Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRANSLATION/TRADUCTION

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2011 COMC 230

Date de la décision : 2011-11-30

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION produite par Pierce Arrow Society, à l’encontre de la demande d’enregistrement no 1 339 865 pour la marque de commerce PIERCE-ARROW au nom d’Olaf vom Heu and IBBTG AG, société en nom collectif faisant affaire sous le nom de Pierce-Arrow.

[1]               Le 19 mars 2007, Olaf vom Heu and IBBTG AG, société en nom collectif faisant affaire sous la dénomination de Pierce-Arrow (la Requérante), a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce PIERCE-ARROW (la Marque) en se fondant sur son emploi projeté au Canada. L’état déclaratif des marchandises est actuellement libellé comme suit :

Véhicules, nommément automobiles, motos et vélos.

[2]               En réponse à une demande de la Section de l’examen du Bureau des marques de commerce, la Requérante reconnaît que l’enregistrement subséquent résultant de la présente demande sera assujetti à l’article 67 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T‑13 (la Loi), et qu’il visera les enregistrements de marques de commerce suivants ayant eu lieu avant le 1er avril 1949 sous le régime des lois de Terre-Neuve : nos TERRE-NEUVE1728 et TERRE-NEUVE1636.

[3]               La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 16 avril 2008.

[4]               Le 15 septembre 2008, Pierce Arrow Society (l’Opposante) a produit une déclaration d’opposition à l’encontre de la demande. Les motifs d’opposition sont les suivants : la demande de la Requérante ne satisfait pas aux exigences de l’al. 30i) de la Loi, la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque en vertu des al. 16(1)a) et c) de la Loi et la Marque n’est pas distinctive. La présente demande étant fondée sur un emploi projeté, j’ai présumé que les motifs relatifs à l’absence de droit à l’enregistrement de l’Opposante étaient fondés sur les al. 16(3)a) et c) plutôt que sur les al. 16(1)a) et c). Les motifs fondés sur l’absence de droit à l’enregistrement et le caractère non distinctif portent sur la confusion avec la marque de commerce et le nom commercial PIERCE ARROW de l’Opposante, qui auraient été employés au Canada par l’Opposante depuis 1957 en liaison avec l’exploitation d’une organisation vouée à la conservation et à l’entretien d’automobiles, de motocyclettes, de bicyclettes, de camions et de roulottes PIERCE ARROW.

[5]               La Requérante a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle elle nie les allégations formulées par l’Opposante.

[6]               La preuve de l’Opposante est constituée de l’affidavit de Ralph J. McKittrick, président de Pierce Arrow Society, une société sans but lucratif de l’Illinois. La preuve de la Requérante est constituée de l’affidavit de Michelle Anderson, assistante juridique à l’emploi des avocats de la Requérante, ainsi que d’une copie certifiée des enregistrements de marque de commerce américains nos 1 185 514 (PIERCE et Dessin); 1 051 583 (PIERCE ARROW SOCIETY et Dessin); 3 110 904 (PIERCE ARROW); 1 058 801 (PIERCE ARROW SOCIETY); 2 625 651 (PIERCE ARROW FOUNDATION et Dessin); 705 872 (PIERCE ARROW et Dessin) et du dossier et du contenu du dossier no 75/827,149 (enregistrement no 2 625 651). L’Opposante a produit en réponse un deuxième affidavit, soit celui de M. McKittrick.

[7]               Aucun des déposants n’a été contre-interrogé. Seule l’Opposante a produit un plaidoyer écrit.  Aucune des parties n’a demandé d’audience. 

Fardeau de la preuve et dates pertinentes

[8]               La Requérante doit s’acquitter du fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. Toutefois, l’Opposante a le fardeau initial de présenter suffisamment d’éléments de preuve recevables pouvant raisonnablement étayer la conclusion que les faits allégués à l’appui de chaque motif d’opposition existent [voir John Labatt Ltd c. Molson Companies Ltd. (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.), p. 298; Dion Neckwear Ltd. c. Christian Dior, S.A. et al. 20 C.P.R. (4th) 155 (C.A.F.)].

