Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2010 COMC 180

Date de la décision : 2010-10-25

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45, engagée à la demande de Oyen Wiggs Green & Mutala LLP, visant l’enregistrement no LMC455196 de la marque de commerce STONES au nom de Dressmaster GmbH (anciennement Dressmaster Bekleidungswerk GmbH & Co. KG)

[1]               Le 6 juin 2007, à la demande de Oyen Wiggs Green & Mutala LLP (la partie requérante), le registraire a envoyé l’avis prévu à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13 (la Loi), à Dressmaster Bekleidungswerk GmbH & Co. KG (l’inscrivante), propriétaire inscrite de la marque de commerce visée par l’enregistrement susmentionné. La marque de commerce STONES (la Marque) est enregistrée pour emploi en liaison avec des « [v]êtements pour hommes, dames et enfants, nommément manteaux, vestes, costumes, pantalons, jupes, blouses, chemises, chandails, sous‑vêtements; chaussures, nommément bottes, baskets, mocassins, souliers, chaussures tout‑aller, sandales et pantoufles » (les marchandises en cause).

[2]               Je signale que l’Office de la propriété intellectuelle du Canada (OPIC) a pris acte d’une modification apportée au nom de l’inscrivante, le 18 juin 2008, en inscrivant son nouveau nom, Dressmaster GmbH. La date de prise d’effet du changement de nom inscrit par l’OPIC est le 30 août 2000.

[3]               L’article 45 de la Loi exige que le propriétaire inscrit indique si la marque de commerce a été employée au Canada en liaison avec chacune des marchandises ou chacun des services que spécifie l’enregistrement à un moment quelconque au cours des trois ans précédant la date de l’avis et, dans la négative, la date où elle a été ainsi employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour établir l’emploi s’étend du 6 juin 2004 au 6 juin 2007 (la période pertinente).

[4]               L’« emploi » d’une marque de commerce en liaison avec des marchandises est défini comme suit à l’article 4 de la Loi :

4. (1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des marchandises si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces marchandises, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les marchandises mêmes ou sur les colis dans lesquels ces marchandises sont distribuées, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux marchandises à tel point qu'avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[…]

(3) Une marque de commerce mise au Canada sur des marchandises ou sur les colis qui les contiennent est réputée, quand ces marchandises sont exportées du Canada, être employée dans ce pays en liaison avec ces marchandises.

 

En l’espèce, le paragraphe 4(1) de la Loi s’applique.

[5]               Il est bien établi que l’article 45 de la Loi a pour objet et pour effet d’offrir un moyen simple, sommaire et rapide de débarrasser le registre du bois mort et, pour cette raison, le critère préliminaire est très peu exigeant. Comme le juge Russell l’a affirmé dans Uvex Toko Canada Ltd. c. Performance Apparel Corp. (2004), 31 C.P.R. (4th) 270 (C.F. 1re inst.) :

[…] Nous savons que l'objet de l'article 45 est de débarrasser le registre du « bois mort ». Nous savons que la simple affirmation par le propriétaire de l'emploi de sa marque de commerce ne suffit pas et que le propriétaire doit « indiquer » quand et où la marque a été employée. Il nous faut des éléments de preuve suffisants pour être en mesure de nous former une opinion en vertu de l'article 45 et d'appliquer cette disposition. Également, nous devons maintenir le sens des proportions et éviter la preuve surabondante. Nous savons également que le genre de preuve exigée varie d'une affaire à l'autre, en fonction d'une gamme de facteurs tels que la nature du commerce et les pratiques commerciales du propriétaire de la marque de commerce.

[6]               En réponse à l’avis du registraire, l’inscrivante a fourni l’affidavit de Jean Lefebvre, signé le 5 décembre 2007, auquel étaient jointes les pièces A à I. M. Lefebvre est président de 3509885 Canada Inc. depuis sa constitution en société en 1998. Il déclare que 3509885 Canada Inc. fait des affaires comme importateur et grossiste de vêtements au Canada sous le nom Style & Transition. Il affirme que, depuis 1998, Style & Transition a agi comme distributeur canadien exclusif de l’inscrivante pour les vêtements vendus en liaison avec la Marque. Avant 1998, M. Lefebvre était directeur des ventes de l’ancien distributeur canadien de l’inscrivante qui, à l’époque, était une filiale de la société mère de l’inscrivante.

