Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

                                 AFFAIRE CONCERNANT L’OPPOSITION de

                                 Protek Paint Limited à la demande

no 780701 produite par Protek Products, société constituée au Michigan en vue de l’enregistrement de la marque de commerce PROTEK PRODUCTS

 

 

Le 19 avril 1995, Protek Products, société constituée au Michigan (ci-après la requérante), a produit une demande d’enregistrement de la marque de commerce PROTEK PRODUCTS (ci-après la marque) en liaison avec :

« Agents de scellement et de nettoyage pour les pavés, notamment agents de nettoyage, agents de scellement; décapant pour la rouille, pour la peinture, pour le goudron et le caoutchouc applicable sur les pavés, la brique, la maçonnerie et le béton » (ci-après les marchandises),

basée sur l’emploi au Canada depuis la fin de mars 1995, et basée sur l’emploi projeté en liaison avec :

« Agents de scellement hydrofuge (à base de silicone) pour le béton et la maçonnerie et agents de scellement à base de bitume et de goudron pour le bois » (ci-après les marchandises dont l’emploi est projeté).

 

La requérante a renoncé au droit à l’usage exclusif du mot « PRODUCTS » indépendamment de la marque de commerce dans son ensemble. La demande a été annoncée, aux fins de toute opposition éventuelle, dans le Journal des marques de commerce du 22 mai 1996.

 

Le 5 juin 1996, Protek Paint Limited (ci-après l’opposante) a produit une déclaration d’opposition. En réponse, le 24 décembre 1996, la requérante a signifié et produit une contre-déclaration dans laquelle elle niait tous les motifs d’opposition soulevés par l’opposante dans sa déclaration d’opposition.

 

La requérante a produit un demande modifiée afin de supprimer de sa demande initiale les marchandises dont l’emploi était projeté. Les deux parties ont présenté des arguments écrits et une audition a été tenue le 2 septembre 2003 au cours de laquelle les deux parties ont présenté des observations orales.

 

Suivent les motifs d’opposition énoncés dans les arguments écrits de l’opposante, lesquels tiennent compte des modifications apportées à la demande initiale.

 

a)                  La marque visée par la demande d’enregistrement n’est pas enregistrable en application de l’alinéa 38(2)a) de la Loi sur les marques de commerce (ci-après la Loi), car la marque n’est pas conforme aux exigences de l’article 30. Plus précisément :

                                            i.            La requérante ne pouvait pas être convaincue suivant l’alinéa 30i) qu’elle avait droit d’employer au Canada la marque visée par la demande d’enregistrement en liaison avec les marchandises, car la requérante connaissait ou devait connaître, à la date où la demande d’enregistrement a été produite, l’emploi antérieur, au Canada, des marques de commerce PROTEK et PROTEK et dessin par l’opposante;

                                          ii.            La requérante ne pouvait pas être convaincue suivant l’alinéa 30i) qu’elle avait droit d’employer au Canada la marque visée par la demande d’enregistrement en liaison avec les marchandises de la requérante, car la requérante connaissait ou devait connaître, à la date où la demande d’enregistrement a été produite, l’emploi antérieur, au Canada, des noms commerciaux PROTEK PAINT LIMITED, PROTEK PAINT et PROTEK PAINT & VARNISH par l’opposante;

                                        iii.            La requérante ne pouvait pas être convaincue suivant l’alinéa 30i) qu’elle avait droit d’employer au Canada la marque visée par la demande d’enregistrement en liaison avec les marchandises de la requérante, car la requérante n’avait pas employé et n’avait pas l’intention d’employer la marque, à la date où la demande d’enregistrement a été produite;

                                        iv.            La demande d’enregistrement n’est pas conforme à l’alinéa 30a), car elle ne renferme pas un état, dressé dans les termes ordinaires du commerce, des marchandises spécifiques en liaison avec lesquelles la marque a été employée;

                                          v.            La demande d’enregistrement n’est pas conforme à l’alinéa 30b), car la requérante n’a pas employé la marque au Canada depuis la date de premier emploi revendiquée dans la demande d’enregistrement;

                                        vi.            La demande d’enregistrement n’est pas conforme à l’alinéa 30e), car elle ne renferme pas une déclaration voulant que la requérante, par elle-même ou par l’entremise d’un titulaire de licence, ait l’intention d’employer la marque au Canada.

