Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2014 COMC 165

Date de la décision : 2014-08-18
TRADUCTION

DANS L'AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L'ARTICLE 45, engagée à la demande de Laboratoires Contapharm, visant l'enregistrement no LMC470,749 de la marque de commerce ORIGINS au nom de Origins Natural Resources Inc.

[1]               La présente décision concerne une procédure de radiation sommaire engagée à l'égard de l'enregistrement no LMC470,749 de la marque de commerce ORIGINS appartenant à Origins Natural Resources Inc.

[2]               Les marchandises décrites dans l'enregistrement sont les suivantes : [traduction] « préparations pour le soin des cheveux, nommément revitalisants et shampooings ».

[3]               Pour les raisons exposées ci-après, je conclus qu'il y a lieu de maintenir l'enregistrement.

La procédure

[4]               Le 30 mai 2012, le registraire des marques de commerce a donné à Origins Natural Resources Inc. (l'Inscrivante) un avis en vertu de l'article 45 de la Loi sur les marques de commerce LRC 1985, ch. T-13 (la Loi). Cet avis a été donné à la demande de Laboratoires Contapharm (la Partie requérante).

[5]               L'avis enjoignait à l'Inscrivante de fournir une preuve démontrant qu'elle a employé la marque de commerce ORIGINS (la Marque) au Canada à un moment quelconque entre le 30 mai 2009 et le 30 mai 2012, en liaison avec chacune des marchandises décrites dans l'enregistrement no LMC470,749. À défaut d'avoir ainsi employé la Marque, l'Inscrivante devait fournir une preuve établissant la date à laquelle la Marque a été employée en dernier lieu et les raisons de son défaut d'emploi depuis cette date.

[6]               En l'espèce, l'emploi de la Marque, en liaison avec les marchandises décrites dans l'enregistrement, est régi par l'article 4(1) de la Loi, lequel est libellé comme suit :

Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des marchandises si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces marchandises, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les marchandises mêmes ou sur les colis dans lesquels ces marchandises sont distribuées, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux marchandises à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[7]               Il est bien établi que l'article 45 de la Loi a pour objet et portée d'offrir une procédure simple, sommaire et expéditive pour éliminer le « bois mort » du registre. De simples allégations d'emploi ne sont pas suffisantes pour établir l'emploi de la marque de commerce [Plough (Canada) Ltd c. Aerosol Fillers Inc (1980), 53 CPR (2d) 62 (CAF)]. Bien que les critères pour établir l'emploi ne soient pas très exigeants et qu'il ne soit pas nécessaire de produire une surabondance d'éléments de preuve, il n'en faut pas moins présenter des faits suffisants pour permettre au registraire de conclure que la marque de commerce a été employée en liaison avec chacune des marchandises ou chacun des services décrits dans l'enregistrement pendant la période pertinente [Uvex Toko Canada Ltd c. Performance Apparel Corp (2004), 31 CPR (4th) 270 (CF)].

[8]               En réponse à l'avis du registraire, l'Inscrivante a produit un affidavit de Lesley A. Moradian, souscrit le 19 décembre 2012. À la date de son affidavit, Mme Moradian était la vice-présidente et l'avocate-conseil principale en marques de commerce de l'Inscrivante.

[9]               Seule l'Inscrivante a produit des représentations écrites.

[10]           Les parties étaient toutes deux représentées à l'audience qui a été tenue conjointement avec les audiences relatives aux procédures de radiation sommaires engagées à l'égard de quatre autres enregistrements de la marque de commerce ORIGINS appartenant à l'Inscrivante. Des décisions distinctes seront rendues relativement à ces autres procédures qui concernent respectivement les enregistrements nos LMC466,901, LMC554,982, LMC617,049 et LMC671,380.

La preuve

[11]           Mme Moradian affirme que les produits de l'Inscrivante comprennent des produits cosmétiques, des produits pour le soin de la peau et du corps, des produits pour le soin des cheveux et des produits pour la maison [para. 3 de son affidavit].

