Contenu de la décision
TRADUCTION/TRANSLATION
RELATIVEMENT A L’ OPPOSITION de Les Produits laitiers Astro Limitée à la demande d’enregistrement no 608 984 concernant la marque de commerce BIO DANONE produite par Compagnie Gervais Danone, une société anonyme
Le 10 juin 1988, la requérante, Compagnie Gervais Danone, une société anonyme, a produit une demande d’enregistrement de la marque de commerce BIO DANONE fondée sur l’emploi projeté de la marque de commerce au Canada en liaison avec des « LAITS ET PRODUITS LAITIERS, nommément : lait frais, lait à longue durée de conservation, lait fermenté, beurre, yogourt, crème, fromage, fromage blanc ».
La marque de commerce BIO DANONE a été publiée pour fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce le 8 août 1990 et l’opposante, Les Produits laitiers Astro Limitée, a produit une déclaration d’opposition le 10 juin 1991, dont copie a été envoyée à la requérante le 4 juillet 1991. L’opposante a demandé la permission, qui lui a été accordée, de modifier sa déclaration d’opposition conformément à l’article 42 [maintenant l’article 40] du Règlement sur les marques de commerce. Les motifs d’opposition suivants ont été soulevés dans la déclaration d’opposition modifiée :
a) La marque de commerce de la requérante n’est pas enregistrable compte tenu de l’alinéa 12(1)b) de la Loi sur les marques de commerce, car la marque, sous forme graphique, écrite ou sonore, donne une description claire ou donne une description fausse et trompeuse, en langue française et anglaise, de la nature ou de la qualité biologique des marchandises en liaison avec lesquelles la marque est employée ou à l’égard desquelles on projette de l’employer, ou des conditions biologiques de leur production.
b) La marque de commerce n’est pas enregistrable compte tenu des dispositions de l’alinéa 12(1)d) de la Loi sur les marques de commerce, car la marque de commerce de la requérante crée de la confusion avec les marques de commerce déposées suivantes :
(i) Marque de commerce No d’enregistrement
BIOSEDRA 152 657
BIOHALBE 212 920
BIO-MARGARINE 235 829
BIOSLIM 270 340
BIOMANAN 282 979
BIONORM 289 997
BIODYN & Dessin 292 642
BIOLAC 322 949
BIOBEST 350 094
BIOPLAIT 374 745
BIOGHURT 385 013
BIO-FRAIS 362 911
BIO-FRESH 362 912
(ii) Marque de commerce No d’enregistrement
BIO-BAR 245 913
BIOBEL 273 422
BIOBLEND 268 827
BIOGERM 200 974
BIOGRAIN 277 137
BIOGUETTE 296 428
BIO-HEALTH 192 518
BIOLOGICAL EDGE 311 197
BIOLIGNE 273 423
BIOMEL 280 173
BIOMIX 267 927
BIO-ORGANIC 237 459
BIO-PLUS 299 919
BIO-SOURCE 276 613
BIO-ST-JOSEPH 225 305
BIO-STRATH 133 946
BIO-TE 281 119
BIO-VEG 289 354
BIO-GOLD 365 708
c) La requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la marque de commerce, car, à la date du dépôt de la présente demande, la marque de la requérante créait de la confusion avec la marque de commerce BIOBEST de l’opposante que cette dernière avait adoptée depuis au moins le 22 octobre 1987, avant la date dépôt de la présente demande, et que cette dernière employait à la date de l’annonce, soit le 8 août 1990, en liaison avec des produits laitiers de culture biologiques.
d) La marque de commerce de la requérante n’est pas enregistrable en ce qu’elle n’est pas distinctive car elle n’est pas conçue de façon à distinguer les marchandises de la requérante et qu’elle ne réussit effectivement pas à distinguer les marchandises de la requérante de celles d’autres personnes. Le préfixe BIO, qui est une partie prédominante de la marque de commerce, a été, à toutes les dates pertinentes, communément employé en tant que partie intégrante des marques de commerce utilisées en liaison avec des produits laitiers, comme on peut le voir dans les exemples de marques de commerce présentés ci‑dessus au paragraphe b)(i), et en liaison avec d’autres produits alimentaires diététiques, comme on peut le voir dans les exemples de marques de commerce présentés ci‑dessus au paragraphe b)(ii).