 

b)      La marque visée par la demande d’enregistrement n’est pas enregistrable en raison de l’alinéa 38(2)c), car la requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la marque en vertu du paragraphe 16(1). Plus précisément, à la date à laquelle la marque a été, selon les allégations, employée la première fois, et à toutes les autres époques pertinentes, la marque créait de la confusion ou était susceptible de créer de la confusion avec :

 

                                            i.            Les marques de commerce de l’opposante PROTEK et PROTEK et dessin, lesquelles avaient été employées antérieurement au Canada par l’opposante et ses prédécesseurs en titre;

                                          ii.            Les noms commerciaux de l’opposante PROTEK PAINT LIMITED, PROTEK PAINT et PROTEK PAINT & VARNISH, lesquels avaient été employés antérieurement au Canada par l’opposante et ses prédécesseurs en titre.

 

c)      La marque visée par la demande d’enregistrement n’est pas enregistrable en raison de l’alinéa 38(2)d), car la marque n’est pas et, à toutes les époques pertinentes, n’a pas été et ne pouvait pas être distinctive des marchandises de la requérante. Plus précisément :

 

                                            i.            Eu égard à l’article 2, la marque créant de la confusion ou étant susceptible de créer de la confusion avec les marques de commerce de l’opposante PROTEK et PROTEK et dessin avec les noms commerciaux de l’opposante PROTEK PAINT LIMITED, PROTEK PAINT et PROTEK PAINT & VARNISH , ladite marque ne distingue pas et n’est pas adaptée pour distinguer les marchandises de la requérante des marchandises, des services et de l’entreprise de l’opposante;

                                          ii.            Eu égard à l’article 50, la requérante a autorisé l’emploi de la marque au Canada sans avoir conclu une licence appropriée, en conséquence, la marque n’est pas réputée avoir été employée par la requérante et, par conséquent, ladite marque n’est pas distinctive des marchandises de la requérante.

 

Le 24 décembre 1996, la requérante a produit une contre-déclaration détaillée dans laquelle, en plus de nier chaque motif d’opposition décrit ci-dessus, elle a déclarée ce qui suit :

 

a)      La marque est distinctive, car, d’une part, elle est apte à distinguer les marchandises de celles vendues par l’opposante en liaison avec les marques de commerce PROTEK et PROTEK et dessin, et, d’autre part, elle est apte à distinguer les marchandises de celles vendues sous les noms commerciaux PROTEK PAINT LIMITED, PROTEK PAINT et PROTEK PAINT & VARNISH compte tenu des dispositions du paragraphe 6(5) de la Loi. (La requérante a expliqué en détail, en analysant chaque critère énoncé au paragraphe 6(5), les raisons pour lesquelles la marque ne pouvait pas créer de confusion avec les marques et noms commerciaux mentionnés de l’opposante).

 

b)      L’état du registre indique l’existence de plusieurs enregistrements où les mots PROTEK, PROTECTOR, PROTEX, PRO-TECH, PRO TEK, et C-PROTEC sont employés seuls ou avec d’autres mots, suffixes ou préfixes, notamment PROTEK PRODUCTS ( no780701), PROTEC 2000 (no 747950), PROTECTOR PLUS (TMA 680337), PRO-TECH SEAL (TMA 139968), PROTEX PLUS (TMA 328890), PRO TEK UCP (TMA 286411), PROTEK (no 816035) et PROTEK et dessin (n816036), ce qui indique le faible caractère distinctif de ces marques de commerce déposées et, de ce fait, ces marques de commerce n’ont qu’une protection limitée, c’est-à-dire une protection moins importante qu’une marque de commerce comme KODAK ou un marque de commerce composée d’un seul mot.

 

La preuve produite par l’opposante consiste en l’affidavit de M. Randall Rogers fait sous serment le 22 décembre 1997. La requérante a produit les affidavits de M. Roger F. Soulliere fait sous serment le 12 janvier 1999 et de M. Dan Tasson fait sous serment le 19 janvier 2000 (Il semblerait qu’une erreur s’est glissée dans la date, car il a été contre-interrogé sur son affidavit en juin 1999, comme l’indique les détails qui suivent). La Commission a informé la requérante, par lettre en date du 31 août 1998, que la documentation qu’elle avait produite le 21 juillet 1998 ne constituait pas une preuve adéquate. Le 4 juin 1999, messieurs Soulliere et Tasson ont été contre-interrogés. En contre-preuve, M. Rogers a produit un deuxième affidavit en date du 24 novembre 1999. La requérante s’est opposée à la production de cet affidavit au dossier, car elle estimait que son contenu ne constituait pas une contre-preuve adéquate, mais plutôt des éléments de preuve additionnels produits sans autorisation. J’aborderai cette question lorsque j’examinerai le contenu de l’affidavit.

