Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

                                                                    THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2014 COMC 47

Date de la décision : 2014-03-05 
TRADUCTION

 

 

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION produite par la Corporation de Développement du Commensal II à l'encontre de la demande d'enregistrement no 1,485,751 pour la marque de commerce COMENSOLI GLUTEN FREE PASTA & Dessin au nom de Comensoli Holdings Inc.

 

[1]               La Corporation de Développement du Commensal II (l'Opposante) s'oppose à l'enregistrement de la marque de commerce COMENSOLI GLUTEN FREE PASTA & Dessin (reproduite ci-dessous) (la Marque) visée par la demande d'enregistrement no 1,485,751 de Comensoli Holdings Inc. (la Requérante).

[2]               La demande a été produite le 18 juin 2010 et est fondée sur un emploi projeté de la Marque au Canada en liaison avec les marchandises [TRADUCTION] « pâtes alimentaires ». La demande comprend la revendication de couleur suivante :

[TRADUCTION]
La couleur est revendiquée comme caractéristique de la marque de commerce. La bande inférieure de l'ovale est verte et le mot PASTA qui y apparaît est blanc. La bande horizontale qui s'étend au centre de l'ovale est noire. Le mot COMENSOLI qui apparaît sur cette bande est blanc, tout comme les mots GLUTEN FREE qui se trouvent sur la bande supérieure de l'ovale. La bande supérieure de l'ovale est rouge. La partie centrale de l'ovale, qui est divisée en deux par la bande horizontale noire, est blanche. La bande inférieure de l'ovale est verte et le mot PASTA qui y apparaît est blanc. L'ovale est entouré d'une fine ligne blanche qui est brisée par la large bande noire de chaque côté de l'ovale.

[3]               L'Opposante allègue que la Marque n'est pas enregistrable aux termes de l'article 12(1)d) de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch. T-13 (la Loi), qu'elle n'est pas distinctive au sens de l'article 2 de la Loi et que la Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la Marque aux termes de l'article 16(3) de la Loi parce que la Marque crée de la confusion avec, entre autres, la marque de commerce déposée COMMENSAL de l'Opposante qui a été antérieurement employée par l'Opposante au Canada en liaison avec divers produits alimentaires et des services de restaurant. L'Opposante allègue, en outre, que la demande d'enregistrement pour la Marque n'est pas conforme aux exigences de l'article 30 de la Loi pour diverses raisons, l'une d'elles étant que la Requérante n'avait pas l'intention d'employer la Marque au Canada au moment où elle a produit sa demande d'enregistrement.

[4]               J'estime que la question déterminante en l'espèce est celle de savoir si la Marque crée de la confusion avec la marque de commerce COMMENSAL de l'Opposante telle qu'elle est enregistrée ou employée.

[5]               Pour les raisons exposées ci-dessous, j'ai conclu que l'opposition devait être rejetée.

Le dossier

[6]               La déclaration d'opposition a été produite par l'Opposante le 25 mars 2011, puis contestée par la Requérante par la voie d'une contre-déclaration.

[7]               Comme preuve, l'Opposante a produit l'affidavit de Pierre-Marc Tremblay, président et directeur général de Gestion Commensal S.E.C. (Gestion), souscrit le 4 novembre 2011. Gestion est une associée commanditée (« general partner ») qui représente la société en commandite Commensal S.E.C., laquelle est une licenciée de l'Opposante, et agit en son nom. L'Opposante a également produit des copies certifiées des enregistrements de marque de commerce nos 552036, 737835, 737834 et 352949, et de la demande en instance no 1371242 invoqués dans la déclaration d'opposition. Les détails relatifs à ces enregistrements et à cette demande sont présentés en annexe de la présente décision.

[8]               Au soutien de sa demande, la Requérante a produit l'affidavit de Valentina Jiew, assistante juridique au sein du cabinet représentant la Requérante, souscrit le 22 mai 2012.

[9]               Aucun des déposants n'a été contre-interrogé.

[10]           Seule la Requérante a produit un plaidoyer écrit. Initialement, les parties avaient toutes deux sollicité une audience, mais elles ont subséquemment retiré leur demande, de sorte que l'audience a été annulée.

Fardeau de preuve incombant à chacune des parties

[11]           L’Opposante a le fardeau de preuve initial d’établir les faits allégués à l’appui de chacun de ses motifs d’opposition. Une fois que l'Opposante s'est acquittée de ce fardeau initial, la Requérante doit s'acquitter du fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que la Marque est enregistrable [voir John Labatt Ltd c. Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re Inst.); et Dion Neckwear Ltd c. Christian Dior, SA et al (2002), 20 CPR (4th) 155 (CAF)].

