Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2015 COMC 45

Date de la décision : 2015-03-18

TRADUCTION

DANS L'AFFAIRE DE L'OPPOSITION produite par 642897 B.C. Ltd. et Punjab Milk Foods Inc. à l'encontre de la demande d'enregistrement no 1,490,259 pour la marque de commerce MALAI PANEER & Dessin au nom de 1030983 Ontario Ltd.

Dossier

[1]        Le 27 juillet 2010, 1030983 Ontario Ltd. a produit une demande d'enregistrement pour la marque de commerce MALAI PANEER & Dessin, reproduite ci-dessous :

MALAI PANEER & Design

La demande est fondée sur l'emploi au Canada depuis aussi tôt que le 1er mars 2009, en liaison avec les produits [traduction] :

fromage, nommément paneer.

Je référerai à la marque visée par la demande simplement comme à MALAI PANEER, car, pour toutes les fins pertinentes en l'espèce, la marque nominale est équivalente à la marque nominale et figurative.

[2]        La requérante renonce au droit à l'usage exclusif du mot PANEER en dehors de la marque de commerce. Dans sa demande, la requérante informe en outre le registraire des marques de commerce que le mot MALAI signifie [traduction] « crème » en pendjabi : voir l'article 29a) du Règlement sur les marques de commerce, DORS/96-195. La Section de l'examen de l'Office de la propriété intellectuelle du Canada (l'OPIC, dont relève également la présente Commission) a initialement soulevé une objection quant à l'enregistrabilité de la marque visée par la demande, mais la requérante a réfuté cette objection : voir les paragraphes 12 à 16, ci-dessous.

[3]        La présente demande a été annoncée aux fins d'opposition dans le Journal des marques de commerce du 22 août 2012 et a fait l'objet d'une opposition par 642897 B.C. Ltd. et Punjab Milk Foods Inc., produite le 30 octobre 2012. Le 1er novembre 2012, le registraire a transmis à la requérante une copie de la déclaration d'opposition, conformément aux dispositions de l'article 38(5) de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13. En réponse, la requérante a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle elle nie l'ensemble des allégations contenues dans la déclaration d'opposition.

[4]        La preuve des opposantes est constituée des affidavits de Gurpreet Arneja et Dulce Campos. La preuve de la requérante est constituée des affidavits d'Harjinder Pabla et Amarjeet Chane. Les parties ont toutes deux produit des plaidoyers écrits.

[5]        Peu avant que la Commission transmette aux parties une copie du plaidoyer écrit de la partie adverse (voir l'article 46(3) du Règlement), les opposantes ont demandé l'autorisation de modifier leur déclaration d'opposition afin d'y ajouter un motif, à savoir que la marque visée par la demande est [traduction] « le nom en pendjabi des marchandises en liaison avec lesquelles son emploi est allégué ». Le nouveau motif était fondé sur l'article 12(1)c), lequel est ainsi libellé :

12. (1) Sous réserve de l'article 13, une marque de commerce est enregistrable sauf dans l'un ou l'autre des cas suivants :

 

a) elle est constituée d’un mot n’étant principalement que le nom ou le nom de famille d’un particulier vivant ou qui est décédé dans les trente années précédentes;

 

b) qu’elle soit sous forme graphique, écrite ou sonore, elle donne une description claire ou donne une description fausse et trompeuse, en langue française ou anglaise, de la nature ou de la qualité des produits ou services en liaison avec lesquels elle est employée, ou en liaison avec lesquels on projette de l’employer, ou des conditions de leur production, ou des personnes qui les produisent, ou de leur lieu d’origine;

 

c) elle est constituée du nom, dans une langue, de l’un des produits ou de l’un des services à l’égard desquels elle est employée, ou à l’égard desquels on projette de l’employer;

(Soulignement ajouté)

[6]        La Commission a rejeté la demande d'autorisation dans une décision interlocutoire en date du 9 avril 2014, laquelle est reproduite ci-dessous. Conséquemment, la question de savoir si la marque MALAI PANEER visée par la demande contrevient aux dispositions de l'article 12(1)c) n'est pas en cause dans la présente procédure.