 

Je vais maintenant résumer la preuve pertinente produite par les deux parties. M. Rogers a indiqué qu’il travaillait pour l’opposante depuis 20 ans et qu’il en est maintenant le président. À ce titre, il a une connaissance personnelle des ventes réalisées au Canada, depuis au moins la fin des années 1970, des produits de marques PROTEK et PROTEK et dessin. M. Rogers allègue que les prédécesseurs en titre de l’opposante étaient Protek Paint & Varnish Co., laquelle société a commencé à employer ce nom commercial en 1951, et Protek Paint and Varnish Ltd., laquelle société a été constituée le 15 octobre 1971, comme en fait foi la copie du certificat de constitution produite comme pièce B jointe à son affidavit. L’opposante a été constituée en personne morale le 22 décembre 1994 comme en fait foi la copie des actes constitutifs produite comme pièce C jointe à son affidavit. Toutefois, il n’y a aucune documentation pour appuyer l’allégation voulant que ces entités soient les prédécesseurs en titre de l’opposante. Par conséquent, je limiterai mon analyse de la preuve de l’opposante à l’emploi qu’elle, seule, a fait au Canada, depuis qu’elle a été créée, des marques de commerce PROTEK, PROTEK et dessin et PROTEK PAINT et dessin et des noms commerciaux PROTEK PAINT LIMITED et PROTEK PAINT en liaison avec des peintures, vernis, teintures et agents de scellement (ci-après les produits).

 

L’opposante exploite un magasin de détail sous le nom commercial de Protek Paint Limited à Etobicoke (Ontario) qui offre en vente et vend les produits en liaison avec les marques de commerce PROTEK, PROTEK et dessin et PROTEK PAINT et dessin. Les ventes de produits réalisées par l’opposante en 1995 et en 1996 se chiffrent à 668 700 $ et à 722 700 $ respectivement. Un échantillon de l’étiquette portant la marque de commerce PROTEK PAINT et dessin a été produit comme pièce E2 jointe à l’affidavit de M. Rogers. La preuve établit (pièce D jointe à l’affidavit de M. Rogers) l’emploi de la dénomination sociale PROTEK PAINT LIMITED, telle que celle-ci figure sur les factures émises de l’opposante. Depuis 1995, l’opposante a dépensé de 5 000 $ à 10 000 $ au titre de la publicité. Un échantillon représentatif des annonces publiées a été produit comme pièce H jointe à l’affidavit de M. Rogers. L’opposante a eu le numéro de téléphone suivant 1-888-7PROTEK ainsi que l’adresse de courriel suivante store@protekpaint.com.

 

M. Soulliere est le président de la requérante depuis mai 1991. La requérante a été constituée en personne morale sous le régime des lois du Michigan et est située à Utica (Michigan), comme l’indique la copie du certificat de constitution produite comme pièce A jointe à l’affidavit de M. Soulliere. Il a produit, comme pièce B, un échantillon de l’étiquette portant la marque et a allégué que la marque était employée au Canada en liaison avec les marchandises depuis mars 1995. Les factures présentées par la requérante aux clients canadiens sont produites comme pièce E jointe à l’affidavit de M. Soulliere. Aucun élément de preuve n’établit les modalités de ces ventes, or, étant donné que l’établissement commercial de la requérante est situé aux États-Unis, il est impossible de conclure que ces ventes ont été réalisées au Canada. De plus, la facture la plus ancienne porte la date du 24 avril 1995. M. Soulliere a produit, comme pièce F jointe à son affidavit, des factures de la société Link Customs Services Ltd. pour établir que les marchandises portant la marque ont été importées au Canada. Je vais faire d’autres observations sur ces documents, car ils sont un élément de preuve important produit par la requérante pour établir son emploi de la marque au Canada à partir de la date revendiquée de premier emploi mentionnée dans sa demande d’enregistrement de la marque. L’opposante a participé à diverses foires commerciales au Canada en 1993, 1996 et 1997. Toutefois, il n’y a aucune preuve documentaire établissant des ventes de marchandises en liaison avec la marque au cours de ces foires commerciales même si des listes de prix ont été distribuées.

 

Le 1er janvier 1997, l’opposante a conclu un contrat de licence se rapportant à la marque de commerce avec Royal Group Distributing (pièce I jointe à l’affidavit de M. Soulliere) en vertu duquel la dernière entité devenait le titulaire de licence et distributeur exclusif au Canada des marchandises vendues en liaison avec la marque. Des factures représentatives pour les années 1997 et 1998 présentées au Royal Group Distributing (ci-après RGD) par l’opposante étaient jointes comme pièce à l’affidavit de M. Soulliere. Une brochure de la société envoyée aux clients au Canada a été produite comme pièce O jointe à l’affidavit de M. Soulliere, mais il n’y a aucun détail indiquant la période où l’opposante ou RGD a envoyé cette brochure aux clients au Canada. Des dépliants et des cartes postales ont été produits comme pièce P jointe à l’affidavit de M. Soulliere, lesquels avaient été distribués au Canada en 1995 et 1996 afin de promouvoir les ventes des marchandises en liaison avec la marque.

