos 9, 38, 54, 56, 107, 145, 151, 154, 218, 234, 246 et 327 de la pièce GA2]. Les entrées couvrent en effet certaines des marchandises des parties.

[74]           Comme susmentionné, la Requérante soutient que les termes employés pour mener les recherches A et B ont gonflé le nombre d'entrées trouvées par la recherche C; et qu’on ne devrait pas tenir compte des demandes d'enregistrement de marques de commerce. Je tends à être d'accord avec la Requérante sur ces deux points.

[75]           J'ai choisi de me pencher sur les cinq enregistrements et les quatre demandes d'enregistrement accordées, qui se trouvent dans les entrées examinées par l'Opposante lors de l'audience, pour expliquer ce qui m'a menée à conclure, avec égards pour l'Opposante, que son argument fondé sur les résultats de la recherche C ne résiste pas à l’examen.

[76]           En plus de couvrir une vaste gamme de marchandises, chacun des cinq enregistrements et des quatre demandes d'enregistrement accordées couvre un grand nombre de marchandises qui sont non seulement grandement différentes les unes des autres par leur genre, mais sont également grandement différentes des marchandises enregistrées de l'Opposante. Pour illustrer ce propos, je remarque les exemples non exhaustifs suivants du genre de marchandises couvertes par les enregistrements de marque de commerce :

         [traduction]
produits de menuiserie d'art, jouets, papeterie [réf. no 9];

         véhicules tout-terrain, outils pour peintre, viandes [réf. no 56];

         barbecue, ventilateurs électriques, rondins pour maison modulaire et préfabriquée [réf. no 145];

         meubles, instrument musical électrique, outils [réf. no 218];

         étoffe pour meubles, paniers à pique-nique [réf. no 246].

[77]           Selon le raisonnement de l'Opposante, il faudrait conclure que la recherche C démontre nécessairement un lien entre ses marchandises enregistrées et des marchandises éloignées comme de la viande ou des véhicules tout-terrain. C'est assurément beaucoup trop exagéré.

[78]           Je trouve qu'il n'est pas nécessaire de se pencher sur les observations des parties concernant la force probante des sites Web de Forever 21, Urban Outfitters et La Baie. D'une part, je suis prête à admettre d'office qu'une vaste gamme de marchandises est offerte en vente dans des grands magasins de détail comme La Baie. D'autre part, lorsqu’il s’agit de déterminer la probabilité de confusion, il n’est pas nécessaire de démontrer que les marchandises des parties sont vendues dans les mêmes points de vente, le simple fait que les parties aient la possibilité de le faire suffit [voir Cartier Men’s Shops Ltd c. Cartier Inc (1981), 58 CPR (2d) 68 (CF 1re inst.)].

[79]           En l'espèce, aucun des états déclaratifs des marchandises de la demande d'enregistrement de la Marque ou de l'enregistrement de l'Opposante ne restreint les voies commerciales des parties à leurs magasins respectifs. Autrement dit, les parties ont le droit de procéder et de vendre leurs produits en situation de concurrence. Toutefois, compte tenu de la preuve, je conclus que c'est fort peu probable.

[80]           En effet, il demeure que la preuve de la Requérante est que les produits de rangement en liaison avec la Marque sont uniquement vendus dans les magasins à prix réduits exploités par la Requérante. Par comparaison, la preuve de l'Opposante est que depuis 1931, les marchandises en liaison avec sa marque de commerce MAURICES ont toujours été vendues aux États-Unis dans des magasins de détail spécialisés dans les vêtements et articles chaussants pour femmes qui sont exploités par l'Opposante en liaison avec la marque de commerce MAURICES. Depuis au moins aussi tôt qu'octobre 2009, le site Web de l'Opposante présente une boutique en ligne permettant aux consommateurs de commander en ligne.

