Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2015 COMC 69

Date de la décision : 2015-04-09

TRADUCTION

DANS L'AFFAIRE DE L'OPPOSITION produite par The Proctor & Gamble Company à l'encontre de la demande d'enregistrement no 1,519,201 pour la marque de commerce SOOTHING CUCUMBER au nom de Reckitt Benckiser (Canada) Inc.

[1]               Le 15 mars 2011, Reckitt Benckiser (Canada) Inc. (la Requérante) a produit la demande d'enregistrement no 1,519,201 pour la marque de commerce SOOTHING CUCUMBER (la Marque). La demande pour la Marque est basée sur un emploi projeté au Canada et couvre les produits décrits comme suit :

[traduction]
Savons antibactériens; savons; produits nettoyants pour les mains; savons pour les mains non médicamenteux; savons liquides pour les mains, le visage et le corps; produits de soins de la peau non médicamenteux, nommément crèmes, lotions et gels protecteurs; produits désinfectants pour les mains; nettoyants antibactériens pour la peau; savon antibactérien pour les mains; lotions, crèmes et gels antibactériens pour les mains; lotions, crèmes et gels protecteurs et antibactériens pour la peau.

[2]               La demande d'enregistrement a été annoncée aux fins d'opposition dans le Journal des marques de commerce du 19 octobre 2011, et le 19 décembre 2011, The Proctor & Gamble Company (l'Opposante) a produit une déclaration d'opposition en vertu de l'article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi). Le 12 mars 2012, la Requérante a demandé une décision interlocutoire en ce qui a trait à certaines lacunes alléguées dans les arguments. Suivant la demande de la Requérante, une déclaration d'opposition modifiée a été produite le 23 avril 2012. Le 15 mai 2012, le registraire a donné l'autorisation de produire la déclaration d'opposition modifiée et a statué que les arguments étaient suffisants.

[3]               Les motifs d'opposition sont fondés sur les articles 30b), 12(1)b) et 2 (caractère distinctif) de la Loi.

[4]               Une contre-déclaration niant chacun des motifs d'opposition a été produite par la Requérante le 6 juin 2012.

[5]               Comme preuve à l'appui de son opposition, l'Opposante a produit l'affidavit de James Meadway, souscrit le 5 octobre 2102 (l'affidavit de M. Meadway) et l'affidavit de Daniel Hynes, souscrit le 9 octobre 2012 (l'affidavit de M. Hynes). Aucun des déposants n'a été contre-interrogé.

[6]               À l'appui de sa demande d'enregistrement, la Requérante a produit l'affidavit de Gay Owens, souscrit le 4 février 2013 (l'affidavit de Mme Owens). Mme Owens a été contre-interrogée et la transcription de son contre-interrogatoire fait partie du dossier.

[7]               Les parties ont toutes deux produit un plaidoyer écrit.

[8]               Une audience a été tenue le 29 janvier 2015 et les parties y étaient toutes deux présentes.

Fardeau de preuve

[9]               C'est à la Requérante qu'incombe le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. L'Opposante a toutefois le fardeau initial de présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l'existence des faits allégués à l'appui de chacun des motifs d'opposition [voir John Labatt Limited c The Molson Companies Limited (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst), à 298].

Question préliminaire

[10]           À l'audience, l'Opposante a retiré le motif d'opposition fondé sur l'article 30b). Par conséquent, je n'examinerai pas ce motif dans ma décision.

Examen des autres motifs d'opposition

Article 12(1)b)

[11]           L'Opposante allègue que la Marque n'est pas enregistrable en vertu de l'article 12(1)b) de la Loi, parce qu'elle donne une description claire de la nature ou de la qualité des produits à l’égard desquels on projette de l’employer.

[12]           La date pertinente pour évaluer l'enregistrabilité d'une marque de commerce en vertu de l'article 12(1)b) de la Loi est la date de production de la demande, nommément le 15 mars 2011 [Fiesta Barbeques Limited c General Housewares Corporation (2003), 28 CPR (4th) 60 (CF 1re inst)].

