Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION de l’Association royale de golf du Canada à la demande no 1,235,338 produite par Ontario Regional Common Ground Alliance en vue de l’enregistrement de la marque de commerce ORCGA & Dessin

 

Le 28 octobre 2004, Ontario Regional Common Ground Alliance, une association sans personnalité morale, a produit une demande d’enregistrement visant la marque de commerce ORCGA & Dessin (la Marque), reproduite ci‑dessous :

                                                ORCGA & design

Il y a eu désistement du droit à l’usage exclusif des mots ONTARIO, REGIONAL et ALLIANCE en dehors de la marque de commerce.

 

La demande est fondée sur l’emploi de la Marque au Canada en liaison avec les services suivants :

(1)     Prévention des dommages pouvant être causés aux installations enfouies au moyen de l’éducation du public, de déclarations, de la sensibilisation du public, de règlements et de l’application de la loi; exploitation d’une organisation sans but lucratif engagée dans la prévention des dommages pouvant être causés aux installations enfouies au moyen de l’éducation du public, de déclarations, de la sensibilisation du public, de règlements et de l’application de la loi.

(2)     Exploitation d’un site Web fournissant de l’information visant à promouvoir la protection d’installations souterraines.

 

Elle est également fondée sur l’emploi projeté de la Marque au Canada en liaison avec les marchandises suivantes :

Articles promotionnels, nommément chopes à café, sacs de plastique, affiches, stylos, planchettes à pince, reliures, rubans à mesurer, calculettes, calendriers, blocs-notes adhésifs, étiquettes à bagages, portefeuilles, tapis de souris, fourre-tout, cordons; publications, nommément revues, livres, brochures, bulletins, dépliants; vêtements, nommément chemises, polos de golf, tee-shirts, vestes, casques de baseball.

 

 

La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans l’édition du Journal des marques de commerce du 13 juillet 2005. Le 12 décembre 2005, l’Association royale de golf du Canada (l’Opposante) a produit une déclaration d’opposition, dans laquelle elle invoque des motifs d’opposition fondés sur les al. 38(2)a), b), c) et d) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13 (la Loi).

 

La requérante a produit et signifié une contre‑déclaration.

 

En 2006, la requérante a informé le registraire qu’elle était devenue une association constituée en personne morale, et le registraire a consigné cette modification de statut. Le terme « Requérante » sera ci‑après utilisé pour désigner l’Ontario Regional Common Ground Alliance, association sans personnalité morale, ou la société Ontario Regional Common Ground Alliance, selon l’appellation chronologiquement applicable.

 

À l’appui de son opposition, l’Opposante a produit les affidavits de Stephen D. Ross et Virginia Collins ainsi que des copies certifiées conformes des enregistrements de marque de commerce nos LMC662,812 et LMC671,589 visant respectivement les marques RCGA et RCGA & Dessin (no 1), de l’avis public donné en vertu du sous‑al. 9(1)n)(iii) de la Loi à l’égard de la marque officielle RCGA & Dessin (no 2) et de la demande visant l’enregistrement de la marque canadienne RCGA & Dessin (no 3). Les marques figuratives sont reproduites ci‑dessous :

 

RCGA & Dessin (no 1)

               RCGA & Design

RCGA & Dessin (no 2)

               RCGA & Design

 

RCGA & Dessin (no 3)

               RCGA & Design

 

La Requérante a décidé de ne produire aucune preuve à l’appui de sa demande, et elle n’a contre‑examiné aucun des auteurs des affidavits produits par l’Opposante.

 

Seule l’Opposante a produit un plaidoyer écrit. Chaque partie a participé à l’audience.

 

Le fardeau de la preuve

C’est à la Requérante qu’il incombe de démontrer suivant la prépondérance des probabilités que la demande d’enregistrement est conforme aux exigences de la Loi, mais l’Opposante a le fardeau initial de présenter suffisamment d’éléments de preuve recevables pouvant raisonnablement étayer la conclusion que les faits allégués à l’appui de chaque motif d’opposition existent [voir John Labatt Limited c. The Molson Companies Limited (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.), p. 298].

 

Le motif d’opposition fondé sur les alinéas 38(2)a) et 30b)

L’Opposante soutient que la demande n’est pas conforme à l’al. 30b) de la Loi, parce que la Marque, si tant est qu’elle a été employée au Canada en liaison avec les services énumérés dans la demande, ne l’a pas été depuis la date de premier emploi revendiqué.

