Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION de Viacom International Inc. à la demande no 1050076 produite par Crossroads Publications Inc. pour la marque de commerce REAL WORLD                                                 

 

 

Le 8 mars 2000, Crossroads Publications Inc. (la « Requérante ») a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce REAL WORLD (la « Marque ») fondée sur l’emploi de la Marque au Canada depuis au moins 1990 en liaison avec les services suivants :

Services de consultation créative en rapport avec la publicité et la promotion, tous les genres de divertissement, diffusion sur le Web, et diffusion d’informations aux particuliers, entreprises, organismes et paliers de gouvernement ciblés, au moyen de médias interactifs et non interactifs; et services de production et de post-production en rapport avec les sujets suivants : films, vidéos, animation, enregistrements sonores, sites Web, diffusions, diffusions sur le Web et commerce électronique.

                                                          

La demande a été publiée pour fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 1er août 2001.

 

Le 8 décembre 2003, Viacom International Inc. (l’« Opposante ») a produit une déclaration d’opposition à l’encontre la demande. La Requérante a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle, d’une part, elle niait les allégations de l’Opposante, et d’autre part, elle soutenait que la déclaration d’opposition ne soulevait pas de motif d’opposition valable eu égard aux faits et à l’absence de faits allégués.

 

La preuve de l’Opposante se compose de l’affidavit de Barbara Gallagher. La Requérante a obtenu une ordonnance l’autorisant à contre-interroger Mme Gallagher, mais ne l’a pas contre‑interrogée.

 

La Requérante a choisi de ne produire aucun élément de preuve.

 

Seule l’Opposante a produit un plaidoyer écrit, et seule l’Opposante a participé à l’audience.

 

Fardeau de preuve

La Requérante a le fardeau d'établir, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande satisfait aux exigences de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13 (la « Loi »). Il incombe cependant à l'Opposante de s’acquitter du fardeau initial en établissant les faits sur lesquels elle appuie chacun de ses motifs d'opposition. [Voir John Labatt Ltd. c. Molson Companies Ltd. (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F.1re inst.); Dion Neckwear Ltd. c. Christian Dior, S.A. et al. (2002), 20 C.P.R. (4th) 155 (C.A.F.)].

 

Motifs d’opposition fondés sur l’article 30

La date pertinente pour l’application de l’article 30 est la date de production de la demande [voir Georgia-Pacific Corp. c. Scott Paper Ltd., 3 C.P.R. (3d) 469, à la p. 475].

 

Il incombe à la Requérante de démontrer que sa demande est conforme à l'article 30 et cette démonstration repose à la fois sur la question de savoir si la Requérante a déposé une demande conforme aux exigences de l'article 30 et si les déclarations qu’elle a faites dans le cadre de cette demande sont exactes. Dans la mesure où l'Opposante allègue certains faits à l’appui du motif d’opposition fondé sur l'article 30, elle est tenue d'établir le bien-fondé de ces allégations. [Joseph E. Seagram & Sons Ltd. et autres c. Seagram Real Estate Ltd. (1984), 3 C.P.R. (3d) 325 (C.O.M.C.), conf. 33 C.P.R. (3d) 454].

 

Alinéa 30a)

L’Opposante a soutenu que la demande ne respectait pas les exigences de l'alinéa 30a) parce qu'elle ne comportait pas un état, dressé dans les termes ordinaires du commerce, des services spécifiques en liaison avec lesquels la Marque avait été employée. Puisque l’Opposante n’a produit aucun élément de preuve et n’a formulé aucun argument au soutien de ce motif, elle ne s’est pas acquittée de son fardeau initial. Le motif est donc rejeté.

 

Alinéa 30b)

L’Opposante a fait valoir que la demande ne respectait pas l’alinéa 30b) de la Loi parce que la Requérante n’avait pas employé la Marque en liaison avec chacune des catégories générales de services décrites dans la demande depuis la date revendiquée comme date de premier emploi, soit 1990.

 

Quant à la question de la non-conformité avec les dispositions de l'alinéa 30b), le fardeau de la preuve initialement exigé de l'Opposante est moins strict puisque les faits concernant le premier emploi de la marque par la Requérante relèvent particulièrement des connaissances de celle-ci. [Voir Tune Masters c. Mr. P's Mastertune Ignition Services Ltd. (1986), 10 C.P.R. (3d) 84 (A.A.M.C.), page 89.]

