Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE‑MARKS

Référence : 2010 COMC 66

Date de la décision : 2010‑05‑13

 

 

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

produite par Pivotal Corporation à l’encontre de la demande d’enregistrement no 1,244,032 pour la marque de commerce PIVOTAL PAYMENTS au nom de 4286839 Canada Inc.

 

 

[1]          Le 2 février 2005, 4218868 Canada Inc. a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce PIVOTAL PAYMENTS (la Marque) fondée sur l’emploi projeté au Canada en liaison avec les services suivants :

Services de paiement électroniques fournis sur un réseau informatique mondial, nommément fourniture de services de paiement permettant aux marchands de facturer des acheteurs par carte de crédit, carte de débit ou chèque pour des biens et services vendus au point de vente ou sur un réseau mondial.

 

[2]          Le 28 juillet 2005, une cession a été inscrite en faveur de 4286839 Canada Inc. (la Requérante).

 

[3]          La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 7 septembre 2005. La Requérante s’est désistée du droit à l’usage exclusif du mot PAYMENTS en dehors de la Marque.

 

[4]          Le 7 novembre 2005, Pivotal Corporation (l’Opposante) a produit une déclaration d’opposition qui repose largement sur la question de la probabilité de confusion entre la Marque et les différentes marques et noms PIVOTAL appartenant à l’Opposante. La Requérante a produit et signifié une contre‑déclaration niant les allégations de l’Opposante.

 

[5]          À l’appui de son opposition, l’Opposante a déposé les affidavits de Derrick Anderson et de Bobbi‑Jo Stonehouse. La Requérante a obtenu une ordonnance l’autorisant à contre‑interroger les auteurs des affidavits, mais elle n’y a pas donné suite.

 

[6]          À l’appui de sa demande d’enregistrement, la Requérante a produit l’affidavit de Philip Fayer. L’Opposante n’a pas demandé à contre‑interroger M. Fayer.

 

[7]          Chacune des parties a produit un plaidoyer écrit. Aucune des parties n’a demandé la tenue d’une audience.

 

Le fardeau de preuve

[8]          Il incombe à la Requérante de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. Il incombe toutefois à l’Opposante de s’acquitter d’un fardeau de preuve initial en établissant les faits sur lesquels elle appuie chacun de ses motifs d’opposition (voir John Labatt Ltd. c. Molson Companies Ltd. (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.), à la page 298).

 

Résumé de la preuve de l’Opposante

[9]          M. Anderson travaille comme technicien juridique pour l’Opposante. Sa preuve repose à la fois sur ses connaissances personnelles et sur l’examen des documents commerciaux de l’Opposante. (Je constate que, bien que M. Anderson semble résider ou travailler à Atlanta, en Géorgie, selon les enregistrements de l’Opposante, le siège de cette dernière est situé à Vancouver, en Colombie‑Brtitannique.)

 

[10]      M. Anderson atteste que l’Opposante est une chef de file de renommée internationale dans la mise au point et la vente de logiciels de gestion des services à la clientèle et de services connexes. M. Anderson déclare que l’Opposante a des clients partout dans le monde, y compris au Canada.

 

[11]      M. Anderson dit ce qui suit, au paragraphe 10 :

[traduction] L’Opposante fournit, entre autres, des produits et des services destinés aux secteurs des services financiers et du traitement des paiements. Vous trouverez ci‑joint comme pièce « E » des copies de divers matériels promotionnels concernant les produits de marque Pivotal adaptés pour les secteurs des services financiers et du traitement des paiements. Comme pour toutes les Marchandises et Services, ces produits sont promus et vendus au Canada en liaison avec les Marques de commerce.

[M. Anderson définit les marchandises et les services comme « logiciels, services d’information et services de soutien technique concernant des logiciels », et les Marques de commerce comme PIVOTAL Design, PIVOTAL PLACE, PIVOTAL RELATIONSHIP et PIVOTAL.]