 

Comme pièce R jointe à son affidavit, M. Soulliere a produit un rapport d’analyse, rédigé par Paint Research Associate, concernant un produit acheté à l’établissement commercial de l’opposante. L’opposante s’est opposée à la production de ce rapport en faisant valoir qu’il s’agissait d’une preuve par ouï-dire. Du fait qu’un affidavit établi sous serment par la personne qui a rédigé le rapport n’a pas été produit, l’opposante n’avait pas la possibilité d’interroger l’auteur de ce rapport. Étant d’accord avec l’opposante, je ne tiendrai pas compte de ce rapport. La requérante n’a pas établi que ce document est fiable et nécessaire afin que celui-ci soit considéré comme une preuve par ouï-dire admissible. [Voir R. v. Khan, [1990] 2 R.C.S. 531 et R. v. Smith [1992] R.C.S. 915].

 

Au cours de son contre-interrogatoire, M. Soulliere a admis ce qui suit :

(i)                 Il n’était pas personnellement au courant des ventes par les détaillants au Canada des marchandises de la requérante à un utilisateur final.

(ii)               Après avoir été confronté au fait que l’étiquette jointe comme pièce B à son affidavit n’était pas conforme aux exigences relatives aux deux langues officielles et aux mesures métriques, il a indiqué qu’il ne savait pas depuis quand cette étiquette était utilisée ou si elle était encore utilisée au Canada.

(iii)             L’élément de preuve joint comme pièce F à son affidavit démontre que des échantillons de produits sont entrés au Canada, mais pas des produits destinés à la vente au Canada.

(iv)             Les éléments de preuve joints comme pièces G, H, K, et L à son affidavit n’établissent pas l’emploi de la marque au Canada.

 

Depuis le 1er janvier 1996, M. Tasson est le directeur général de RGD. Il a également produit comme pièce A jointe à son affidavit une copie du contrat de licence se rapportant à la marque de commerce conclu avec la requérante et en vigueur depuis le 1er janvier 1997. Il a produit comme pièce B jointe à son affidavit une copie de l’étiquette apparaissant sur l’emballage des marchandises et portant la marque employée au Canada par RGD. Il a indiqué qu’il savait que l’opposante employait continuellement sa dénomination sociale au Canada sur les étiquettes apparaissant sur l’emballage des marchandises. Toutefois, il n’indique pas depuis quand cet emploi avait lieu. Suivant les copies des factures se rapportant aux ventes canadiennes produites comme pièce C jointe à son affidavit, RGD a réalisé, au Canada, des ventes de marchandises sur lesquelles apparaît la marque s’élevant à 40 000 $ en 1997 et à 120 000 $ en 1998. Les canaux de distribution de RGD comprennent notamment des compagnies d’agents de scellement pour les voies d’accès au garage, des compagnies d’entretien de pelouses, des entrepreneurs en terrassement, des magasins de détail comme Canadian Tire et Home Hardware, des fabricants et des grossistes de pavés. RGD a dépensé 15 500 $ en 1997 et 18 500 $ en 1998 au titre de la publicité pour la promotion des ventes des marchandises en liaison avec la marque. Comme pièce D jointe à son affidavit, il a produit une copie de l’annonce publiée en mai 1998 dans le magazine « Canadian Living ». Comme pièce F jointe à son affidavit, il a produit une autre étiquette portant la marque et apposée sur l’emballage des marchandises.

 

Au paragraphe 13 de son affidavit, il a indiqué qu’il ne connaissait aucun cas de confusion entre les marchandises de la requérante portant la marque et les marchandises de l’opposante portant la marque de commerce PROTEK et PROTEK et dessin. Il a visité les locaux de la requérante et a acheté un produit portant une étiquette sur laquelle figurait l’inscription suivante : Wood-finishes-Seal-Tek. La pièce G jointe à son affidavit est une étiquette sur laquelle apparaît la dénomination sociale Protek Paint and Varnish Ltd. Comme pièce H à son affidavit, il a produit un dépliant publicitaire des produits vendus par l’opposante, dans lequel figurent les mots Protek Paint. Ce sont les employés de l’opposante qui lui ont appris que ces produits sont principalement vendus dans la région de Toronto et ne sont pas vendus dans des magasins comme Home Depot, Canadian Tire, Réno-Depot et Rona.