[13]           Le test à appliquer pour déterminer si une marque de commerce correspond à l'exclusion prévue à l'article 12(1)b) de la Loi a été résumé par la Cour d'appel fédérale dans Ontario Teachers’ Pension Plan Board c Canada (2012), 99 CPR (4th) 213 (CAF), au para 29 :

[traduction]
Il est de jurisprudence constante que le critère applicable pour décider si une marque de commerce donne une description claire soit celui de la première impression créée dans l'esprit de la personne normale ou raisonnable. […] On ne devrait pas tenter de résoudre la question en procédant à une analyse critique des mots qui forment la marque, mais on devrait plutôt tenter de déterminer l'impression immédiate que donne la marque, compte tenu des produits ou des services avec lesquels elle est utilisée ou avec lesquels on se propose de l'utiliser. En d’autres termes, la marque de commerce ne doit pas être examinée de façon isolée, mais en fonction de l’ensemble du contexte des produits et des services.

[14]           Le mot « nature » à l'article 12(1)b) est interprété comme désignant une particularité, un trait ou une caractéristique des produits ou des services, et le mot « claire » est interprété comme signifiant « facile à comprendre, évident ou simple » [voir Drackett Co of Canada Ltd c American Home Products Corp (1968), 55 CPR 29, à 34].

[15]           L'Opposante allègue que la Marque décrit clairement que les produits de la Requérante sont faits de concombre et sont de nature ou ont une qualité apaisante. Par contre, la Requérante fait valoir que la combinaison des mots « soothing » [apaisant] et « cucumber » [concombre] crée une phrase unique qui n'est pas d'usage courant en anglais et qui rendrait les consommateurs perplexes quant à sa signification.

[16]           Comme l'a indiqué le juge Martineau dans Neptune SA c Canada (Procureur général) (2003), 29 CPR (4th) 497 (CF 1re inst.), au paragraphe 11 :

[traduction]
Afin de déterminer si une marque de commerce tombe sous cette exclusion [article 12(1)b)], le registraire doit non seulement tenir compte des éléments de preuve dont il dispose, mais également appliquer son sens commun à l'évaluation des faits...

[Voir également Ontario Teachers' Pension Plan Board c Canada (Procureur général) (2010), 89 CPR (4th) 301 (CF), au para 48; conf. par (2012), 99 CPR (4th) 213 (CAF).]

[17]           Outre la nécessité d'user de sens commun, j'ai la possibilité d'exercer mon pouvoir discrétionnaire de prendre en considération les définitions du dictionnaire des mots qui composent la Marque [Envirodrive Inc c 836442 Alberta Ltd, 2005 ABQB 446 (C.B.R. Alb); Yahoo! Inc c audible.ca inc (2009), 76 CPR (4th); Lakeside Produce Inc c Imagine IP LLC 2011 COMC 17 (CanLII)].

[18]           Dans son plaidoyer écrit, la Requérante a souligné que, dans le Canadian Oxford Dictionary (2d), « soothing » [apaisant] est défini comme : [traduction]
1) entraîner ou restaurer un état de paix et de tranquillité; 2) réduire l'intensité de; et 3) adoucir, apaiser ou soulager une douleur ou une émotion.

[19]           Compte tenu des différentes significations possibles de « soothing cucumber » [concombre apaisant], je n'estime pas que la Marque dans son ensemble soit évidente ou simple dans sa signification dans le contexte des produits de la Requérante, particulièrement en ce qui a trait à la première impression. Selon moi, il n'est pas évident si « soothing » vise à exprimer que les produits de la Requérante sont « apaisants » sur le plan physique et sont censés, par exemple, adoucir, apaiser ou soulager une certaine douleur physique ou un inconfort ou s'ils sont « apaisants » sur le plan de la détente et des émotions, peut-être à l'instar de l'aromathérapie. Les consommateurs des produits de la Requérante peuvent également se demander s’ils sont composés de concombre ou s'ils ont simplement une propriété ou un parfum de concombre. Par conséquent, même si « soothing » et « cucumber » et même « soothing cucumber » peuvent donner une description de certains aspects des produits de la Requérante, je n'estime pas que la Marque est clairement descriptive au sens de l'article 12(1)b) de la Loi.