 

Le fardeau de preuve initial d’un opposant à l’égard des allégations de fait étayant un motif d’opposition fondé sur l’al. 30b) est plus léger puisque les renseignements relatifs à la date de premier emploi sont plus accessibles au requérant. [Voir Tune Masters c. Mr. P’s Mastertune Ignition Services Ltd. (1986), 10 C.P.R. (3d) 84 (C.O.M.C.), p. 89.]

 

Mme Collins, qui a souscrit l’un des affidavits produits par l’Opposante, a déposé des pages tirées du site Web de la Requérante en date du 27 septembre 2006 et du 22 janvier 2005. Dans ce dernier cas, l’information provient des archives de Wayback Machine (Mme Collins a joint comme pièce 2 des pages tirées du site www.archive.org, qui donnent des explications au sujet de Wayback Machine). Mme Collins a cherché dans les archives de Wayback Machine des versions antérieures du site Web de la Requérante, et il appert des résultats obtenus qu’il n’existait pas de site Web avant 2005 (pièce 3).

 

Je conçois qu’il puisse y avoir des limites à la précision de Wayback Machine, notamment de possibles problèmes de ouï‑dire, mais je suis d’avis que, compte tenu de la légèreté du fardeau de preuve de l’Opposante sous le régime de l’al. 30b) , les résultats de la recherche sont suffisants pour soulever un doute concernant l’exactitude de la date de premier emploi revendiquée par la Requérante à l’égard de l’exploitation d’un site Web fournissant des renseignements liés à la promotion de la protection d’installations souterraines, à savoir dès le mois de janvier 2004. La Requérante avait la possibilité de soumettre une preuve pour réfuter les résultats de la recherche effectuée dans Wayback Machine, mais elle ne s’en est pas prévalue. Je conclus en conséquence que, la Requérante ne s’étant pas acquittée de son fardeau de preuve, il y a lieu d’accueillir le motif fondé sur l’al. 30b) à l’égard des services (2). Toutefois, comme aucun élément de preuve ne porte sur l’exactitude de la date de premier emploi revendiqué à l’égard des services (1), le motif d’opposition fondé sur l’al. 30b) ne sera pas retenu pour ce qui est de ces services, l’Opposante ne s’étant pas acquittée de son fardeau de preuve initial.

 

Le motif d’opposition fondé sur les alinéas 38(2)a) et 30i)

L’alinéa 30i) de la Loi exige l’inclusion dans la demande d’enregistrement d’une déclaration portant que la Requérante est convaincue d’avoir le droit d’employer la Marque au Canada en liaison avec les marchandises et services. La Requérante a fourni une telle déclaration. Lorsqu’un requérant fournit la déclaration prévue à l’alinéa 30i), le motif d’opposition fondé sur cette disposition n’est retenu que dans des circonstances exceptionnelles, notamment lorsque la mauvaise foi du requérant est démontrée [voir Sapodilla Co. Ltd. c. Bristol-Myers Co. (1974), 15 C.P.R. (2d) 152 (C.O.M.C.), p. 155]. Comme cette démonstration n’a pas été faite en l’instance, le motif d’opposition fondé sur l’al. 30i) est écarté.

 

Les motifs d’opposition fondés sur l’alinéa 38(2)c) et l’article 16

L’Opposante a soutenu que la Requérante n’avait pas droit à l’enregistrement parce que la marque ORCGA & Dessin crée de la confusion avec la marque de commerce RCGA et avec les diverses versions graphiques de la marque reproduites ci‑dessus, antérieurement employées ou révélées par l’Opposante au Canada.

 

La date pertinente pour l’examen du risque de confusion, en ce qui concerne l’emploi projeté de la Marque en liaison avec les marchandises, est la date de la production de la demande, en l’occurrence le 28 octobre 2004 [par. 16(3)]. En ce qui concerne l’emploi de la Marque en liaison avec les services, la date pertinente est généralement la date de premier emploi revendiquée [par. 16(3)]. Toutefois, lorsqu’est accueilli un motif d’opposition fondé sur l’al. 30b) contestant la date de premier emploi revendiquée, la date pertinente pour l’examen du motif d’opposition fondé sur le par. 16(1) devient la date de production de la date d’enregistrement [voir American Cyanamid Co. c. Record Chemical Co. Inc. (1972), 6 C.P.R. (2d) 278 (C.O.M.C.); Everything for a Dollar Store (Canada) Inc. c. Dollar Plus Bargain Centre Ltd. (1998), 86 C.P.R. (3d) 269 (C.O.M.C.)]. Par conséquent, la date pertinente pour trancher la question du risque de confusion à l’égard des services (1) est le 1er mars 2004, tandis qu’à l’égard des services (2), il s’agit du 28 octobre 2004. Cela dit, dans les circonstances de la présente espèce, la date en fonction de laquelle se fait l’examen de la question de la confusion ne porte pas à conséquence.