[9]               Les dates pertinentes quant aux motifs d’opposition sont les suivantes :

         article 30 – la date de production de la demande [voir Georgia-Pacific Corp.  c. Scott Paper Ltd. (1984), 3 C.P.R. (3d) 469 (C.O.M.C.), p. 475];

         paragraphe 16(3) – la date de production de la demande [voir le paragraphe 16(3)];

         absence de caractère distinctif – la date de production de la déclaration d’opposition [voir Metro-Goldwyn-Mayer Inc. c. Stargate Connections Inc. (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (C.F.)].

Question préliminaire

[10]           L’Opposante s’est opposée à certaines parties du témoignage de Mme Anderson portant sur les deux aspects suivants : 1) comme Mme Anderson est une employée de l’agent de la Requérante, son affidavit ne devrait pas être admissible parce qu’il contient clairement des questions litigieuses; et 2) l’affidavit de Mme Anderson contient une série d’arguments plutôt que des faits essentiels. Pour étayer sa position, l’Opposante s’appuie sur l’arrêt Cross-Canada Auto Body Shop Supply (Windsor) Ltd. c. Hyundai Auto Canada (2006), 53 C.P.R. (4th) 286 (C.A.F.).

[11]           Madame Anderson a effectué diverses recherches sur Internet pour déterminer si l’adresse canadienne de l’Opposante fournie par M. McKittrick dans sont premier affidavit était l’adresse d’une entreprise exploitée activement. Elle a également commenté certaines estimations de Statistique Canada au sujet de la population canadienne et de l’étendue de la production et des ventes automobiles au Canada. De plus, elle a décrit son expérience de recherche sur le site Web de l’Opposante et a souligné ne pas avoir été en mesure de faire des achats directement par l’entremise du site Web de l’Opposante.

Je suis d’accord avec l’Opposante que le témoignage de Mme Anderson au sujet du site Web de l’Opposante constitue un élément de preuve contesté qui ne devrait pas être présenté par l’employé d’un agent d’une partie. Je suis également d’accord qu’on devrait accorder moins de poids aux parties de l’affidavit de Mme Anderson qui constituent des arguments plutôt que des faits. S’agissant de l’admissibilité de la preuve relative à Statistique Canada, j’ai tenu compte du commentaire suivant formulé par la juge Tremblay dans ITV Technologies, Inc. c. WIC Television Ltd. (2003), 29 C.P.R. (4th) 182 (C.F. 1re inst.) concernant la fiabilité des éléments de preuve tirés d’Internet : « Pour ce qui concerne la fiabilité d’Internet, je souscris à l’idée que, en général, les sites Web officiels, c’est-à-dire ceux qui sont créés et tenus à jour par l’organisme même, fournissent des renseignements plus fiables que les sites Web non officiels, c’est-à-dire ceux qui contiennent de l’information sur l’organisme mais sont offerts par des personnes physiques ou des entreprises.

À mon avis, les sites Web officiels d’organismes connus peuvent fournir des renseignements fiables qui seraient admissibles en preuve, de la même façon que la Cour peut se fier à Carswell ou à C.C.C. pour ce qui concerne la publication des décisions judiciaires, sans avoir à exiger une copie certifiée conforme du texte publié par l’arrêtiste. Par exemple, il est évident que le site Web officiel de la Cour suprême du Canada propose une version exacte des arrêts de ce tribunal. »

 

Appliquant ce raisonnement à la présente affaire, je suis disposée à considérer la preuve de Statistique Canada comme étant fiable étant donné qu’elle provient de ce que j’estime être un site Web officiel. En conséquence, je suis disposée à accorder la pleine valeur probante à cette preuve.