[traduction]
L'opposante [sic] n'a [sic] pas suffisamment expliqué pourquoi le motif fondé sur l'article 12(1)c) n'aurait pas pu être soulevé plus tôt. À cet égard, l'opposante [sic] a eu amplement l'occasion de revoir sa déclaration d'opposition et de demander l'autorisation de la modifier pendant la procédure d'opposition, y compris lors de la préparation de sa preuve au titre de l'article 41 du Règlement.

 

Le préjudice qui serait causé à la requérante si l'autorisation était accordée à un stade aussi tardif de la procédure serait considérable. À cet égard, je conviens avec la requérante que les changements proposés ne se limitent pas à la simple correction d'une erreur typographique; ils découlent de la volonté d'ajouter un nouveau motif d'opposition qui n'était pas envisagé initialement. Ainsi, la requérante aurait éventuellement à produire une contre-déclaration modifiée et également à demander l'autorisation de produire une preuve et un plaidoyer écrit supplémentaires. La preuve et le plaidoyer écrit que la requérante a produits au titre de l'article 42 du Règlement ont été constitués en fonction uniquement des motifs d'opposition soulevés initialement, en particulier les motifs fondés sur le caractère descriptif de la marque aux termes de l'article 12(1)b) et l'absence de caractère distinctif de la marque, qui serait soi-disant descriptive ou générique au sens de l'article 2. La requérante ne prévoyait pas que l'opposante [sic] allait invoquer l'article 12(1)c) à titre de motif d'opposition.

[7]        Les parties étaient toutes deux présentes à l'audience qui s'est tenue le 20 novembre 2014.

[8]        Peu avant l'audience, les parties ont toutes deux produit une liste des affaires sur lesquelles elles entendaient s'appuyer. Les opposantes ont également joint à leur liste une Annexe A constituée de renseignements se rapportant à diverses marques inscrites au registre des marques de commerce. Il aurait été approprié que ces renseignements soient soumis à titre de preuve. J'ai informé les parties que je ne tiendrais pas compte de l'Annexe A. Aussi, à l'audience, l'avocat de la requérante a objecté que les paragraphes 34 et 35 du plaidoyer écrit des opposantes constituaient des éléments de preuve. Je lui ai donné raison. Je n'ai tenu aucun compte de ces paragraphes.

Déclaration d'opposition

[9]        La déclaration d'opposition étant plutôt longue (elle est jointe comme Annexe 1 à la présente décision), je résume ci-dessous les principales allégations qu'elle contient.

1. non-conformité à l'article 30a)

Les opposantes allèguent que la demande ne décrit pas les marchandises de la requérante [traduction] « dans les termes ordinaires du commerce » en ce que « paneer » [traduction] « devrait être décrit de façon plus détaillée ».

2. non-conformité à l'article 30b)

Les opposantes allèguent que i) ni la requérante ni une quelconque licenciée de la requérante n'emploie la marque MALI PANEER visée par la demande depuis la date de premier emploi revendiquée dans la demande et que ii) la combinaison formée des mots MALI et PANEER ne peut pas servir de marque de commerce, car il s'agit d'un terme descriptif qui signifie [traduction] « fromage à la crème » et qui est utilisé par divers tiers et par les opposantes [traduction] « pour décrire les mêmes produits ».

3. non-conformité à l'article 30i)

Les opposantes allèguent que la requérante ne pouvait pas être convaincue d'avoir droit d'employer la marque visée par la demande, car la requérante savait ou devait forcément savoir que la marque est un terme descriptif et générique couramment employé dans l'industrie du fromage.

4. non-conformité à l'article 12(1)b)

Les opposantes allèguent que la marque visée par la demande n'est pas enregistrable, parce que les caractéristiques dominantes de la marque sont les mots MALAI PANEER, lesquels donnent une description claire ou une description fausse et trompeuse des produits de la requérante.

5. non-conformité à l'article 2

Les opposantes allèguent que la marque visée par la demande n'est pas distinctive, parce que le terme MALAI PANEER i) est un terme générique et descriptif qui ne peut pas être utilisé comme marque de commerce en ce qu'il ne distingue pas les produits de la requérante, et ii) les opposantes et d'autres entités de l'industrie emploient le même terme, c'est-à-dire MALAI PANEER, en liaison du fromage.

