Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

AFFAIRE INTÉRESSANT L’OPPOSITION d’Aliments Jivan Inc./Jivan Foods Inc. à la demande no 1,070,395 en vue de l’enregistrement de la marque de commerce KISS THE COOK au nom de Summer Kitchen Fine Foods Inc.

 

 

Le 9 août 2000, Summer Kitchen Fine Foods Inc. (la requérante) a produit une demande pour faire enregistrer la marque de commerce KISS THE COOK (la marque). La demande se fonde sur l’emploi de la marque au Canada en liaison avec des produits alimentaires, nommément des sauces, depuis au moins janvier 1998. Elle a par la suite été modifiée pour se fonder sur l’emploi de la marque au Canada en liaison avec des produits alimentaires, nommément des sauces pour cuisson et grillades, depuis au moins mai 1998. Le droit à l’usage exclusif du mot « COOK » en dehors de la marque de commerce n’est pas accordé.

 

Aux fins de toute opposition éventuelle, la demande a été annoncée dans le Journal des marques de commerce le 26 septembre 2001.

 

L’opposante, Aliments Jivan Inc./Jivan Foods Inc., a produit une déclaration d’opposition le 26 février 2002. La requérante a produit et signifié une contre-déclaration.

 

La preuve de l’opposante consiste en la déclaration de Harry I. Ghosh. La requérante a obtenu une ordonnance l’autorisant à contre‑interroger ce dernier, mais le contre‑interrogatoire n’a pas eu lieu.

 

La preuve de la requérante consiste en l’affidavit de Mary Fabiano.

 

Aucune partie n’a produit de plaidoyer écrit. Aucune audience n’a été demandée.

 

Fardeau de la preuve

Il incombe à la requérante d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme à la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T‑13 (la Loi). Il appartient toutefois à l’opposante de produire d’abord une preuve suffisante pour établir la véracité des faits sur lesquels s’appuie chacun de ses motifs d’opposition [voir John Labatt Ltd c. Molson Companies Ltd. (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.), p. 298; Dion Neckwear Ltd. c. Christian Dior, S.A. et autres (2002), 20 C.P.R. (4th) 155 (C.A.F.)].

 

Résumé de la preuve de l’opposante

M. Ghosh est dirigeant et associé directeur général de l’opposante depuis sa constitution en personne morale, en 1999. Il décrit le commerce de l’opposante comme étant l’élaboration, la fabrication et la mise en marché de plats gastronomiques préparés délicieux et nourrissants.

 

En 1999, l’opposante a reçu une aide à la valorisation de marque d’un organisme du gouvernement du Québec, aide qui a donné lieu à l’adoption du dessin-marque KISS THE COOK (ci‑après appelé la marque de l’opposante), reproduit ci‑dessous :

Le 16 octobre 1999, l’opposante a livré des échantillons de sa sauce pour pâtes portant la marque de l’opposante à certaines entreprises. Elle a enregistré ses premières ventes le 22 octobre 1999.

 

Du 4 au 7 novembre 1999, l’opposante a présenté sa sauce pour pâtes en liaison avec la marque de l’opposante, dans une exposition, à Montréal.

 

En avril 2000, l’opposante a élargi sa gamme de produits pour y inclure des caris.

 

M. Ghosh affirme que, rapidement, les ventes de l’opposante ont crû et sa gamme de produits s’est étendue en 2000, année où l’opposante a vendu 21 600 bocaux de produits en liaison avec sa marque et a ainsi atteint un chiffre de ventes d’environ 180 000 $. En 2000, 114 magasins, au Canada, tenaient les produits de l’opposante. Les magasins en question étaient des magasins d’alimentation spécialisée et des épiceries.

 

Outre la promotion dans divers salons et expositions, l’opposante a fait la promotion de ses marchandises dans les épiceries Provigo et Métro et dans le magasin Health Tree Natural Foods à Montréal, dans les épiceries Sobeys, dans les provinces de l’Atlantique, de même qu’à l’épicerie fine Pusateri’s et les magasins Whole Foods Market, à Toronto. L’opposante a affecté au moins 59 000 $ à la promotion de la marque de l’opposante depuis sa fondation.