[12]           De plus, je ne suis pas d’accord avec l’Opposante qui prétend que les parties de recherches sur Internet dans l’affidavit de Mme Anderson ne sont pas admissibles. En examinant cette question, j’ai pris en compte la décision suivante de la membre de la Commission, Mme  Bradbury, dans Assoc. canadienne des bijoutiers. c. American Gem Society (2010), 86 C.P.R. (4th) 131 :

Je ne suis pas d’accord avec la Requérante lorsqu’elle dit que les résultats des recherches effectuées dans Internet qui ont été produits en preuve par Mme  Cheng sont controversés. […] je ne crois pas que les préoccupations exprimées par la Cour d’appel fédérale dans Cross-Canada s’appliquent légitimement en l’espèce. Je ne vois pas comment on pourrait considérer que l’intérêt d’un agent employé par une partie fausse ces résultats. Il est très clair que la recherche avait pour but de voir si une personne ou une autre entreprise que la Requérante employait l’expression [TRADUCTION] « gemmologue agréé » sur un site Web canadien. Je ne vois pas comment le fait que cette preuve ait été produite par une employée de l’agent de l’Opposante fait en sorte qu’elle est moins appropriée ou qu’elle soulève plus de doutes que si l’Opposante ou son agent avait eu recours à un enquêteur externe pour effectuer ces recherches et signer un affidavit. Dans les deux cas, la Requérante pourrait, si elle le voulait, contre-interroger la personne produisant cette preuve pour savoir pourquoi elle a choisi les termes de recherche qu’elle a utilisés. La réponse semble évidente en l’espèce. Dans l’ensemble, la preuve ne me paraît pas controversée. Je souligne également que la Requérante aurait pu, si elle l’avait voulu, fournir les résultats de ses propres recherches dans Internet pour contredire les résultats des recherches effectuées par l’Opposante.

[13]           De façon similaire, les recherches de Mme Anderson visant à déterminer si l’adresse canadienne de l’Opposante était celle d’une entreprise exploitée activement ne sont pas moins appropriées que si la Requérante avait engagé un enquêteur externe pour faire ce travail. Quoi qu’il en soit, M. McKittrick a confirmé dans son deuxième affidavit que l’adresse de l’Opposante fournie dans son premier affidavit n’était pas l’adresse principale de l’Opposante.

[14]           Cet élément de preuve est donc admissible, tout comme le reste de l’affidavit de Mme Anderson.

Motif fondé sur l’alinéa 30i)

[15]           Lorsqu’un requérant produit la déclaration exigée par l’al. 30i), le motif fondé sur cet alinéa ne devrait être retenu qu’en des cas exceptionnels, notamment lorsque la mauvaise foi du requérant est établie [Sapodilla Co. Ltd. c. Bristol-Myers Co. (1974), 15 C.P.R. (2d) 152, [C.O.M.C., p. 155]. Je souligne que la Requérante dans la présente affaire a fait la déclaration requise et qu’il n’y a aucune preuve qu’elle a agi de mauvaise foi. Je rejette donc ce motif d’opposition.

Motifs d’opposition fondés sur le paragraphe 16(3)

[16]           L’Opposante a également fait valoir que la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement conformément au paragraphe 16(3) du fait que la Marque crée de la confusion avec la marque de commerce PIERCE ARROW de l’Opposante, laquelle a été précédemment employée en liaison avec des services de conservation et d’entretien d’automobiles, de motocyclettes, de bicyclettes, de camions et de roulottes PIERCE ARROW. Au titre du motif fondé sur l’al. 16(3)c), l’Opposante a allégué que la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement aux termes de cette disposition parce que la Marque crée de la confusion avec le nom commercial PIERCE ARROW de l’Opposante, précédemment employé par cette dernière en liaison avec les services susmentionnés.

[17]           En ce qui a trait à ces motifs d’opposition, l’Opposante doit d’abord démontrer qu’elle a employé sa marque de commerce ou son nom commercial avant la date de production de la demande de la Requérante et qu’elle ne l’avait pas abandonné à la date de l’annonce de la demande de la Requérante [article 16(5)].  Le paragraphe 4(2) de la Loi prévoit les exigences à satisfaire pour qu’une marque soit réputée employée en liaison avec des services.

4(2) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l’exécution ou l’annonce de ces services.

[18]           L’Opposante doit donc présenter des affirmations factuelles et une preuve documentaire démontrant que les services ont été exécutés et comment la marque PIERCE ARROW a été montrée dans l’exécution ou l’annonce des services.

