Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

AFFAIRE INTÉRESSANT L’OPPOSITION de

London Regional Transport à la demande no 828,071

produite par Planet Luv-Tron, Inc. en vue de

l’enregistrement de la marque de commerce LONDON UNDERGROUND

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Le 6 novembre 1996, William A. Berdan et Edward C. Goetz, III, une société en nom collectif constituée sous le régime des lois de l’Oregon, formée de William A. Berdan et de Edward C. Goetz, III, a produit une demande en vue de l’enregistrement de la marque de commerce LONDON UNDERGROUND.  La demande revendique la date de priorité de production conventionnelle du 24 juin 1996 basée sur une demande produite aux États-Unis d’Amérique.  La demande est actuellement basée uniquement sur l’emploi projeté de la marque de commerce au Canada et le libellé de l’état courant des marchandises est le suivant : « chaussures, bottes et sandales pour hommes et femmes; bijoux ».  Il y a eu, au cours des ans, de nombreux changements de propriétaire en ce qui concerne la présente demande, et le propriétaire actuel est Planet Luv-Tron, Inc.  En conséquence, Planet Luv-Tron, Inc. et ses prédécesseurs sont désignés collectivement ci-après la requérante.

 

Aux fins de toute opposition éventuelle, la demande a été annoncée dans le Journal des marques de commerce du 7 octobre 1998.  L’opposante, London Regional Transport, a produit une déclaration d’opposition le 8 mars 1999.  Une contre-déclaration a été produite et signifiée en temps voulu.

 

À titre de preuve, l’opposante a produit l’affidavit de David Rhys Ellis.  Même si elle a obtenu une ordonnance l’autorisant à contre-interroger M. Ellis, la requérante n’a pas mené ledit contre-interrogatoire.

 

À titre de preuve, la requérante a produit les affidavits de William A. Berdan et de John B. Self, Jr.

 

Les deux parties ont produit un mémoire écrit, et elles étaient représentées à l’audience qui a été tenue.

 

Il y a quatre motifs d’opposition.

 

Le premier motif d’opposition est rejeté.  L’opposante a fait valoir que la demande n’est pas conforme à l’alinéa 30i) de la Loi sur les marques de commerce, car la requérante ne pouvait pas être convaincue qu’elle avait droit d’employer la marque parce que la marque créait de la confusion, au moment de la production de la demande, avec la marque de commerce LONDON UNDERGROUND identique de l’opposante, laquelle avait été antérieurement révélée au Canada par l’opposante en liaison avec un réseau ferroviaire souterrain et une grande variété de biens connexes, y compris des chaussures.  Toutefois, l’opposante n’a pas invoqué le fait que la requérante était au courant de la révélation alléguée.  Même si elle avait invoqué correctement ce motif, ledit motif aurait été rejeté car, comme il est exposé ci-dessous, l’opposante n’a pas établi la révélation antérieure alléguée.

 

Selon le deuxième motif d’opposition, la marque de la requérante n’est pas enregistrable en vertu de l’alinéa 12(1)e) de la Loi, « car elle crée de la confusion en vertu du sous-alinéa 9(1)n)(iii) » avec une marque adoptée et employée au Canada par l’opposante comme marque officielle pour des marchandises et services, nommément :

                                                          

Le texte du sous-alinéa 9(1)n)(iii) est reproduit ci-dessous.

9. (1) Nul ne peut adopter à l’égard d’une entreprise, comme marque de commerce ou autrement, une marque composée de ce qui suit, ou dont la ressemblance est telle qu’on pourrait vraisemblablement la confondre avec ce qui suit :

n) tout insigne, écusson, marque ou emblème :

(iii) adopté et employé par une autorité publique au Canada comme marque officielle pour des marchandises ou services,

à l’égard duquel le registraire, sur la demande de Sa Majesté ou de l’université ou autorité publique, selon le cas, a donné un avis public d’adoption et d’emploi;

 

Il y a trois bases différentes sur lesquelles je rejetterais le deuxième motif d’opposition.

 

Premièrement, je ne tiendrais pas compte de ce motif d’opposition parce qu’il n’invoque pas un motif d’opposition approprié puisqu’une marque  n’est pas interdite par l’article 9 si elle crée de la confusion avec une marque officielle.  L’article 9 interdit plutôt une marque qui est composée d’une marque officielle ou dont la ressemblance est telle qu’on pourrait vraisemblablement la confondre avec une marque officielle.