 

[12]      J’ajoute ici que la Requérante a soutenu dans son plaidoyer écrit que les matériels fournis à la pièce « E » ne semblent s’appliquer qu’aux clients du secteur des services financiers et que rien ne démontre que ces matériels visent le secteur du traitement des paiements. Sans aborder le sens de l’expression « le secteur du traitement des paiements », je conviens que la pièce « E » vise les clients du secteur des services financiers, par exemple le secteur bancaire et celui de la gestion des actifs institutionnels.

 

[13]      En plus de la pièce « E », M. Anderson fournit les matériels suivants qui affichent l’une ou plusieurs des marques de commerce de l’Opposante :

1.         des emballages et des étiquettes pour CDs – pièce « A »;

2.         des échantillons de matériels publicitaires et promotionnels pour les Marchandises et les Services de l’Opposante [traduction] « distribués ou offerts au Canada » – pièce « B ».

 

[14]      D’après la pièce « B », je souligne que les marchandises et les services de l’Opposante [traduction] « peuvent être adaptés pour répondre aux exigences propres à chaque entreprise » et sont destinés à améliorer l’efficacité du marketing, des ventes et des services de ses clients. La technologie logicielle comprend le potentiel qu’offrent les technologies de commerce sur Internet et les technologies sans fil et propose de nombreuses caractéristiques, dont l’acheminement et l’envoi des commandes et des factures.

 

[15]      M. Anderson fournit également des copies de pages provenant de publications spécialisées diffusées au Canada et qui portent sur l’Opposante. [pièce « F »]

 

[16]      M. Anderson n’a fourni aucun chiffre des ventes. Il a fourni des chiffres de publicité, mais vu qu’ils ont trait à l’Amérique du Nord, le montant afférent au marché canadien n’est pas connu.

 

[17]      Mme Stonehouse est directrice des opérations après‑vente de l’Opposante; elle travaille au bureau de Vancouver de l’Opposante depuis environ 8 ans. Elle fournit des copies de divers matériels, que l’Opposante a utilisés au cours de son emploi et continue d’utiliser régulièrement, à ses dires, dans ses activités commerciales au Canada. Ces matériels, qui affichent tous la marque PIVOTAL, comprennent une carte professionnelle, des enveloppes, des articles de papeterie d’entreprise, des pochettes de CD et de DVD et des autocollants d’emballage. Comme l’a fait remarquer la Requérante, les enveloppes et les articles de papeterie sont en blanc, c’est‑à‑dire qu’il ne s’agit pas de copies de documents qui avaient déjà été envoyés à quiconque.

 

Résumé de la preuve de la Requérante

[18]      M. Fayer est le président directeur général de Pivotal Holdings Ltd./Gestion Pivotal Ltée of Montreal. Il déclare qu’avant le 27 avril 2007, Pivotal Holdings Ltd./Gestion Pivotal Ltée portait le nom de 4286839 Canada Inc. Il semble donc que M. Fayer soit le président de la Requérante, bien que le changement du nom de l’entreprise ne semble pas avoir été invoqué à l’encontre de la présente demande.

 

[19]      M. Fayer est également administrateur de deux autres entreprises dont la raison sociale comprend le mot Pivotal : Pivotal Payments Corporation/Corporation Paiements Pivotal de Montréal et Pivotal Payments Inc. de Melville, New York.  

 

[20]      M. Fayer dit ce qui suit, au paragraphe 5 :

[traduction] Nous exerçons les activités d’un fournisseur de services commerciaux, ce qui veut dire que nous fournissons aux commerçants des solutions de traitement des paiements. Plus particulièrement, nous fournissons la technologie et les services dont les commerçants ont besoin pour pouvoir accepter les opérations par carte de crédit ou par carte de débit […].

 

[21]      M. Fayer fournit de nombreux renseignements sur les activités commerciales aux États‑Unis. Toutefois, M. Fayer affirme que ces activités sont exercées par l’entremise d’une entreprise des États‑Unis (Pivotal Payments Inc.), et il n’est pas évident que les services en question proviennent du Canada. Par conséquent, les activités exercées aux États‑Unis ne sont pas particulièrement pertinentes en l’espèce.