[10]      Avant d'examiner les motifs d'opposition, je passerai en revue la preuve des parties et expliquerai en quoi consistent le fardeau de preuve des opposantes et le fardeau ultime de la requérante.

Preuve des opposantes

Dulce Campos

[11]      Mme Campos atteste qu'elle est une recherchiste en marques de commerce et qu'elle utilise diverses bases de données dans le cadre de ses recherches. Les résultats de ses recherches sont joints à son affidavit comme pièces 1 à 5.

Pièces 1 et 2

[12]      La pièce 1 est une copie d'une objection à l'enregistrement de la marque en cause, soulevée le 29 novembre 2010, par la Section de l'examen de l'OPIC lors du traitement de la demande d'enregistrement. L'examinateur a formulé son objection dans les termes suivants :

. . . la marque . . . est considérée, sous sa forme sonore, comme donnant une description claire ou une description fausse et trompeuse des marchandises en liaison avec lesquelles elle est employée, car MALAI PANEER indique clairement que le paneer de la requérante comprend une sauce à la crème « malai ».

 

Compte tenu des dispositions du paragraphe [sic] 12(1)b) de la Loi sur les marques de commerce, cette marque ne semble pas enregistrable.

[13]      Par commodité, je reproduis à nouveau l'article 12(1)b) ci-dessous.

12. (1) Sous réserve de l'article 13, une marque de commerce est enregistrable sauf dans l'un ou l'autre des cas suivants :

 

a) elle est constituée d’un mot n’étant principalement que le nom ou le nom de famille d’un particulier vivant ou qui est décédé dans les trente années précédentes;

 

b) qu’elle soit sous forme graphique, écrite ou sonore, elle donne une description claire ou donne une description fausse et trompeuse, en langue française ou anglaise, de la nature ou de la qualité des produits ou services en liaison avec lesquels elle est employée, ou en liaison avec lesquels on projette de l’employer, ou des conditions de leur production, ou des personnes qui les produisent, ou de leur lieu d’origine;

 

c) elle est constituée du nom, dans une langue, de l’un des produits ou de l’un des services à l’égard desquels elle est employée, ou à l’égard desquels on projette de l’employer;

(Soulignement ajouté)

[14]      Je constate, à la lecture de l'historique du dossier que, le 16 février 2012, la requérante a répondu à l'objection de l'examinateur en affirmant que « malai » ne signifie pas « sauce à la crème », mais que [traduction] « certaines personnes emploient le mot ‘malai’ pour décrire certains plats cuisinés qui contiennent une sauce ».

[15]      La requérante a également fait valoir que :

[traduction]
Même si la Marque donnait une description claire ou une description fausse et trompeuse . . . cette interdiction serait limitée aux mots anglais et français. Étant donné que les mots « malai paneer » ne sont ni anglais ni français, il ne devrait y avoir aucune objection à l'enregistrement de la Marque, même si cette dernière donne une description claire ou une description fausse et trompeuse.

 

Je reconnais que lorsque des mots étrangers sont passés dans l'usage en français ou en l'anglais, il y a lieu de considérer que ces mots ont une signification ou une connotation clairement descriptive. Cependant . . . le mot « malai » n'est passé dans l'usage ni en français ni en anglais, pas plus qu'il n'est devenu suffisamment familier aux locuteurs francophones ou anglophones pour que la Marque ne puisse pas devenir une marque enregistrable valide.

[16]      La pièce 2 est une copie d'une lettre en date du 11 avril 2012 dans laquelle l'examinateur exige qu'une traduction en anglais ou en français du mot MALAI soit fournie, conformément aux dispositions de l'article 29a) du Règlement sur les marques de commerce. La requérante a répondu le 8 mai 2012 et indiqué que MALAI est le mot employé en pendjabi pour désigner la [traduction] « crème » et, plus précisément, [traduction] « la peau qui se forme à la surface du lait lorsqu'il est chauffé ».

Sans doute la Section de l'examen a-t-elle accepté les observations de la requérante et retiré son objection (bien qu'il n'y ait aucune indication au dossier), car la demande en cause a finalement été annoncée.