 

Le test en matière de confusion

Le test applicable en matière de confusion est un test de première impression et de souvenir imparfait. Suivant le paragraphe 6(2) de la Loi, il y a confusion entre deux marques de commerce lorsque l’emploi des deux marques dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises qui y sont liées sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou services soient ou non de la même catégorie générale.

 

Pour déterminer s’il y a confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, et notamment de celles qui sont expressément énoncées au paragraphe 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues, b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage, c) le genre de marchandises, services ou entreprises, d) la nature du commerce et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Il n’est pas nécessaire d’accorder un poids égal à chacun de ces facteurs. [De façon générale, voir Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc. (2006), 49 C.P.R. (4th) 321 (C.S.C.).]

 

S’agissant de l’argumentation de l’Opposante relative à l’art. 16, comme l’argument le plus solide est celui qui se rapporte à l’antériorité de l’emploi de ses marques [al. 16(1)a) et 16(3)a)], mon examen se concentrera sur ces marques plutôt que sur les demandes d’enregistrement pendantes ou les noms commerciaux de l’Opposante. De la même façon, l’argument le plus solide de l’Opposante se rapportant à sa marque RCGA, l’examen se concentrera sur cette marque.

 

Alinéa 6(5)a) – le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

« [U]ne marque de commerce ou un dessin-marque consistant uniquement en lettres est qualifiée de “marque faible” [...] » [GSW Ltée. c. Great West Steel Industries Ltd. et al. (1975), 22 C.P.R. (2d) 154 (C.F. 1re inst.), par. 29]. La marque RCGA de l’Opposante est donc une marque intrinsèquement faible. Comme la Marque de la Requérante est constituée de lettres, de mots et d’éléments graphiques, il s’agit d’une marque intrinsèquement plus forte.

 

Rien dans la preuve n’indique que la Marque de la Requérante soit devenue le moindrement connue au Canada. Par contre, des éléments de preuve indiquent que la marque RCGA de l’Opposante est devenue connue, notamment l’affidavit de M. Ross concernant l’emploi ou la promotion de la marque de l’Opposante avant le mois de mars 2004, qui fait état des faits suivants :

  • une publication intitulée Les règles du golf (dans laquelle la marque RCGA figure à divers endroits) a été distribuée et vendue (paragraphe 17, pièce 11) – 150 000 exemplaires sont distribués à tous les quatre ans;
  • une publication portant sur le système de handicap (où la marque RCGA est bien en évidence) a été distribuée et vendue (paragraphe 20, pièce 14) – 2 000 exemplaires sont distribués deux fois par année;
  • d’autres publications se rapportant au golf affichent la marque RCGA (paragraphes 21 et 22, pièces 15 et 16);
  • des brochures promotionnelles de l’Omnium canadien affichent la marque RCGA (paragraphe 26, pièce 18);
  • des brochures promotionnelles de l’Omnium canadien féminin affichent la marque RCGA (paragraphe 27, pièce 19);
  • des rapports d’enquête sur l’exploitation des parcours de golf et d’autres rapports affichent la marque RCGA (paragraphes 40 et 41, pièces 28 et 29);
  • le magazine GOLF CANADA (qui affiche la marque RCGA) est publié et diffusé par l’Opposante (paragraphes 55-56, pièces 37A à 37J) – le déposant croit savoir que 670 000 copies du magazine sont distribuées annuellement;
  • des casquettes portant la marque RCGA bien en évidence sont distribuées à ceux qui adhèrent au « programme du golfeur public » de l’Opposante (paragraphe 65, pièce 43) – 1 500 casquettes ont été remises en 2000;
  • des T-shirts où la marque RCGA apparaît sur la manche ont été portés par les bénévoles qui travaillaient pour l’Omnium féminin (paragraphe 66, pièce 44) – 1 800 T‑shirts sont distribués chaque année;
  • des tés portant la marque RCGA ont été distribués à des équipes amateurs (paragraphe 67, pièce 45) – 50 000 tés sont distribués chaque année;
  • des étiquettes de sacs de golf portant la marque RCGA ont été distribuées à des équipes amateurs (paragraphe 68, pièce 46) – 1 295 étiquettes sont distribuées chaque année;
  • des pinces à billets portant la marque RCGA ont été distribuées à des équipes amateurs (paragraphe 69, pièce 47) – 1 295 pinces sont distribuées chaque année.