La requérante a signifié et produit une contre-déclaration dans laquelle elle niait l’ensemble des motifs d’opposition formulés par l’opposante. En outre, la requérante a par la suite obtenu la permission, conformément à l’article 40 du Règlement sur les marques de commerce, de modifier sa contre‑déclaration. L’opposante a produit en preuve l’affidavit de Jack Marshall, tandis que la requérante a produit en preuve l’affidavit de Karen Smythe. Les deux parties ont produit des plaidoyers écrits et étaient représentées à l’audience.
En tant que premier motif d’opposition, l’opposante a allégué que la marque de commerce de la requérante n’est pas enregistrable compte tenu des dispositions de l’alinéa 12(1)b) de la Loi sur les marques de commerce, en ce que la marque de commerce BIO DANONE, sous forme graphique, écrite ou sonore, donne une description claire ou donne une description fausse et trompeuse, en langue française et anglaise, de la nature biologique ou de la qualité des marchandises en liaison avec lesquelles elle est employée, ou à l’égard desquelles on projette de l’employer, et des conditions biologiques de leur production. En ce qui concerne le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)b), le fardeau légal repose sur la requérante de démontrer que sa marque de commerce BIO DANONE est enregistrable. Cependant, le fardeau de preuve initial repose sur l’opposante de soumettre suffisamment d’éléments de preuve qui, s’ils sont jugés plausibles, viendraient étayer la véracité de ces allégations selon lesquelles la marque de la requérante donne une description claire de la nature ou de la qualité de ses marchandises ou des conditions biologiques de leur production. La date pertinente en ce qui concerne un motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)b) de la Loi est la date à laquelle la décision est rendue [voir Lubrication Engineers, Inc. c. Le Conseil canadien des ingénieurs, 41 C.P.R. (3d) 243 (CAF)]. Comme l’opposante n’a produit aucun élément de preuve à l’appui de ce motif d’opposition, elle ne s’est pas acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait. De toute façon, j’estime que la marque de commerce BIO DANONE, lorsqu’elle est considérée dans son ensemble, ne donne pas une description claire des marchandises de la requérante. En conséquence, j’ai rejeté le premier motif d’opposition.
Le deuxième motif d’opposition est fondé sur l’alinéa 12(1)d) de la Loi sur les marques de commerce, l’opposante prétendant que la marque de commerce BIO DANONE de la requérante crée de la confusion avec plusieurs des marques de commerce enregistrées énumérées ci‑dessus, y compris sa marque enregistrée BIOBEST, no d’enregistrement 350 094. Comme les plaidoyers présentés par les deux parties à l’audience portent sur le risque de confusion entre les marques de commerce BIO DANONE et BIOBEST, j’examinerai tout d’abord cette question. Pour déterminer s’il existe un risque raisonnable de confusion entre les marques de commerce en cause au sens du paragraphe 6(2) de la Loi sur les marques de commerce, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles qui sont expressément énumérées au paragraphe 6(5) de la Loi. Le registraire doit également tenir compte du fait que le fardeau légal repose sur la requérante de démontrer qu’il n’y aurait aucun risque raisonnable de confusion entre les marques de commerce des parties à la date de la décision rendue dans l’affaire, la date pertinente eu égard au motif fondé sur l’alinéa 12(1)d) [voir Park Avenue Furniture Corp. c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. et al, 37 C.P.R. (3d) 413 (CAF)].
Pour ce qui est du caractère distinctif inhérent des marques de commerce en cause, la marque de commerce BIOBEST de l’opposante en liaison avec du yogourt et du fromage cottage possède un certain caractère distinctif inhérent, même si l’élément BEST (meilleur) a une signification élogieuse et n’ajoute donc aucun caractère distinctif inhérent à la marque de l’opposante, et même si le préfixe BIO peut suggérer à certains consommateurs que les marchandises de l’opposante ont un aspect biologique. La marque de commerce BIO DANONE de la requérante, lorsqu’elle est considérée dans son ensemble, possède un caractère distinctif inhérent plus marqué que la marque de l’opposante. Bien que le mot BIO est suggestif, le mot DANONE semble être un terme inventé.
