Contenu de la décision
TRADUCTION/TRANSLATION
DANS L’AFFAIRE DES OPPOSITIONS
de Metromedia CMR Plus Inc. aux demandes
nos 1014396 et 1014397 produites par Metromedia Company
en vue de l’enregistrement des marques de commerce
METROMEDIA et METROMEDIA TECHNOLOGIES
Demande no 1014396
[1] Le 4 mai 1999, la requérante, Metromedia Company, a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce METROMEDIA en liaison avec les services suivants :
1) Services de divertissement sous forme d’un spectacle sur glace; services de divertissement sous forme d’un spectacle de patinage.
2) Publicité sur panneaux d’affichage et location d’espaces publicitaires.
La demande est fondée sur l’emploi de la marque au Canada depuis 1964 en liaison avec les services énumérés en 1) et depuis 1987 en liaison avec les services énumérés en 2). La demande a été annoncée aux fins d’opposition le 28 juin 2000.
[2] Les co-opposantes initiales, Métromédia CMR Montréal Inc. (« Montréal »), Diffusion Métromédia CMR Inc. (« Diffusion ») et Metromedia CMR Plus Inc. (« Plus »), ont produit une déclaration d’opposition le 28 novembre 2000, dont copie a été envoyée à la requérante le 12 décembre 2000. Le 30 avril 2009, l’autorisation de mettre hors de cause les deux premières co-opposantes a été accordée conformément à l’article 40 du Règlement sur les marques de commerce.
[3] Le premier motif d’opposition porte que la demande de la requérante ne satisfait pas aux exigences de l’alinéa 30i) de la Loi sur les marques de commerce, en ce que la requérante ne pouvait être convaincue qu’elle avait le droit d’employer la marque de commerce visée par la demande au Canada. Le deuxième motif d’opposition porte que la demande de la requérante ne satisfait pas aux exigences de l’alinéa 30b) de la Loi, en ce que la requérante n’a pas employé la marque faisant l’objet de la demande en liaison avec les services visés par la demande depuis les dates revendiquées.
[4] Les troisième et quatrième motifs d’opposition sont libellés comme suit :
[traduction]
b) La requérante n’est pas la personne qui a droit à l’enregistrement de la marque de commerce en vertu de l’article 16, étant donné qu’à la première date où elle l’a employée au Canada, la marque de commerce créait de la confusion avec la marque de commerce « METROMEDIA » de l’opposante qui avait été antérieurement employée et révélée au Canada.
c) La marque de commerce n’est pas distinctive au sens de l’article 2, étant donné que la marque de commerce ne peut distinguer les services de la requérante des marchandises et services des autres propriétaires, et n’est pas adaptée à les distinguer ainsi, en particulier les marchandises et les services offerts par les opposantes en liaison avec leur marque de commerce susmentionnée.
[5] La requérante a produit et signifié une contre-déclaration le 11 avril 2001. L’alinéa 1d) de la contre-déclaration est libellé comme suit :
[traduction]
La requérante affirme, et c’est un fait, que l’alinéa 3b) n’énonce pas de motifs d’opposition valables étant donné que ledit alinéa n’indique pas les services en liaison avec lesquels la marque de commerce alléguée METROMEDIA de l’opposante aurait été antérieurement employée ou révélée au Canada.
[6] La preuve de l’opposante est constituée de l’affidavit de Pierre Béland. À titre de preuve, la requérante a soumis l’affidavit de Jonathan P. Gilmore. Les deux parties ont produit un plaidoyer écrit, et elles ont toutes deux été représentées à l’audience tenue le 16 juin 2009.
[7] À titre préliminaire, j’ai examiné l’affirmation dans la contre-déclaration selon laquelle le troisième motif d’opposition, fondé sur le droit préalable à l’enregistrement, n’a pas été valablement invoqué. Je conviens avec la requérante que le libellé de ce motif d’opposition manque de précision, étant donné qu’il n’indique pas les marchandises ou services en liaison avec lesquels la marque de l’opposante avait été antérieurement employée. Toutefois, cette lacune a été comblée par la preuve produite par l’opposante, laquelle fournit les renseignements manquants : voir Novopharm Limited c. AstraZeneca AB (2002), 21 C.P.R. (4th) 289, p. 293 (C.A.F.).