 

Il a produit un rapport de Dun et Bradstreet pour les mêmes raisons exposées ci-dessus en ce qui concerne le rapport de Paint Research Associate, ledit document est une preuve par ouï-dire inadmissible. Finalement, les observations faites au paragraphe 20 de son affidavit sont également un élément de preuve inadmissible, car ce sont des arguments plutôt que des faits. [Voir Cadbury Schweppes Inc. v. Najm, 41 C.P.R. (3d) 112]

 

Au cours de son contre-interrogatoire, M. Tasson a admis ce qui suit :

 

(i)                 Il ne savait pas que les marchandises de la requérante étaient vendues au Canada avant 1997.

(ii)               Aucune des factures produites comme pièce C jointe à son affidavit démontre l’emploi de la marque.

(iii)             Les agents de scellement, comme les marchandises de l’opposante, destinés à être utilisés avec du bois, et les agents de scellement, comme les marchandises de la requérante, destinés à être utilisés avec des pavés, de la maçonnerie et du béton, sont souvent ensemble dans le même magasin de détail.

(iv)             L’étiquette employée au Canada figure sur l’illustration de l’emballage décrit dans le dépliant joint comme pièce E à son affidavit, tandis que l’étiquette produite comme pièce B jointe à son affidavit est l’étiquette employée aux États-Unis.

 

En contre-preuve, l’opposante a produit un deuxième affidavit de M. Rogers. Le fait qu’il ne sache pas que les documents produits comme pièces N, O et P jointes à l’affidavit de M. Soulliere aient circulés en Ontario ou ailleurs au Canada ne veut pas dire qu’ils n’ont pas circulé du tout dans ledit territoire. Au paragraphe 10 de son affidavit, il a indiqué qu’il a eu connaissance de cas de confusion et a décrit ce qui lui a été signalé par une autre personne. La requérante s’est opposée à la production de cet élément de preuve en faisant valoir qu’il ne s’agissait pas de contre-preuve appropriée. Un argument similaire a été soulevé dans Horn Abbott v. 120192 Canada Ltd. (1987) 12 C.I.P.R. 245 et l’élément de preuve a été jugé comme étant une contre-preuve appropriée, mais dans la présente affaire, il s’agit de preuve par ouï-dire inadmissible pour les mêmes raisons que celles exposées ci-dessus en ce qui concerne le rapport de Paint Research Associate. Les allégations contenues aux alinéas 14(a), (b), (c) et (e) ne constituent pas une contre-preuve mais un argumentation [ voir Cadbury Schweppes Inc, précitée] tandis que les allégations contenues à l’alinéa 14(d) constituent une preuve par ouï-dire inadmissible.

 

L’époque pertinente pour l’examen des circonstances entourant les questions de non-conformité à l’article 30 de la Loi est la date du dépôt de la demande d’enregistrement (19 avril 1995) [voir Georgia-Pacific Corp. v. Scott Paper Ltd., 3 C.P.R.(3d) 469, à la p. 475], tandis que la question de l’absence du droit d’enregistrer fondée sur le paragraphe 16(1) de la Loi doit être abordée à la date revendiquée du premier emploi par la requérante (31 mars 1995) [article 16 de la Loi]. La date pertinente pour trancher la question du caractère distinctif est, en général, considérée comme étant celle de la date du dépôt de l’opposition (5 juin 1996) [voir Andres Wines Ltd. and E&J Gallo Winery (1975), 25 C.P.R. (2d) 126 à la p. 130 (C.A.F.) et Park Avenue Furniture Corporation v. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 à la p. 424 (C.A.F.)].

 

La requérante a le fardeau de la preuve d’établir que sa demande est conforme aux dispositions de l’article 30 de la Loi, toutefois l’opposante doit d’abord établir les faits sur lesquels elle se fonde pour appuyer ces motifs d’opposition. Une fois que l’opposante s’est acquittée de ce fardeau initial, il incombe à la requérante d’établir que les motifs d’opposition particuliers ne doivent pas empêcher l’enregistrement de la marque [voir Joseph E. Seagram & Sons Ltd. et al v. Seagram Real Estate Ltd., 3 C.P.R. (3d) 325, aux pages 329-330; et John Labatt Ltd. v. Molson Companies Ltd., 30 C.P.R. (3d) 293].

