Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

                                                                                          Référence: 2014 COMC 253

Date de la décision: 2014-11-14

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45, engagée à la demande de De Granpré Chait visant l’enregistrement no LMC755,904 de la marque de commerce ENSEIGNE AVEC COQ (rooster) (dessin couleur) au nom de J. BENNY INC.

[1]               La présente décision a trait à une procédure de radiation sommaire engagée à l’encontre de l’enregistrement no LMC755,904 pour la marque de commerce ENSEIGNE AVEC COQ (rooster) (dessin couleur) (la Marque) telle que ci-après reproduite :

ENSEIGNE AVEC COQ (rooster) (DESSIN COULEURS)

en liaison avec :

services de restauration, nommément exploitation de restaurants (Les Services).

La couleur est revendiquée comme une caractéristique de la marque de commerce. ROUGE pour le fond quadrillé, le bec, la crête et la plume supérieure sur la queue du coq; NOIR pour le rectangle en dessous du coq, le contour du coq et pour la plume inférieure sur la queue du coq; JAUNE pour l'intérieur du coq; BLANC pour la plume sur la poitrine du coq.

[2]               À la lumière de la preuve au dossier et pour les motifs ci-après décrits, j’arrive à la conclusion que l’Inscrivante (ci-après définie) s’est déchargée de son fardeau de prouver l’emploi de la Marque en liaison avec les Services au sens de l’article 4(2) de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi) durant la Période Pertinente (ci-après définie).

La procédure

[3]               Le 20 février 2013, à la demande de De Granpré Chait (la Partie Requérante), le registraire a transmis l’avis prévu à l’article 45 de la Loi à J. BENNY INC. (l’Inscrivante).

[4]               L’article 45 de la Loi oblige l’Inscrivante à démontrer qu’elle a employé au Canada la Marque en liaison avec les Services à un moment quelconque au cours des trois ans précédant la date de l’avis ou, dans la négative, à fournir la date à laquelle elle a été employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. La période pertinente est donc du 20 février 2010 au 20 février 2013 (la Période Pertinente).

[5]               La procédure sous l’article 45 est simple, expéditive et sert à éliminer du registre le “bois mort”. Ainsi le seuil exigé pour établir l’emploi de la Marque, au sens de l’article 4 de la Loi, au cours de la Période Pertinente n’est pas très élevé [voir Uvex Toko Canada Ltd c Performance Apparel Corp (2004), 31 CPR (4th) 270 (CF 1re inst)]. Il s’agit d’établir prima facie un emploi de la Marque [voir 1459243 Ontario Inc c Eva Gabor International, Ltd, 2011 FC 18 (CF 1re inst)].

[6]               Une simple allégation d’emploi de la Marque en liaison avec les Services n’est pas suffisante pour établir son usage au sens de l’article 4(2) de la Loi. Il n’y a pas lieu de produire une preuve abondante. Toutefois toute ambigüité dans la preuve sera interprétée à l’encontre de l’Inscrivante [voir Plough (Canada) Ltd c Aerosol Fillers Inc (1980), 53 CPR (4th) 62 (CAF)].

[7]               En réponse à l’avis, l’Inscrivante a produit la déclaration solennelle de M. Jean Benny avec les pièces JB-1 à JB-7 inclusivement. Les parties ont produit des représentations écrites et étaient représentées lors d’une audience.

Remarques préliminaires

[8]               J’ai remarqué que la Partie Requérante réfère dans ses représentations écrites à des documents y annexés. J’ai informé la Partie Requérante lors de l’audience qu’elle ne pouvait introduire de la preuve de quelque manière que ce soit dans le cadre d’une procédure sous l’article 45 de la Loi ou de se référer à de la documentation qui ne fait pas partie du dossier [voir Fasken Martineau DuMoulin LLP c In-N-Out Burgers, 2007 CanLII 80990 (CA TMOB)].

