Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

RELATIVEMENT A LOPPOSITION de Jean Couzon S.A. à  la demande denregistrement no 767 021 concernant la marque de commerce CUISINOX & dessin produite par 155686 Canada Inc.                                               

 

 

Le 24 octobre 1994, la requérante, 155686 Canada Inc., a produit une demande denregistrement de la marque de commerce CUISINOX & dessin, reproduite ci-dessous, fondée sur lemploi projeté de la marque de commerce au Canada par la requérante ou par un licencié ou, encore, par la requérante et par un licencié en liaison avec :

« Vaisselle, nommément vaisselle de porcelaine, vaisselle en plastique, vaisselle en céramique, assiettes, tasses, soucoupes, plats de service, marmites, casseroles, passoires, pots à ingrédients, couverts, spatules, saucières, woks, plateaux, couteaux à découper, couperets, fourchettes à découper, écumoires, pilons, pocheuses, poêlons, soupières, égouttoirs, casse-noix, éplucheurs, pinces, supports pour serviettes de table, vide-pommes, couteaux à légumes, presse-purée, presses, broyeurs, moules, louches, trancheuses, batteurs, tamis, saupoudreuses, bocaux, pichets, carafes, râpes, bouilloires, marmites à pression, ouvre-boîtes, services à condiments, couvercles connexes, batterie de cuisine, poêles à frire, cafetières, crémiers, sucriers, plateaux de service, seaux glace, rôtissoires, verres. »

 

 

 

 

 

 

 

La présente demande a été publiée pour fins dopposition dans le Journal des marques de commerce du 23 août 1995 et lopposante, Jean Couzon S.A., a produit une déclaration dopposition le 3 octobre 1995, dont copie a été envoyée à la requérante le 17 novembre 1995.  La requérante a produit et signifié une contre-déclaration le 18 décembre 1995.  Lopposante ainsi que la requérante ont choisi de ne pas soumettre de preuve principale, conformément aux paragraphes 41(1) et 42(1) du Règlement sur les marques de commerce.  Toutefois, lopposante a été autorisée, conformément à la demande quelle avait soumise en vertu du paragraphe 44(1) du Règlement, à soumettre laffidavit de Sylvie Lafrance en tant quautre preuve dans la présente opposition.  Mme Lafrance a été contre-interrogée au sujet de son affidavit, la transcription du contre-interrogatoire faisant partie du dossier de lopposition.  Ni lune ni lautre partie na produit de plaidoyer écrit mais les deux parties étaient représentées à laudience.

 

Lopposante a invoqué les motifs dopposition suivants :


1.   La demande de la requérante nest pas conforme à larticle 30 de la Loi sur les marques de commerce, en ce que :

a) la requérante a déjà employé sa marque de commerce au Canada, en tout ou en partie;

b) la requérante na jamais eu lintention demployer sa marque de commerce au Canada ou a abandonné sa marque, en tout ou en partie;

c) il est faux que la requérante a déclaré être convaincue quelle avait le droit demployer la marque de commerce au Canada, compte tenu des allégations formulées dans la déclaration dopposition;

 

2.  La requérante nest pas la personne ayant droit à lenregistrement de la marque de commerce CUISINOX & dessin, en ce que :

 a)  à la date de production de la présente demande, ainsi quà toute autre date pertinente, la marque de commerce de la requérante créait de la confusion avec la marque de commerce CUISINOX, précédemment employée et révélée au Canada par lopposante ou ses prédécesseurs en titre en liaison avec ses marchandises et opérations concernant des articles de cuisine, de la coutellerie, de la vaisselle et des accessoires connexes;

b) la présente demande

i)  nest pas conforme à larticle 30 de la Loi sur les marques de commerce;

ii)  la marque de la requérante nest pas une marque projetée, mais une marque qui a été employée ou abandonné, selon le cas;

ce qui va à lencontre du préambule du paragraphe 16(3) de la Loi;

 

3.   La marque de commerce de la requérante nest pas distinctive des marchandises et services de lopposante et nest pas adaptée à les distinguer ainsi :

a)  en raison principalement de ladoption, de lemploi, de la révélation et de lenregistrement des marques notoires dont lopposante est le propriétaire;

b)  à la suite du transfert de la marque de commerce, il subsistait des droits, chez deux ou plusieurs personnes, à lemploi de la marque de commerce, et ces droits ont été exercés par ces personnes, ce qui va à lencontre de larticle 48 de la Loi sur les marques de commerce;

c)  la requérante a autorisé des tiers à employer la marque de commerce au Canada, et ces tiers ont employé la marque sans respecter les dispositions législatives régissant lemploi sous licence, ce qui va à lencontre de larticle 50 de la Loi.