 

[22]      En ce qui concerne les activités au Canada, M. Fayer dit ce qui suit, au paragraphe 16 :

[traduction] Nous avons fait activement la promotion de nos services auprès de clients canadiens potentiels depuis 2007. En juin 2007, Pivotal Payments Corporation a été enregistrée au Canada en tant qu’organisation commerciale officielle en matière de ventes par cartes Visa et Master Card. Jusqu’à présent, nous avons signé des contrats de services avec neuf clients canadiens qui exercent leurs activités dans le commerce de détail et le secteur de la restauration.

 

[23]      M. Fayer ne fournit pas de copies de ces contrats de services. Il fournit toutefois les matériels suivants qui affichent tous la marque PIVOTAL PAYMENTS :

1.             des photocopies de pages Web imprimées à partir des sites www.pivotalpayments.com et www.pivotalpayment.ca – pièces « B » et « C »;

2.             des exemples de papeterie commerciale et copies de [traduction] « lettres adressées aux clients canadiens » ‑ pièce « D »;

3.             des exemples de dépliants [traduction] « prêts à être expédiés aux commerçants partout au Canada » ‑ pièce « E »;

4.             des échantillons de lettres proposant des prix à des clients potentiels et une copie de l’entente commerciale signée avec des clients canadiens (des copies signées n’ont pas été fournies en raison des [traduction] « renseignements sensibles ») – pièce « F »;

5.             l’échantillon d’un autocollant qui sera apposé sur les terminaux de traitement d’opérations par cartes avant qu’ils soient expédiés aux clients canadiens – pièce « H »;

6.             une enveloppe utilisée pour envoyer des factures aux clients – pièce « I »;

7.             la photographie d’un kiosque aménagé à l’intention des personnes à la recherche d’emploi lors d’un salon de l’emploi organisé à Montréal en mars 2008, et des photocopies de descriptions de postes distribuées à cette occasion – pièce « J »;

8.             la copie d’un diaporama destiné aux clients potentiels et diffusé à Montréal à trois occasions en 2007 – pièce « K »;

9.             des offres de services présentées aux clients canadiens potentiels en 2008 – pièce « L »;

10.         des annonces d’emploi diffusées en ligne – pièce « M »;

11.         une invitation à un événement de bienfaisance organisé à Montréal en 2006 – pièce « N ».

 

[24]      Les matériels fournis par M. Fayer font la promotion de la Requérante auprès de commerçants à titre de fournisseur de [traduction] « solutions visant le traitement des paiements et les comptes marchands permettant de garantir la croissance et le succès de leurs entreprises ». Les services de la Requérante visent à [traduction] « améliorer les transactions de crédit de vos clients » tout en diminuant les frais de traitement et en récompensant les commerçants selon le volume mensuel de transaction. Les services de la Requérante comprennent un éventail d’interfaces de terminal, y compris des solutions de paiement sans contact et de paiement à distance; de plus, [traduction] « pour les commerçants qui ont l’intention d’élargir leurs activités en ligne, [la Requérante] fournit des solutions de traitement des paiements par carte de crédit adaptées, flexibles et variables relativement aux commandes par Internet, par courrier ou par téléphone.

 

[25]      Au paragraphe 7, M. Fayer a dit ce qui suit : [traduction] « Nous avons plus de 120 employés et agents partout en Amérique du Nord. Nous sommes chargés à présent du traitement des transactions de vente de nos clients s’élevant à plus de 3,8 milliards de dollars par année ». Toutefois, il n’indique pas le nombre d’employés et d’agents travaillant au Canada ni la valeur des transactions de vente traitées au nom des clients canadiens.