L’affidavit de M. Smythe démontre que la requérante n’a pas encore commencé à employer la marque de commerce BIO DANONE au Canada. En outre, rien n’indique dans l’affidavit en question que la marque de la requérante aurait acquis une certaine notoriété de quelque façon au Canada. Par contre, l’affidavit de M. Marshall établit que l’opposante a commencé à vendre son yogourt BIOBEST au Canada au mois de juillet 1988 et que, depuis ce moment, l’opposante a vendu au moins 7 000 000 de contenants de yogourt BIOBEST ayant une valeur marchande au détail d’environ 6 000 000 $. Selon M. Marshall, vice‑président des ventes et du marketing de l’opposante, le yogourt de cette dernière est vendu dans des épiceries à succursales, des épiceries de détail indépendantes et des épiceries fines en Ontario ainsi que dans les grandes régions métropolitaines du Manitoba, de la Colombie‑Britannique, du Québec et de Terre‑Neuve. Ainsi la mesure dans laquelle les marques de commerce en cause sont devenues connues ainsi que la période pendant laquelle les marques ont été en usage pèsent nettement en faveur de l’opposante.
Les produits laitiers des parties se chevauchent en ce que l’enregistrement de l’opposante vise du yogourt et du fromage cottage, produits qui sont identiques au yogourt et au fromage cottage vendus par la requérante et qui présentent aussi un étroit rapport avec le lait frais et le lait fermenté, le beurre, la crème et le fromage de la requérante. En outre, il y aurait un chevauchement entre les canaux de distribution associés à ces marchandises.
Quant au degré de ressemblance entre les marques de commerce en cause, les marques de commerce BIO DANONE et BIOBEST présentent un certain degré de ressemblance dans la présentation ou le son à cause de l’élément initial BIO. Il existe également un certain degré de ressemblance entre les marques dans les idées qu’elles suggèrent, en ce que les marques pourraient suggérer à certains consommateurs que les marchandises des parties ont un aspect biologique.
En tant qu’autre circonstance de l’espèce concernant la question de la confusion, la requérante a fait observer qu’il y avait quatre marques de commerce enregistrées énumérées dans la déclaration d’opposition de l’opposante qui sont composées du préfixe BIO pour désigner du yogourt et qui sont enregistrées aux noms de tiers. Toutefois, j’estime que la simple existence de quatre marques de commerce dans le registre, mais sans preuve d’emploi, n’est pas d’une grande utilité pour la requérante. À cet égard, je noterais que la demande d’enregistrement de la marque de commerce BIOHALBE était fondée sur l’emploi et l’enregistrement en Allemagne et que M. Marshall a indiqué dans son affidavit que, à sa connaissance, aucun autre yogourt n’est vendu au Canada sous une marque de commerce composée de l’élément BIO.
Compte tenu du degré de ressemblance entre les marques de commerce en cause utilisées en liaison avec des marchandises qui se chevauchent et qui passeraient par les mêmes canaux de distribution, et comme l’opposante a démontré que sa marque BIOBEST est devenue connue au Canada, j’en suis venu à la conclusion que la requérante n’a pas réussi à s’acquitter du fardeau ultime qui lui incombait d’établir qu’il n’y aurait aucun risque raisonnable de confusion entre sa marque de commerce BIO et la marque enregistrée BIOBEST de l’opposante. En conséquence, la marque de commerce BIO DANONE de la requérante en liaison avec des « LAITS ET PRODUITS LAITIERS, nommément : lait frais, lait à longue durée de conservation, lait fermenté, beurre, yogourt, crème, fromage, fromage blanc » n’est pas enregistrable en raison de l’alinéa 12(1)d) de la Loi sur les marques de commerce.
Étant donné ce qui précède, je repousse la demande de la requérante conformément au paragraphe 38(8) de la Loi sur les marques de commerce. Je n’ai donc pas examiné les autres motifs d’opposition formulés par l’opposante.
FAIT À HULL (QUÉBEC), CE 2ième JOUR DE DECEMBRE 1997
G. W. Partington
Président de la Commission des
oppositions des marques de commerce