[19]           Or, en ce qui concerne le nom commercial de l’Opposante, il n’y a aucune définition dans la Loi de ce que constitue un emploi approprié d’un nom commercial. Sur ce point, je me reporte aux commentaires de la juge Simpson dans Mr. Goodwrench Inc. c. General Motors Corp., (1994) 55 C.P.R. (3d) 508 :

« Aucune disposition de la Loi ne définit ou ne décrit l'emploi d'un nom commercial. Toutefois, dans l'affaire Professional Publishing Associates Ltd. c. Toronto Parent Magazine Inc., (1986), C.P.R. (3d) 207 (C.F. 1re inst.), le juge Strayer a étudié ce problème et conclu que les principes énoncés à l'art. 2 et au par. 4(1) de la Loi s'appliquaient à l'emploi d'un nom commercial. Voici ses propos sur la question :

Bien que la Loi sur les marques de commerce ne définisse pas l'emploi à l'égard des noms commerciaux je suis convaincu, compte tenu des objets de la Loi, que l'emploi devrait avoir lieu dans le cours normal des affaires et à l'égard de la classe de personnes ou des classes de personnes avec qui ces affaires devront être transigées.

 

Par conséquent, l'emploi dans le cours ou la pratique normale des affaires sera le critère selon lequel la présente espèce sera décidée. »

[20]           En conséquence, l’Opposante se sera acquittée de son fardeau de preuve dans la présente affaire si elle démontre qu’avant le 19 mars 2007, elle a employé sa marque de commerce au Canada dans l’exécution ou l’annonce de ses services ou son nom commercial dans la pratique normale du commerce. Je me pencherai maintenant sur la preuve de l’Opposante afin de déterminer si elle s’est acquittée de son fardeau de preuve.

[21]           Monsieur McKittrick déclare être le président de The Pierce Arrow Society (la société), une société à but non lucratif de l’Illinois. Comme il a été dit précédemment, il a confirmé dans son deuxième affidavit que l’adresse principale actuelle de la société est 1054 Ashmont Avenue, Oakland, Californie, 94610-1261. Il a expliqué que les automobiles PIERCE ARROW ont une longue histoire au Canada; l’entreprise a commencée en 1931 sous le nom Pierce Arrow Company of Canada, une filiale de The Pierce Arrow Motor Car Company, dont le siège social était à Buffalo, New York. The Pierce Arrow Company of Canada avait une usine située à Walkerville, en Ontario, qui a continué d’être exploitée à titre d’usine de montage pour les automobiles PIERCE ARROW vendues au Canada jusqu’en 1935.

[22]           Il explique que la société a été fondée en août 1957 par R. Vale Faro, dans le but de former une organisation internationale visant à stimuler et à préserver l’intérêt pour les véhicules PIERCE ARROW et à fournir des renseignements techniques, historiques et esthétiques à ceux qui détiennent ces véhicules ou qui s’y intéressent. Il s’agit d’une société sans but lucratif qui, pendant près de cinquante ans, a travaillé activement aux États-Unis et au Canada pour conserver l’héritage relié aux automobiles, camions, bicyclettes et motocyclettes PIERCE ARROW dont les derniers modèles ont été fabriqués en 1938 et pour stimuler l’intérêt à l’égard de ces véhicules.

[23]           Monsieur McKittrick affirme qu’à compter de janvier 2009, la société avait près de 1 100 membres dans au moins seize pays différents. Après les États-Unis, le Canada a le nombre de membres le plus important; certains de ces membres détiennent des véhicules PIERCE ARROW originaux ou restaurés, le total pour ce bassin de membres se situant entre 35 et 50 véhicules. La société détient et exploite un site Web depuis 1995 (www.pierce-arrow.org).

[24]           La société s’occupe entre autres de fournir des services éducatifs et des services de divertissement, y compris l’exploitation d’un musée consacré à des automobiles classiques ou d’époque précises et à des produits et artéfacts connexes et l’organisation de séminaires et d’ateliers visant à favoriser l’appréciation pour des automobiles classiques ou d'époque précises et pour les produits et artéfacts connexes. Ces services sont fournis sous les marques de services PIERCE ARROW SOCIETY et Dessin et PIERCE ARROW FOUNDATION et Dessin, reproduites ci-dessous.