Pièces 3 à 5

[17]      Les pièces 3 à 5 sont constituées des résultats de recherches menées sur Internet au sujet de « malai paneer ». Les recherches démontrent qu'il s'agit d'un fromage couramment utilisé en cuisine indienne, qui est souvent appelé simplement « paneer ». Le fromage est obtenu par caillage du lait chauffé sous l'action de jus de citron ou d'autres acides alimentaires ajoutés. Diverses recettes pour fabriquer du paneer sont proposées.

[18]      D'après ce que je comprends de la preuve résumée ci-dessus, le terme « malai paneer » désigne un fromage obtenu à l'aide d'un procédé plutôt simple, c'est-à-dire par chauffage et caillage du lait, qui peut facilement être reproduit dans une cuisine domestique (de plus amples explications quant à la nature du « malai paneer » sont fournies dans la preuve de la requérante : voir le para. 27 ci-dessous).

[19]      Pour faire suite au paragraphe 16 ci-dessus, si l'examinateur avait eu des raisons de croire que l'expression MALAI PANEER dans son ensemble pouvait se traduire par quelque chose comme [traduction] « fromage fait de crème caillée », il aurait sans doute jugé opportun de s'objecter à l'enregistrement de la marque sur la base de l'article 12(1)c), c'est-à-dire au motif que la marque est constituée du nom des produits « dans une langue », quelle qu'elle soit, voir le para. 13 ci-dessus. Comme je l'ai souligné précédemment, la non-conformité à l'article 12(1)c) n'est pas en cause dans la présente procédure d'opposition.

Gurpreet Arneja

[20]      M. Arneja atteste qu'il agit à titre de dirigeant de chacune des sociétés des opposantes. Les opposantes sont établies à Surrey, en Colombie-Britannique; elles constituent deux des quelques rares fabricants de produits laitiers indiens présents en Amérique du Nord, et emploient 160 personnes à temps plein.

[21]      M. Arneja affirme que « malai » est un terme indien qui signifie [traduction] « crème caillée » et que « paneer » est un terme indien qui signifie [traduction] « fromage non affiné ». Le terme « malai paneer » est couramment employé par les fabricants indiens de produits laitiers pour décrire leur produit de [traduction] « fromage à la crème ». Les pièces 7 à 15 de son affidavit comprennent des imprimés d'emballages tirés des sites Web de divers fabricants indiens de produits laitiers. Je souligne que les termes « paneer » et « malai paneer » figurent sur les emballages et sont utilisés pour décrire les produits de fromage. Les opposantes n'ont, toutefois, pas démontré qu'un ou plusieurs de ces produits emballés étaient accessibles aux consommateurs du Canada.

[22]      La pièce 17 de l'affidavit de M. Arneja est constituée de copies de pages tirées de divers sites Web de restaurant qui offrent sur leur menu des plats « malai paneer ». J'ai examiné la pièce 17 et il semble qu'aucun de ces menus ne soit proposé par des restaurants situés au Canada.

Preuve de la requérante

Harjinder Pabla

[23]      M. Pabla atteste qu'il est le vice-président de la société de la requérante. La requérante a été constituée en société en 1993 et exploitait à l'époque une confiserie et un restaurant indiens. Elle a, par la suite, pris de l'expansion pour en venir à exploiter trois restaurants, un service de traiteur et une gamme de friandises, de grignotines et de produits laitiers commercialisés sous la marque BRAR'S.

[24]      En 1999, la requérante a constitué une nouvelle société appelée Ontario Impex of Canada Inc. (« OIC ») à laquelle elle a confié la fabrication et la distribution des produits BRAR, y compris le fromage MALAI PANEER. OIC détient une licence « implicite » (voir le para. 4 de l'affidavit de M. Pabla) de la requérante l'autorisant à employer la marque MALAI PANEER, en conformité avec l'article 50 de la Loi sur les marques de commerce. La requérante et/ou sa licenciée OIC emploient la marque visée par la demande depuis au moins le 1er mars 2009 en liaison avec du fromage. La pièce 5 illustre l'emploi de la marque visée par la demande sur des emballages de produit qui sont demeurés inchangés depuis 2009.

[25]      Au début, le produit MALAI PANEER de la requérante était vendu dans des boutiques spécialisées et des restaurants; mais, déjà en 2011, le produit était offert en vente dans les principaux supermarchés canadiens, y compris Loblaws et Fresh Co. Les ventes annuelles brutes approximatives de fromage MALAI PANEER réalisées en 2010, 2011, et 2012 ont été de l'ordre de 1,2 million de dollars, 2 millions de dollars et 3,5 millions de dollars, respectivement.