La preuve

[9]               M. Benny se décrit comme étant le président ainsi que le secrétaire de l’Inscrivante et ce depuis sa constitution. Il est également le président d’autres entreprises auxquels il fait référence dans sa déclaration solennelle. Il a produit comme pièce JB-1 une copie du relevé du Registre des entreprises concernant l’Inscrivante.

[10]           M. Benny explique que la Marque est employée par BENNY & FRÈRES INC., dont il est également le président, en vertu d’une licence octroyée par l’inscrivante qui comporte un programme de franchise visant l’exploitation de restaurants. Il a produit comme pièce JB-2 une copie du relevé du Registre des entreprises concernant cette entreprise. Il explique que ce programme de franchise comporte une licence qui permet à BENNY & FRÈRES INC. d’accorder des sous-licences. Il affirme que dans le cadre de cette licence et ces sous-licences, l’Inscrivante a contrôlé directement ou indirectement durant la Période Pertinente les caractéristiques et la qualité des Services. Il a d’ailleurs produit comme pièce JB-3 une copie des licences confirmatives de marques de commerce entre l’Inscrivante et BENNY & FRÈRES INC. ainsi que celles conclues entre cette dernière et certains de ces sous-licenciés.

[11]           M. Benny affirme que des services de restaurant ont été offerts et rendus par les sous-licenciés de l’Inscrivante, identifiés au paragraphe 11 de sa déclaration solennelle, en liaison avec la Marque à l’un ou l’autre moment durant la Période Pertinente dans le cadre du programme de franchise ci-haut mentionné permettant ainsi aux clients de déguster des repas servis sur place dans ces restaurants.

[12]           À titre de preuve d’emploi de la Marque en liaison avec les Services M. Benny a produit :

         une photographie de la devanture du restaurant opéré par le sous-licencié 9199-4400 Québec Inc à Blainville (pièce JB-4) portant la Marque et placée à l’entrée de ce restaurant depuis son ouverture, soit en juillet 2006. Cette devanture est représentative de l’enseigne extérieure montrée sur les restaurants des franchisés de l’Inscrivante;

         un document portant la Marque (pièce JB-5) remis à des clients accompagnés d’un ou de plusieurs enfants qui ont fréquenté le restaurant situé à Blainville du 11 janvier 2012 jusqu’au 19 février 2013 (et par la suite). Il s’agit d’un dessin à colorier remis à plus de 300 exemplaires. Ainsi en attendant le repas ou durant le repas servi et payé au restaurant, les enfants qui ont reçu la pièce JB-5 ont pu faire du coloriage sur un document portant la Marque;

         une affiche portant la Marque (pièce JB-6) placée à l’intérieur du restaurant opéré par le sous-licencié à Blainville pendant la période du 20 décembre 2012 jusqu’au 19 février 2013;

         une photographie (pièce JB-7) montrant l’affiche (pièce JB-6) placée à l’intérieur du restaurant de Blainville près des caisses, pour être vue par les clients et ce du 20 décembre 2012 jusqu’au 19 février 2013.

[13]           Ainsi selon M. Benny la Marque a été montrée durant l’exécution des Services au Canada durant la Période Pertinente.

[14]           M. Benny affirme qu’au moins 4200 clients ont profité des Services en mangeant sur place et en payant pour des repas dans ce restaurant de Blainville durant l’entièreté du mois de janvier 2013.


Analyse des arguments de la Partie Requérante

[15]           La Partie Requérante plaide que la pièce JB-5 ne saurait constituer une preuve d’emploi de la Marque en liaison avec les services d’exploitation de restaurant. Je suis d’accord avec la Partie Requérante. La pièce n’est pas employé pour l’annonce, la promotion ou lors de l’exécution des Services, mais sert plutôt d’objet de dessin pour divertir les jeunes enfants qui accompagnent leurs parents lorsqu’ils visitent les restaurants opérés par les sous-licenciés de l’Inscrivante.