 

Deuxièmement, même s’il avait été correctement soulevé, ce motif aurait été rejeté parce que LONDON UNDERGROUND ne ressemble pas à UNDERGROUND & Design au point d’être vraisemblablement être confondue avec cette marque.  Pour déterminer si une marque risque d’être confondue avec une marque officielle, il faut examiner les facteurs prévus à l’alinéa 6(5)e) de la Loi, à savoir le degré de ressemblance sur le plan de la présentation, du son et des idées qu’elle suggère et appliquer le critère de la première impression et du souvenir imparfait [voir Big Sisters Association of Ontario c. Big Brothers of Canada (1999), 86 C.P.R. (3d) 504 (C.A.F.); confirmée par (1997), 75 C.P.R. (3d) 177 (C.F. 1re inst.)].  Il n’est pas nécessaire d’examiner la renommée que peut avoir acquise l’une ou l’autre des marques.  Par conséquent, en application de l’article 9, il n’est pas nécessaire de tenir compte du fait que la marque de l’opposante peut avoir un lien avec Londres (Angleterre), ou avec un système de transport.  En conséquence, je conclus que sur le plan de la présentation, du son et des idées suggérées, il y a assez de différences entre les deux marques, qu’un Canadien n’est pas susceptible, comme première impression, de confondre l’une des marques avec l’autre.  En particulier, la forme ronde de la marque de l’opposante et le mot LONDON qui domine, en première position, dans la marque de la requérante font en sorte qu’il est peu probable, selon la prépondérance des probabilités, que la marque de la requérante soit confondue avec celle de l’opposante.

 

Troisièmement, la requérante a souligné que l’opposante n’a fourni aucun détail quant à la publication de la marque officielle ni dans sa déclaration d’opposition ni dans sa preuve.  Une vérification du registre nous indique qu’à la date du dépôt de la déclaration d’opposition, le registraire n’avait pas donné d’avis public d’une telle marque officielle.  L’avis public d’une telle marque a été donné deux jours plus tard.  Selon moi, ce motif d’opposition était donc nul dès le début et il ne pouvait pas y être remédié par l’émission subséquente de l’avis public, même si la date pertinente à l’égard de l’alinéa 12(1)e) est la date d’aujourd’hui.  Évidemment, pour les raisons susmentionnées, ce motif aurait été rejeté même s’il avait été ajouté au moment opportun.

 

Selon le troisième motif d’opposition, la requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la marque de commerce en vertu de l’article 16 parce que la marque visée par la demande d’enregistrement créait de la confusion à la date du 6 novembre  1996 et du 24 juin 1996 avec la marque de commerce LONDON UNDERGROUND de l’opposante antérieurement révélée.

 

La requérante a le fardeau de persuasion, à savoir d’établir, selon la prépondérance de la preuve, qu’il n’y a pas de risque de confusion entre sa marque de commerce et la marque de commerce de l’opposante [voir Dion Neckwear Ltd. c. Christian Dior, S.A. (2002), 20 C.P.R. (4th) 155 (C.A.F.)]. Toutefois, l’opposante a le fardeau de présentation, c’est-à-dire de produire des éléments de preuve suffisants pour appuyer la véracité de ses allégations.  En ce qui concerne le présent motif d’opposition, l’opposante doit établir la révélation de sa marque de commerce avant la date de priorité de production conventionnelle de la requérante et établir le non-abandon de sa marque de commerce à la date de l’annonce de la demande de la requérante [paragraphes 16(5) et 17(1) de la Loi sur les marques de commerce].  Ainsi, la marque de commerce de l’opposante doit se conformer aux exigences relatives à la révélation énoncées à l’article 5 de la LoiLe texte de l’article 5 est reproduit ci-dessous :

 

5.         Une personne est réputée faire connaître une marque de commerce au Canada seulement si elle l'emploie dans un pays de l'Union, autre que le Canada, en liaison avec des marchandises ou services, si, selon le cas :

a) ces marchandises sont distribuées en liaison avec cette marque au Canada;

b) ces marchandises ou services sont annoncés en liaison avec cette marque :

(i) soit dans toute publication imprimée et mise en circulation au Canada dans la pratique ordinaire du commerce parmi les marchands ou usagers éventuels de ces marchandises ou services,

(ii) soit dans des émissions de radio ordinairement captées au Canada par des marchands ou usagers éventuels de ces marchandises ou services,

et si la marque est bien connue au Canada par suite de cette distribution ou annonce.

 

Par conséquent, pour s’acquitter de son fardeau de preuve initial, l’opposante doit établir que la marque de commerce LONDON UNDERGROUND est devenue bien connue au Canada en raison de la distribution ou de la publicité des marchandises ou des services de l’opposante en liaison avec ladite marque de commerce au Canada.  De plus, afin qu’une marque puisse être jugée comme étant devenue « bien connue » au Canada, une partie substantielle du Canada doit connaître la marque [voir Marineland Inc. c. Marine Wonderland and Animal Park Ltd. (1974), 16 C.P.R. (2d) 97 (C.F. 1re inst.)]