[81]           En fin de compte, la preuve de l'Opposante démontre qu'en aucun cas depuis 1931, les marchandises en liaison avec sa marque de commerce ont été vendues dans des magasins de détail de tiers aux États-Unis ou sur des sites Web de tiers. Si en tant d'années l'Opposante n'a jamais vendu ses marchandises aux États-Unis dans des magasins autres que ceux qu'elle exploite, je considère qu'il est raisonnable d'inférer que les marchandises en liaison avec la marque de commerce de l'Opposante seraient vendues au Canada dans des magasins de détail spécialisés dans les vêtements et les articles chaussants pour femmes exploités par ou pour l'Opposante, particulièrement en l'absence de preuve du contraire. Au contraire, le fait que M. Thun dans son affidavit fait référence à la constitution de l'entreprise Maurices Canada Stores Limited appuie cette inférence.

[82]           Ultimement, l'Opposante ne m'a pas convaincue que les facteurs énoncés aux articles 6(5)c) et d) la favorise en l'espèce.

Les autres circonstances de l'espèce — aucun cas réel de confusion

[83]           M. Robillard déclare qu'il n'est pas au courant de cas de confusion entre la gamme de produits de rangement vendue en liaison avec la Marque dans les magasins de détail de la Requérante et les produits vendus ou les magasins exploités par l'Opposante aux États-Unis en liaison avec la marque de commerce MAURICES, pas plus qu'aucun cas de confusion n'ait été porté à son attention par les employés ou les consommateurs de la Requérante [para 18 de son affidavit].

[84]           Un opposant n'est pas tenu de démontrer les cas de confusion. C'est au requérant qu'incombe le fardeau de démontrer l'absence de probabilité de confusion. Le fait qu'il n'existe aucune preuve de confusion ne libère aucunement un requérant du fardeau de la preuve qui lui incombe. Néanmoins, une conclusion défavorable peut être tirée de l'absence de preuve de cas réels de confusion lorsqu'il y a preuve d'un emploi simultané significatif des marques [voir Mattel Inc, précité à la page 347].

[85]           Je considère que l'absence de cas réels de confusion n'est d'aucune importance parce qu'il n'y a pas de preuve d'emploi concurrent des marques de commerce au Canada.

La conclusion concernant la probabilité de confusion

[86]           L'article 6(2) de la Loi ne porte pas sur la confusion entre les marques de commerce elles-mêmes, mais sur la confusion quant à la source des marchandises ou des services.

[87]           En appliquant le test en matière de confusion, j'ai examiné la situation sur le principe de la première impression et du souvenir vague. Après avoir examiné tous les facteurs énoncés à l'article 6(5) de la Loi et leur importance respective, je suis convaincue que la Requérante s'est acquittée de son fardeau de démontrer qu'il n'y a pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et la marque de commerce déposée MAURICES de l'Opposante.

[88]           Si l'Opposante avait démontré que sa marque de commerce MAURICES avait acquis une réputation dans une mesure importante au Canada, j'aurais pu être convaincue que l'examen global des facteurs énoncés à l'article 6(5) la favorise ou entraîne une prépondérance égale des probabilités. Toutefois, la conclusion d'une opposition est fondée sur la preuve et les plaidoyers des parties et non pas sur des observations non étayées des parties.

[89]           Par conséquent, le motif d'opposition fondé sur l'article 12(1)d) de la Loi est rejeté.

La Requérante était-elle la personne ayant droit à l'enregistrement de la Marque à la date de production de la demande d'enregistrement?

[90]           Cette question découle du motif d'opposition alléguant que la Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la Marque en vertu de l'article 16(3)a) de la Loi, en raison de la confusion créée par la marque de commerce MAURICES de l'Opposante, qui aurait déjà été employée et/ou révélée au Canada par l'Opposante en liaison avec les marchandises et services couverts par l'enregistrement no LMC776,138.

[91]           Malgré le fardeau de preuve qui incombe à la Requérante, l'Opposante doit démontrer que sa marque de commerce MAURICES a été employée et/ou révélée au Canada à la date de production de la demande d'enregistrement de la Marque, c'est-à-dire le 21 avril 2010. L'Opposante doit également démontrer que sa marque de commerce n'a pas été abandonnée à la date d'annonce de la demande d'enregistrement de la Marque, c'est-à-dire le 19 janvier 2011 [voir l'article 16(5) de la Loi].