 

Alinéa 6(5)b) – la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

Nous ne disposons d’aucun élément de preuve indiquant que la Requérante ait jamais employé la Marque projetée en liaison avec des marchandises, mais il appert de la preuve de l’Opposante que le site Web de la Requérante existait en 2005. Étant donné que l’Opposante affirme employer sa marque RCGA depuis 1948, le facteur de la durée de l’emploi des marques favorise incontestablement l’Opposante.

 

Alinéa 6(5)c) et d) – le genre de marchandises, services ou entreprises et la nature du commerce

Depuis sa fondation en 1895, l’Opposante exerce les fonctions d’organisme dirigeant à l’égard du golf amateur au Canada. M. Ross a énuméré quatorze types d’activité dont l’Opposante a la responsabilité (paragraphe 10). La plupart se rapportent à la supervision des règles du jeu, à l’organisation de tournois et au soutien du développement du golf, mais l’une d’elles se rapproche un peu plus des services offerts par la Requérante, à savoir la responsabilité de [traduction] « promouvoir et financer la recherche et le développement en matière d’environnement et d’agronomie dans leur rapport avec le golf ». M. Ross précise en ces termes la responsabilité de l’Opposante relative à la régie environnementale, au paragraphe 38 : [traduction] « prendre toutes les précautions possibles pour que les produits et techniques utilisés dans l’aménagement et l’entretien de parcours de golf présentent le moins de risque possible pour les employés, les golfeurs, le public et l’environnement ». Ainsi, il appert que la clientèle type de l’Opposante soit formée des exploitants de parcours de golf, des golfeurs et des amateurs de golf.

 

Il ressort par contre du site Web de la Requérante (ainsi que de son état déclaratif des services) que son activité première est la prévention des dommages aux infrastructures souterraines, comme en témoigne sa campagne visant l’adoption d’une loi établissant un régime obligatoire du type [traduction] « Appelez avant de creuser » (affidavit de Mme Collins, pièce 1). Le site Web indique également que les membres de la Requérante sont généralement [traduction] « des propriétaires, des exploitants et des baillants-loueurs d’installations [souterraines], des concepteurs professionnels, des employés de centres à numéro unique, des excavateurs, des entrepreneurs et d’autres intervenants ».

 

L’Opposante soutient que les services des parties se recoupent du fait que [traduction] « les deux parties s’occupent de réglementation et de programmes d’éducation visant des espaces extérieurs et des espaces verts » (plaidoyer écrit de l’Opposante, paragraphe 14.2), mais j’estime que les rapports entre les champs d’intérêt et les voies de commercialisation des parties sont ténus. Il existe toutefois un recoupement entre certaines des marchandises des parties, notamment des publications et des vêtements.

 

Alinéa 6(5)e) – le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent

La Marque de la Requérante incorpore intégralement la marque RCGA de l’Opposante. Dans la Marque de la Requérante, une lettre additionnelle figure devant la suite de lettres communes, mais ce « O » supplémentaire n’est pas un élément particulièrement fort puisque qu’il s’agit de la première lettre du mot Ontario. Bien que le premier élément d’une marque soit souvent considéré comme le plus important lorsqu’il s’agit d’évaluer le caractère distinctif, il perd de son importance lorsqu’il est couramment utilisé ou qu’il est descriptif ou suggestif [voir Conde Nast Publications Inc. c. Union des Éditions Modernes (1979), 46 C.P.R. (2d) 183 (C.F. 1re inst.); Park Avenue Furniture Corp. c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.); Phantom Industries Inc. c. Sara Lee Corp. (2000), 8 C.P.R. (4th) 109 (C.O.M.C.)].