 

Dans sa demande modifiée, la requérante a supprimé la demande d’enregistrement à l’égard des marchandises dont l’emploi était projeté. Ainsi le fondement de l’enregistrement est uniquement lié à l’emploi en liaison avec les marchandises depuis mars 1995. En soi le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30e) est théorique.

 

Il faut se rappeler que l’opposante qui soutient que la requérante ne s’est pas conformée à l’alinéa 30b) de la Loi a un léger fardeau initial tandis que la requérante a le fardeau d’établir la conformité à cette disposition [voir John Labatt Ltd v. Molson Companies Ltd (1990) 30 C.P.R. (3d) 293 à la p. 298]. De plus, l’opposante peut se fonder sur les éléments de preuve produits par la requérante pour s’acquitter du fardeau initial [Tune Masters v. Mr. P’s Mastertune Ignition Services Ltd. (1986) 10 C.P.R. (3d) 84 (C.O.M.C.); Hearst Communications Inc. v. Nesbitt Burns Corp., (2000) 7 C.P.R. (4th) 161 (C.O.M.C.); Labatt Brewing Co. v. Molson Breweries, a Partnership (1996), 68 C.P.R. (3d) 216 (1re inst. C.F.); Williams Telecommunications Corp. v. William Tell Ltd., (1999) 4 C.P.R. (4th) 107 (C.O.M.C.)].

 

L’opposante a fait valoir ce qui suit :

 

(i)                 Il n’existe aucun élément de preuve démontrant l’emploi de la marque au Canada par la requérante depuis le 31 mars 1995.

(ii)               L’étiquette unilingue soulève des doutes quant à son emploi commercial au Canada.

(iii)             La méconnaissance du titulaire de licence de la requérante quant à l’emploi de la marque au Canada avant 1997.

(iv)             Les documents produits comme pièce F jointe au premier affidavit de M. Soulliere, notamment le document qui émane de Revenu Canada – Accise, Douanes et Impôt porte la mention « FOR PROTEK PRODUCTS SAMPLES ENTERING CANADA », ce qui soulève des doutes quant à l’emploi commercial de ces produits, tandis que les autres documents émanant de RGD laissent entendre que la marque a été employée après le 1er janvier 1997.

 

Ces faits sont suffisants pour transférer le fardeau de la preuve à la requérante d’établir qu’elle a employé la marque au Canada en liaison avec chacune des marchandises depuis mars 1995. La preuve au dossier n’appuie pas une telle prétention et, de ce fait, je dois accueillir le motif d’opposition de l’opposante fondé sur l’alinéa 30b) de la Loi.

 

Je vais toutefois analyser les motifs d’opposition fondés sur le caractère distinctif et le paragraphe 16(1) de la Loi. En ce qui concerne le motif d’opposition fondé sur l’article 50 de la Loi, il est rejeté, car la preuve établit clairement l’existence d’un contrat de licence entre la requérante et RGD en date du 1er janvier 1997 et, de ce fait, tout emploi de la marque par RGD est réputé être un emploi de la marque par la requérante. Malgré les arguments réfléchis de l’agent de l’opposante, la demande d’enregistrement modifiée renferme un état dressé dans les termes ordinaires du commerce des marchandises spécifiques. Je traiterai de la conséquence d’une telle conclusion dans mon analyse sur le genre de marchandises et sur le réseau de distribution pour déterminer si la marque est susceptible de causer de la confusion avec les marques de commerce et noms commerciaux de l’opposante.

 

Pour évaluer ces motifs d’opposition, il est utile de citer les dispositions pertinentes de la Loi :

 

2.      Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi.

 

« distinctive » Relativement à une marque de commerce, celle qui distingue véritablement les marchandises ou services en liaison avec lesquels elle est employée par son propriétaire, des marchandises ou services d’autres propriétaires, ou qui est adaptée à les distinguer.

 

« marque de commerce » Selon le cas :

a) marque employée par une personne pour distinguer, ou de façon à distinguer, les marchandises fabriquées, vendues, données à bail ou louées ou les services loués ou exécutés, par elle, des marchandises fabriquées, vendues, données à bail ou louées ou des services loués ou exécutés, par d’autres;

 

16. (1) Tout requérant qui a produit une demande selon l'article 30 en vue de l'enregistrement d'une marque de commerce qui est enregistrable et que le requérant ou son prédécesseur en titre a employée ou fait connaître au Canada en liaison avec des marchandises ou services, a droit, sous réserve de l'article 38, d'en obtenir l'enregistrement à l'égard de ces marchandises ou services, à moins que, à la date où le requérant ou son prédécesseur en titre l'a en premier lieu ainsi employée ou révélée, elle n'ait créé de la confusion :

 

a) soit avec une marque de commerce antérieurement employée ou révélée au Canada par une autre personne;

 

b) soit avec une marque de commerce à l'égard de laquelle une demande d'enregistrement avait été antérieurement produite au Canada par une autre personne;

 

c) soit avec un nom commercial qui avait été antérieurement employé au Canada par une autre personne.