[92]           Comme susmentionné, l'Opposante a reconnu que sa preuve ne démontre pas l'emploi de la marque de commerce MAURICES au Canada. Par conséquent, il reste à déterminer si la preuve de l'Opposante démontre que sa marque de commerce MAURICES, en date du 21 avril 2010, avait été révélée au Canada par les moyens précis énoncés à l'article 5 de la Loi, de sorte que la marque de commerce était devenue suffisamment connue.

[93]           L'article 5 de la loi est libellé comme suit :

5. Une personne est réputée faire connaître une marque de commerce au Canada seulement si elle l’emploie dans un pays de l’Union, autre que le Canada, en liaison avec des marchandises ou services, si, selon le cas :

a) ces marchandises sont distribuées en liaison avec cette marque au Canada;

b) ces marchandises ou services sont annoncés en liaison avec cette marque :

(i) soit dans toute publication imprimée et mise en circulation au Canada dans la pratique ordinaire du commerce parmi les marchands ou usagers éventuels de ces marchandises ou services,

(ii) soit dans des émissions de radio ordinairement captées au Canada par des marchands ou usagers éventuels de ces marchandises ou services,

et si la marque est bien connue au Canada par suite de cette distribution ou annonce.

[94]           Par conséquent, quoique l'Opposante, à la fois dans son plaidoyer écrit et lors de l'audience, s'appuie sur toute la preuve présentée par M. Thun, je suis contrainte par la Loi de ne considérer que les catégories de façons dont une marque de commerce peut devenir bien connue au Canada, ce qui, en l'espèce, serait par l'entremise de la publicité dans les magazines.

[95]           Je considère, en vertu du motif d'opposition fondé sur l'article 12(1)d) que la preuve de l'Opposante concernant la publicité dans des magazines en circulation au Canada est insuffisante pour démontrer toute réputation de la marque de commerce MAURICES au Canada à la date de ma décision. Je n'ai aucune raison de conclure autrement en vertu du motif d'opposition fondé sur l'article 16(3)a). Par conséquent, je considère que l'Opposante ne s'est pas acquittée du fardeau de démontrer que sa marque de commerce MAURICES est devenue connue au Canada avant le 21 avril 2010.

[96]           Par conséquent, je rejette le motif d'opposition fondé sur l'article 16(3)a) de la Loi.

La Marque était-elle distinctive des marchandises de la Requérante à la date de production de la déclaration d'opposition?

[97]           Cette question découle du motif d'opposition alléguant que la Marque ne possède pas de caractère distinctif et ne distingue pas véritablement les marchandises de la Requérante des marchandises et services de l'Opposante en liaison avec la marque de commerce et le nom commercial MAURICES de l'Opposante.

[98]           La date pertinente pour l’examen de ce motif d’opposition est la date de production de la déclaration d’opposition [voir Metro-Goldwyn-Mayer Inc c. Stargate Connections Inc (2004), 34 CPR (4th) 317 (CF)].

[99]           L'Opposante a le fardeau de démontrer que ses marques de commerce et nom commercial invoqués, en date du 21 mars 2011, avaient acquis au Canada une réputation substantielle, significative ou suffisante en liaison avec les marchandises et services de l'Opposante pour faire perdre à la Marque son caractère distinctif [voir Motel 6, Inc c. No 6 Motel Ltd (1981), 56 CPR (2d) 44 (CF 1re inst.); et Bojangles’ International LLC c. Bojangles Café Ltd (2006), 48 CPR (4th) 427 (CF)].

[100]       Bien que l'Opposante ait retiré le motif d'opposition fondé sur l'absence de droit à l'enregistrement alléguant un emploi antérieur de son nom commercial MAURICES, l'Opposante n'a pas modifié de façon explicite le plaidoyer fondé sur la question du caractère distinctif pour retirer la référence à son nom commercial. Toutefois, dans son plaidoyer écrit comme lors de l'audience, l'Opposante ne prétend pas s'être acquittée de son fardeau de preuve à l'égard du nom commercial MAURICES.

[101]       Quoi qu'il en soit, dans la mesure où le motif d'opposition repose sur une allégation de confusion entre la Marque et le nom commercial allégué de l'Opposante, il est rejeté puisque l'Opposante ne s'est pas acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait. Par conséquent, il reste à déterminer si l'Opposante s'est acquittée de son fardeau de preuve pour la marque de commerce MAURICES.