[12]           Au paragraphe 4 de son affidavit, Mme Moradian affirme que la Marque est employée au Canada depuis au moins 1999 et que la Marque a été employée au Canada par l'Inscrivante au cours de la période pertinente en liaison avec des revitalisants et des shampooings (qu'elle désigne collectivement par le terme « Marchandises » dans la suite de son affidavit).

[13]           Comme le fait Mme Moradian au paragraphe 4 de son affidavit, j'emploierai dans la présente décision le terme « Marchandises » pour désigner collectivement les revitalisants et les shampooings.

[14]           Selon les affirmations de Mme Moradian [para. 5, 6 et 8 de l'affidavit] :

      l'Inscrivante emploie la Marque en l'apposant sur les Marchandises;

      les marchandises arborant la Marque sont vendues au Canada par l'intermédiaire du site de commerce électronique de l'Inscrivante, qui se trouve à l'adresse www.origins.com;

      à la date de son affidavit, c.-à-d. le 19 décembre 2012, les ventes au Canada des Marchandises arborant la Marque s'élevaient à environ 1 000 $ pour l'année financière ayant débuté le 1er juillet 2012 et devant se terminer le 30 juin 2013.

[15]           Mme Moradian explique qu'en raison des fonctionnalités limitées de la base de données de l'Inscrivante, il n'est pas possible d'obtenir les chiffres de ventes concernant spécifiquement les ventes des Marchandises pendant la période pertinente (par opposition à l'ensemble des produits ORIGINS). Mme Moradian affirme toutefois que, selon les chiffres des ventes antérieurs concernant les ventes des Marchandises aux États-Unis, le chiffre des ventes au Canada aurait été d'environ 1 000 $ annuellement pendant la période pertinente [para. 8 de l'affidavit].

[16]           Je passe maintenant à l'examen des pièces A et B que Mme Moradian a jointes à son affidavit pour appuyer ses affirmations concernant l'emploi de la Marque au Canada par l'Inscrivante au cours de la période pertinente.

      La pièce A est constituée d'imprimés extraits du site de commerce électronique de l'Inscrivante. Selon les affirmations de Mme Moradian, ces imprimés montrent des Marchandises qui étaient offertes en vente au Canada à la date de son affidavit, et sont représentatifs des Marchandises arborant la Marque qui ont été vendues et expédiées au Canada pendant la période pertinente [para. 5 de l'affidavit].

      La pièce B est une copie d'un formulaire électronique de confirmation d'envoi ayant trait à la vente et l'expédition de Marchandises arborant la Marque à un client canadien pendant la période pertinente. Mme Moradian explique que le nom et l'adresse du client ont été retirés pour des raisons de confidentialité [para. 7 de l'affidavit]. Je souligne que, malgré la piètre qualité de la reproduction, je peux lire « Toronto, ON » dans la partie de l'adresse qui n'a pas été retirée. Je n'arrive pas, cependant, à discerner la date.

Analyse des questions

[17]           Les questions qui découlent des représentations verbales de la Partie requérante sont les suivantes :

1.    La preuve établit-elle l'emploi de la Marque telle qu'enregistrée?

2.    Y a-t-il une preuve suffisante de l'emploi de la Marque dans la pratique normale du commerce en liaison avec les Marchandises pendant la période pertinente?

[18]           J'examinerai chacune de ces questions tour à tour.

1.      La preuve établit-elle l'emploi de la Marque telle qu'enregistrée?

[19]           Cette question découle de la prétention principale de la Partie requérante selon laquelle la preuve établit l'emploi d'une marque mixte formée du mot ORIGINS et du dessin de deux arbres, et non l'emploi de la Marque, c.-à-d. le mot ORIGINS.