 

En 2000, l’opposante a lancé son site Internet, www.kissthecook.ca; dès octobre 2002, elle comptait 300 abonnés sur sa liste de diffusion.

 

En 2000 et 2001, cinq magazines/journaux ont fait un reportage sur les produits de l’opposante. Aucune donnée concernant la diffusion n’a été fournie, mais je peux prendre connaissance d’office que le numéro du 29 mars 2001 de La Presse, où a paru le reportage, aurait reçu un tirage relativement imposant [voir Northern Telecom Ltd. c. Nortel Communications Inc. (1987), 15 C.P.R. (3d) 540 (C.O.M.C.)].

 

En 2002, l’opposante a retenu les services d’un second distributeur national et, en septembre 2002, ses produits étaient vendus dans 227 magasins. En juillet 2002, elle effectuait sa première vente aux États‑Unis. En 2002, à la fin d’octobre, l’opposante avait vendu 25 800 bocaux de produits en liaison avec le dessin‑marque KISS THE COOK, représentant une valeur au détail d’environ 216 000 $.

 

L’opposante a demandé à enregistrer la marque de l’opposante le 17 novembre 1999. Elle ne connaissait pas la marque de commerce de la requérante jusqu’à ce qu’elle soit invoquée, le 12 septembre 2000, contre la demande d’enregistrement de la marque de l’opposante.

 

Résumé de la preuve de la requérante

Mme Fabiano, présidente de la requérante, est responsable des produits de cette dernière, y compris les sauces KISS THE COOK, depuis la constitution de la requérante en personne morale, en 1996.

 

La requérante a élaboré ses étiquettes KISS THE COOK etc., en 1998. On peut lire sur les étiquettes des sauces KISS THE COOK [traduction] « Avec ou sans cuisson, elle fait de vos légumes de tous les jours, vos sautés, vos viandes et fruits de mer grillés des mets exquis ».

 

La requérante a réalisé sa première vente le 6 mai 1998, et les ventes brutes pour cette année‑là se sont chiffrées à 2 191 $. Les ventes enregistrées dans les années ultérieures sont les suivantes : 1999 – 3 081 $; 2000 – 1 740 $; 2001 – 7 342 $; 2002 – 1 867 $. Les ventes totales réalisées entre le 6 mai 1998 et le 30 avril 2003 se chiffrent à 16 638 $.

 

Mme Fabiano affirme que la requérante vend ses produits par l’intermédiaire de détaillants au Canada, notamment Beautiful Gifts, All The Best Breads, Holt Renfrew, Bloor Meat Market, William Ashley Limited, Worldwide Specialty Foods Inc., Pusateri’s, Blackbird Catering, Elora General Store, Broadway Farm Market, Jubilee Fruit Market et Flowers by Amber. La majorité des détaillants qui offrent les produits de la requérante sont situés en Ontario.

 

La requérante fait la promotion de ses produits, y compris ses sauces KISS THE COOK, dans divers salons, notamment l’Ontario Garden Show, le Bayview Support Network Christmas Show and Sale, le Cabbagetown Arts & Craft Show, le One of a Kind Show and Sale, le Canadian Gift & Tableware Association Show et le Canadian Fine Food Show, qui, semble‑t‑il, ont tous lieu en Ontario.

 

La requérante a dépensé 27 797 $ à la promotion de ses produits, y compris ses sauces KISS THE COOK, mais on ne saurait dire quelle part de cette somme a été affectée à la promotion de la marque de la requérante.

 

La requérante a acheté le nom de domaine www.summer-kitchen.com en 2000 et des pages de ce site datées du 28 juillet 2003 ont été fournies. Ces pages renferment des publicités sur les sauces KISS THE COOK et offrent ces produits en vente. Aucune donnée sur le nombre de Canadiens qui fréquentent ce site Web n’a toutefois été fournie.

 

Des articles non commandés sur les sauces KISS THE COOK de la requérante ont paru dans des magazines, notamment le numéro de juillet-août 2000 de Style at Home, Canada’s Decorating Magazine et le numéro de l’été 2001 de À bon verre, bonne table, de la Régie des alcools de l’Ontario (aucune donnée sur le tirage n’a été fournie).