 

 


En tant que question préliminaire, la requérante a affirmé à laudience que la façon dont les agents de lopposante, en particulier Mme Lafrance, avaient tenté dobtenir de la requérante des renseignements concernant lemploi par cette dernière de sa marque de commerce allait à lencontre de lalinéa 3.02.01 h) du code de déontologie des avocats de la province de Québec, en ce que Mme Lafrance avait communiqué avec la requérante sans la présence de son avocat.  Dautre part, lagent de lopposante a fait valoir que Robic, lagent linscrit au dossier de lopposante, est une société dagents de brevets et de marques de commerce et non un cabinet davocats.  Sil y a effectivement eu une entorse au code de déontologie des avocats du Québec, comme le prétend lagent de la requérante, je présume que les agents de la requérante auraient porté laffaire à lattention du Barreau du Québec.  En outre, je ferai observer quaucune disposition de la Loi sur les marques de commerce ne confère au registraire un droit de regard sur les pratiques des agents des marques de commerce.

 

Comme lopposante na soumis aucun élément de preuve concernant labsence de droit évoquée au paragraphe 2 de la déclaration dopposition, je considère que lopposante ne sest pas acquittée du fardeau qui lui incombait conformément aux paragraphes 16(5) et 17(1) de la Loi sur les marques de commerce, fardeau qui consistait à démontrer que son ou ses prédécesseurs en titre avaient déjà employé ou révélé sa marque de commerce CUISINOX au Canada et quelle navait pas abandonné sa marque de commerce au Canada à la date de lannonce de la présente demande [le 23 août 1995].  Jai donc rejeté ce motif dopposition.  Jai également rejeté le motif concernant labsence de caractère distinctif, parce que lopposante ne sest pas acquittée du fardeau qui lui incombait en omettant de fournir des éléments de preuve pour étayer les faits invoqués par elle à lappui de ce motif.

 

En ce qui concerne le premier motif dopposition, il appartient à la requérante de démontrer que sa demande est conforme aux exigences de larticle 30 de la Loi sur les marques de commerce. Toutefois, il y a un fardeau de preuve initial qui repose sur lopposante de produire suffisamment déléments de preuve qui, sils sont retenus, viendraient étayer la véracité des allégations concernant le motif fondé sur larticle 30 [voir Joseph E. Seagram & Sons Ltd. et al c. Seagram Real Estate Ltd., 3 C.P.R. (3d) 325, p. 329-330].  Pour sacquitter du fardeau de preuve qui lui incombe au sujet dune question particulière, lopposant doit soumettre suffisamment déléments de preuves admissibles qui pourraient raisonnablement permettre de conclure à lexistence des faits allégués à lappui de cette question  [voir John Labatt Limited c. The Molson Companies Limited, 30 C.P.R. (3d) 293, p. 298]. En outre, la date pertinente pour apprécier les circonstances concernant la question de la non-conformité à larticle 30 de la Loi est la date de production de la présente demande [voir Georgia-Pacific Corp. c. Scott Paper Ltd., 3 C.P.R. (3d) 469, p. 475].

 


Lopposante a prétendu que la requérante, à la date de production de la présente demande, avait employé sa marque de commerce CUISINOX & dessin au Canada, ou bien que la requérante navait jamais eu lintention demployer sa marque au Canada ou quelle avait abandonné sa marque. Au départ, lopposante a affirmé à laudience que les spécimens produits par la requérante confirment le fait que cette dernière employait la marque de commerce CUISINOX & dessin au Canada à la date de dépôt de la demande fondée sur lemploi projetée de sa marque.  Toutefois, les spécimens soumis par la requérante semblent être des photocopies de documents publicitaires ou promotionnels et, par conséquent, ne démontrent pas que la requérante employait la marque de commerce CUISINOX & dessin au Canada au sens du paragraphe 4(1) de la Loi sur les marques de commerce.  De plus, il semblerait que les spécimens ont été soumis par la requérante en réponse à la décision de lexaminateur datée du 21 février 1995; ils ne démontrent donc pas que la requérante employait sa marque à la date de production de la présente demande [le 24 octobre 1994].