[20]           À l'audience, l'Inscrivante a répondu à la prétention de la Partie requérante en faisant valoir que l'emploi du mot ORIGINS en conjugaison avec le dessin de deux arbres constitue un emploi de la Marque. À cet égard, l'Inscrivante soutient essentiellement que lorsque la Marque est employée en conjugaison avec le dessin de deux arbres, le mot ORIGINS est toujours séparé des deux arbres par une barre pleine ou une ligne et que cette séparation graphique met en évidence le fait que ORIGINS est une marque de commerce distincte.

[21]           Pour les raisons qui suivent, je tranche cette question en faveur de l'Inscrivante.

[22]           En premier lieu, je tiens à souligner que la preuve ne montre pas seulement l'emploi sur les Marchandises du mot ORIGINS en conjugaison avec le dessin de deux arbres. En effet, la preuve démontre également que la Marque, c.-à-d. le mot ORIGINS, est apposée sur les Marchandises en conjugaison avec une autre marque de commerce.

[23]           L’emploi d’une marque de commerce en conjugaison avec des mots ou des éléments supplémentaires constitue un emploi de la marque enregistrée si, sous le coup de la première impression, le public y voit un emploi de la marque de commerce en soi. Comme il a été statué dans Nightingale Interloc Ltd c. Prodesign Ltd (1984), 2 CPR (3d) 535 (COMC), p. 538 :

[traduction]
Il s’agit là d’une question de fait qui dépend de celles de savoir si la marque de commerce se démarque des éléments supplémentaires, par exemple par l’emploi d’une police ou d’une taille de caractères différentes [...] et si les autres éléments seraient perçus par le public comme étant clairement descriptifs ou comme constituant une marque de commerce ou un nom commercial distincts [...]

Voir également Canada (Registraire des marques de commerce) c. Compagnie International pour l’informatique CII Honeywell Bull (1985), 4 CPR (3d) 523, p. 525 (CAF). En outre, rien dans la loi n'interdit d'employer simultanément deux marques de commerce ou plus [AW Allen Ltd c. Warner-Lambert Canada Inc (1985), 6 CPR (3d) 270 (CF 1re inst.)].

[24]           J'estime que ces principes s'appliquent en l'espèce et, partant, les représentations verbales de la Partie requérante ne me convainquent pas que la preuve démontrant l'emploi du mot ORIGINS en conjugaison avec le dessin de deux arbres ne peut pas constituer une preuve de l'emploi de la Marque. En revanche, je souscris aux représentations de l'Inscrivante selon lesquelles l'emploi du mot ORIGINS en conjugaison avec le dessin de deux arbres serait perçu comme un emploi de la Marque en soi.

[25]           Par conséquent, je suis convaincue que la preuve produite en l'espèce établit l'emploi de la Marque telle qu'enregistrée.

2.      Y a-t-il une preuve suffisante de l'emploi de la Marque dans la pratique normale du commerce en liaison avec les Marchandises pendant la période pertinente?

[26]           Les représentations verbales de la Partie requérante dont découle cette question comportent deux volets.

[27]           Le premier volet repose sur la prétention que la preuve concernant les ventes des Marchandises pendant la période pertinente est insuffisante pour les raisons suivantes :

      rien ne prouve que le formulaire électronique de confirmation d'envoi concerne la période pertinente;

      la preuve concernant les ventes canadiennes est vague. Seuls des chiffres de ventes approximatifs ont été fournis. En plus d'être approximatifs, les chiffres de ventes fournis pour la période pertinente sont fondés sur les chiffres des ventes aux États-Unis;

      aucune facture n'a été fournie.

[28]           Le deuxième volet repose sur la prétention que la preuve n'établit pas l'emploi de la Marque en liaison avec les Marchandises pour les raisons suivantes :

      l'Inscrivante n'a pas produit de preuve du transfert de la propriété ou de la possession des Marchandises pendant la période pertinente; en l'absence d'une telle preuve, le seul fait que la Marque soit apposée sur les Marchandises n'est pas suffisant pour établir l'emploi de la Marque au sens de l'article 4(1) de la Loi;

         l'affichage des Marchandises sur les sites Web n'établit pas l'emploi de la Marque au sens de l'article 4(1);

[29]           Pour les raisons qui suivent, je tranche cette question en faveur de l'Inscrivante, car je suis convaincue que la preuve expose des faits suffisants pour me permettre de conclure que la Marque a été employée au Canada en liaison avec les Marchandises pendant la période pertinente.