[26]      Depuis 2009, la requérante a régulièrement annoncé son fromage MALAI PANEER par l'intermédiaire de sites Web d'entreprise, de sites de Web de médias sociaux, de médias imprimés, de la radio et de la télévision, ainsi que par la commandite de films et d'événements de divertissement. En 2009, la requérante et/ou OIC ont engagé des dépenses publicitaires de 28 500 $ et ces dépenses ont continué d'augmenter de façon soutenue pour atteindre 213 900 $ en 2012.

[27]      Aux paragraphes 17 à 23 de son affidavit, que je reproduis ci-dessous, M. Pabla explique, entre autres choses, la nature du fromage MALAI PANEER de la requérante :

[traduction]
17. « Malai » est un mot utilisé en pendjabi pour désigner la couche de matières grasses et de protéines coagulées qui se forme à la surface du lait lorsqu'il est chauffé (qu'on appelle en français la « crème caillée » et en anglais la « clotted cream »), ainsi que l'action consistant à récupérer la crème à la surface du lait. « Malai » peut également être utilisé pour suggérer que quelque chose est de qualité supérieure ou de première qualité par allusion au fait que « la crème monte toujours à la surface ». . .

 

18.     « Paneer » est un type particulier de fromage non affiné qui est couramment utilisé en cuisine sud-asiatique. « Paneer » est le nom commercial ordinaire qui est utilisé pour désigner ce type de fromage partout au Canada, aussi bien sur les marchés anglophones que francophones. . .

 

19.     La requérante a choisi la marque de commerce MALAI PANEER, parce que le terme MALAI évoque la texture moelleuse du paneer naturel de la requérante ainsi que sa qualité supérieure.

 

20.     Le terme « malai paneer » est parfois employé pour désigner un plat cuisiné composé de cubes de paneer enrobés d'une sauce riche faite de crème, de tomates, d'oignon, d'ail, d'épices, etc. Ce plat est servi chaud, le plus souvent accompagné de rôti, de pain naan ou de riz.

 

21.     À ma connaissance, la requérante a été la première au Canada à employer le terme MALAI PANEER en liaison avec du paneer ou des blocs de paneer offerts dans un emballage. Je ne connais aucun type de fromage qui serait appelé de façon générique « malai paneer » au Canada.

 

22.     MALAI PANEER n'est pas un terme générique utilisé pour désigner le « fromage à la crème ». À ma connaissance, le fromage à la crème est un produit laitier tartinable riche caractérisé par une teneur en matières grasses d'au moins 30 % et une teneur en humidité d'au plus 55 %. Le fromage à la crème fond rapidement lorsqu'il est chauffé. . .

 

23.     Le paneer de la requérante a une teneur en matières grasses de 20 % et une teneur en humidité de 60 %. Il n'est pas tartinable comme le fromage à la crème. Le paneer de la requérante peut être coupé en cubes, et il conserve sa forme lorsqu'il est chauffé, car il ne fond pas. Les cubes de paneer sont souvent enfilés sur des brochettes en alternance avec des légumes et grillés sur le barbecue.

[28]      À mon sens, le poids de cette preuve corrobore le témoignage de M. Pabla selon lequel le produit de la requérante n'est pas un fromage à la crème.

[29]      Dans leur plaidoyer écrit et à l'audience, les opposantes ont attiré mon attention sur d'apparentes incohérences et lacunes dans la preuve de M. Pabla. Les opposantes soutiennent, de ce fait, que peu de poids devrait être accordé à son témoignage par affidavit, voire aucun. Je souscris aux observations des opposantes en ce qui concerne les incohérences apparentes et l'absence d'information pertinente, mais je ne suis pas d'accord pour dire qu'il y a lieu de n'accorder qu'un poids limité à la preuve de M. Pabla. À titre d'exemple, dans son affidavit, qui a été souscrit en septembre 2013, M. Pabla atteste qu'il est le vice-président de la société de la requérante « depuis 2006 ». Les opposantes soulignent que, selon la pièce 1 de l'affidavit de M. Pabla, qui est une copie des Statuts constitutifs de la requérante en date du 20 mai 1993, l'unique administrateur et dirigeant de la société est Dial Pabla, et non Harjinder Pabla. Certes, la requérante aurait pu produire en preuve un certificat de constitution à jour, mais une telle omission n'est pas, à mon sens, suffisante pour mettre en doute la crédibilité du déposant. Les opposantes avaient la possibilité de contre-interroger le déposant pour sonder sa capacité à témoigner au nom de la requérante. Puisqu'aucun contre-interrogatoire n'a été mené, je n'ai pas de raison de douter de la fiabilité de la preuve de M. Pabla.

