Contenu de la décision
PROCÉDURE PRÉVUE À L’ARTICLE 45
MARQUE DE COMMERCE : CHARLESTON CHEW ET DESSIN
No D’ENREGISTREMENT : LMC 220,535
Le 12 juin 2003, à la demande de la société 88766 Canada Inc., le registraire a transmis l’avis prévu à l’article 45 à Tootsie Roll Industries, Inc., propriétaire inscrite de la marque de commerce indiquée ci‑dessus.
La marque de commerce CHARLESTON CHEW et dessin (reproduite ci‑dessous) est enregistrée pour être utilisée en liaison avec les marchandises suivantes : « candy » - TRADUCTION “bonbon”.
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Aux termes de l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, le propriétaire inscrit d’une marque de commerce est tenu d’attester que la marque a été employée au Canada en liaison avec chacune des marchandises et/ou services que spécifie l’enregistrement à un moment quelconque au cours des trois ans précédant la date de l’avis et, sinon, d’indiquer la date où elle a été ainsi employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. Il s’agit, en l’occurrence, de la période allant du 12 juin 2000 au 12 juin 2003.
En réponse à l’avis ainsi transmis, l’affidavit de Barry Bowen a été produit, accompagné de pièces. Chacune des parties a déposé des représentations écrites et était représentée à l’audience.
Dans son affidavit, M. Bowen déclare qu’au cours de la période en cause, la propriétaire inscrite a, de manière continue et dans le cours normal de ses activités commerciales, utilisé au Canada la marque de commerce CHARLESTON CHEW et dessin en liaison avec des bonbons tels que décrits dans son affidavit. Il affirme que le bonbon portant la marque de commerce est fabriqué par la propriétaire inscrite aux États-Unis, où le produit est également conditionné et d’où il est expédié à Tootsie Roll of Canada Limited, sa filiale en propriété exclusive, en vue de la vente au détail.
Il ajoute que pour faciliter la tâche des acheteurs canadiens, son agent de vente canadien, Tootsie Roll of Canada Limited, distribue des brochures dans lesquelles sont illustrées en couleur les divers bonbons fabriqués par la propriétaire inscrite dont elle est l’agente de vente au Canada. Un exemplaire de cette brochure est joint à titre de pièce A. Puis, il explique que le bonbon fabriqué par la propriétaire inscrite est vendue sous un emballage dont un exemplaire est fourni à titre de pièce B. À titre de pièce C, il a fourni des copies de factures typiques qui confirment la vente, par l’intermédiaire du distributeur canadien, de bonbons portant la marque en question. Il a en outre précisé le montant des ventes au Canada des marchandises enregistrées vendues en liaison avec la marque de commerce.
La partie requérante soutient que l’affidavit doit être interprété indépendamment des pièces qui l’accompagnent, ou bien complètement écarté étant donné la divergence entre la date de l’affidavit et la date qui figure sur les pièces l’accompagnant. En tout état de cause, celle‑ci estime que la marque de commerce prétendument employée n’est pas la marque de commerce qui a été enregistrée et le produit auquel se réfèrent les pièces concernant la marque de commerce n’est pas un « bonbon », au sens où ce terme est généralement pris.
La titulaire fait valoir que même si l’affidavit est présenté comme étant daté du 12 janvier 2004, il a en fait été passé devant le notaire le 22 janvier 2004. La titulaire affirme qu’il est clair d’après la lettre en date du 12 janvier 2004 envoyée par Ogilvy Renault (son représentant pour signification) à l’Office de la propriété intellectuelle du Canada, courrier qui a été versé au dossier, que M. Bowen n’a pas signé l’affidavit à cette date étant donné que dans la lettre du 12 janvier accompagnée d’une copie non-signée de l’affidavit en question, il est indiqué que l’affidavit n’avait pas encore été signé et légalisé et qu’un délai d’un mois jusqu’au 12 février 2004 était requis afin de fournir l’affidavit ainsi que les pièces signés et légalisés. Elle fait valoir, par conséquent, que l’erreur manifeste figurant sur l’affidavit, c’est-à-dire la date du 12 janvier 2004 qui figure sur le constat d’assermentation, est un simple détail technique qui ne touche en rien à l’admissibilité de l’affidavit et des pièces qui l’accompagnent.