 

Lopposante a en outre fait valoir que la question et la réponse reproduites à la ligne 10 de la page 52 de la transcription du contre-interrogatoire de Mme Lafrance indiquaient que la requérante avait commencé à employer sa marque de commerce avant de produire la présente demande. Toutefois, le fait que Mme Lafrance ait affirmé avoir été informée par Léo Cavalière que la requérante employait sa marque depuis environ deux ans, à la date du 18 novembre 1996, ne prouve pas que la requérante avait employé la marque de commerce CUISINOX & dessin au Canada avant le 24 octobre 1994.  Enfin, lopposante a soutenu que laffidavit Lafrance, les pièces qui laccompagnaient et la transcription du contre-interrogatoire de la déposante démontrent que la requérante employait la marque de commerce CUISINOX & dessin au Canada en tant que distributeur et que tout emploi de la marque est donc imputable à un tiers situé en Corée.  Ce nest pas là mon avis. La preuve au dossier démontre selon moi que la requérante est la source doù viennent les articles de cuisine CUISINOX & dessin vendus par elle au Canada et que la requérante est le propriétaire de la marque de commerce CUISINOX & dessin au Canada.  Compte tenu de ce qui précède, jai rejeté les deux premiers motifs dopposition fondés sur larticle 30.

 


Le troisième motif fondé sur larticle 30 repose plus précisément sur lalinéa 30(i) de la Loi, lopposante prétendant que la requérante ne pouvait être convaincue quelle avait le droit demployer la marque de commerce au Canada en raison des allégations formulées dans la déclaration dopposition.  Toutefois, lopposante na produit aucun élément de preuve pour démontrer que la requérante ne pouvait être convaincue quelle avait le droit demployer sa marque de commerce CUISINOX & dessin au Canada.  De plus, dans la mesure où la question concernant lalinéa 30(i) est fondée sur des allégations énoncées dans les autres motifs dopposition, cet aspect du motif concernant larticle 30 sera retenu uniquement sil est conclu que la marque de commerce CUISINOX & dessin nest pas distinctive ou que la requérante nest pas la personne ayant droit à lenregistrement de la marque de commerce CUISINOX & dessin, comme il est allégué dans ces motifs [voir Consumer Distributing Co. Ltd. c. Toy World Ltd., 30 C.P.R. (3d) 191, p. 195; et Sapodilla Co. Ltd. c. Bristol-Myers Co., 15 C.P.R. (2d) 152, p. 155].  Cependant, le motif concernant labsence de caractère distinctif a été rejeté, tout comme le motif concernant labsence de droit qui est fondé, entre autres, sur la révélation ou lemploi antérieur allégué par lopposante de la marque de commerce CUISINOX au Canada . En outre, les motifs fondés sur larticle 30 nont pas de rapport avec le fait que la requérante ait pu être convaincu quelle avait le droit demployer sa marque de commerce CUISINOX & dessin au Canada.  Jai donc rejeté ce motif.

 

Le seul autre motif quil me reste à examiner a trait au droit qua la requérante dobtenir un enregistrement, motif selon lequel la demande de la requérante nest pas conforme à larticle 30, ce qui va à lencontre du préambule du paragraphe 16(3) de la Loi sur les marques de commerce. Après avoir rejeté les motifs reposant sur larticle 30, jécarte également ce motif dopposition.

 

Conformément aux pouvoirs qui mont été délégués par le registraire des marques de commerce en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi sur les marques de commerce, je rejette lopposition de lopposante conformément au paragraphe 38(8) de la Loi sur les marques de commerce.

 

FAIT À HULL (QUÉBEC), CE      30e        JOUR DE SEPTEMBRE 1999.

 

 

G. W. Partington

Président de la Commission des

oppositions des marques de commerce

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