Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

AFFAIRE INTÉRESSANT L’OPPOSITION

d’eLoyalty Corporation aux demandes numéro 862,344

et 862,346 produites par Loyalty Management Group Canada Inc.

en vue de l’enregistrement des marques de commerce LE GROUPE LOYALTY

et LOYALTY LE GROUPE LOYALTY & Dessin

                                                        

 

Le 24 novembre 1997, la requérante, Loyalty Management Group Canada Inc., a demandé l’enregistrement des marques de commerce suivantes : LE GROUPE LOYALTY et LOYALTY LE GROUPE LOYALTY & Dessin.  La dernière marque est reproduite ci‑dessous :

           

 

 

Les demandes sont fondées sur l’emploi de la marque de commerce au Canada depuis le 21 septembre 1997 au moins, en liaison avec les marchandises et les services suivants :

Affiches, bannières, brochures, stylos, teeshirts, chapeaux.

Publicité et promotion des marchandises et des services de tiers par

l’intermédiaire d’un programme de primes d’encouragement;

organisation, exploitation et supervision de ventes et de systèmes

de primes promotionnelles; consultation en gestion; études de

marché; services de mise en marché de bases de données,

nommément fourniture d’analyses statistiques et de conseils sur

l’utilisation de bases de données dans la mise en marché de biens

et services; analyses de bases de données; fourniture de

programmes destinés aux entreprise et aux consommateurs au

moyen desquels des crédits sont accumulés et échangés contre

des prix; fourniture de programmes de mise en marché pour des

tiers, nommément aide dans la préparation de matériel de points

de vente; gestion des relations avec les clients; gestion des

affaires guidée par les données; gestion et livraison de prix;

consultation, conception, mise en oeuvre et administration de

programmes de primes d’encouragement pour des tiers; gestion

de bases de données informatisées; services de traitement de

données; services de production d’imprimerie; services de mise

en marché, nommément fourniture de renseignements

statistiques aux entreprises sur les profils d’achat des

consommateurs et d’autres entreprises; services d’agence de

voyage; recherche sur les entreprises, les consommateurs, les

gouvernements; services de conseil commercial; études en

gestion et études de marché; services de soutien Internet,

nommément services d’information Internet et conception de

pages Web; services d’information géographique et consultation;

consultation en aide à la décision; services de développement et

de consultation relatifs aux données d’entreposage; services de

consultation en données minières; développement de produits

scientifiques et techniques et consultation pour des tiers;

distribution et développement de matériel informatique et de

logiciels pour des tiers; marketing concerté.

 

Chacune des demandes est également fondée sur l’emploi projeté de la marque au Canada en liaison avec les marchandises et les services suivants :

Autocollants, bons d’échange, magazines,

journaux, périodiques; présentoirs pour matériel de promotion;

décalcomanies de promotion; carton, livres; crayons, ballons,

présentoirs de kiosques; équipements de bureau, nommément

calculatrices, presse-papiers, agrafeuses, sous-mains, et

supports pour stylos, crayons et encre; vêtements en cuir,

nommément vestes, paletots et manteaux d’hiver; vêtements en

denim, nommément pantalons, shorts, vestes, chemises et

salopettes, tous fabriqués de denim; chandails, chemises

habillées, pulls molletonnés, polos de golf, chaussettes, gants;

chaussures pour hommes, femmes et bébés, nommément

souliers, sandales et bottes; montres; CD-ROM et bandes vidéo

contenant de l’information ou des profiles de sociétés; équipement

de golf, nommément balles, tés, sacs, gants, housses pour fers

droits, serviettes et parapluies; lunettes de soleil; porte‑documents

et étiquettes à bagages.

 

Services d’impression et de distribution électronique de dépliants et de

catalogues; services commerciaux sur Internet, nommément

transactions en ligne pour obtenir des biens et des services;

organisation pour la fabrication de biens de consommation

durables et de produits consommables selon les commandes et

les spécifications de tiers; organisation, exploitation, consultation

et administration de services d’accomplissement pour des tiers,

nommément exploitation d’un centre d’appels téléphoniques et

impression et distribution de matériel de points de vente et

publipostage; fourniture de programmes de mise en marché pour

des tiers, nommément aide dans la préparation de programmes

de points de vente.

 

Au mois de septembre 1999, la requérante s’est désistée du droit à l’usage exclusif du mot LOYALTY en dehors de la marque, à l’égard des services. 

