Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

PROCÉDURE EN VERTU DE LARTICLE 45

MARQUE DE COMMERCE : POCKET DESIGN (DESSIN DE POCHE)

ENREGISTREMENT N° 307,935

 

 

Le 18 novembre 2002, sur demande dAird & Berlis LLP, le registraire a envoyé un avis prévu à larticle 45 à Levi Strauss & Co. (LS & Co.), propriétaire inscrite de lenregistrement de la marque de commerce citée en rubrique.

 

La marque de commerce (représentée ci-dessous) est enregistrée en vue de lemploi en liaison avec les marchandises suivantes : vêtements pour hommes et garçons, nommément jeans, pantalons, shorts et vestes.

 

 

 

 

 

 

[traduction] « La représentation de la poche de pantalon ne fait pas partie de la marque de commerce. »

 


Larticle 45 de la Loi sur les marques de commerce oblige le propriétaire inscrit de la marque de commerce à indiquer si la marque de commerce a été employée au Canada en liaison avec chacune des marchandises et/ou chacun des services énumérés dans lenregistrement à un moment quelconque au cours des trois ans précédant la date de lavis et, dans la négative, la date où elle a été employée en dernier lieu et la raison de son défaut demploi depuis cette date. La période pertinente en lespèce va du 18 novembre 1999 au 18 novembre 2002.

 

Dans son affidavit, Mme Baker dit quelle est employée par Levi Strauss & Co. (Canada) Inc. (LSC), filiale en propriété exclusive de Levi Strauss & Co. (la propriétaire inscrite) et titulaire dune licence concédée par celle-ci. Elle dit quelle est la spécialiste des marques de commerce chez LSC et quelle est responsable des questions de marques de commerce chez LSC, notamment de la coordination de lenregistrement et de la défense des marques de commerce de LSC et de la propriétaire inscrite au Canada. Elle dit que lune de ses responsabilités consiste à fournir la preuve demploi des marques de commerce de LSC et de la propriétaire inscrite au Canada dans les cas où une telle preuve est nécessaire. Elle ajoute quelle a accès aux dossiers de lentreprise tenus dans le cours normal et ordinaire de lactivité de LSC en ce qui concerne cet emploi.

 

Elle ajoute que son témoignage se fonde sur sa connaissance personnelle, sur les dossiers de lentreprise au besoin et sur les connaissances de lentreprise quelle a acquises par son emploi chez LSC.

 


Elle explique que LSC fabrique et vend actuellement (son affidavit a été souscrit le 16 mai 2003) des vêtements de marque GWG au Canada et que ces vêtements sont fabriqués et vendus par LSC depuis de nombreuses années. Elle dit que, du printemps de 1998 jusquà la fin de 2001, des vêtements de marque GWG ont été fabriqués et vendus par Jack Spratt Inc. dans le cadre dune licence concédée par LSC et que, de novembre 1999 à novembre 2002, des jeans de marque GWG portant une version allongée de la marque de commerce LOOP Design (Dessin de BOUCLE) ont été fabriqués et vendus au Canada dans le cadre dune licence concédée à LSC par la propriétaire inscrite, licence par laquelle la propriétaire inscrite contrôle les caractéristiques et la qualité des marchandises. Elle ajoute que Jack Spratt Inc. a fabriqué et vendu des vêtements portant la marque de commerce Dessin de BOUCLE dans le cadre dune sous-licence concédée par LSC.

 

Elle fait valoir que les vêtements portant la marque de commerce Dessin de BOUCLE sont vendus à des magasins de détail de vêtements dans tout le Canada. Elle explique que la marque de commerce est apposée sur les vêtements par le moyen dune surpiqûre ayant la forme du dessin faite sur la poche du vêtement et elle confirme que la titulaire de licence et la titulaire de sous-licence ont constamment apposé la marque de commerce Dessin de BOUCLE sur les vêtements, et en particulier sur les jeans vendus au Canada, depuis de nombreuses années, notamment pendant la période de trois ans pertinente.

 

À titre de pièce B, elle produit des copies de photographies dun jeans de marque GWG représentatif portant la marque de commerce Dessin de BOUCLE. Elle indique que le  jean portant la marque de commerce ainsi apposée est vendu sous les nos de modèle 10838, 10818 et 10828. À titre de pièce C, elle produit des photocopies de factures représentatives établissant la vente de jeans en liaison avec la marque de commerce.