 

La Requérante souligne que les mots qui entourent l’acronyme ORCGA permettent de distinguer la Marque de la marque RCGA de l’Opposante, tout comme l’élément graphique imbriqué dans la lettre « A ». Toutefois, l’Opposante fait valoir que ce dernier élément pourrait être considéré comme une balle de golf en vol.

 

Nous ne disposons d’aucun élément de preuve concernant la façon dont serait prononcé l’acronyme ORCGA faisant partie de la Marque de la requérante; peut-être que chaque lettre serait prononcée, mais peut‑être aussi serait-il prononcé comme un mot de deux syllabes, auquel cas, il se distinguerait de l’acronyme RCGA nécessairement prononcé lettre par lettre.

 

L’acronyme RCGA ne suggère rien, à moins qu’on ne le considère comme l’abréviation de Royal Canadian Golf Association (Association royale de golf du Canada). L’idée suggérée par la Marque de la Requérante est énoncée dans la marque elle-même, c’est‑à‑dire Ontario Regional Common Ground Alliance.

 

« Même s’il faut examiner la marque comme un tout (et non la disséquer pour en faire un examen détaillé), il est tout de même possible d’en faire ressortir des caractéristiques particulières susceptibles de jouer un rôle déterminant dans la perception du public » [United Artists Corp. c. Pink Panther Beauty Corp. (1998), 80 C.P.R. (3d) 247 (C.A.F.), p. 263]. En l’espèce, la prédominance des lettres ORCGA dans la Marque crée une ressemblance entre les deux marques. Il s’impose toutefois de considérer les marques dans leur ensemble, et la Marque de la Requérante n’est pas uniquement constituée des lettres ORCGA. Le fait que la Marque incorpore le sens de l’acronyme ORCGA revêt une importance particulière.

 

Autres circonstances

i) Mme Collins a déposé des pages tirées du site Web de la requérante faisant la promotion d’un tournoi de golf annuel de l’ORCGA. Toutefois, je ne considère pas qu’il s’agisse là d’une circonstance importante puisqu’il est manifeste que l’entreprise de la Requérante n’est pas l’organisation de tournois de golf, à l’exception du simple tournoi annuel de ses membres.

 

ii) M. Ross a déclaré que la marque RCGA est employée en liaison avec d’autres articles de promotion, nommément des blousons, des vestes, des fourre‑tout et des cordons (paragraphe 53), mais cette déclaration n’a pas été prouvée.

 

iii) Les deux parties semblent jouir de l’appui de sociétés commanditaires.

 

Conclusion concernant le risque de confusion

Les observations suivantes formulées par le juge Cattanach dans GSW Ltée. c. Great West Steel Industries Ltd. et al. (1975), 22 C.P.R. (2d) 154 (C.F. 1re inst.) sont particulièrement pertinentes en l’espèce :

29   Il est clair d’après l’affaire du Cros (précitée) et d’autres qu’une marque composée uniquement de lettres (et avant l’enregistrement du 3 mai 1968 c’est ce en quoi consistait la marque de l’appelante) sans autre signe distinctif de l’enregistrement est une marque qui manque de caractère distinctif. En conséquence, une marque de commerce ou un dessin‑marque consistant uniquement en lettres est qualifiée de « marque faible ».

 

30   Dans l’affaire American Cyanamid Co. c. Record Chemical Co. Inc. (1973), 7 C.P.R. (2nd) 1, le juge en chef adjoint Noël a déclaré à la page 5 :

 

Lorsqu’il s’agit de marques faibles ou n’ayant en soi que peu de caractère distinctif, nous pouvons certainement accepter que ces marques se distinguent par de légères différences, mais cela ne signifie pas qu’il ne faut pas tenir compte des parties faibles d’une marque pour opérer cette distinction.

 

31   En bref, lorsqu’un commerçant s’approprie des lettres de l’alphabet comme dessin‑marque sans autre signe distinctif et tente d’empêcher d’autres commerçants de faire de même, la protection à donner à ce commerçant doit être plus réduite que dans le cas d’une marque de commerce unique et des différences relativement minimes suffisent à éviter la confusion. On s’attend normalement, dans ces circonstances, à ce que le public manifeste beaucoup plus de discernement. (Voir les observations de Lord Simon au sujet des noms commerciaux dans l’affaire Office Cleaning Services c. Westminster Window and General Cleaners Limited (1944), 61 R.P.C. 133, à la p. 135.)