 

 

Pour déterminer si des marques de commerce créent de la confusion, le paragraphe 6(5) de la Loi oblige le registraire à tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris :

 

a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus;

 

b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage;

 

c) le genre de marchandises, services ou entreprises;

 

d) la nature du commerce;

 

e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'ils suggèrent.

 

Le fardeau de la preuve incombe à la requérante qui doit convaincre le registraire qu’il n’y a pas de risque de confusion entre la marque et les marques de commerce et noms commerciaux de l’opposante aux dates susmentionnées pertinentes [voir Sunshine Biscuits Inc. v. Corporate Foods Ltd. (1982), 61 C.P.R. (2d) 53].

Dans Christian Dior, S.A. c. Dion Neckwear Ltd [2002] 3 C.F. 405, la Cour d’appel fédérale a indiqué :

 

«…la Cour doit se mettre à la place d’une personne ordinaire qui est familière avec la marque antérieure mais qui n’en a qu’un vague souvenir; la question à se poser est de savoir si un consommateur ordinaire, au vu de la marque postérieure, aura comme première impression que les marchandises avec lesquelles la seconde marque est employée sont en quelque sorte associées à celles de la marque antérieure.

 

Le registraire doit donc être raisonnablement convaincu, selon la prépondérance des probabilités, que l’enregistrement n’est pas susceptible de créer de la confusion. Il n’est pas nécessaire qu’il soit convaincu hors de tout doute qu’il n’y a aucun risque de confusion. Si la norme de preuve « hors de tout doute » s’appliquait, les requérants seraient, dans la plupart des cas, confrontés à un fardeau insurmontable parce qu’en matière de risque de confusion, la certitude est une denrée rare. Dans le meilleur des scénarios, ce n’est que lorsque les probabilités sont égales qu’on peut dire qu’il existe une sorte de doute, lequel doute doit être résolu en faveur de l’opposant. Mais la notion de doute est un concept trompeur et déroutant en matière civile et le registraire devrait éviter d’y recourir.»

 

 

La question des motifs d’opposition fondés sur l’alinéa 30i) de la Loi voulant que la requérante ne pouvait pas être convaincue qu’elle avait le droit d’employer, au Canada, la marque en liaison avec les marchandises est liée à la question de savoir si la marque est susceptible de créer de la confusion avec les marques de commerce ou noms commerciaux de l’opposante, étant donné que la preuve au dossier ne permet pas de conclure que la requérante connaissait les marques de commerce ou noms commerciaux de l’opposante [voir Sapodilla Co. v. Bristol-Myers Co. (1974), 15 C.P.R. (2d) 152 à la p. 155].

J’appliquerai ces principes aux éléments de preuve résumés ci-dessus.

 

i.                    Caractère distinctif inhérent

 

Dans son argumentation écrite, la requérante a fait valoir que la marque de commerce PROTEK manque de caractère distinctif inhérent, car il s’agit d’un mot utilisé fréquemment pour suggérer le genre ou la qualité des marchandises en liaison avec lesquelles il est employé. La requérante mentionne l’état du registre au Canada et aux États-Unis, lesquels révèlent l’existence de dix-neuf (19) marques de commerce inscrites au registre et plus de trente (30) marques de commerce en suspens, abandonnées ou déposées auprès du bureau des marques de commerce et des brevets des États-Unis pour appuyer cette prétention. Toutefois, il n’y aucune preuve au dossier quant à l’existence de ces marques de commerce et, chose plus importante, que ces marques sont employées au Canada en liaison avec des marchandises de la même catégorie générale que celle de l’opposante.