 


La partie à la demande de qui lavis a été donné a soulevé plusieurs arguments à légard de la preuve produite. Elle fait valoir :

a) que la preuve nétablit pas un emploi que pourrait invoquer la titulaire de lenregistrement;

 

b) quelle contient de simples assertions;

 

c) quelle nétablit pas lemploi de la marque de commerce dans la pratique normale du commerce;

 

d) quelle nétablit pas lemploi en liaison avec chacune des marchandises;

 

d) quelle démontre une différence entre la marque déposée et la marque employée;

 

e) quelle nétablit pas de circonstance excusant le défaut demploi.

Je traiterai ces points successivement. 

a) Lemploi ne peut être invoqué par la titulaire de lenregistrement

La partie à la demande de qui lavis a été donné fait valoir que laffidavit Baker est établi pour le compte dune employée dune société liée à la propriétaire inscrite et témoigne que la propriétaire inscrite a concédé une licence demploi de la marque de commerce. La partie à la demande de qui lavis a été donné plaide que, Mme Baker étant une employée de Levi Strauss & Co. (Canada) Inc. et non de la propriétaire inscrite, la preuve nétablit pas un emploi par la titulaire de lenregistrement ou que la titulaire de lenregistrement pourrait invoquer. En outre, à légard de lemploi par les titulaires de licence, elle soutient quil nexiste pas une preuve suffisante pour satisfaire aux conditions prévues à larticle 50 de la Loi pour que la titulaire de lenregistrement puisse invoquer lemploi par la propriétaire inscrite.

 


Sagissant de lauteur de laffidavit, Mme Baker, comme elle est responsable des questions de marques de commerce chez LSC, notamment de la coordination de lenregistrement et de la défense des marques de commerce de LSC et de la propriétaire inscrite au Canada, ce qui comprend la responsabilité de fournir la preuve demploi des marques de commerce de son employeur et de la propriétaire inscrite au Canada, et comme elle a déclaré sous serment que son témoignage se fonde sur sa connaissance personnelle, sur les dossiers de lentreprise au besoin et sur les connaissances de lentreprise quelle a acquises par son emploi, jestime quon peut conclure que Mme Baker est en mesure de témoigner pour le compte de la propriétaire inscrite et davoir une connaissance de lemploi de la marque de commerce par les titulaires de licence.

 


Sagissant de lemploi par LSC (titulaire de licence) et Jack Spratt Inc. (titulaire de sous-licence), je ne puis accepter que la propriétaire inscrite puisse invoquer lemploi par Jack Spratt Inc., comme on ne trouve aucune indication dans laffidavit Baker que la propriétaire inscrite contrôle les caractéristiques et la qualité des marchandises produites par la titulaire de sous-licence. Toutefois, sagissant de lemploi par LSC, comme Mme Baker a déclaré sous serment que lemploi de la marque de commerce en liaison avec les marchandises se fait dans le cadre dune licence concédée par la propriétaire inscrite et que celle-ci contrôle les caractéristiques et la qualité des marchandises, jaccepte que, pour lapplication de larticle 45, cela suffit pour satisfaire aux conditions prévues au paragraphe 50(1) de la Loi (voir les décisions Fitzsimmons, MacFarlane c. Caitlin Financial Corp. N.V., 79 C.P.R. (3d) 154 à la page 157 et Sim & McBurney c. Lesage Inc., 67 C.P.R. (3d) 571). Par conséquent, comme je conclus que la titulaire de lenregistrement peut seulement invoquer lemploi par LSC, je ne prendrai en considération que les éléments de preuve se rapportant à lemploi par LSC.

 

b) Simples assertions dans la preuve produite, c) défaut détablir lemploi de la marque de commerce dans la pratique normale du commerce; d) défaut détablir lemploi de la marque de commerce en liaison avec chacune des marchandises, e) différence entre la marque employée et la marque déposée et f) défaut détablir des circonstances spéciales excusant le défaut demploi

 

Je conviens avec la partie à la demande de qui lavis a été donné que laffidavit Baker est muet à légard des marchandises « pantalons, shorts et vestes ». Comme il ny a pas de circonstances spéciales excusant le défaut demploi de la marque de commerce en liaison avec ces marchandises, elles seront supprimées de lenregistrement.