[Je souligne.]

 

Après examen de l’ensemble des circonstances, j’estime qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre les marques des parties pour ce qui est des services de la Requérante. Ce sont les différences entre les marques en cause et les importantes dissemblances entre les principaux champs d’intérêt des parties qui m’amènent à cette conclusion. Ces différences s’étendent également aux marchandises en cause, étant donné que chacune des marchandises de l’Opposante est clairement associée au golf et qu’on peut présumer que les articles promotionnels de la requérante seraient utilisés pour la promotion de ses propres services spécialisés. Toutefois, vu la présence du mot « golf » dans la description de l’article « polos de golf » figurant dans l’état des marchandises de la Requérante, il y a lieu de conclure que celle‑ci ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve à l’égard de cet article particulier. Pour le reste, je suis d’avis que la Requérante s’est acquittée de son fardeau de preuve à l’égard de l’emploi projeté de la Marque en liaison avec les marchandises énumérées dans sa demande, étant donné les différences entre les marques ainsi qu’entre les champs d’intérêt des parties. Je signale que si la demande d’enregistrement avait visé la marque ORCGA sans les mots supplémentaires ONTARIO REGIONAL COMMON GROUND ALLIANCE, l’Opposante aurait disposé d’arguments plus solides. Toutefois, aucune des versions graphiques de RCGA ne confère à l’argumentation de l’Opposante une assise plus solide que ne le fait la marque RCGA elle‑même.

 

Les motifs d’opposition fondés sur les al. 16(1)a) et (3)a) ne sont donc accueillis qu’à l’égard des « polos de golf ».

 

L’Opposante a également formulé des motifs d’opposition se rapportant au droit à l’enregistrement, fondés sur les al. 16(1)b) et c) et 16(3)b) et c) de la Loi. Toutefois, les arguments qu’elle invoque à l’appui de ces motifs n’ont pas plus de poids que ceux qu’elle a invoqués à l’égard des motifs fondés sur les al. 16(1)a) et (3)a). Autrement dit, exception faite du rejet des « polos de golf », aucun des motifs fondés sur l’art. 16 n’est accueilli. (Je relève que chacune des demandes antérieures de l’Opposante ne portait que sur des services.)

 

Les motifs d’opposition fondés sur les alinéas 38(2)b) et 12(1)e)

Il s’agit de déterminer, à l’égard de ce motif, si la Marque est composée de la marque officielle RCGA & Dessin (no 2) ou lui ressemble à un point tel qu’on pourrait vraisemblablement la confondre avec elle. Relativement à cette question, les marchandises et services et les voies de commercialisation des parties n’entrent pas en ligne de compte.

 

Comme le juge O’Keefe l’a indiqué dans Conseil canadien des ingénieurs professionnels c. APA ‑ The Engineered Wood Assn. (2000), 7 C.P.R. (4th) 239 (C.F. 1re inst.), au par. 69 :

 

[69] […] Pour contrevenir au sous-alinéa 9(1)n)(iii), et ne pas être enregistrable en vertu de l’alinéa 12(1)e), la marque projetée doit soit être identique à la marque officielle, soit avoir avec elle une ressemblance telle qu’on pourrait vraisemblablement la confondre avec elle. Les mots « composé de » utilisés au paragraphe de la Loi doivent être interprétés comme signifiant « identique à » , conclusion à laquelle en est apparemment venu le registraire.

 

[…]

 

[71] […] Les expressions anglaises « mistaken therefor » et « confusing with » ne sont pas synonymes.

 

En outre, le juge Lemieux a écrit, dans Assoc. Olympique Canadienne c. Coopérative Fédérée de Québec (2000), 7 C.P.R. (4th) 309 (C.F. 1re inst.) :

 

Je souscris aux motifs suivants que le juge Gibson a exposés à la suite de l’instance, car j’estime qu’ils sont pertinents relativement à la présente affaire pour traiter de la question des marques officielles que l’on utilise en vertu de l’article pour s’opposer à une demande de marque de commerce :

 

(1) Le critère applicable en vertu de l’article 9 est celui de la ressemblance, et dans le cas où la marque officielle et la marque que l’on cherche à obtenir ne sont pas identiques, la question qui se pose « est donc de savoir si la marque de la défenderesse est pratiquement la même que l’une ou toutes les marques de l’AGSO, ou si elle est essentiellement similaire », et le critère pertinent pour trancher cette question, qui a été énoncé dans La Reine c. Kruger, est de savoir si « une personne familière avec les marques de l’AGSO [ou l’une d’elles], mais qui s’en souvient imparfaitement [...] pourrait vraisemblablement la confondre [avec la marque de la défenderesse »] (page 217).