[30]           À mon sens, la Partie requérante a adopté une approche exagérément technique dans son analyse de la preuve. Or, une approche aussi technique est incompatible avec l'objet limité de la procédure prévue à l'article 45. La preuve doit être considérée dans son ensemble.

[31]           Il ressort clairement de la jurisprudence que la preuve qui doit être fournie en réponse à un avis en vertu de l'article 45 n'a pas à être d'un genre particulier. Ce qui est exigé du propriétaire de la marque de commerce, c'est qu'il produise une preuve prima facie de l'emploi de sa marque [voir Lewis Thomson & Sons Ltd c. Rogers, Bereskin & Parr (1988), 21 CPR (3d) 483 (CF 1re inst.)].

[32]           À l'audience, l'Inscrivante a répondu aux observations de la Partie requérante au sujet du formulaire électronique de confirmation d'envoi en faisant valoir que Mme Moradian affirme spécifiquement que ce formulaire concerne un envoi au Canada pendant la période pertinente. Je suis d'accord.

[33]           Le fait que l'Inscrivante n'ait pas fourni de factures n'est pas fatal à sa cause. Je conviens avec l'Inscrivante que l'ensemble de la preuve est plus que suffisant pour me permettre d'inférer que des ventes des Marchandises ont eu lieu dans la pratique normale du commerce pendant la période pertinente.

[34]           En effet, en plus du formulaire électronique de confirmation d'envoi qu'elle a fourni comme preuve d'une vente réelle, Mme Moradian affirme clairement que les Marchandises ont été vendues au Canada pendant la Période pertinente. Malgré le fait qu'ils soient « vagues », pour reprendre l'expression de la Partie requérante, les chiffres approximatifs des ventes au Canada qu'a fournis Mme Moradian comprennent des données factuelles qui viennent appuyer ses affirmations. Mme Moradian a indiqué la raison pour laquelle ces chiffres de ventes ne sont pas précis et expliqué comment elle s'y est prise pour estimer les chiffres des ventes au Canada. En outre, il a été statué que la preuve relative à l'emploi dans la pratique normale du commerce n'est pas limitée à l'emploi effectué avant la date de l'avis donné en vertu de l'article 45 [John Labatt ltd c. Rainier Brewing Co et al (1984) 80 CPR (2d) 228 (CAF)]. À mon sens, les chiffres approximatifs des ventes réalisées au Canada entre le 1er juillet 2012 et la date de l'affidavit, souscrit le 19 décembre 2012, tendent à corroborer le fait que des ventes ont eu lieu dans la pratique normale du commerce pendant la période pertinente et qu'elles se sont poursuivies par la suite.

[35]           Enfin, Mme Moradian affirme clairement que les Marchandises montrées sur le site Web sont représentatives des Marchandises qui ont été vendues pendant la période pertinente. La Marque est apposée sur les Marchandises qui sont montrées sur le site Web.

[36]           En somme, je suis convaincue, que la preuve établit l'emploi de la Marque pendant la période pertinente au Canada, au sens des articles 4(1) et 45 de la Loi, en liaison avec les Marchandises.


Décision

[37]           Compte tenu de tout ce qui précède, dans l'exercice des pouvoirs qui m'ont été délégués en vertu des dispositions de l'article 63(3) de la Loi et conformément aux dispositions de l'article 45 de la Loi, l'enregistrement no LMC470,749 sera maintenu.

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Céline Tremblay

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada


Traduction certifiée conforme
Judith Lemire

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