Amarjeet Chane

[30]      Mme Chane atteste qu'elle travaille à titre d'adjointe juridique au sein du cabinet qui représente la requérante. Son affidavit vise à présenter en preuve une recherche dans un site Web qui présente une liste de [traduction] « . . . plus de 550 fromages de spécialité originaires de 57 pays. . . ». Le premier fromage énuméré sous la lettre M est Maasdam; le dernier est Myzithra. Malai Paneer ne figure nulle part dans la liste. Je souligne, toutefois, qu'il n'y a aucune indication à savoir si l'Inde est comprise dans le groupe des 57 pays.

Fardeau de preuve initial et fardeau ultime

[31]      Conformément aux règles de preuve habituelles, les opposantes ont le fardeau de preuve initial d'établir les faits inhérents aux allégations formulées dans leur déclaration d'opposition : voir John Labatt Limited c The Molson Companies Limited, 30 CPR (3d) 293, p. 298 (CF 1re inst). Le fait qu'un fardeau de preuve initial soit imposé aux opposantes signifie que pour qu'une question soulevée par les opposantes soit prise en considération, il doit exister une preuve suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de cette question. La requérante doit, quant à elle, s'acquitter du fardeau ultime de démontrer que sa demande ne contrevient pas aux dispositions de la Loi sur les marques de commerce contrairement à ce qu'allèguent les opposantes dans leur déclaration d'opposition (mais uniquement à l'égard des allégations relativement auxquelles les opposantes se sont acquittées de leur fardeau de preuve initial). Le fait que le fardeau ultime incombe à la requérante signifie que s’il est impossible de parvenir à une conclusion déterminante une fois que toute la preuve a été présentée, la question doit être tranchée à l’encontre de la requérante.

Examen des motifs d'opposition

Article 30a)

[32]      La date pertinente qui s'applique à l'article 30 est la date de production de la demande, soit, en l'espèce, le 27 juillet 2010. Au paragraphe 9 de leur plaidoyer écrit, les opposantes soutiennent que [traduction] « Le Manuel des marchandises et des services de l'OPIC ne contient aucune entrée pour le terme ‘paneer’ » et que, par conséquent, la requérante n'a pas décrit ses produits avec suffisamment de précision. Je ne souscris pas à la conclusion des opposantes. Le fait qu'un produit figure ou ne figure pas dans le Manuel ne détermine pas la conformité à l'article 30a). La preuve au dossier indique que la requérante a décrit son produit dans les termes ordinaires du commerce et d'une façon suffisamment précise. En conséquence, le premier motif d'opposition est rejeté.

Article 30b)

[33]      En ce qui concerne le premier volet du motif d'opposition fondé sur l'article 30b) (voir le point 1 du para. 9, ci-dessus), les opposantes, dans leur plaidoyer écrit, s'appuient sur les [traduction] « incohérences et imprécisions » relevées dans l'affidavit de M. Pabla pour affirmer que la requérante n'a pas établi l'existence d'un contrat de licence entre la requérante et Ontario Impex of Canada Inc. Les opposantes concluent, par conséquent, que la requérante n'a pas établi que l'emploi de la marque visée par la demande par Impex bénéficie à la requérante. Je ne souscris pas à la conclusion des opposantes. Il est vrai que la preuve de la requérante concernant la licence aurait pu être plus substantielle, mais en l'absence d'un contre-interrogatoire, je ne vois aucune raison qui justifierait d'écarter le témoignage par affidavit de M. Pabla en ce qui concerne l'existence d'un contrat de licence avec Impex. En conséquence, le premier volet de ce motif d'opposition est rejeté.