 

Motifs d’opposition fondés sur l’article 30

L’opposante a fait valoir quatre motifs d’opposition fondés sur l’article 30 de la Loi. La date pertinente pour ce qui est de l’article 30 est la date de dépôt de la demande [voir Georgia-Pacific Corp. c. Scott Paper Ltd., 3 C.P.R. (3d) 469, p. 475].

 

Il incombe à la requérante de montrer que sa demande est conforme à l’article 30 et, pour ce faire, la preuve doit porter à la fois sur la question de savoir si la requérante a bien déposé une demande conforme aux exigences de l’article 30 et si les indications données dans la demande sont exactes. Dans la mesure où l’opposante se fonde sur des allégations de fait à l’appui des motifs prévus par l’article 30, il appartient à l’opposante d’établir le bien-fondé de ces allégations [Joseph E. Seagram & Sons Ltd. et autres c. Seagram Real Estate Ltd. (1984), 3 C.P.R. (3d) 325 (C.O.M.C.), conf. 33 C.P.R. (3d) 454].

 

Alinéa 30a)

L’opposante a soutenu que la demande n’est pas conforme à l’alinéa 30a), car la requérante n’a pas fourni un état, dressé dans les termes ordinaires du commerce, des marchandises spécifiques en liaison avec lesquelles elle allègue avoir employé la marque de commerce en ce sens que l’expression « sauces pour cuisson » est floue et trop générique.

 

L’opposante n’a produit aucune preuve ni aucun argument pour s’acquitter de la charge qui lui incombait de prouver que l’état des marchandises n’est pas dressé dans les termes ordinaires du commerce. Ce motif d’opposition est donc rejeté.

 

Alinéa 30b)

L’opposante a fait valoir que la demande n’est pas conforme à l’alinéa 30b), car la requérante n’a pas employé la marque de commerce au Canada en liaison avec chacune des catégories générales de marchandises, c’est‑à‑dire les « sauces pour cuisson » et les « sauces pour grillades », depuis la date alléguée de premier emploi ou en a abandonné l’emploi.

 

En ce qui concerne le motif fondé sur l’alinéa 30b), l’opposante peut s’acquitter de son fardeau initial en renvoyant non seulement à sa propre preuve, mais aussi à celle de la requérante [voir Brasserie Labatt Limitée c. Brasseries Molson, société en nom collectif (1996), 68 C.P.R. (3d) 216 (C.F. 1re inst.), p. 230]. Toutefois, si l’opposante peut invoquer les éléments de preuve de la requérante pour s’acquitter du fardeau de preuve qui lui incombe à l’égard de ce motif, elle doit par contre démontrer que la preuve de la requérante est « manifestement » incompatible avec les allégations exposées dans sa demande.

 

En l’espèce, l’opposante n’a produit aucune preuve à l’appui du motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30b). En outre, la preuve de Mme Fabiano étaye la date de premier emploi qu’allègue la requérante.

 

Pour ce qui est de l’allusion de l’opposante voulant qu’il y ait deux catégories générales de marchandises, je constate que la requérante a au départ demandé à faire enregistrer sa marque de commerce seulement pour des produits alimentaires, nommément des sauces, et ce n’est que plus tard qu’elle a défini davantage ses marchandises comme étant des produits alimentaires, nommément des sauces pour cuisson et grillades. À cet égard, je note que le produit que la requérante vend peut effectivement être utilisé pour la cuisson et les grillades.

 

Le motif fondé sur l’alinéa 30b) est rejeté parce que l’opposante ne s’est pas acquittée de la charge de preuve qui lui incombait initialement.

 

Alinéa 30i)

L’opposante a fait valoir que la demande n’est pas conforme avec l’alinéa 30i) du fait que la requérante ne pouvait être convaincue qu’elle était autorisée à employer la marque de commerce au Canada en liaison avec les marchandises décrites dans la demande compte tenu des faits exposés aux présentes.