 

Les motifs d’opposition fondés sur l’alinéa 12(1)d)

[26]      L’Opposante plaide que la Marque n’est pas enregistrable parce qu’elle crée de la confusion avec l’une ou plusieurs des marques de commerce suivantes enregistrées par l’Opposante :

1.      PIVOTAL , no d’enregistrement LMC484583;

2.      PIVOTAL Design, no d’enregistrement LMC478310;

3.      PIVOTAL PLACE, no d’enregistrement LMC475836;

4.      PIVOTAL RELATIONSHIP, no d’enregistrement LMC482119.

 

[27]      La preuve de l’Opposante n’établit pas que les enregistrements sur lesquels elle se fonde sont valides. J’ai donc exercé le pouvoir discrétionnaire du registraire de vérifier le registre afin de confirmer leur validité. [Voir Quaker Oats of Canada Ltd./La Compagnie Quaker Oats du Canada Ltée c. Menu Foods Ltd. (1986), 11 C.P.R. (3d) 410 (C.O.M.C.).]

 

[28]      Les marques PIVOTAL et PIVOTAL Design sont enregistrées pour :

                logiciels de vente, marketing, service à la clientèle, administration de bureau et communications;

                services de soutien technique concernant logiciels de vente, marketing, service à la clientèle, administration de bureau et communications.

 

[29]      La marque PIVOTAL PLACE est enregistrée pour :

                services d’information concernant l’automatisation de la force de vente, la gestion des renseignements sur les clients, les ventes, l’analyse de marché, les études de marché, la publicité, la démonstration de produits, et services à la clientèle fournis en direct.

 

[30]      La marque PIVOTAL RELATIONSHIP est enregistrée pour :

                logiciels pour utilisation en rapport avec ventes, marketing, service à la clientèle, comptabilité, administration de bureau et communications.

 

[31]      À mon avis, les arguments les plus solides invoqués par l’Opposante ont trait à la marque PIVOTAL. Je me concentrerai donc sur l’analyse de la probabilité de confusion entre les marques PIVOTAL et PIVOTAL PAYMENTS.

 

[32]      La marque PIVOTAL a été enregistrée le 24 octobre 1997 par Pivotal Software Inc. sur la foi d’une déclaration d’emploi déposée le 10 octobre 1997. Un changement de propriété a été inscrit en 1999 en faveur de l’Opposante.  

 

[33]      La date pertinente pour évaluer la probabilité de confusion suivant l’al. 12(1)d) est la date de ma décision [Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. et le Registraire des marques de commerce, 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.)].

 

[34]      Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. Le paragraphe 6(2) de la Loi prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

 

[35]      Lorsqu’il applique le test en matière de confusion, le registraire doit prendre en compte toutes les circonstances pertinentes, y compris celles expressément énumérées au paragraphe 6(5) de la Loi, c’est à dire : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou des noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus; b) la période pendant laquelle chaque marque ou nom commercial a été en usage; c) le genre de marchandises, services ou entreprises; d) la nature du commerce; et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent. Le poids qu’il convient d’accorder à ces facteurs n’est pas forcément le même [voir in général Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc. (2006), 49 C.P.R. (4th) 321 (C.S.C.).]

 

Alinéa 6(5)a) – le caractère distinctif inhérent des marques, et la mesure dans laquelle chacune est devenue connue

[36]      La Requérante soutient que le mot PIVOTAL ne suggère pas le genre de ses services et il semble qu’on pourrait en dire autant pour les marchandises et les services de l’Opposante. Toutefois, la Requérante reconnaît que le mot PAYMENTS est directement relié à ses services. Par conséquent, je suis d’avis que la marque PIVOTAL possède un caractère distinctif inhérent supérieur à celui de la marque PIVOTAL PAYMENTS.

 

[37]      Bien que les marques des parties aient été employées ou promues au Canada, il est difficile d’évaluer le caractère distinctif inhérent acquis, vu qu’aucune des parties n’a fourni de chiffres des ventes ni de chiffres de publicité au Canada.