La preuve de l’opposante
[8] Dans son affidavit, M. Béland atteste qu’il est président et directeur de Plus, Montréal et Diffusion. Il décrit en détail l’actionnariat des trois sociétés et déclare que Montréal est une filiale en propriété exclusive de Diffusion. De plus, il affirme que Montréal a autorisé Plus à employer le nom Metromedia CMR Plus Inc. par un consentement signé par M. Béland et que Montréal a consenti à l’emploi du nom Metromedia CMR Broadcasting Inc. - Diffusion Métromédia CMR Inc. par Diffusion par un consentement en date du 5 septembre 1995. Il y a lieu de souligner que M. Béland ne fournit aucun renseignement pour étayer la conclusion selon laquelle l’emploi de l’un ou l’autre de ces noms en vertu de ces consentements constitue un emploi faisant l’objet d’une licence en bonne et due forme conformément à l’article 50 de la Loi.
[9] Selon M. Béland, depuis sa constitution en société en septembre 1993, Plus a vendu des publicités sur panneaux d’affichage intérieurs et extérieurs partout au Canada sous les marques de commerce et noms commerciaux METROMEDIA PLUS et MÉTROMÉDIA PLUS. La pièce PB12 de son affidavit comporte des photocopies de feuilles illustrant des échantillons des produits, sur lesquelles figure la marque de commerce METROMEDIA PLUS. Selon M. Béland, les produits publicitaires intérieurs et extérieurs de Plus ont rapporté plus d’un million de dollars en 1994 et environ deux millions de dollars pour chacune des années entre 1995 et 1998.
[10] M. Béland affirme que Diffusion exploite deux stations de radio anglophones à Montréal. Les cotes d’écoute dépassent les 400 000 auditeurs pour l’une des stations et les 100 000 auditeurs pour l’autre, 90 % de ces auditeurs étant des résidents du Québec. M. Béland affirme que chaque station diffuse quotidiennement un message disant que la station appartient à Metromedia CMR et est exploitée par elle. Cependant, cette entité n’a pas été identifiée ni décrite par M. Béland et elle n’a pas non plus été invoquée dans la déclaration d’opposition. Quoi qu’il en soit, il est difficile d’attribuer une certaine réputation à un nom qui n’est mentionné que brièvement une fois par jour sur les ondes de deux stations de radio. Sont jointes en annexe à l’affidavit de M. Béland, comme pièce PB18, des photocopies de factures sur lesquelles figure le nom Metromedia CMR Broadcasting Inc. - Diffusion Métromédia CMR Inc. Cependant, ce nom commercial n’a pas été invoqué dans la déclaration d’opposition.
[11] M. Béland affirme que Montréal exploite deux stations de radio francophones à Montréal. Les cotes d’écoute dépassent les 400 000 auditeurs pour l’une des stations et les 1,2 million d’auditeurs pour l’autre, 90 % des auditeurs de chacune des stations étant au Québec. M. Béland affirme que chaque station diffuse deux fois par jour un message disant que la station est la propriété de Metromedia CMR Inc., Metromedia CMR Incorporée ou Métromédia CMR Montréal Inc. Cependant, aucun de ces noms commerciaux n’a été invoqué dans la déclaration d’opposition. La pièce PB23 de l’affidavit de M. Béland comporte des photocopies de factures sur lesquelles figure le nom Metromedia CMR Inc., lequel n’a pas été invoqué dans la déclaration d’opposition.
[12] Même si les noms commerciaux précisés par M. Béland avaient été invoqués dans la déclaration d’opposition, il est peu probable qu’ils aient pu étayer un motif fondé sur le droit préalable à l’enregistrement ou l’absence de caractère distinctif. Étant donné l’absence de preuve quant à la propriété de chacun des noms et l’absence de licence en bonne et due forme octroyée par le propriétaire (quel qu’il soit) pour ces noms, il est difficile de savoir quelle société bénéficie de leur emploi.
La preuve de la requérante
[13] Dans son affidavit, M. Gilmore atteste qu’il est directeur adjoint du contentieux et secrétaire adjoint de la requérante. Il affirme que sa société emploie les marques de commerce METROMEDIA, METROMEDIA TECHNOLOGIES, METROMEDIA TECHNOLOGIES INTERNATIONAL et MMT METROMEDIA TECHNOLOGIES au Canada par l’entremise de ses licenciées Metromedia Technologies, Inc. et Metromedia Technologies International, Inc. en liaison avec le service de fabrication d’affiches publicitaires en vinyle pour l’extérieur qui sont utilisées dans la publicité par affichage. Il affirme que sa société surveille et contrôle le genre de marchandises vendues et de services offerts en liaison avec les marques METROMEDIA. Cependant, il ne donne pas de description précise de la façon dont sa société exerce cette surveillance et ce contrôle. Qui plus est, il ne démontre pas que, en vertu des licences, sa société contrôle directement ou indirectement les caractéristiques ou la qualité des services offerts.