 

Les demandes ont été annoncées pour fin d’opposition dans l’édition du Journal des marques de commerce du 3 janvier 2001.  Le 5 juin 2001, eLoyalty Corporation a produit une déclaration d’opposition relativement à chaque demande.  Voici un résumé des motifs d’opposition :

1.  La demande n’est pas conforme à l’article 30 de la Loi sur les marques de commerce parce que la requérante n’a pas employé la marque de commerce au sens de l’article 4 depuis le 21 septembre 1997 au moins, en liaison avec les marchandises et services pour lesquels elle revendique un tel emploi.

 

2.  La marque de commerce n’est pas enregistrable aux termes de l’alinéa  12(1)b) parce que [traduction] « la marque, et plus particulièrement le mot LOYALTY, donne une description claire ou donne une description fausse et trompeuse de la nature ou de la qualité des services décrits dans la demande ».

 

3.  La marque de commerce n’est pas enregistrable aux termes de l’alinéa  12(1)e) parce que [traduction] « la marque, et plus particulièrement le mot LOYALTY est, en raison d'une pratique commerciale ordinaire et authentique, devenu reconnue au Canada comme désignant le genre ou la qualité des services et que son enregistrement est par conséquent interdit par l’article 10 ».

 

4. La marque de commerce n’est pas distinctive au sens de l’article 2 parce qu’elle ne distingue pas les services de la requérante de ceux des autres, ne peut les distinguer et n’est pas adaptée à le faire.

 

La requérante a produit et signifié des contre‑déclarations dans lesquelles elle nie les allégations de l’opposante et fait valoir, relativement au motif fondé sur l’absence de caractère distinctif, que [traduction] « l’opposante n’a pas précisé le fondement de son allégation et, par conséquent, n’a pas formulé un motif d’opposition valide ».

 

L’opposante a présenté un affidavit souscrit par Sandra Spadafora.  Mme Spadafora a fourni des copies de ce qu’elle décrit comme des extraits [traduction] « du site web internet www.eloyalty.com et du site web intranet www.eloyaltymatters.com », qu’elle a obtenus le 22 mars  2002.  Toutefois, certaines des pages incluses dans les pièces portent l’adresse  www.corporate-ir.net et les pièces ne comprennent aucune page du site www.eloyaltymatters.com, bien qu’il y ait des pages du site  www.loyaltymatters.com.

 

L’opposante prétend que l’affidavit de Mme Spadafora établit l’emploi courant du mot descriptif « LOYALTY » à l’égard des programmes d’encouragement.  À mon avis, ce document démontre uniquement que le 22 mars 2002 il existait deux sites web.  Les pages tirées du site www.eloyalty.com, lequel semble lié à l’opposante, affichent le mot LOYALTY, quelquefois à l’intérieur d’une marque de commerce ou d’un nom commercial et quelquefois sans lien avec un élément de propriété intellectuelle.  Les pages tirées du site www.loyaltymatters.com, lequel semble lié à une entreprise du Royaume‑Uni appelée pgw Ltd., contiennent des articles où figure le mot « loyalty » employé de diverses façons, notamment dans les expressions « loyalty card », « loyalty scheme » et « loyalty program ».  Rien n’indique que ces sites proviennent du Canada ou qu’à part Mme Spadafora, d’autres Canadiens les aient vus. 

 

La requérante a décidé de ne produire aucune preuve.

 

Les deux parties ont déposé un plaidoyer écrit.  Une audience a été tenue, à laquelle les deux parties étaient représentées.  À l’audience, l’agent de l’opposante a retiré le premier et le troisième motif d’opposition.

 

Bien qu’il incombe à la partie requérante de démontrer suivant la prépondérance des probabilités que sa demande est conforme aux exigences de la Loi sur les marques de commerce, l’opposante a le fardeau initial de présenter suffisamment d’éléments de preuve recevables pouvant raisonnablement étayer la conclusion que les faits allégués à l’appui de chaque motif d’opposition existent [voir John Labatt Limited c. The Molson Companies Limited, 30 C.P.R. (3d) 293, p. 298; Dion Neckwear Ltd. c. Christian Dior, S.A. et al. (2002), 20 C.P.R. (4th) 155 (C.A.F.)].  Toutefois, il est possible qu’un motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)b) soit reçu même en l’absence d’élément de preuve, sur la base de la définition du dictionnaire uniquement.