 

Je ne vois pas comment les faits exposés dans la déclaration d’opposition pourraient empêcher la requérante de faire la déclaration requise par l’alinéa 30i). Lorsqu’un requérant a fourni la déclaration visée à l’alinéa 30i), le motif d’opposition fondé sur cet alinéa échouera la plupart du temps, sauf dans des cas exceptionnels, par exemple lorsqu’il y a mauvaise foi de la part du requérant [voir Sapodilla Co. Ltd. c. Bristol-Myers Co. (1974), 15 C.P.R. (2d) 152 (C.O.M.C.), p. 155.]

 

Le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30i) est donc rejeté.

 

Motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif

L’opposante a avancé les arguments suivants :

[traduction] Les mots KISS THE COOK servant de marque visés par la demande ne sont pas distinctifs de la requérante, comme le veut l’article 2 de la Loi, parce qu’ils ne distinguent pas véritablement les marchandises de la requérante – et ne sont pas adaptés à le faire – des marchandises que l’opposante vend en liaison avec le dessin‑marque KISS THE COOK comme l’expose le paragraphe 3 des présentes. Dans la mesure où il y a eu emploi continu d’une marque de commerce semblable alléguée par la requérante – fait nié en l’occurrence –, il se serait agi d’un dessin‑marque qui n’aurait pas créé de confusion avec le dessin‑marque distinctif KISS THE COOK de l’opposante. En outre, les mots servant de marque visés par la demande ne sont pas distinctifs de la requérante à la lumière du défaut d’emploi et de l’abandon de sa marque et à la lumière du caractère distinctif qu’a acquis le dessin‑marque KISS THE COOK de l’opposante en raison de son emploi soutenu sur le marché.

 

Le paragraphe 3 susmentionné est ainsi rédigé :

[traduction] L’opposante a employé le dessin‑marque KISS THE COOK au Canada, de façon continue jusqu’à ce jour, depuis au moins le 15 octobre 1999 en liaison avec les marchandises suivantes : mets cuisinés, nommément des repas, des sauces, des soupes, des pâtés en croûte, des saucisses, où la viande est remplacée par des protéines végétales texturées, notamment des produits gastronomiques novateurs à base de protéines de soja; d’autres aliments et condiments fins, prêts à servir ou faciles à préparer; des produits alimentaires déshydratés et emballés faciles à préparer; aliments pour services alimentaires d’établissement et industrie de la restauration.

 

J’ai eu du mal à comprendre l’argument ci-dessus, et je suis venue à la conclusion que l’opposante fait valoir que les mots KISS THE COOK servant de marque ne sont pas distinctifs parce qu’ils créent de la confusion avec le dessin‑marque KISS THE COOK de l’opposante. Cependant, cette dernière affirme aussi que tout dessin‑marque KISS THE COOK que la requérante peut prétendre avoir employé ne crée pas de confusion avec le dessin‑marque KISS THE COOK de l’opposante, sans doute parce que la partie dessin permettrait de faire la distinction entre les deux dessins‑marques KISS THE COOK. Je présume que l’opposante avance cet argument alambiqué en réponse au fait que la date de premier emploi alléguée par la requérante est antérieure à celle de l’opposante; celle‑ci tente vraisemblablement d’éviter d’admettre que sa marque de commerce crée de la confusion avec une marque qui était déjà employée. Peu importe la raison de cette forme d’argument, j’estime qu’il faudrait une situation de fait extraordinaire (comme, par exemple, une preuve concernant l’état du marché établissant que de nombreuses parties emploient la marque KISS THE COOK) pour qu’un dessin‑marque KISS THE COOK ne crée pas de confusion avec un autre dessin‑marque KISS THE COOK si les deux sont employés en liaison avec des aliments prêts à servir.

 

Je constate que la requérante emploie en liaison avec sa marque un dessin où paraissent deux têtes arborant la toque. Un tel dessin ne crée pas de confusion avec la partie dessin de la marque de l’opposante, mais telle n’est pas la question dans la présente instance.