 

Dans son argumentation écrite, la requérante résume la preuve de l’opposante de la façon suivante :

[traduction] En résumé, selon la déposition de M. Ellis, l’opposante fournit des services de transport public à Londres (Angleterre), et, accessoirement, vend des vêtements et des articles de type souvenir à Londres, sur lesquels figurent diverses marques de commerce, y compris parfois la marque de commerce UNDERGROUND & Roundel Device et rarement LONDON UNDERGROUND.  Elle ne vend pas le type de biens visés par la présente demande.  Il n’y a aucune preuve qui établit que les marques de commerce UNDERGROUND & Roundel Device et LONDON UNDERGROUND de l’opposante sont connues au Canada. Il n’y a aucune preuve d’emploi des marques de commerce au Canada et, en fait, aucun tel emploi n’est plaidé dans la déclaration d’opposition.

 

M. Ellis, le seul déposant pour l’opposante, n’a présenté aucune preuve quant à la distribution, à l’exécution et à l’annonce des marchandises ou services au Canada en liaison avec la marque de commerce LONDON UNDERGROUND.  Par conséquent, l’opposante ne s’est pas acquittée du fardeau de preuve initial qui lui incombait d’établir que sa marque avait été révélée au Canada, conformément à l’article 5, avant le 24 juin 1996 ou à toute autre époque.  En conséquence, le motif d’opposition fondé sur l’article 16 est rejeté.

 

Selon le quatrième motif d’opposition, la marque de commerce de la requérante n’a pas de caractère distinctif, car elle ne distingue pas et n’est pas apte à distinguer les marchandises de la requérante des marchandises en liaison avec lesquelles les marques « ROUNDEL Device et UNDERGROUND » de l’opposante (qui est, je suppose, le nom attaché à la marque officielle de l’opposante) et LONDON UNDERGROUND ont été antérieurement révélées au Canada.  Pour s’acquitter de son fardeau de preuve en ce qui concerne ce motif d’opposition, l’opposante n’a qu’à établir que ses marques étaient devenues assez connues pour nier le caractère distinctif de la marque visée par la demande à la date du 8 mars 1999.  Elle n’a pas besoin d’établir que ses marques sont bien connues au Canada ou qu’elles ont été révélées uniquement par les moyens restrictifs énoncés à l’article 5 de la Loi [voir Motel 6, Inc. c. No. 6 Motel Ltd. (1981), 56 C.P.R. (2d) 44 (C.F. 1re inst.), Re Andres Wines Ltd. et E. & J. Gallo Winery (1975), 25 C.P.R. (2d) 126 (C.A.F.), Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 412 (C.A.F.) et Metro-Goldwyn-Meyer Inc. c. Stargate Connections Inc., 2004 CF 1185].

 

M. Ellis fournit des renseignements concernant la vente de diverses marchandises en liaison avec les marques de l’opposante, mais toutes ces ventes ont été réalisées en Angleterre.  Même s’il indique que de nombreux touristes de partout dans le monde achètent ces biens, je ne crois pas que ce soit une base suffisante pour conclure que les marques de l’opposante sont devenues assez connues au Canada pour nier le caractère distinctif de la marque de la requérante.  Bien que je sois disposée à prendre connaissance d’office du fait que des Canadiens visitent l’Angleterre, je ne suis pas prête à accepter que les Canadiens associent LONDON UNDERGROUND ou « ROUNDEL Device et UNDERGROUND » apposée sur des vêtements, comme étant une indication d’une source particulière (en effet, je soupçonne qu’il est plus probable que les Canadiens penseraient qu’il s’agit d’un souvenir de Londres plutôt qu’une indication de la source).  De plus, M. Ellis n’a fourni aucun document qui montre l’emploi de LONDON UNDERGROUND en liaison avec des vêtements.  En fait, la seule marchandise produite en preuve qui porte les mots LONDON UNDERGROUND est un produit CD-ROM (photographie 27).  Il y a également trois livres qui comprennent les mots LONDON UNDERGROUND dans leurs titres annoncés sur le site Web de l’opposante.  Je remarque également que la page intitulée « What is protected?» sur le site Web de l’opposante ne mentionne pas LONDON UNDERGROUND comme étant un bien protégé.

 

Par conséquent, je rejette le quatrième motif d’opposition sur la base que l’opposante ne s’est pas acquittée du fardeau de la preuve initial qui lui incombait.


 

Conformément au pouvoir qui m’a été délégué par le registraire des marques de commerce en application du paragraphe 63(3) de la Loi sur les marques de commerce, je rejette l’opposition en vertu du paragraphe 38(8) de la Loi.

 

 

 

FAIT À TORONTO, ONTARIO, CE 21e JOUR DE DÉCEMBRE 2004.

 

 

 

Jill W. Bradbury

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

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