 

Dans son plaidoyer écrit, l’opposante fait valoir qu’elle s’est acquittée de son fardeau de preuve relativement à chacun des motifs d’opposition et soutient qu’il y a lieu de les accueillir parce que la requérante n’a présenté aucune preuve.  Je ne partage pas ce point de vue.

 

La date pertinente pour l’examen du motif fondé sur l’alinéa 12(1)b) est la date de la production des demandes d’enregistrement, c’est‑à‑dire le 24 novembre 1997 en l’espèce [voir Zorti Investments Inc. c. Party City Corporation, demande no 766,534, 12 janvier 2004; Havana Club Holdings S.A. c. Bacardi & Company Limited, demande no 795,803, 12 janvier 2004; Fiesta Barbeques Limited c. General Housewares Corporation (2003), 28 C.P.R. (4th) 60 (C.F. 1re inst.)].  Aucun des éléments de preuve présentés n’est antérieur au 24 novembre 1997.

 

Pour déterminer si la marque de la requérante donne une description claire des services, il faut adopter le point de vue de l’acheteur moyen.  En outre, il convient de ne pas décomposer la marque en ses éléments constitutifs pour l’analyser en détail, mais de l’examiner dans son ensemble en tenant compte de l’impression immédiate qui s’en dégage [Wool Bureau of Canada Ltd. c. Registraire des marques de commerce, 40 C.P.R. (2d) 25, p. 27-28; Atlantic Promotions Inc. c. Registraire des marques de commerce, 2 C.P.R. (3d) 183, p. 186]La nature des services s’entend de leurs caractéristiques ou particularités, et « claire » veut dire [traduction] « facile à comprendre, évidente, simple » [voir Drackett Co. of Canada Ltd. c. American Home Products Corp. (1968), 55 C.P.R. 29, p.  34 (C.É.)].

 

L’agent de l’opposante a soutenu que l’alinéa 12(1)b) interdit l’enregistrement d’une marque de commerce qui, dans sa forme sonore, donne une description claire des marchandises ou services.  J’en conviens.  Je n’ignore pas que dans la décision Fiesta Barbeques Ltd. c. General Housewares Corp. (2003), 28 C.P.R. (4th) 60 (C.F. 1re inst.), le juge Russell a exprimé l’opinion qu’une caractéristique graphique peut faire en sorte qu’une marque ne soit pas clairement descriptive dans son ensemble, même si les mots qui la composent donnent une description claire.  Toutefois, dans une décision non encore publiée, Best Canadian Motor Inns Ltd. c. Best Western International, Inc., T-656-02, 29 janvier 2004, le juge Gibson a conclu que, sur ce point, les commentaires du juge Russell s’écartaient des principes d’interprétation des lois.

 

Voici le texte de l’alinéa 12(1)b) :

12. (1) Sous réserve de l'article 13, une marque de commerce est enregistrable sauf dans l'un ou l'autre des cas suivants :

b) qu'elle soit sous forme graphique, écrite ou sonore, elle donne une description claire ou donne une description fausse et trompeuse, en langue française ou anglaise, de la nature ou de la qualité des marchandises ou services en liaison avec lesquels elle est employée, ou à l'égard desquels on projette de l'employer, ou des conditions de leur production, ou des personnes qui les produisent, ou du lieu d'origine de ces marchandises ou services.

 

Comme l’a indiqué le président de la Commission des oppositions des marques de commerce dans l’affaire Insurance Co. of Prince Edward Island c. Prince Edward Island Mutual Insurance Co., 2 C.P.R. (4th) 103, à la p.  110 :

À mon avis, l’alinéa 12(1)b) de la Loi sur les marques de commerce n’a vraisemblablement pas été conçu pour interdire l’enregistrement d’un dessin-marque comportant des éléments graphiques qui pourraient autrement être enregistrables comme des marques de commerce sans les termes descriptifs. Incontestablement, il ne semble pas raisonnable qu’un dessin-marque devienne subitement non enregistrable en raison de l’ajout d’un mot descriptif (ou de mots descriptifs), particulièrement parce que l’article 35 de la Loi sur les marques de commerce prévoit le désistement à l’égard de ces parties d’une marque de commerce. D’autre part, la formulation de l’alinéa 12(1)b) de la Loi interdit de manière claire l’enregistrement d’une marque de commerce qui, sous sa forme sonore, donne notamment une description claire en langue anglaise de la nature ou de la qualité des services en liaison avec lesquels elle est employée. À cet égard, le registraire est tenu d’appliquer la Loi sur les marques de commerce comme elle existe et non comme elle aurait dû être conçue.