Monsieur McKittrick souligne que ces marques de services ont été employées de façon continue au Canada et aux États-Unis depuis 1964 et 1998, respectivement.

[25]           La société, grâce à la Pierce Arrow Foundation, appuie le Pierce Arrow Museum situé à Kalamazoo, au Michigan; plus de 8 500 Canadiens ont visité cet endroit depuis son ouverture en 1999. Une illustration d’une partie de l’exposition au Pierce Arrow Museum figure au paragraphe 9 de l’affidavit de M. McKittrick.

[26]           Chaque année, l’Opposante organise une rencontre annuelle de cinq jours dans différentes parties des États-Unis où plusieurs membres canadiens de l’Opposante et leurs conjoints se rendent et apportent leurs automobiles PIERCE ARROW. Il existe également d’importantes relations commerciales entre un bon nombre de fournisseurs de pièces et accessoires PIERCE ARROW canadiens et américains, lesquels fournissent également des services de restauration aux membres de l’Opposante. Un de ces fournisseurs canadiens est Fawcett Motor Carriage Company Ltd. situé à Toronto, en Ontario. En mars 2009, cette entreprise s’occupait de la restauration de six automobiles d’époque PIERCE ARROW. Fawcett Motor Carriage Co. (1981) située à Whitby, en Ontario, a restauré quelques automobiles PIERCE ARROW appartenant à des membres de l’Opposante vivant au Canada et aux États‑Unis et s’occupe de l’entretien de ces automobiles sur une base régulière.

[27]           Compte tenu de l’ensemble de la preuve de l’Opposante, je ne suis pas convaincue que l’Opposante a démontré l’emploi de sa marque en liaison avec la [traduction] « conservation et l’entretien d’automobiles, de motocyclettes, de bicyclettes, de camions et de roulottes PIERCE ARROW » au Canada conformément au paragraphe 4(2) de la Loi. L’Opposante n’a fourni aucun exemple de publicités, d’enseignes ou d’inscriptions téléphoniques établissant comment la marque ou le nom était montré en liaison avec l’exécution ou l’annonce de ces services au Canada. De plus, l’Opposante ne fournit pas elle-même des services d’entretien d’automobiles à ses membres, mais le fait plutôt par l’entremise de « fournisseurs », dont Fawcett Motor Carriage Company Ltd. et Fawcett Motor Carriage Co. (1981). L’Opposante n’a pas expliqué quel avantage elle aurait tiré de l’emploi par ces entreprises aux termes du paragraphe 50(1). Enfin, le fait que l’Opposante organise une rencontre annuelle aux États-Unis à laquelle participent certains membres canadiens et qu’elle appuie le Pierce Arrow Museum aux États-Unis grâce à la Pierce Arrow Foundation n’est pas pertinent pour déterminer s’il y a eu emploi au Canada conformément au paragraphe 4(2) de la Loi.

[28]           Les motifs d’opposition fondés sur les alinéas 16(3)a) et c) sont donc rejetés puisque l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve initial.

Motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif

[29]           Voici comment est libellé le motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif invoqué par l’Opposante :

[traduction]

La marque de commerce PIERCE ARROW alléguée n’est pas distinctive de la Requérante, et ne distingue pas les marchandises projetées de la Requérante, et n’est pas adaptée à les distinguer en raison de l’emploi préexistant et de la réputation de la marque de commerce PIERCE-ARROW et du nom commercial PIERCE-ARROW de l’Opposante au Canada et de l’emploi répandu et de la réputation acquise de la marque de commerce PIERCE ARROW détenue et employée au Canada par The Pierce Arrow Motor Car Company.