[14] Selon M. Gilmore, les licenciés de sa société reçoivent les commandes pour les affiches publicitaires en vinyle pour l’extérieur. Les licenciés fabriquent les affiches publicitaires en vinyle et les expédient ensuite dans des tubes à leurs clients. M. Gilmore affirme que les tubes ont des étiquettes sur lesquelles figure la marque de commerce METROMEDIA TECHNOLOGIES. Cependant, les documents annexés comme pièces à son affidavit (notamment les pièces C et D) n’indiquent pas que cette marque de commerce y soit apposée. Ils démontrent plutôt l’emploi de la marque de commerce MMT et du nom commercial Metromedia Technologies Inc. Selon M. Gilmore, le montant total des ventes d’affiches publicitaires au Canada en liaison avec les marques de commerce METROMEDIA et METROMEDIA TECHNOLOGIES était supérieur à 4,9 millions de dollars.
[15] M. Gilmore ajoute que, d’après les registres de la société, la requérante ou son prédécesseur en titre possédait les droits sur le spectacle sur glace Ice Capades entre 1964 et 1986. Chacun des programmes pour les Ice Capades indiquait que le spectacle était [traduction] « une société Metromedia ».
Les motifs d’opposition
[16] Le premier motif d’opposition invoqué n’est pas valable. L’opposante n’a pas allégué de faits à l’appui du motif de non-conformité aux exigences de l’alinéa 30i) de la Loi. Le simple fait de reproduire le libellé de l’alinéa 30i) n’est pas suffisant. En conséquence, le premier motif d’opposition est rejeté.
[17] En ce qui concerne le deuxième motif d’opposition invoqué par l’opposante, il incombe à la requérante de démontrer que sa demande satisfait aux exigences de l’alinéa 30b) de la Loi : voir la décision en matière d’opposition Joseph Seagram & Sons c. Seagram Real Estate (1984), 3 C.P.R. (3d) 325, p. 329-330, et la décision John Labatt Ltd. c. Les Compagnies Molson Ltée (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.). Il incombe cependant à l’opposante de prouver les allégations de fait qu’elle invoque à l’appui de ce motif. Ce fardeau de preuve est moins exigeant pour ce qui est de la non-conformité à l’alinéa 30b) de la Loi : voir la décision en matière d’opposition Tune Masters c. Mr. P's Mastertune (1986), 10 C.P.R. (3d) 84, p. 89. En outre, l’alinéa 30b) exige qu’il y ait eu emploi ininterrompu de la marque de commerce visée par la demande dans la pratique normale du commerce depuis la date revendiquée : voir Brasserie Labatt Limitée c. Benson & Hedges (Canada) Limitée et al. (1996), 67 C.P.R. (3d) 258 (C.F. 1re inst.), p. 262. Enfin, l’opposante peut s’acquitter de son fardeau en s’appuyant sur la preuve de la requérante : voir Brasserie Labatt Limitée c. Brasseries Molson, société en nom collectif (1996), 68 C.P.R. (3d) 216 (C.F. 1re inst.), p. 230.
[18] En ce qui a trait aux services de divertissement de la requérante sous forme d’un spectacle sur glace ou d’un spectacle de patinage, la preuve de la requérante permet à l’opposante de s’acquitter de son fardeau de preuve. Le seul élément de preuve appuyant la prétention de la requérante relativement à l’emploi de sa marque en liaison avec des spectacles sur glace est la présentation des Ice Capades comme étant [traduction] « une société Metromedia » dans les programmes. Cette expression ne permet pas de conclure à l’emploi de la marque de commerce METROMEDIA en liaison avec ces services. Qui plus est, la déclaration de M. Gilmore au sujet de la propriété par la requérante des Ice Capades donne tout lieu de penser que la requérante ne possédait plus de droits sur le spectacle sur glace après 1986. Il semblerait donc qu’il n’y a pas eu emploi ininterrompu de la marque visée par la demande en liaison avec ces services.
[19] En ce qui a trait aux autres services, M. Gilmore n’a aucunement laissé entendre que sa société loue des espaces publicitaires pour les annonceurs. Sa société semble plutôt s’occuper de la préparation du matériel pour les panneaux d’affichage pour ses clients, lesquels font appel à un tiers pour installer les publicités. À supposer que cette activité consiste à fournir le service de « publicité sur panneaux d’affichage », il reste à déterminer si la marque de la requérante a été employée en liaison avec ce service.