[16]           Pour ce qui est des pièces JB-6 et JB-7, la Partie Requérante prétend qu’il s’agit du même dessin qui apparaitrait sur une pièce produite dans le cadre d’un autre dossier d’avis émis par le registraire sous l’article 45 de la Loi concernant une autre marque de l’Inscrivante. De plus la Partie Requérante se réfère à des documents annexés à son argumentation écrite pour tenter de démontrer que l’Inscrivante utilise une tout autre marque de commerce que la Marque. Pour les motifs déjà exprimés, je ne tiens pas compte de ces documents et en conséquence, de l’argument développé par la Partie Requérante fondé sur ces documents.

[17]           La Partie Requérante plaide également que les pièces JB-6 et JB-7 ne font aucunement référence à l’Inscrivante ou un de ses sous-licenciés "de telle sorte que nous imaginions difficilement que [l’Inscrivante] utilise une telle enseigne pour faire la promotion de ses services".

[18]           Or M. Benny affirme que l’affiche JB-6 est montrée aux clients lorsque ceux-ci sont à l’intérieur du restaurant opéré par l’un des sous-licenciés. D’ailleurs la pièce JB-7 est une photographie de ladite affiche telle qu’exhibée à l’intérieur du restaurant d’un des sous-licenciés. Ainsi la Marque, qui est indéniablement imprimée sur l’affiche, est exhibée aux clients des sous-licenciés à l’intérieur des lieux exploités par ces derniers dans le cadre de l’exécution des Services.

[19]           Je rappelle que l’article 4(2) de la Loi prévoit qu’il y a emploi d’une marque de commerce en liaison avec des services non seulement dans le cadre de la promotion des services, mais également si elle est montrée dans l’exécution de ceux-ci. Cette dernière possibilité est exactement notre cas. Il n’y a donc pas lieu de s’interroger sur l’origine des Services.

[20]           Finalement en ce qui concerne la pièce JB-4, la Partie Requérante prétend que la marque apposée sur les devantures des restaurants exploités par les sous-licenciés n’est pas la Marque. En effet, elle plaide qu’on y a ajouté dans le rectangle noir en-dessous du coq la mention suivante ‘Benny & Co. MAÎTRES ROTISSEURS DEPUIS 1960’.

[21]           Le présent dossier s’apparente à celui de la décision du registraire rendue dans Ogilvy Renault c Pacific Foods Ltd (2001), 16 CPR (4th) 120 (COMC). Dans cette décision, la marque enregistrée était la représentation d’un capitaine de bateau avec un rectangle blanc en-dessous de cette figure. Or la preuve produite démontrait l’emploi de cette figure mais on y avait ajouté la mention ‘BARNACLE BILL’S dans le rectangle blanc. Tout comme dans notre dossier, la partie requérante plaidait que le vocable rajouté constituait la portion dominante puisque le consommateur identifierait les produits associés à cette marque par cet ajout. Or le registraire a conclu que l’addition de ce qui pouvait être perçu comme le nom du capitaine n’empêchait pas le public de percevoir la figure du capitaine comme l’une des marques employées sur l’emballage des produits. Ainsi il est toujours possible pour un propriétaire de plusieurs marques d’employer simultanément certaines d’entre-elles [voir John Labatt Ltd v Molson Breweries, A Partnership (1993) 46 CPR (3d) 6 (FCTD)].

[22]           Je suis donc d’avis que la photographie de la devanture d’un des restaurants exploités par l’un des sous-licenciés démontre l’emploi de la Marque en liaison avec les Services. À tout événement même si j’étais dans l’erreur concernant cette dernière conclusion, les allégations de M. Benny au soutien des pièces JB-6 et JB-7 ainsi que ces pièces constituent une preuve satisfaisante pour démontrer l’emploi de la Marque en liaison avec les Services durant la Période Pertinente.


Disposition

[23]           Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article  63(3) de la Loi, l’enregistrement LMC755,904 sera maintenu conformément aux dispositions de l’article 45 de la Loi.

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Jean Carrière

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

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