 

L’opposant s’acquitte de la charge de preuve qui lui incombe pour ce qui est du motif fondé sur le caractère distinctif s’il montre, à la date de production de la déclaration d’opposition, que sa marque de commerce est devenue connue au point d’annihiler le caractère distinctif de la marque visée par la demande [Motel 6, Inc. c. No. 6 Motel Ltd. (1981), 56 C.P.R. (2d) 44 (C.F. 1re inst.), p. 58; Andres Wines Ltd. et E. & J. Gallo Winery (1975), 25 C.P.R. (2d) 126 (C.A.F.), p. 130; Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 412 (C.A.F.), p. 424]. Toutefois, comme en l’occurrence c’est elle qui est le nouvel utilisateur, l’opposante ne peut invoquer que l’emploi ou la promotion qu’elle a fait de sa marque de commerce avant d’apprendre l’existence de la marque antérieure. Le juge Shore a analysé ainsi la situation, dans les décisions George Weston Ltd. c. Humpty Dumpty Foods Ltd. (1989), 24 C.P.R. (3d) 454 (C.F. 1re inst.) et Kimberly-Clark of Canada Ltd. c. Molnlycke AB (1982), 61 C.P.R. (2d) 42 (C.F. 1re inst.), au paragraphe 37 de sa décision, dans l’affaire Remo Imports Ltd. c. Jaguar Cars Ltd. (2006), 47 C.P.R. (4th) 1 (C.F. 1re inst.) [2007 CAF 258] :

Dans Humpty Dumpty, le juge Martin a conclu que la Commission des oppositions des marques de commerce n’aurait pas dû tenir compte de l’emploi que la demanderesse (le nouvel utilisateur) avait fait de sa marque après que la demande pendante de l’opposante (ancien utilisateur) concernant la même marque avait été invoquée à l’encontre de la demande d’emploi projeté du nouvel utilisateur, y compris l’emploi fait par ce dernier avant la date pertinente pour l’examen du motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif (c’est-à-dire la date de production de l’opposition) :

 

[...] je tiens à ajouter que j’accueillerais aussi l’appel pour le motif que le président n’aurait pas dû accepter la preuve [du nouvel utilisateur] relativement à l’utilisation de la marque de commerce projetée après que [le nouvel utilisateur] eut reçu l’avis que lui a fait parvenir le Bureau des marques de commerce le 10 mai 1985. On précisait dans cet avis que la marque de commerce de l’intimée ne pourrait vraisemblablement être enregistrée vu l’antériorité de la demande de [l’ancien utilisateur] et la possibilité de confusion avec la marque de [ce dernier].

 

Dans Molnlycke [226] [la Cour a décidé ce qui suit] :

 

L’erreur évidente qui consiste à considérer la date pertinente de l’examen des droits entre les parties comme la date de la procédure d’opposition plutôt que la date du dépôt de l’opposition modifierait les circonstances dans l’intervalle et renforcerait la position de l’une des parties. [Non souligné dans l’original.]

 

 

En l’espèce, [le nouvel utilisateur] a appris que sa demande ne serait vraisemblablement pas acceptée vu la confusion apparente avec la marque de commerce que [l’ancien utilisateur] souhaitait faire enregistrer. [Le nouvel utilisateur] a alors voulu raffermir sa position en soumettant des éléments de preuve visant à fonder sur l’usage le caractère prépondérant de sa demande. Compte tenu de la décision de la Cour dans l’arrêt Molnlycke, il s’agit là de circonstances qui n’auraient pas dû être prises en considération. Pour cette même raison, j’estime que la preuve des activités qu’a poursuivies [le nouvel utilisateur] après le 10 mai 1985 n’aurait pas dû être prise en considération par le président.

 

[Voir aussi Courtyard Restaurant Inc. c. Marriott Worldwide Corp., 2006 CarswellNat 5371 (C.O.M.C.).]

 

En l’espèce, puisque M. Ghosh affirme que l’opposante a été mise au courant de la marque de la requérante le 12 septembre 2000, je dois déterminer si la marque de l’opposante était devenue assez connue à cette date pour annihiler le caractère distinctif de la marque à la date pertinente. La preuve de M. Ghosh se rapportant à la période précédant le 12 septembre 2000 se résume ainsi :

         Le 16 octobre 1999, 12 bocaux de sauce pour pâtes portant le dessin KISS THE COOK sont livrés à une entreprise de fabrication/distribution à Dorval (Québec) dans l’intention d’établir un commerce d’exportation outremer vers Taïwan.