[30]           La Requérante a le fardeau ultime de démontrer que sa Marque distingue véritablement ses services de ceux d’autres propriétaires au Canada, ou qu’elle est adaptée à les distinguer ainsi [Muffin Houses Inc. c. The Muffin House Bakery Ltd. (1985), 4 C.P.R. (3d) 272 (C.O.M.C.)]. Toutefois, il incombe à l’Opposante de prouver les allégations de fait à l’appui de son motif d’absence de caractère distinctif. Bien que pour s’acquitter de ce fardeau de preuve, l’opposant n’a pas à démontrer que sa marque de commerce est bien connue au Canada [voir Motel 6, Inc. c. No. 6 Motel Ltd. (1981), 56 C.P.R. (2d) 44 (C.F. 1re inst.)], une marque doit être connue au moins jusqu’à un certain point pour annuler le caractère distinctif établi d’une autre marque, et sa réputation au Canada devrait être importante, significative ou suffisante [Bojangles’ International LLC c. Bojangles Café Ltd. (2006), 48 C.P.R. (4th) 427 (C.F.)]. Il convient de souligner que dans Bojangles’, l’opposante avait présenté de nombreux éléments de preuve pour démonter que plusieurs Canadiens étaient au courant de ses activités à l’étranger (aux États-Unis), mais la Cour d’appel fédérale a néanmoins conclu que les éléments de preuve de l’opposante ne lui avaient pas permis de s’acquitter de son fardeau de preuve initial relativement au caractère distinctif.

[31]           La date pertinente pour l’appréciation du caractère distinctif est la date de production de l’opposition, soit le 15 septembre 2008 [voir Metro-Goldwyn-Mayer Inc. c. Stargate Connections Inc. (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (C.F.)].

[32]           D’après la preuve produite, je ne peux conclure que l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve initial de démontrer que sa marque ou son nom avait acquis une réputation suffisante au Canada au 15 septembre 2008 pour influer sur le caractère distinctif de la Marque. Sur ce point, la présente affaire est unique du fait qu’elle examine une marque de commerce et un nom commercial qui ont été employés en liaison avec des automobiles au Canada dans les années 1930 et que l’Opposante prétend maintenant que la marque et le nom continuent d’être employés en liaison avec des services de préservation et d’entretien de telles automobiles qui sont maintenant des antiquités. Toutefois, l’Opposante n’a pas démontré que sa marque ou son nom a acquis une réputation suffisante au sein d’une proportion importante de la population canadienne. Il semble plutôt que la marque et le nom de l’Opposante ne sont connus que d’un nombre très restreint de Canadiens qui sont membres de la société de l’Opposante.

[33]           À cet égard, la preuve établit tout au plus que les membres canadiens de la société de l’Opposante détiennent de 35 à 50 véhicules PIERCE ARROW originaux ou restaurés et que la société a fourni des services d’entretien pour de tels véhicules à l’occasion, que certains membres canadiens participent à la rencontre annuelle aux États-Unis, qu’environ 8 500 Canadiens ont visité l’exposition du PIERCE ARROW FOUNDATION au Pierce Arrow Museum situé à Kalamazo, au Michigan, depuis son ouverture en 1999 et que l’Opposante exploite un site Web à l’adresse suivante : www.pierce-arrow.org. Je ne vois pas clairement comment cette preuve démontre que la marque de commerce et le nom commercial PIERCE ARROW de l’Opposante ont acquis une réputation suffisante au Canada en liaison avec des services de conservation et d’entretien d’automobiles pour annuler le caractère distinctif de la Marque. À mon avis, pour s’acquitter du fardeau à l’égard de ce motif, l’Opposante aurait dû produire une preuve établissant que les services fournis en liaison avec sa marque sont connus par un plus grand nombre de Canadiens que le nombre restreint de Canadiens qui possèdent de tels véhicules d’époque ou qui ont visité le musée de l’Opposante aux États-Unis. Comme il a été dit au paragraphe 33 dans Bojangles’ :« Le propriétaire d'une marque de commerce étrangère ne peut pas simplement affirmer que sa marque de commerce est connue au Canada; il doit plutôt présenter une preuve claire à ce sujet ».

L’Opposante ne s’étant pas acquittée de son fardeau de preuve à l’égard de ce motif, le motif d’opposition n’est pas retenu.


Décision

[34]           Compte tenu de ce qui précède, et dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition en application du paragraphe 38(8) de la Loi.

______________________________

Cindy R. Folz

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Mélanie Lefebvre, LL.B.

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