[20]           Je remarque qu'au moyen de l'affidavit de Mme Owens, la Requérante a également produit une preuve pour démontrer qu'un certain nombre d'autres marques de commerce de format similaire à la Marque ont été accueillies ou enregistrées par le passé. Cependant, je ne considère pas que cette preuve soit pertinente, puisqu'aucune des marques trouvées par Mme Owens ne comprend le mot « soothing », qu'une seule comprend le mot « cucumber » et que chaque cas doit être tranché en fonction des circonstances qui lui sont propres.

[21]           Compte tenu de ce qui précède, ce motif d'opposition est rejeté.

Article 2 – Caractère distinctif

[22]           L'Opposante a plaidé que la Marque n'est pas distinctive au sens de l'article 2 de la Loi, car elle ne distingue pas véritablement et n’est pas adaptée à distinguer les produits en association avec lesquels l'emploi est projeté de ceux de propriétaires tiers qui emploient également le terme « soothing cucumber ». L'annexe A de la déclaration d'opposition modifiée fournit des exemples de certains de ces propriétaires tiers et l'annexe B consiste en des imprimés de sites Web qui, déclare l'Opposante, correspondent aux propriétaires tiers listés à l'annexe A.

[23]           La date pertinente pour l’examen du caractère distinctif est la date de production de la déclaration d’opposition [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc (2004), 34 CPR (4th) 317 (CF)].

[24]           L'Opposante a le fardeau de preuve initial d'établir les faits allégués à l'appui de son motif d'opposition fondé sur l'absence de caractère distinctif. Une fois ce fardeau de preuve acquitté, la Requérante a le fardeau ultime de démontrer que la Marque est adaptée à distinguer ou distingue véritablement ses produits de ceux de tiers [voir Muffin Houses Incorporated c The Muffin House Bakery Ltd. (1985), 4 CPR (3d) 272 (COMC].

[25]           À l'appui de ce motif d'opposition, l'Opposante invoque les affidavits de MM. Meadway et Hynes. Je donnerai ci-dessous un bref aperçu de chacun de ces affidavits.

Affidavit de M. Hynes

[26]           M. Hynes est un étudiant employé par l’agent de l'Opposante. Le 9 octobre 2012, M. Hynes a mené des recherches sur Internet pour trouver certains des produits visés par la déclaration d'opposition modifiée. La pièce A consiste en un imprimé d'un site Web montrant un produit qui est décrit comme un [traduction] « gel biologique pour le visage au concombre apaisant ». Le produit semble être disponible pour la vente en ligne et la compagnie qui vend le produit est décrite comme étant une compagnie canadienne. La pièce J consiste en un imprimé d'un site Web montrant une crème à raser décrite comme une crème offrant un rasage de près tout en [traduction] « protégeant la peau avec du concombre apaisant... » Le site Web et le fabricant sont décrits comme étant canadiens.

[27]           La pièce B consiste en un imprimé d'un site Web montrant un produit qui est décrit comme un brumisateur pour stabiliser le teint avec des extraits de camomille et de « concombre apaisant ». La pièce C consiste en un imprimé d'un site Web montrant un produit qui est décrit comme un démaquillant apaisant pour les yeux composé d'une [traduction] « formule apaisante au concombre ». La pièce D consiste en un imprimé d'un site Web montrant un produit qui est décrit comme un masque ayant un [traduction]« parfum de chèvrefeuille et de concombre apaisant ». La pièce G consiste en un imprimé d'un site Web montrant un produit qui est décrit comme une lotion composée de jus de « concombre apaisant ». La pièce H consiste en un imprimé d'un site Web montrant un produit qui est décrit comme un nettoyant composé d'extrait de « concombre apaisant ». La pièce I consiste en un imprimé d'un site Web montrant un produit qui est décrit comme un gel pour les yeux composé de « concombre apaisant ». La pièce K consiste en un imprimé d'un site Web montrant un produit qui est décrit comme une fragrance ayant un [traduction] « parfum de concombre apaisant ». La pièce L consiste en un imprimé d'un site Web montrant une lotion composée de « concombre apaisant ». La pièce M consiste en un imprimé d'un site Web montrant un produit qui est décrit comme un rafraîchisseur pour le visage dans lequel le « concombre apaisant » a un effet nourrissant et calmant. Il n'est pas évident si les produits visés par les pièces B à I et K à M sont offerts en vente au Canada.