 

(2) Le critère que le juge Rothstein (tel était alors son titre) a adopté dans la décision Association olympique canadienne c. Health Care Employees Union of Alberta, précitée, n’est rien de plus qu’une reformulation utile du critère de l’arrêt Kruger, duquel il ne s’éloigne pas. Voici comment M. le juge Rothstein a énoncé le critère, à la page 19 :

 

La question qui se pose est de savoir si une personne qui ne connaît qu’une des marques en cause et en garde un vague souvenir, pourrait, sous l’effet d’une première impression, se tromper ou se méprendre.

 

(3) Le critère de la comparaison directe a été rejeté. Le juge Gibson a dit, à la page 217 :

 

Je ne peux accepter le moyen soumis pour le compte des demanderesses voulant que le critère soit celui de la « comparaison directe ». La notion de « comparaison directe » suppose un examen rigoureux et consciencieux des marques de l’AGSO et de la marque de la défenderesse ou une comparaison de ces marques. Or un tel examen rigoureux et consciencieux ou une telle comparaison a été spécifiquement rejeté par le juge Rothstein dans la décision Canadian Olympic Assn. c. Health Care Employees Union of Alberta.

 

 

Par souci de commodité, je reproduis les deux marques en cause :

 

ORCGA & design                                RCGA & Design

 

 

 

 

Il faut donc déterminer si une personne à qui la marque RCGA & Dessin reproduite ci‑dessus est familière mais qui s’en souvient imparfaitement [...] pourrait vraisemblablement la confondre avec la marque ORCGA & Dessin. La réponse est « non ».

 

Le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 38(2)d)

L’Opposante a soutenu que la Marque de la Requérante n’est pas distinctive parce qu’elle ne distingue pas véritablement les marchandises et services de la Requérante de ceux de l’Opposante et qu’elle n’est pas non plus adaptée à les distinguer. La date pertinente pour l’examen de ce motif est la date de la production de l’opposition, en l’occurrence le 12 décembre 2005 [Metro‑Goldwyn-Mayer Inc. c. Stargate Connections Inc. (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (C.F. 1re inst.), p. 324].

 

Le risque de confusion entre les marques des parties, tel qu’il se présentait le 12 décembre 2005, ne diffère pas sensiblement du risque qui existait aux dates antérieures, en 2004. En conséquence, le motif fondé sur le caractère distinctif connaîtra un sort semblable aux motifs fondés sur l’art. 16; il n’est accueilli qu’à l’égard des « polos de golf ».

 

Décision

En vertu de la délégation de pouvoirs faite par le registraire des marques de commerce sous le régime du paragraphe 63(3) de la Loi, je refuse la demande d’enregistrement en application du paragraphe 38(8) de la Loi, à l’égard du service et de la marchandise suivants :

  • Exploitation d’un site Web fournissant de l’information visant à promouvoir la protection d’installations souterraines;
  • polos de golf.

 

L’opposition est rejetée à l’égard des services et marchandises suivants :

  • Prévention des dommages pouvant être causés aux installations enfouies au moyen de l’éducation du public, de déclarations, de la sensibilisation du public, de règlements et de l’application de la loi; exploitation d’une organisation sans but lucratif engagée dans la prévention des dommages pouvant être causés aux installations enfouies au moyen de l’éducation du public, de déclarations, de la sensibilisation du public, de règlements et de l’application de la loi.
  • Articles promotionnels, nommément chopes à café, sacs de plastique, affiches, stylos, planchettes à pince, reliures, rubans à mesurer, calculettes, calendriers, blocs‑notes adhésifs, étiquettes à bagages, portefeuilles, tapis de souris, fourre-tout, cordons; publications, nommément revues, livres, brochures, bulletins, dépliants; vêtements, nommément chemises, tee-shirts, vestes, casques de baseball.

 

 

FAIT À TORONTO (ONTARIO), le 23 JANVIER 2009

 

 

Jill W. Bradbury

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Ghislaine Poitras, LL.L., Trad. a.

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