 

 

L’agent de l’opposante fait valoir qu’en déposant les désistements en l’espèce, la requérante a effectivement reconnu le caractère clairement descriptif du mot LOYALTY.  Dans Fiesta Barbeques, précité, le juge Russell a toutefois infirmé une décision de la Commission au motif suivant (p. 68-69) :

[24] Comme le fait remarquer la demanderesse, le registraire a commis plusieurs erreurs dans sa décision. D'abord, le registraire n'aurait pas dû fonder sa décision relative à l'alinéa 12(1)b) sur le désistement de la demanderesse quant aux mots GRILL et GEAR.  L'article 35 de la Loi dispose :

35. Le registraire peut requérir celui qui demande l'enregistrement d'une marque de commerce de se désister du droit à l'usage exclusif, en dehors de la marque de commerce, de telle partie de la marque qui n'est pas indépendamment enregistrable. Ce désistement ne porte pas préjudice ou atteinte aux droits du requérant, existant alors ou prenant naissance par la suite, dans la matière qui fait l'objet du désistement, ni ne porte préjudice ou atteinte au droit que possède le requérant à l'enregistrement lors d'une demande subséquente si la matière faisant l'objet du désistement est alors devenue distinctive des marchandises ou services du requérant.

 [25]       Manifestement, cette disposition ne permet pas qu'un désistement « sans préjudice » porte atteinte aux « droits du requérant, existant alors ou prenant naissance par la suite, dans la matière qui fait l'objet du désistement... »

 

 

En conséquence, je ne suis pas disposée à considérer les désistements de la requérante comme des aveux.  Je constate également que la requérante a déposé les demandes modifiées incorporant les désistements pendant l’examen de la demande et, par conséquent, après la date pertinente.

 

L’opposante affirme également que le caractère clairement descriptif du mot LOYALTY est manifeste, mais il ne l’est par pour moi.  Le sens ordinaire du mot « loyalty », c’est‑à‑dire « fidélité », « allégeance », ne me paraît pas décrire d’emblée une caractéristique ou une particularité des services de la requérante.  Pour l’opposante, l’expression anglaise « loyalty program » (programme de fidélisation), est une expression courante qui se rapporte aux avantages consentis aux clients fidèles.  On ne m’a soumis aucune définition de dictionnaire relative à cette expression, et je ne puis certainement pas prendre connaissance d’office d’une telle signification.  Pour étayer son opinion, l’opposante s’appuie sur des sites web relevés par l’auteur de l’affidavit qu’elle a soumis.  Même si cette preuve était antérieure à la date pertinente, je ne conclurais pas qu’elle démontre que les mots « loyalty program » sont une expression courante se rapportant aux avantages consentis aux clients fidèles ou que les marques en cause seraient vraisemblablement perçues comme décrivant une caractéristique des services visés par la demande d’enregistrement.

 

L’opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau initial de présenter une preuve me permettant de conclure que le mot dominant de chacune des marques de commerce, LOYALTY, donnait une description claire des services de la requérante le 24 novembre 1997.  Par conséquent, il n’est pas nécessaire d’examiner si les mots supplémentaires LE GROUPE sont clairement descriptifs.

 

Le défaut de l’opposante de s’acquitter de son fardeau de preuve initial entraîne également le rejet des motifs d’opposition fondés sur l’absence de caractère distinctif.  La date pertinente pour l’examen de tels motifs est la date de la production des oppositions, c’est‑à‑dire le 5 juin 2001 en l’espèce [voir E. & J. Gallo Winery c. Andres Wines Ltd (1975), 25 C.P.R. (2d) 126, p. 130; [1976] 2 C.F. 3 (C.A.F.) et Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 412, p. 424 (C.A.F.)].  Aucun des éléments de preuve afférents à l’affidavit de Mme Spadafora n’est antérieur au 5 juin 2001.  Quoi qu’il en soit, ces motifs reposent sur la prémisse que les marques de la requérante sont clairement descriptives et, comme je l’ai déjà indiqué, rien ne me permet de tirer une telle conclusion.

 

En vertu de la délégation des pouvoirs et fonctions du registraire faite sous le régime de paragraphe 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition en application du paragraphe 38(8) de la Loi.

 

 

FAIT À TORONTO (ONTARIO), LE 28 MAI 2004.

 

 

 

Jill W. Bradbury

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

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