 

Alinéa 6(5)b) – la période pendant laquelle chaque marque a été employée

[38]      L’alinéa 6(5)b) favorise l’Opposante, en ce qu’elle revendique l’emploi de la marque PIVOTAL au Canada depuis au moins mars 1996 (affidavit Anderson, paragraphe 4), environ huit ans avant le dépôt de la présente demande fondée sur l’emploi projeté et onze ans avant que la Requérante ne commence à faire activement la promotion de ses services au Canada (affidavit Fayer, paragraphe 16).

 

Alinéas 6(5)c) et d) – le genre de marchandises, services ou entreprises et la nature du commerce  

[39]      Il est clair que les parties ne fournissent pas exactement le même genre de services. Les services de la Requérante sont liés au traitement des paiements alors que les marchandises et les services de l’Opposante sont liés à la gestion des services à la clientèle. La Requérante n’a demandé l’enregistrement de sa Marque pour aucune marchandise et il n’est pas évident que ses services comprennent la vente de logiciels; toutefois, la technologie et le matériel de traitement des données sont manifestement des éléments constitutifs des services de la Requérante et ces services utilisent l’Internet.

 

[40]      Malgré les différences qui existent entre leurs activités commerciales, l’Opposante soutient qu’il y a un chevauchement de la clientèle cible des parties. Je souligne que la pièce « E » de l’affidavit Fayer indique que la Requérante doit cibler les entreprises suivantes : [traduction] « des petites ou moyennes entreprises, des magasins à succursales, des franchises, des restaurants ou des concessions », alors qu’au paragraphe 6 de même affidavit il est indiqué que la Requérante a desservi aux États‑Unis les secteurs suivants : magasins de détail, restaurants, établissements d’accueil et d’hébergement, agents de vente directe, marchands de commerce électronique et entreprises de vente par correspondance ou par téléphone. Je souligne également que les pièces « C » et « D » de l’affidavit Anderson indiquent que l’Opposante a des clients dans plus de 50 secteurs, y compris les services financiers, l’administration publique, le grand public, les soins de santé, les payeurs de services de soins de santé, la construction domiciliaire et le courtage immobilier, l’assurance, le secteur manufacturier, les matériels médicaux, l’édition et les médias, les services, les technologies, les logiciels, les télécommunications, services d’utilité publique et de l’énergie, et la distribution en gros et en détail. Bien que le chevauchement de la clientèle déclarée des parties puisse tout au plus être limité, il semble néanmoins logique qu’une entreprise qui utilise des logiciels pour la gestion des services à la clientèle puisse également exiger des services de traitement des paiements.

 

Alinéa 6(5)e) – le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent

[41]      Même si les marques doivent être examinées dans leur ensemble, le premier élément de la marque est souvent considéré comme le plus important pour établir une distinction. [Conde Nast Publications Inc. c. Union des Éditions Modernes (1979), 46 C.P.R. (2d) 183 (C.F. 1re inst.)]

 

[42]      Dans l’ensemble, il existe un degré de ressemblance assez élevé entre la Marque de la Requérante et la marque de l’Opposante dans la présentation ou le son et dans les idées qu’elles suggèrent.

 

Autres circonstances de l’espèce

i) famille de marques

[43]      L’Opposante soutient qu’elle détient une famille de marques PIVOTAL, à savoir PIVOTAL, PIVOTAL PLACE et PIVOTAL RELATIONSHIP. Toutefois, la partie qui veut profiter de la protection étendue accordée à une famille de marques de commerce doit d’abord démontrer l’emploi de chacune des marques constituantes [MacDonald’s Corporation c. Yogi Yogurt Ltd. (1982), 66 C.P.R. (2d) 101 (C.F. 1re inst.)]. L’Opposante et ses auteurs d’affidavit n’ont porté à mon attention aucun élément de preuve concernant les marques PIVOTAL PLACE ou PIVOTAL RELATIONSHIP. J’ai noté que la marque PIVOTAL RELATIONSHIP figure aux pièces A et B de l’affidavit de M. Anderson, mais je conclus que l’ensemble de la preuve n’établit pas l’existence d’une famille de marques qui permettrait à l’Opposante de bénéficier d’une protection étendue.  