[102]       Pour l'examen du facteur énoncé à l'article 6(5)a) en vertu du motif d'opposition fondé sur l'article 12(1)d), je considère que la preuve de l'Opposante est insuffisante pour démontrer que la marque de commerce MAURICES est devenue bien connue au Canada, mais pourrait être suffisante pour démontrer que la marque de commerce est devenue connue dans une certaine mesure. Il reste donc à déterminer si l'affidavit de M. Thun est suffisant pour démontrer que, en date du 21 mars 2011, la réputation de la marque de commerce MAURICES au Canada était substantielle, significative ou suffisante pour faire perdre à la Marque son caractère distinctif.

[103]       J'estime qu'il n'est pas nécessaire de trancher cette question puisque même si je considère que l'Opposante s'est acquittée de son fardeau de preuve, je conclurais que le motif fondé sur la question du caractère distinctif favorise la Requérante. En effet, puisque la différence de date pertinente n'a pas d'incidence sur mon examen précédent des circonstances de l'espèce, je conclurais que la Requérante s'est acquittée du fardeau ultime d'établir qu'il n'existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et le nom commercial MAURICES de l'Opposante en date du 21 mars 2011.


Décision

[104]       Conformément aux pouvoirs qui me sont délégués en vertu de l'article 63(3) de la Loi, je rejette l'opposition au titre de l'article 38(8) de la Loi.

______________________________

Céline Tremblay

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada


 

 

 


Traduction certifiée conforme
Nathalie Tremblay


Annexe

Détails de l'enregistrement no LMC776,138 pour la marque de commerce MAURICES

Date d'enregistrement : 1er septembre 2010
[TRADUCTION]

Marchandises : Cosmétiques, nommément gommages, produits exfoliants, hydratants, fond de teint, poudre pour le visage, poudre compacte, poudre libre, fard à joues, crèmes correctrices, correcteurs, ombres à paupières, traceurs pour les yeux, crayons pour les yeux, maquillage pour les yeux, traitements pour les yeux sous forme de crèmes, de gels et de lotions; produits pour les lèvres, nommément rouges à lèvres, couleur à lèvres, teinte à lèvres, brillant à lèvres, glaçure à lèvres, crayons à lèvres, crayons contour des lèvres, baumes à lèvres, lustre à lèvres, hydratant à lèvres mascara, teintures à cils, embellisseurs de cils, apprêts à cils, crayons à sourcils; bijoux; sacs-pochettes, portefeuilles, sacs à bandoulière et fourre-tout; vêtements, nommément robes, vêtements en denim, jeans, chemisiers, jupes, chasubles, pantalons sport, pantalons, débardeurs, shorts, bermudas, chandails, camisoles, tee-shirts, pulls d'entraînement, chemises, polos, costumes, jerseys, vestes, gilets, cardigans, chandails à col roulé, blazers, manteaux, parkas, pardessus, anoraks, imperméables, cirés, boxeurs, sous-vêtements, jupes-culottes, brassières, slips, licous, pantalons, salopettes, habits de neige, costumes de ski, manteaux de ski, pantalons de ski, pyjamas, maillots, robes de nuit, nuisettes, robes de chambre, sorties de bain, uniformes, vêtements de plage, nommément maillots de bain, vêtements de bain et paréo, vêtements d'exercice, chaussettes, collants, caleçons longs, bonneterie; articles chaussants nommément bottes, sandales, chaussures, pantoufles, chaussures d'entraînement, chaussures de basketball, chaussures pour l'eau, articles chaussants de sport, nommément espadrilles, chaussures de course, chaussures de marche, chaussures de tennis et chaussures de golf.

Services : Services de magasin de détail spécialisé dans les vêtements et articles chaussants mode pour femmes.

Revendications : Employée aux États-Unis d'Amérique Enregistrée dans ou pour les États-Unis d'Amérique le 19 février 2008 sous le no 3386467 en liaison avec les marchandises. Enregistrée dans ou pour les États-Unis d'Amérique le 4 juillet 1978 sous le no 1095513 en liaison avec les services.

 

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