Affidavit de M. Meadway

[28]           M. Meadway est un enquêteur qui prétend avoir mené une enquête sur les produits disponibles au Canada et aux États-Unis qui comprennent les mots « soothing » [apaisant] et « cucumber » [concombre] dans le nom ou la description du produit et qui ont trait aux savons et aux produits de soins de la peau [affidavit de M. Meadway, para 1].

[29]           Aux paragraphes 2 à 4 de son affidavit, M. Meadway déclare qu'il a effectué des recherches sur Internet dans divers moteurs de recherche à l'aide des termes « soothing » et « soothing cucumber ». Ses recherches ont été faites en septembre et octobre 2012. Joints en pièces 1 à 3 se trouvent des imprimés de la première ou des quelques premières pages des résultats de recherche obtenus. La recherche de M. Meadway pour « soothing cucumber » dans le moteur de recherche Google a donné 1 740 000 résultats. Selon M. Meadway, ces résultats font régulièrement référence à des produits en liaison avec les savons et les produits de soins de la peau [affidavit de M. Meadway, para 3, pièce 2]. La première page de cette recherche jointe en pièce 2 montre un certain nombre de références au « concombre apaisant » dans le contexte des produits de soins de la peau. Notamment, la toute première référence est à un site Web .ca et est liée un [traduction] « nettoyant corporel purificateur à base de concombre apaisant ».

[30]           Aux paragraphes 5 et 6 de son affidavit, M. Meadway fournit des détails à l'égard de produits offerts en vente en ligne et expédiés et vendus aux Canadiens, du Canada ou des États-Unis. M. Meadway a trouvé les sites Web de bon nombre de ces produits en répétant ou en faisant référence aux recherches avec le terme « soothing cucumber » qui est mentionné aux paragraphes 2 et 4 de son affidavit. M. Meadway a acheté certains produits de ces sites Web.

[31]           Joints en pièces 4 à 30 se trouvent des imprimés de sites Web montrant les renseignements sur les produits et des copies des bordereaux d'expédition des articles que M. Meadway a achetés. Certains d'entre eux comprennent : un produit décrit comme un gel biologique pour le visage au concombre apaisant (pièces 8 et 9), qui a été expédié du Canada; un produit décrit comme un masque au concombre apaisant (pièces 12 et 13), qui a été expédié des États-Unis; un produit décrit comme un gel rafraîchissant pour les yeux au parfum de concombre apaisant (pièce 19 et 20), qui a été expédié des États-Unis; un produit décrit comme un masque au concombre apaisant (pièces 23 et 24), qui a été acheté d'un site Web canadien et qui a été expédié du Canada; et un produit décrit comme un masque après-soleil à la noix de coco et au concombre apaisant (pièces 25 et 26), qui a été expédié du Canada.

[32]           Aux paragraphes 17 à 23 de son affidavit, M. Meadway cite un certain nombre de points de vente qu'il a visités au Canada, où il a trouvé divers produits arborant les mots « soothing » et « cucumber » dans le nom ou la description du produit. M. Meadway a acheté un certain nombre de ces produits. Joints en pièces 31 à 49 se trouvent des photographies des produits qu'il a achetés et les reçus de caisse de ces achats. Certains des produits qui ont été achetés par M. Meadway comprennent : du shampoing et du revitalisant décrits comme un ayant un [traduction] « parfum de concombre apaisant » (pièces 35 à 37); des lingettes pour le visage, des crèmes, des hydratants et des nettoyants décrits comme répondant [traduction] « Oui au concombre apaisant » (pièces 38 à 42]; et un nettoyant pour le corps décrit comme ayant un [traduction] « parfum de concombre apaisant » (pièce 44).