La marque de l’opposante est un mot inventé qui peut être considéré comme un mot qui suggère les caractéristiques des marchandises vendues en liaison avec celles-ci, mais cela ne veut pas dire qu’il manque de caractère distinctif inhérent, comme le soutient la requérante. Les chiffres relatifs aux ventes de marchandises réalisées par la requérante en liaison avec la marque de commerce PROTEK m’amènent à conclure que ladite marque de commerce a acquis un certain caractère distinctif. De plus, la marque de commerce PROTEK et dessin a un caractère distinctif inhérent en raison de la particularité dans la conception consistant en le mot PROTEK stylisé accompagné du dessin d’un pinceau.

ii)                  Durée de l’emploi de la marque

 

L’opposante a établi l’emploi des marques de commerce PROTEK, PROTEK et dessin et des noms commerciaux PROTEK PAINT LIMITED et PROTEK PAINT depuis au moins le 22 décembre 1994 tandis que la preuve au dossier démontre au mieux que la date la plus ancienne du premier emploi de la marque par la requérante est le 1er janvier 1997.

iii)                Genre de marchandises

La requérante a tenter de distinguer le genre de marchandises des parties en faisant valoir la différence entre ses agents de scellement, lesquels sont destinés aux pavés, aux briques, à la maçonnerie et au béton, tandis que les agents de scellement de l’opposante sont destinés au bois. Je dois comparer la catégorie générale des marchandises décrites dans la demande d’enregistrement de la requérante et ne pas me centrer sur certaines des marchandises. La demande d’enregistrement mentionne l’emploi de la marque en liaison avec les agents de scellement sans aucune restriction. De plus, le titulaire de licence de l’opposante a admis au cours du contre-interrogatoire que les marchandises pourraient être vendues dans des quincailleries et dans des magasins de détail, comme Canadian Tire et Home Hardware, comme les marchandises de l’opposante vendues en liaison avec les marques de commerce PROTEK et PROTEK et dessin. De toute façon, il n’est pas nécessaire que les marchandises soient identiques pour qu’il y ait un risque de confusion entre les marques de commerce. Tout ce qui est nécessaire c’est que le consommateur moyen d’intelligence moyenne qui serait mis en présence des marchandises en vient à la conclusion que les marchandises émanent probablement de la même source. Dans la présente affaire, je suis d’avis que les marchandises associées aux marques de commerce en litige se chevauchent du fait qu’elles appartiennent toutes à la même catégorie générale de marchandises.

 

iv)                Nature du commerce

Comme l’indiquait le juge Teitelbaum dans Everex Systems, Inc. v. Everdata Computer Inc., (1992) 44 C.P.R. (3d) 175 à la p. 182 :

            Eu égard à la nature du commerce, il n’est pas nécessaire de prouver que les marchandises en question ont déjà été ou sont vendues aux mêmes endroits.  Il convient plutôt de se demander si les marchandises pourraient un jour être vendues aux mêmes endroits. Comme l’a dit le juge Dubé dans l’arrêt Cartier Inc. v. Cartier Optical Ltd./Lunettes Cartier Ltée (1988), 20 C.P.R. (3d) 68 (C.F. 1re inst.) à la p. 74 :

 

Toutefois, si les marchandises sont de la même catégorie générale, il n’est pas nécessaire de prouver qu’elles sont vendues aux mêmes endroits pour établir le risque de confusion; il suffit d’établir qu’elles le pourraient et que les parties ont le droit de le faire : [voir la décision Eminence, S.A c. Registraire des marques de commerce (1977), 39 C.P.R. (2d) 40.]

 

v)                  Degré de ressemblance

L’ajout du mot PRODUCTS au mot PROTEK n’est pas suffisant pour permettre à un consommateur ayant un souvenir imparfait des marques de commerce PROTEK et PROTEK et dessin et des noms commerciaux PROTEK PAINT LIMITED et PROTEK PAINT de distinguer les marchandises vendues en liaison avec lesdites marques des marchandises vendues en liaison avec la marque de commerce PROTEK PRODUCTS. De plus, la première partie d’une marque de commerce doit être traitée comme étant d’une importance particulière. [Voir Molson Companies Ltd. v. John Labatt Ltd. (1990), 28 C.P.R. (3d) 457 à la p. 461.]

Ayant examiné la preuve pertinente dans le contexte des circonstances de l’espèce, j’arrive à la conclusion que la marque crée de la confusion avec les marques de commerce de l’opposante PROTEK, PROTEK et dessin et les noms commerciaux PROTEK PAINT LIMITED et PROTEK PAINT lorsque celles-ci sont employées en liaison avec les marchandises. De ce fait, j’accueille également les motifs d’opposition fondés sur le caractère distinct et sur le paragraphe 16(1) de la Loi.

Pour ces motifs et conformément au pouvoir qui m’a été délégué par le registraire des marques de commerce en application du paragraphe 63(3) de la Loi, je rejette la demande d’enregistrement modifiée de la marque de commerce présentée par la requérante en vertu du paragraphe 38(8) de la Loi.

 

FAIT À MONTRÉAL, QUÉBEC, CE 15e JOUR DE SEPTEMBRE 2003.

 

 

 

Jean Carrière

Agent d’audience

Commission des oppositions des marques de commerce

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