 

ii) absence de preuve de confusion

[44]       La Requérante souligne que l’Opposante n’a démontré aucun cas de confusion réelle entre les marques des parties. Certes, une conclusion défavorable quant à la probabilité de confusion peut être tirée lorsque la preuve révèle un emploi simultané largement répandu et qu’aucune preuve de confusion n’a été fournie par l’opposant [voir Christian Dior S.A. c. Dion Neckwear Ltd. (2002), 20 C.P.R. (4th) 155 (C.A.F.)]. Toutefois, les faits de l’espèce ne montrent pas un emploi simultané largement répandu, de sorte qu’il est impossible de tirer une conclusion défavorable quant à la probabilité de confusion.

 

conclusion concernant l’al. 12(1)d)

[45]      Après avoir examiné toutes les circonstances pertinentes, je conclus que la Requérante ne s’est pas acquittée du fardeau de preuve parce qu’il m’est impossible de dire que l’absence de probabilité de confusion entre les marques PIVOTAL PAYMENTS et PIVOTAL est plus probable que son existence, pour les motifs suivants.

 

[46]      Non seulement la Requérante a pris le nom de la marque de l’Opposante dans son intégralité, mais elle utilise ce nom comme la première partie de sa marque, et la première partie d’une marque est souvent considérée comme la plus importante pour trancher les questions de confusion. De plus, la seule caractéristique que la Requérante a ajoutée à la marque de l’Opposante est le mot faible et descriptif « payments »; un tel ajout ne distingue guère les deux marques.

 

[47]      Bien que la Requérante ait fait valoir que sa [traduction] « preuve montre clairement que la nature de ses activités n’a aucun lien avec celle des activités décrites dans la preuve de l’Opposante à cet égard », cette prétention comporte au moins deux faiblesses : i) le par. 6(2) indique clairement que la confusion serait vraisemblable même si les marchandises ou les services ne sont pas de la même catégorie générale; ii) au regard de l’al. 12(1)d), c’est l’état déclaratif des marchandises ou des services figurant dans la demande d’enregistrement de la marque de commerce ou dans l’enregistrement lui‑même qui est déterminant [Henkel Kommanditgesellschaft auf Aktien c. Super Dragon Import Export Inc. (1986), 12 C.P.R. (3d) 110 (C.A.F.); Mr. Submarine Ltd. c. Amandista Investments Ltd. (1987), 19 C.P.R. (3d) 3 (C.A.F.); Miss Universe Inc. c. Bohna (1994), 58 C.P.R. (3d) 381 (C.A.F.)].

 

[48]      C’est à la Requérante qu’incombe le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe aucune probabilité raisonnable de confusion. Cela signifie que, si les probabilités ne favorisent ni l’une ni l’autre des parties, je dois trancher à l’encontre de la Requérante. Compte tenu de mes conclusions ci‑dessus, et particulièrement de la ressemblance entre les marques et de l’absence de preuve concernant l’emploi par un tiers des marques PIVOTAL sur le marché, et malgré les différences entre les services des parties, je conclus que les probabilités sont égales pour chaque partie. Par conséquent, je dois trancher la question contre la Requérante. Si la Requérante avait démontré l’emploi simultané des marques en cause en l’absence d’une confusion réelle ou d’un emploi important par un tiers des marques PIVOTAL sur le marché pour des services offerts aux entreprises, ma conclusion aurait pu être différente.

 

[49]      Pour les motifs qui précèdent, le motif d’opposition fondé sur l’al. 12(1)d) est accueilli.