[7]               Je souligne qu’il ressort clairement de la jurisprudence que, dans le cadre d’une procédure relative à l’article 45, il n’est pas nécessaire que la preuve produite ait été souscrite par le propriétaire de la marque de commerce lui‑même, du moment qu’elle est « fournie » par lui [voir Canada (Registraire des marques de commerce) c. Harris Knitting Mills  Ltd. (1985), 4 C.P.R. (3d) 488 (C.A.F.)]. Compte tenu de cela, je conclus que l’affidavit souscrit par un distributeur canadien du propriétaire de la marque de commerce, comme en l’espèce, est admissible.

[8]               Seule l’inscrivante a produit des observations écrites et la tenue d’une audience n’a pas été demandée.

[9]               Je vais maintenant examiner la preuve présentée par l’inscrivante qui, comme je le constate, se rapporte aux vêtements pour hommes uniquement.

[10]           D’abord, je signale que M. Lefebvre affirme que l’inscrivante a changé de nom en 2004, ce qui ne correspond pas à la date de prise d’effet inscrite par l’OPIC. Quoi qu’il en soit, la date de prise d’effet du changement de nom n’est déterminante à l’égard d’aucune des questions en litige en l’espèce.

[11]           M. Lefebvre affirme que l’inscrivante confectionne et vend des vêtements sous diverses marques de commerce dont la Marque. Il ajoute que l’inscrivante produit la majeure partie de ses stocks dans ses propres installations mais qu’elle confie également en sous‑traitance à d’autres manufacturiers une petite partie de la production de ses stocks. Il joint à son affidavit des photocopies de factures que l’inscrivante a envoyées au cours de la période pertinente à Style & Transition pour des vêtements pour hommes portant la Marque (pièce A). Je constate que ces factures indiquent clairement que les marchandises qui y sont énumérées proviennent de l’inscrivante.

[12]           M. Lefebvre affirme que, en tant que distributeur exclusif des vêtements de l’inscrivante vendus sous la Marque au Canada, Style & Transition importe des vêtements et des accessoires de l’inscrivante pour les revendre à des détaillants canadiens. Il dit que, pour renforcer cette relation, il rencontre la direction de l’inscrivante en Allemagne de deux à quatre fois par année. Il explique que Style & Transition vend les vêtements et les accessoires de l’inscrivante à des détaillants canadiens par le canal de ses salles d’exposition situées à Montréal et de son agent à Vancouver. M. Lefebvre explique que ces détaillants canadiens revendent ensuite les vêtements et les accessoires à de consommateurs au Canada.

[13]           La Cour fédérale a affirmé plusieurs fois que l’emploi d’une marque de commerce à n’importe quel point de la chaîne de distribution suffit à établir l’emploi au sens de l’article 4 de la Loi et qu’une inscrivante pourra prétendre au bénéfice de cet emploi pour autant que les marchandises portant la marque de commerce proviennent d’elle [voir Manhattan Industries Inc. c. Princeton Manufacturing Ltd. (1971), 4 C.P.R. (2d) 6 (C.F. 1re inst.) et Société nationale des chemins de fer français c. Venice Simplon-Orient-Express Inc. (2000), 9 C.P.R. (4th) 443 (C.F. 1re inst.)]. Dans la présente affaire, après avoir examiné la preuve par affidavit dans son ensemble, je suis convaincue que les vêtements pour hommes vendus sous la Marque au cours de la période pertinente provenaient de l’inscrivante. De plus, je suis convaincue que Style & Transition agit uniquement comme distributeur canadien de ces produits.

[14]           Dans son affidavit, M. Lefebvre déclare que, depuis 1998, Style & Transition a vendu chaque année près de 10 000 à 12 000 articles de vêtement pour hommes et d’accessoire de mode fabriqués par l’inscrivante à des détaillants partout au Canada (pièce C). Selon M. Lefebvre, le chiffre d’affaire annuel des produits vendus sous la Marque au Canada par Style & Transition, pour la période pertinente, s’élevait à environ 999 000 $ en 2007, 876 000 $ en 2006, 866 000 $ en 2005 et 881 000 $ en 2004.