         Le 16 octobre 1999, un bocal de sauce pour pâtes portant le dessin KISS THE COOK est livré chez un détaillant d’aliments fins haut de gamme à Montréal; à ce premier bocal s’est ajouté un second le 21 octobre; le 22 octobre 1999, ce détaillant a acheté 60 bocaux à l’opposante.

         Le 22 octobre 1999, 12 bocaux sont vendus aux Saveurs d’ici, puis 12 autres bocaux le 15 décembre 1999.

         Du 4 au 7 novembre 1999, l’opposante fait la promotion de sa sauce pour pâtes étiquetée KISS THE COOK au Salon de la gastronomie de Montréal, un salon destiné au grand public; elle y vend 102 bocaux.

         Le 5 novembre 1999, l’opposante expédie quatre bocaux à Elco Fine Foods Inc., le plus grand distributeur d’aliments spécialisés du Canada.

         Le 19 novembre 1999, 24 bocaux sont vendus au Marché Mont Casino.

         Le 7 janvier 2000, 600 bocaux de sauce pour pâtes arborant le dessin KISS THE COOK sont vendus à Elco Fine Foods Inc.

         Le 18 janvier 2000, trois caisses (?) de sauce pour pâtes portant le dessin KISS THE COOK sont vendues à Fleur Sauvage.

         En février 2000, l’opposante fait la promotion de sa sauce pour pâtes portant le dessin KISS THE COOK au salon professionnel Rendez-vous, à Montréal.

         Les 17 et 18 mars 2000, l’opposante fait la promotion de ses produits portant le dessin KISS THE COOK dans une épicerie Provigo, à Montréal.

         Le 21 mars 2000, 24 bocaux de sauce pour pâtes portant le dessin KISS THE COOK sont vendus au Marché Mont Casino.

         Le 14 avril 2000, 600 bocaux de cari portant le dessin KISS THE COOK sont vendus à Elco Fine Foods Inc.

         Le 18 avril 2000, l’opposante fait la promotion de ses produits portant le dessin KISS THE COOK au salon Gourmet International, à Montréal.

         Du 19 au 22 avril 2000, l’opposante fait la promotion de ses produits portant le dessin KISS THE COOK chez l’épicier Pusateri’s, à Toronto.

         Le 30 avril et les 1er et 2 mai 2000, l’opposante fait la promotion de ses produits portant le dessin KISS THE COOK au Canadian Fine Food Show, à Toronto.

         Le 9 mai 2000, 2 bocaux (caisses?) sont vendus à Fleur Sauvage.

         Du 4 au 20 août 2000, l’opposante fait la promotion de ses produits portant le dessin KISS THE COOK aux Fêtes gourmandes internationales de Montréal, où elle vend 92 bocaux.

         Du 16 août au 31 mai 2000, l’opposante a diffusé un nombre inconnu de circulaires par courriel.

 

Je conclus, sur la foi de ce qui précède, que l’opposante s’est acquittée de son fardeau initial, principalement grâce à la promotion de ses produits portant le dessin KISS THE COOK à Montréal. Je conclus en outre que les mots KISS THE COOK servant de marque à la requérante n’étaient pas adaptés à distinguer la source de ses sauces pour cuisson et grillades de la source des sauces pour pâtes de marque KISS THE COOK, à Montréal, en date du 26 février 2002. Bien que la marque de la requérante puisse être distinctive de ses marchandises dans certaines parties du Canada, la demande d’enregistrement de cette dernière doit être rejetée si la marque visée n’est pas distinctive ou n’est pas adaptée pour l’être partout au Canada. Le motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif est donc accueilli.

 

J’ai constaté que la requérante a réalisé des ventes de sauces KISS THE COOK dans la région de Montréal se chiffrant à au moins 72 $, 39 $ et 39 $ en 1999, 2000 et 2001 respectivement, mais cela ne change en rien l’issue de l’affaire pour ce qui est du caractère distinctif.

 

Décision

En vertu des pouvoirs qui m’ont été délégués par le registraire des marques de commerce en application du paragraphe 63(3) de la Loi, je rejette la demande aux termes du paragraphe 38(8).

 

 

FAIT À TORONTO (ONTARIO), CE 29e JOUR D’AOÛT 2007.

 

 

Jill W. Bradbury

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

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