 

L’Opposante a démontré que la Requérante avait seulement été constituée en personne morale le 8 janvier 1999, c.‑à‑d. neuf ans après la date qu’elle revendique comme date de premier emploi. [Pièce « A », affidavit de Mme Gallagher] Ce faisant, elle s’est acquittée du fardeau peu astreignant qui lui incombait quant à sa prétention selon laquelle la Requérante n’a pas commencé à employer la Marque depuis au moins 1990.

 

La Requérante n’a mentionné aucun prédécesseur en titre dans sa demande, et elle n’a produit aucun élément de preuve pour expliquer l’incohérence révélée par la preuve présentée par l’Opposante. La Requérante ne s’est donc pas acquittée du fardeau qui lui incombait, et le motif fondé sur l’alinéa 30b) est accueilli.

 

Alinéa 30i)

L’Opposante a soutenu que la demande ne respectait pas les exigences de l’alinéa 30i) parce que la Requérante ne pouvait pas avoir été convaincue qu’elle avait le droit d’employer la marque au Canada. Lorsque le requérant fournit la déclaration exigée à l'alinéa 30i), le motif fondé sur cette disposition ne devrait être accueilli que dans des situations exceptionnelles, par exemple lorsqu’il est démontré que le requérant a fait preuve de mauvaise. [Sapodilla Co. Ltd. c. Bristol-Myers Co. (1974), 15 C.P.R. (2d) 152 (C.O.M.C.), à la page 155.]. Les éléments de preuve qui étayaient le motif fondé sur l’alinéa 30b) ne constituent pas une preuve du genre de mauvaise foi qui étaierait un motif fondé sur l’alinéa 30i). Je rejette donc le motif fondé sur l’alinéa 30i).

 

Motif d’opposition relatif au caractère distinctif

L’Opposante a aussi allégué que la Marque ne distingue pas les services de la Requérante.

 

Pour s’acquitter de son fardeau initial en ce qui a trait à ce motif, l’Opposante doit démontrer qu’à la date de production de la déclaration d’opposition (le 8 décembre 2003), d’autres marques/noms étaient devenus suffisamment connus pour annuler le caractère distinctif de la Marque. [Motel 6, Inc. c. No. 6 Motel Ltd. (1981), 56 C.P.R. (2d) 44, à la p. 58 (C.F.1re inst.); Re Andres Wines Ltd. and E. & J. Gallo Winery (1975), 25 C.P.R. (2d) 126, à la p. 130 (C.A.F.); et Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 412, à la p. 424 (C.A.F.)]

 

Dans son plaidoyer écrit, l’Opposante a soutenu que ce motif devrait être accueilli, étant donné la preuve selon laquelle deux sociétés employaient le terme REAL WORLD comme composante de leurs noms en 2001, à savoir Real World Media Inc. et Real World Films Inc.

 

Puisque la pièce « A » jointe à l’affidavit de Mme Gallagher indique que la Requérante a changé son nom pour Real World Media Inc. le 15 septembre 2000, l’emploi de REAL WORLD par cette entité est sans intérêt.

 

Mme Gallagher fournit aussi des copies de sites Web archivés pour www.realworldmedia.tv datées du 23 février 2001 et du 19 mai 2001 [pièce « D »]. Bien que ces sites Web archivés mentionnent Real World Films Inc., ces éléments de preuve ne démontrent pas que Real World Films était devenue suffisamment connue le 8 février 2003 pour permettre à l’Opposante de s’acquitter de son fardeau initial. En fait, aucun élément de preuve n’indique que quiconque au Canada ait déjà vu les sites Web en question. Je n’ai donc pas à déterminer si les sites Web archivés devraient être admis à titre d’éléments de preuve fiables [voir ITV Technologies, Inc. c. WIC Television Ltd. (2003), 29 C.P.R. (4th) 182 (C.F.1re inst.), où un élément de preuve de ce genre a été jugé fiable].

 

Le motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif est donc rejeté parce que l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau initial.

 

Décision

Conformément aux pouvoirs qui m’ont été délégués par le registraire des marques de commerce en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, je repousse la demande de la Requérante en application du paragraphe 38(8).

 

FAIT À TORONTO (ONTARIO), LE 6 FÉVRIER 2008.

 

Jill W. Bradbury

Membre,

Commission des oppositions des marques de commerce

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