 

Les motifs d’opposition fondés sur l’article16

[50]      L’opposante a soutenu que la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement en vertu des al. 16(3)a) et c) de la Loi parce que la Marque crée de la confusion avec l’une ou plusieurs des marques de commerce ou des noms commerciaux PIVOTAL, antérieurement employés ou révélés au Canada par l’Opposante. En ce qui concerne ce motif d’opposition, l’Opposante a le fardeau initial de prouver que ses marques de commerce ou ses noms commerciaux étaient employés ou avaient été révélés avant la date de production de la demande de la Requérante. Je conclus que l’Opposante ne s’est pas acquittée de ce fardeau de preuve initial. Bien que les auteurs des affidavits de l’Opposante affirment que cette dernière a employé la marque PIVOTAL au Canada avant le 2 février 2005, aucun élément de preuve n’établit que cette marque a été employée ou révélée au Canada avant cette date. Les motifs d’opposition fondés sur l’art. 16 sont en conséquence rejetés.

 

Le motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif

[51]      L’Opposante a fait valoir que la Marque n’est pas distinctive parce qu’elle n’est pas adaptée à distinguer les services de la Requérante des marchandises et des services fournis par  l’Opposante sous l’une ou plusieurs de ses marques de commerce ou de ses noms commerciaux PIVOTAL. Pour s’acquitter de son fardeau initial de preuve à l’égard de ce motif d’opposition, l’Opposante doit établir que la réputation au Canada de l’une ou plusieurs de ses marques ou noms commerciaux était importante, significative ou suffisante pour annuler le caractère distinctif de la Marque. [Bojangles’ International LLC c. Bojangles Café Ltd. (2006), 48 C.P.R. (4th) 427 (C.F.)] La date pertinente pour l’examen du caractère distinctif est la date du dépôt de la déclaration d’opposition, soit le 7 novembre 2005. [Metro‑Goldwyn‑Mayer Inc. c. Stargate Connections Inc. (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (C.F. 1re inst.)]

 

[52]      Le seul élément de preuve de l’Opposante concernant l’emploi au Canada antérieur au 7 novembre 2005, dont j’ai connaissance, est constitué d’un court article tiré du journal Ottawa Citizen du 19 mars 2005, mentionnant que [traduction] « la ville de Gatineau utilise des logiciels pour le service à la clientèle provenant de Pivotal Corp. de Vancouver » [l’affidavit Anderson; pièce « F »]. Je ne crois pas que cela soit suffisant pour satisfaire au fardeau de preuve initial qui incombe à l’Opposante. Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif est rejeté.

 

Motifs d’opposition fondés sur l’article 30

[53]      Dans sa déclaration, l’Opposante a soulevé également deux motifs d’opposition fondés sur les al. 30e) et i) de la Loi.

 

[54]      Le motif d’opposition fondé sur l’al. 30e) porte que la Requérante n’a jamais eu l’intention d’employer la Marque au Canada en liaison avec tous les services visés par la demande de marque de commerce. Comme aucun élément de preuve n’appuie cette allégation, le motif fondé sur l’al. 30e) est rejeté, l’Opposante ne s’étant pas acquittée de son fardeau de preuve initial.

 

[55]      Le motif d’opposition fondé sur l’al. 30i) allègue que la Requérante ne pouvait pas être convaincue à juste titre qu’elle avait droit d’employer la Marque au Canada, [traduction] « compte tenu des faits énoncés dans la présente déclaration d’opposition ». Toutefois, lorsque le requérant fournit la déclaration exigée par l’al. 30i), le motif fondé sur l’al. 30i) ne devrait être retenu que dans des cas exceptionnels, notamment lorsque la mauvaise foi du requérant est établie. [Sapodilla Co. Ltd. c. Bristol‑Myers Co. (1974), 15 C.P.R. (2d) 152 (C.O.M.C.), à la page 155] Vu l’absence de preuve de mauvaise foi en l’espèce, le motif fondé sur l’al. 30i) est également rejeté.
Décision

[56]      Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu du par. 63(3) de la Loi, je repousse la demande en application du par. 38(8) de la Loi.

 

 

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Jill W. Bradbury

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Semra Denise Omer

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