La titulaire fait valoir en ce qui concerne l’emploi démontré que les produits vendus en liaison avec la marque de commerce sont bel et bien des bonbons (i.e. candies) et c’est ainsi qu’ils sont décrits dans l’affidavit de M. Bowen. De plus, elle soutient que la marque de commerce dont l’emploi est démontré correspond à une utilisation dérivée valable de la marque telle qu’enregistrée. Elle estime que les différences entre les deux marques sont tellement minimes que l’acheteur ordinaire estimerait que, malgré la différence, les deux dénotent bien les marchandises fabriquées par la propriétaire inscrite (RTM c. Compagnie Internationale pour l’Informatique CII Honeywell Bull, 4 C.P.R.(3d) 523, p. 525, et Swabey Ogilvy Renault c. Golden Brand Clothing (Canada) Ltd., 19 C.P.R.(4th) 516).
En ce qui concerne l’affidavit et les pièces qui y sont jointes, compte tenu des explications du titulaire et de la lettre du 12 janvier 2004 transmis par le cabinet Ogilvy Renault, et versé au dossier, je suis disposée à admettre que la date qui figure au constat d’assermentation est inexacte puisqu’il est clair qu’il s’agit là de la date de la première version de l’affidavit. De plus, je suis prête à accepter que la date figurant sur les pièces est la date réelle de l’assermentation de l’affidavit. Donc je conclus que la divergence en question est du genre “détail technique”. Je tiendrai donc compte tant de l’affidavit que des pièces qui l’accompagnent afin de déterminer si l’emploi de la marque de commerce a été démontré en liaison avec les marchandises.
Concernant la marque de commerce dont l’emploi est démontré, je conviens, avec la partie requérante, que les pièces produites montrent une marque de commerce qui diffère de la marque de commerce enregistrée. En effet, la marque de commerce est inscrite sur une même ligne, les mots « CHARLESTON » et « CHEW » revêtant une égale importance et le point d’exclamation ayant été supprimé. Cela dit, je ne partage pas l’avis de la partie requérante aux yeux de qui l’écart entre les deux formes de la marque est considérable. Comme la titulaire l’a fait remarquer, les éléments essentiels de la marque de commerce enregistrée sont les mots CHARLESTON CHEW et ces éléments sont bien présents. En ce qui concerne l’absence du point d’exclamation et le fait que les deux mots CHARLESTON et CHEW figurent sur une même ligne, cela ne constitue, selon moi, que des variations mineures qui ne sont pas de nature à tromper le public ou à lui nuire (Nightingale Interloc Ltd. c. Prodesign Ltd., 2 C.P.R. (3d) 535, C.O.M.C.). Je considère que la marque de commerce n’a aucunement perdu son identité et qu’elle demeure tout à fait reconnaissable (voir Promafil Canada Ltd. c. Munsingwear Inc. 44 C.P.R.(3d) 59 [C.A.F.], et Honey Dew Ltd. c. Rudd et al (1929) Ex. C.R. 83). J’en conclus que l’utilisation démontrée est bien une utilisation de la marque de commerce déposée.
Quant à la question de savoir si le produit vendu en liaison avec la marque de commerce est effectivement un « candy », je conclus que c’est effectivement le cas. Selon M. Bowen, il s’agit clairement d’un « candy ». D’après les définitions que l’on trouve de ce terme dans les dictionnaires, ce terme comprend les confiseries, c’est-à-dire une catégorie qui englobe le produit vendu par la titulaire. Je relève en outre que, dans la pièce C accompagnant l’affidavit, le produit de la titulaire est décrit comme étant un « chewy flavoured nougat with a delicious chocolatey coating ». Selon le dictionnaire Wordsmyth English-Dictionary-Thesaurus en ligne, on entend par nougat : “1. a chewy or brittle candy that contains nuts and sometimes chunks of fruit”. Selon le dictionnaire The Heinle’s Newburry House Dictionary of America English , le nougat est “a sweet candy made of honey or sugar and nuts”. Ces définitions confirment clairement que le produit de la titulaire est bel et bien un « candy ».
De plus, je suis satisfaite en tenant compte de la totalité de la preuve et particulièrement du fait que le produit est fabriqué et emballé par la titulaire que l’emploi est par la titulaire. Donc, comme la preuve démontre qu’il y a eu des ventes au Canada durant la période pertinente, j’en conclus qu’il y a lieu de maintenir l’enregistrement de la marque de commerce.
L’enregistrement no LMC 220,535 est donc maintenu conformément aux dispositions du paragraphe 45(5) de la Loi.
FAIT À GATINEAU (QUÉBEC), LE 4 MAI 2006.
D. Savard
Agente d’audience principale
Article 45