[33]           La Requérante a émis quelques objections à la preuve de l'Opposante. Premièrement, la Requérante fait remarquer que les recherches et les enquêtes menées par MM. Hynes et Meadway ont été faites après la date pertinente du 19 décembre 2011et que leurs affidavits ont également été souscrits après cette date. Compte tenu de cela, la Requérante est d'avis que je ne peux pas tenir compte de cette preuve. Deuxièmement, la Requérante fait valoir que la partie Internet de la preuve de l'Opposante constitue une preuve par ouï-dire inadmissible.

[34]           En ce qui a trait à la question de la date pertinente, je remarque qu'environ neuf mois se sont écoulés entre la date de production de la déclaration d'opposition (19 décembre 2011) et les dates auxquelles MM. Hynes et Meadway ont fait leurs recherches et leurs enquêtes et souscrit leurs affidavits. En raison du laps de temps relativement court entre ces dates, l'Opposante fait valoir qu'il est raisonnable pour moi d'inférer que l'état d'Internet/du marché aurait été similaire à la date pertinente à ce qu'il était au moment où MM. Hynes et Meadway ont fait leurs recherches et leurs enquêtes et ont souscrit leurs affidavits. La Requérante, évidemment, n'est pas d'accord. Les deux parties se sont fiées à la jurisprudence pour appuyer leurs positions respectives.

[35]           L'Opposante a dirigé mon attention vers deux causes dans lesquelles une preuve postérieure à une date pertinente a été prise en considération [voir Speedo Knitting Mills Pty Ltd c Beaver Knitwear (1975) Ltd (1985), 4 CPR (3d) 176 (COMC) et Credit Union Central of Canada c Banque de Montréal (2001), 12 CPR (4th) 275 (COMC)]. Je remarque que chacune de ces causes impliquait des motifs d'opposition fondés sur la confusion et le genre de preuve est quelque peu différent de la preuve qui est présentée dans la cause en l'espèce. La Requérante a dirigé mon attention vers deux causes impliquant des questions de description et de caractère distinctif, dans lesquelles une telle évidence n'a pas été prise en considération [voir Lakeside Produce Inc c Imagine IP, LLC (2011), 90 CPR (4th) 296 (COMC) et Kellogg Canada Inc c Nature’s Path Foods Inc (2007), 61 CPR (4th) 460 (COMC)]. Cependant, dans ces causes, la preuve était nettement plus postérieure à la date pertinente que dans la cause en l'espèce.

[36]           En raison du laps de temps relativement court de neuf mois (environ) dans la cause en l'espèce et compte tenu du genre de résultats de recherche, j'estime qu'il est raisonnable d'inférer que l'état d'Internet/du marché aurait été similaire à la date pertinente à ce qu'il était au moment où MM. Hynes et Meadway ont fait leurs recherches et leurs enquêtes et souscrit leurs affidavits. Je suis donc prête à accorder un certain poids à cette preuve.

[37]           En ce qui a trait la question de ouï-dire, je suis d'accord que certains aspects de la preuve tirée d'Internet de l'Opposante constituent une preuve par ouï-dire. Par exemple, dans les imprimés de sites Web joints en pièces à l'affidavit de M. Hynes et à l'affidavit de M. Meadway, diverses déclarations sont faites à propos des produits qui sont décrits ou désignés. Je ne suis pas prête à accepter ces imprimés de sites Web comme la véracité de leur contenu. Cependant, j'estime qu'il est adéquat de tenir compte de ces imprimés de sites Web comme preuve de l'existence d'occurrences d'emploi des termes « soothing », « cucumber » ou « soothing cucumber » par d'autres négociants sur Internet pour désigner ou décrire des produits qui sont similaires à eux qui sont en liaison avec la Marque [Candrug Health Solutions Inc c Thorkelson (2007), 2007 CF411 (CanLII), 60 CPR (4th) 35 (CF), inf. (2008), 2008 CAF 100 (CanLII), 64 CPR (4th) 431 (CAF)].

[38]           Dans l'ensemble, j'estime que la preuve de l'Opposante est suffisante pour établir qu'au moins certains négociants ont employé « soothing cucumber » ou diverses variations de « soothing » et « cucumber » pour désigner ou décrire des produits qui sont semblables à ceux de la Requérante et qui sont annoncés et offerts en vente aux Canadiens.