 

Sagissant des marchandises «  jeans », je conclus que laffidavit Baker contient davantage que de simples assertions, il contient des assertions de faits établissant lemploi (Mantha & Associates c. Central Transport Inc., 64 C.P.R. (3d) 354).

 

Mme Baker a clairement déclaré sous serment que, de novembre l999 à novembre 2002, LSC a fabriqué et vendu ces marchandises portant une version allongée de la marque de commerce. Mme Baker a expliqué la manière dont la marque de commerce a été apposée sur les marchandises et la photographie de jean fournie montre clairement le jean avec une variante de la marque de commerce déposée. Elle a expliqué que les «  jeans » portant les numéros de modèle l08l8, 10828 et 10838 sont des jeans sur lesquels la marque de commerce est apposée. Une facture de LSC datée du 25 octobre 2002 fait état de ventes de jeans portant ces numéros de modèle.


Cela suffit pour me permettre de conclure quune variante de la marque de commerce a été employée au Canada en liaison avec des « jeans » durant la période pertinente.

 

La partie à la demande de qui lavis a été donné a plaidé que la marque de commerce employée est sensiblement différente de la marque de commerce déposée. La titulaire de lenregistrement, de son côté, fait valoir que la marque employée est une variation négligeable de la marque de commerce déposée et que lemploi établi constitue donc un emploi de la marque de commerce déposée.

 

Je reproduis ci-dessous la marque de commerce déposée et la marque de commerce employée :

 version déposée                                                                            version employée

 

 

 

 

 

À mon avis, bien que la marque employée ait quelque ressemblance avec la marque de commerce déposée, je ne puis conclure que cet emploi constitue un emploi de la marque de commerce déposée.

 

À mon avis, la présente situation est régie par le principe 2 énoncé dans la décision Nightingale Interloc Ltd. c. Prodesign Ltd., 2 C.P.R. (3d) 535 :


[traduction] « On considérera quune marque de commerce donnée est employée si la marque de commerce véritablement employée nest pas sensiblement différente et que les différences ne sont pas graves au point de tromper le public ou de lui nuire dune quelconque façon En général, toutefois, ce principe ne semble applicable que dans le cas de variations très mineures... »  [non souligné dans loriginal]

 

Dans larrêt Munsingwear Inc. c. Promafil Canada Ltée, 44 C.P.R. (3d) 59, la Cour dappel fédérale a traité dune situation relevant de ce principe. Elle y a jugé que lemploi dune version légèrement modifiée du dessin dun pingouin constituait lemploi de la marque de commerce déposée. La Cour a jugé que les caractéristiques dominantes des deux marques étaient les mêmes. Elle a fait observer à la page 71 :

« De toute évidence, lors de chaque modification, le propriétaire de la marque de commerce joue avec le feu. Selon les termes du juge Maclean, "la pratique de séloigner de la forme précise dune marque de commerce enregistrée ... constitue un grand danger pour lauteur de lenregistrement." Mais des modifications prudentes peuvent être apportées sans conséquences fâcheuses si les mêmes traits dominants sont préservés et si les différences sont si insignifiantes quelles ne trompent pas lacheteur non averti. »

 

En lespèce, je considère que la modification apportée à la marque de commerce est notable, non simplement mineure. À cet égard, je conviens avec la partie à la demande de qui lavis a été donné quon na pas préservé toutes les caractéristiques dominantes de la marque de commerce déposée. À mon avis, le dessin de « boucle » en forme de cercle constitue une caractéristique importante de la marque de commerce déposée et cette caractéristique na pas été conservée dans la marque employée. À mon sens, cela donne une marque très différente. Par conséquent, comme jestime que les différences entre les marques de commerce sont plus que mineures, je conclus que lemploi de la marque de commerce établi en liaison avec des « jeans » ne constitue pas un emploi de la marque de commerce déposée.

 


Comme la preuve nétablit aucun emploi de la marque de commerce déposée en liaison avec les marchandises énumérées dans lenregistrement, et comme il ny a pas de circonstances spéciales qui excusent le défaut demploi, je conclus que lenregistrement de la marque de commerce devrait être radié.

 

Lenregistrement n° 307,935 sera radié conformément au paragraphe 45(5) de la Loi.

 

FAIT À GATINEAU (QUÉBEC), LE 30 JUIN 2005.

 

D.  Savard

Agente daudience principale

Section de larticle 45

 

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