[34]      Dans leur plaidoyer écrit, les opposantes ne font aucune observation au sujet du second volet qui est fondé sur la prémisse voulant que les mots MALI et PANEER ne puissent pas servir de marque de commerce parce qu'ils constituent un terme descriptif pour « fromage à la crème » qui est employé par divers tiers et par les opposantes [traduction] « pour décrire les mêmes produits ». Comme je l'ai mentionné précédemment, la preuve au dossier ne corrobore pas l'allégation des opposantes voulant que MALI PANEER soit un terme descriptif pour « fromage à la crème » et que ce terme soit employé au Canada par des tiers ou par les opposantes. Le second volet de ce motif d'opposition est donc rejeté également.

Article 30i)

[35]      Les opposantes allèguent que la requérante ne pouvait pas être convaincue d'avoir droit d'employer la marque visée par la demande parce que la requérante savait ou devait forcément savoir que la marque est un terme descriptif et générique couramment employé dans l'industrie du fromage. Or, il existe une longue liste d'affaires d'opposition indiquant qu'un opposant qui soulève un motif d'opposition fondé sur l'article 30i) doit absolument alléguer l'existence de circonstances exceptionnelles telles que la mauvaise foi ou la non-conformité à une loi fédérale. Le fait qu'un requérant sache ou ait connaissance que la marque dont il demande l'enregistrement est possiblement un terme descriptif ou générique ne peut pas servir de fondement à ce motif d'opposition. J'estime que les allégations formulées en l'espèce n'appuient pas un motif d'opposition fondé sur l'article 30i) et, conséquemment, ce motif est rejeté.

Article 12(1)b)

[36]      Les opposantes allèguent que la marque visée par la demande n'est pas enregistrable, parce que les caractéristiques dominantes de la marque sont les mots MALAI PANEER, lesquels donnent une description claire ou une description fausse et trompeuse des produits de la requérante. La requérante a présenté ses observations sur cette question à la Section de l'examen, lesquelles sont reproduites au para. 15 ci-dessus, et adopte la même position dans la présente procédure, au para. 118 de son plaidoyer écrit, lequel est ainsi formulé :

[traduction]
. . . L'article 12(1)b) interdit seulement l'enregistrement des marques qui donnent une description claire ou une description fausse et trompeuse en anglais ou en français. Non seulement l'Opposante n'a pas établi que la Marque de commerce est un terme de la langue anglaise ou de la langue française, elle a adopté la position contraire en présentant une preuve selon laquelle MALAI est un terme indien. Par conséquent, la Requérante soutient respectueusement que ce motif d'opposition est dépourvu de fondement et qu'il devrait être rejeté.

[37]      Je souscris aux observations de la requérante et, conséquemment, je rejette ce motif d'opposition.

Article 2

[38]      Les opposantes allèguent que la marque visée par la demande n'est pas distinctive, parce que le terme MALAI PANEER i) est un terme générique et descriptif et ii) les opposantes et d'autres entités de l'industrie emploient le terme MALAI PANEER en liaison du fromage. À mon sens, les opposantes ne se sont pas acquittées du fardeau de preuve qui leur incombait, dans la présente juridiction, d'établir que l'une ou l'autre de ces prémisses est exacte quant aux faits. En conséquence, ce motif est rejeté.

Décision

[39]      Étant donné que chacun des motifs d'opposition a été rejeté, l'opposition est, elle aussi, rejetée. La présente décision est rendue dans l'exercice des pouvoirs qui m'ont été délégués par le registraire des marques de commerce en vertu des dispositions de l'article 63(3) de la Loi sur les marques de commerce.

[40]      J'ajouterai que, même si un motif fondé sur l'article 12(1)c) avait été soulevé, il n'est pas certain que les opposantes auraient obtenu gain de cause sur la base de ce motif. À cet égard, les opposantes ont adopté la position voulant que MALAI PANEER signifie « fromage à la crème » en pendjabi. Or, comme je l'ai mentionné précédemment, j'ai conclu que le poids de la preuve corrobore la prétention de la requérante selon laquelle son produit n'est pas, au sens commercial ordinaire, un fromage à la crème.

__________________

Myer Herzig, membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Judith Lemire, trad.


 

Annexe 1

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