[15]           Comme preuve de ces ventes, M. Lefebvre joint des photocopies des échantillons représentatifs des factures pour les sélections de vêtements pour hommes vendus sous la Marque par Style & Transition aux détaillants canadiens durant la période pertinente (pièce B). Ces échantillons de facture indiquent la Marque et donnent une brève description de la nature des produits vendus (à savoir selon le cas : manteaux, vestes, costumes, pantalons, chemises et tricots). Je suis d’avis que les factures corroborent le témoignage de M. Lefebvre sur les ventes de vêtements pour hommes en liaison avec la Marque au cours de la période pertinente.

[16]           M. Lefebvre déclare que, au moment de la vente, on peut voir la Marque sur les étiquettes fixes ou mobiles apposées sur les vêtements de l’inscrivante. Comme preuve, M. Lefebvre joint à son affidavit une sélection de vêtements de l’inscrivante sur lesquels des étiquettes fixes et mobiles sont apposées ainsi qu’une sélection d’étiquettes fixes et mobiles séparées (pièce D). Je constate que la Marque apparaît sur toutes les étiquettes fixes et mobiles et sur tous les vêtements joints à l’affidavit de M. Lefebvre.

[17]           M. Lefebvre joint à son affidavit une photo d’un magasin de vente au détail appartenant à l’un des clients canadiens de Style & Transition, en l’occurrence BTQ, situé à Montréal (pièce F). La photo montre la Marque affichée à proximité des vêtements pour hommes confectionnés par l’inscrivante.

[18]           M. Lefebvre joint à son affidavit une sélection de housses à vêtements, de sacs de papier et de boîtes qui présentent la Marque et sont utilisés par les détaillants pour emballer les vêtements pour hommes confectionnés par l’inscrivante (pièce G).

[19]           J’observe que M. Lefebvre n’a pas mentionné précisément si les échantillons de marchandise (pièce D), les échantillons d’étiquette fixe et mobile (pièce D), la photo du magasin de vente au détail (pièce F) et les échantillons d’emballage (pièce G) joints à son affidavit sont représentatifs de l’emploi de la Marque au cours de la période pertinente. Certes, il aurait été préférable que M. Lefebvre le mentionne de façon précise, mais je suis disposée à accepter, suivant une interprétation objective de l’affidavit dans son ensemble, que la Marque a été employée en liaison avec les vêtements pour hommes confectionnés par l’inscrivante au cours de la période pertinente.

[20]           M. Lefebvre fournit la preuve relative à la publicité des vêtements pour hommes vendus en liaison avec la Marque (pièces E, H et I). Cette preuve est peu utile à la cause de l’inscrivante parce que toutes les annonces ont été publiées à une date postérieure à la période pertinente. En tout état de cause, je signale que l’emploi de la Marque dans de la publicité n’est pas en soi suffisant pour constituer un emploi en liaison avec les marchandises [voir BMW Canada Inc. c. Nissan Canada Inc. (2007), 60 C.P.R. (4th) 181 (C.A.F.)].

[21]           Après avoir analysé la preuve, je suis convaincue que l’inscrivante a prouvé l’emploi de la Marque au Canada, au sens du paragraphe 4(1) de la Loi, en liaison avec des « [v]êtements pour hommes, nommément manteaux, vestes, costumes, pantalons, chandails » au cours de la période pertinente. Toutefois, je conclus qu’il n’existe aucune preuve d’emploi de la Marque en liaison avec des « [v]êtements pour […] dames et enfants », « jupes », « blouses », « sous‑vêtements » et « chaussures, nommément bottes, baskets, mocassins, souliers, chaussures tout‑aller, sandales et pantoufles » au cours de la période pertinente ni aucune preuve quant à la date où la Marque a été employée en dernier lieu en liaison avec ces marchandises et aux raisons de leur défaut d’emploi.

[22]           En vertu des pouvoirs qui m’ont été délégués en application du paragraphe 63(3) de la Loi, l’enregistrement LMC455196 sera modifié de manière à supprimer les termes « […] dames et enfants, […] jupes, blouses, […] sous‑vêtements; chaussures, nommément bottes, baskets, mocassins, souliers, chaussures tout‑aller, sandales et pantoufles » de l’inscription des marchandises en cause.

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Andrea Flewelling

Membre

Commission d’opposition des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

Traduction certifiée conforme

Édith Malo, LL.B.

 

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