[20] Comme nous l’avons vu, l’affidavit de M. Gilmore comporte plusieurs lacunes. Premièrement, M. Gilmore désigne les quatre marques de commerce comme étant les marques METROMEDIA, sans répartir les ventes et les activités entre chaque marque. Deuxièmement, il affirme que la marque METROMEDIA TECHNOLOGIES figure sur les tubes mais les pièces justificatives n’étayent pas cette affirmation. Dans ce cas-ci, l’emploi du nom commercial Metromedia Technologies Inc. ne constitue pas non plus un emploi de la marque de commerce METROMEDIA TECHNOLOGIES. Quoi qu’il en soit, il n’affirme pas que la marque de commerce METROMEDIA elle-même figure sur ces tubes. Troisièmement, il ne réussit pas à prouver de façon convenable l’existence d’un contrat de licence qui autoriserait en bonne et due forme l’emploi de l’une ou l’autre des marques de la requérante par ses supposés licenciés.
[21] Compte tenu de ce qui précède, l’opposante s’est acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait à l’égard du deuxième motif. Il incombait donc à la requérante de démontrer clairement l’emploi de sa marque, tel que revendiqué. Comme elle ne l’a pas fait, le deuxième motif d’opposition est accueilli à tous les égards.
[22] En ce qui concerne le troisième motif d’opposition, l’opposante devait s’acquitter du fardeau initial de prouver qu’elle avait employé la marque de commerce METROMEDIA avant la date de la production de la demande par la requérante (étant donné que les dates de premier emploi revendiquées ne sont plus valables) et qu’elle ne l’avait pas abandonnée à la date de l’annonce de la demande par la requérante. Comme nous l’avons vu, l’opposante ne s’est pas acquittée de ce fardeau. On ne peut dire clairement qui est propriétaire de la marque de commerce ou du nom commercial. En outre, aucun contrat de licence de marque de commerce n’a été mis en preuve qui satisferait aux exigences de l’article 50 de la Loi. Enfin, même si on pouvait faire abstraction de ces lacunes, M. Béland n’a pas démontré l’emploi de la marque de commerce METROMEDIA elle-même, la seule marque sur laquelle repose la déclaration d’opposition. Par conséquent, le troisième motif d’opposition est rejeté.
[23] En ce qui concerne le quatrième motif d’opposition, il incombe à la requérante de démontrer que sa marque distingue véritablement ses services de ceux d’autres propriétaires au Canada, ou est adaptée à les distinguer ainsi : voir Muffin Houses Incorporated c. The Muffin House Bakery Ltd. (1985), 4 C.P.R. (3d) 272 (C.O.M.C.). Par ailleurs, la date pertinente pour examiner les circonstances relatives à cette question est la date de production de la déclaration d’opposition (soit le 28 novembre 2000) : voir E. & J. Gallo Winery c. Andres Wines Ltd. (1975), 25 C.P.R. (2d) 126 (C.A.F.), p. 130, et Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 412 (C.A.F.), p. 424. Enfin, il incombe à l’opposante de prouver les allégations de fait formulées à l’appui de son motif fondé sur l’absence de caractère distinctif.
[24] Comme je l’ai déjà souligné, l’opposante s’est fondée uniquement sur l’emploi de la marque METROMEDIA. Étant donné que l’opposante n’a établi ni l’emploi ni la réputation de cette marque, elle ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve initial et le quatrième motif d’opposition est donc également rejeté.
[25] Compte tenu de ce qui précède et conformément aux pouvoirs qui me sont délégués en vertu de paragraphe 63(3) de la Loi, je repousse la demande no 1014396.
Demande no 1014397
[26] Le 4 mai 1999, la requérante, Metromedia Company, a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce METROMEDIA TECHNOLOGIES, laquelle est fondée sur l’emploi de la marque au Canada depuis 1987 en liaison avec les services de « publicité par affichage et location d’espace publicitaire ». La demande a été annoncée aux fins d’opposition le 23 août 2000.
[27] Les co-opposantes initiales, Montréal, Diffusion et Plus ont produit une déclaration d’opposition le 19 janvier 2001, dont copie a été envoyée à la requérante le 30 janvier 2001. Le 30 avril 2009, l’autorisation de mettre hors de cause les deux premières co-opposantes a été accordée conformément à l’article 40 du Règlement sur les marques de commerce. Les motifs d’opposition sont essentiellement les mêmes que dans la première déclaration d’opposition, ce qui est également le cas de la preuve soumise par les deux parties et des plaidoyers écrits qui ont été produits. Par conséquent, pour les motifs déjà exposés, j’accueille le deuxième motif d’opposition et je rejette les trois autres motifs d’opposition.
[28] Compte tenu de ce qui précède et conformément aux pouvoirs qui me sont délégués en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, je repousse également la demande no 1014397.
FAIT À GATINEAU (QUÉBEC), LE 26 JUIN 2009.
David J. Martin,
Membre,
Commission des oppositions des marques de commerce
Traduction certifiée conforme
Jenny Kourakos, LL.L.