[39]           Par conséquent, j'estime que je peux raisonnablement conclure que les faits allégués à l'appui du motif d'opposition fondé sur l'absence de caractère distinctif existent. Par conséquent, j'estime que l'Opposante s'est acquittée du fardeau de preuve initial qui lui incombait à l'égard de ce motif d’opposition. Compte tenu de cette conclusion, c'est à la Requérante qu'incombe le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que la Marque était distinctive à la date pertinente.

[40]           Comme preuve, la Requérante a produit l'affidavit de Mme Owens. Mme Owens est à l'emploi de l'agent de la Requérante à titre de recherchiste en marque de commerce [affidavit de Mme Owens, para 1]. Mme Owens a obtenu des imprimés des détails d'un certain nombre d'enregistrements de marque de commerce et de demandes accueillies. Jointes en pièce A de son affidavit se trouvent des copies des imprimés. Il y a plus de 40 marques de commerce à l'annexe A. Quelques exemples comprennent : ALOE CARE; BODY BUTTER; ALLURING AVOCADO; MILK GLOW; MINT CLEAN; ENERGIZING MANDARIN et STRAWBERRY SPLASH. Notablement, aucune de ces marques de commerce ne comprend le mot « soothing » et une seule comprend le mot « cucumber ».

[41]           La Requérante semble avoir produit ces marques de commerce en preuve en guise d'exemples de marques qui pourraient être considérées comme descriptives et qui ont été accueillies ou enregistrées par le passé. Je n'estime pas que les résultats de recherche de Mme Owens peuvent m'aider à tirer une conclusion significative à l'égard du caractère distinctif de la Marque. Comme susmentionné, les marques de commerce qu'a trouvées Mme Owens n'ont pas grand-chose de similaire à la Marque et chaque cas doit être tranché en fonction des circonstances qui lui sont propres. De plus, le caractère distinctif n'est pas habituellement évalué au cours de l'examen, et je ne dispose d'aucune preuve que ces marques ont réussi à surmonter une contestation du caractère distinctif au cours de l'opposition.

Conclusion

[42]           La demande d'enregistrement de la Marque s'appuie sur un emploi projeté au Canada, et aucune preuve de caractère distinctif acquis par l'emploi n'a été produite à la date pertinente. Bien que je n'aie pas conclu que la Marque était clairement descriptive du fait qu'elle pourrait avoir plus d'une signification dans le contexte des produits de la Requérante, il demeure que « soothing », « cucumber » et « soothing cucumber » sont des termes descriptifs de par leur nature et qu'en raison de leurs significations associées, ils peuvent adéquatement être employés pour décrire certains aspects du genre de produits qui sont en liaison avec la Marque. En fait, l'Opposante a produit une certaine preuve pour établir que des propriétaires tiers ont employé les mots « soothing » et « cucumber » de différentes façons ou « soothing cucumber » afin de désigner ou décrire des produits qui sont similaires à ceux de la Requérante et qui sont annoncés et offerts en vente aux Canadiens.

[43]           La Requérante n'a produit aucune preuve que je considère utile à l'appui de son point de vue que la Marque possède un caractère distinctif. Dans le meilleur des cas pour la Requérante, j'estime que les probabilités sont également partagées entre une conclusion que la Marque possède un caractère distinctif et une conclusion que la Marque ne possède pas de caractère distinctif. Par conséquent, j'estime que la Requérante ne s'est pas acquittée, selon la prépondérance des probabilités, du fardeau ultime qui lui incombait de démontrer que la Marque possède un caractère distinctif au sens de l'article 2 de la Loi.

[44]           Par conséquent, ce motif d'opposition est accueilli.

Décision

[45]           Compte tenu de ce qui précède, dans l'exercice des pouvoirs qui m'ont été délégués en vertu de l'article 63(3) de la Loi, je repousse la demande d'enregistrement conformément à l'article 38(8) de la Loi.

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Lisa Reynolds

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Nathalie Tremblay, trad.

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