Analyse des motifs d'opposition

Motif d'opposition fondé sur la non-enregistrabilité

[12]           L'Opposante allègue que la Marque n'est pas enregistrable eu égard aux dispositions de l'article 12(1)d) de la Loi en ce qu'elle crée de la confusion avec la marque nominale et/ou figurative COMMENSAL de l'Opposante qui est l'objet des quatre enregistrements susmentionnés.

[13]           J'ai exercé le pouvoir discrétionnaire du registraire et je confirme que ces enregistrements sont en règle à la date d'aujourd'hui, laquelle est la date pertinente qui s'applique à l'examen d'un motif fondé sur l'article 12(1)d) [voir Park Avenue Furniture Corp c.Wickers/Simmons Bedding Ltd (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)].

[14]           L'Opposante s'étant acquittée de son fardeau de preuve initial, il incombe à la Requérante de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu'il n'existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et les marques de commerce déposées de l'Opposante.

[15]           Sauf indication contraire, j'axerai mon analyse sur l'enregistrement no 737,834 de l'Opposante, car ce dernier constitue l'argument le plus solide de l'Opposante. Il va sans dire que si cette marque ne permet pas à l’Opposante d’obtenir gain de cause, les autres marques qu'elle a invoquées ne le lui permettront pas davantage.

Le test en matière de confusion

[16]           L'article 6(2) de la Loi porte que :

L'emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

[17]           Ainsi, l'article 6(2) ne concerne pas la confusion entre les marques elles-mêmes, mais sur la possibilité que des marchandises ou services provenant d’une source puissent être perçus comme provenant d’une autre source

[18]           Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. Comme l’a souligné le juge Denault dans Pernod Ricard c. Molson Breweries (1992), 44 CPR (3d) 359, à la page 369 :

[TRADUCTION]
Les marques de commerce doivent être examinées dans l'optique du consommateur moyen qui a un souvenir non pas précis, mais général de la marque précédente. Par conséquent, les marques ne doivent pas être disséquées ni soumises à une analyse microscopique dans le but d'en évaluer les similitudes et les différences. Elles doivent plutôt être envisagées dans leur globalité et évaluées en fonction de leur effet sur le consommateur moyen en général.

[19]           Lorsqu'il applique le test en matière de confusion, le Registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce, y compris celles expressément énoncées à l'article 6(5) de la Loi, à savoir a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de marchandises, services ou entreprises; d) la nature du commerce; et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Cette liste n’est pas exhaustive et tous les facteurs pertinents doivent être pris en considération. De plus, le poids qu’il convient d’accorder à chacun de ces facteurs n’est pas nécessairement le même et varie en fonction des circonstances [voir Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc., (2006), 49 CPR (4th) 321 (CSC); Veuve Clicquot Ponsardin c. Boutiques Cliquot Ltée (2006), 49 CPR (4th) 401 (CSC); et Masterpiece Inc c. Alavida Lifestyles Inc (2011), 92 CPR (4th) 361 (CSC) pour une analyse exhaustive des principes généraux régissent le test en matière de confusion.]

Examen des facteurs énoncés à l'article 6(5)

Le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues 

[20]           Les marques de commerce en cause sont toutes deux intrinsèquement distinctives, quoique peut-être un peu moins dans le cas de la marque de commerce de l'Opposante, étant donné son emploi dans le contexte des services de restaurant auxquels elle est associée. En effet, la marque de commerce de l'Opposante est formée du mot français COMMENSAL, qui est défini comme un terme d'usage littéraire désignant un compagnon de table : « Personne qui mange habituellement à la même table qu’une autre » [voir le Multidictionnaire de la langue française]. En revanche, le mot COMENSOLI qui constitue l'élément dominant de la Marque ne revêt aucune signification particulière en anglais ou en français.

[21]           Une marque de commerce peut acquérir une force accrue si elle devient connue par la promotion ou l'emploi. Rien n'indique que la Marque projetée de la Requérante ait été employée au Canada ou qu'elle soit devenue connue dans une quelconque mesure au Canada en liaison avec les marchandises visées par la demande. Bien que la Requérante indique dans son plaidoyer écrit que les ventes de ses marchandises « pâtes alimentaires » ont débuté [TRADUCTION] « approximativement en septembre 2012 », l'affidavit de Mme Jiew n'établit en aucune façon l'emploi de la Marque, au sens de l'article 4 de la Loi, en liaison avec ces marchandises.

[22]           L'affidavit de M. Tremblay, en revanche, démontre que la marque de commerce COMMENSAL de l'Opposante a été employée au Canada par l'Opposante et qu'elle est devenue connue dans une certaine mesure au moins, tel qu'il ressort de mon examen des points saillants de l'affidavit de M. Tremblay résumés ci-dessous.

L'affidavit de M. Tremblay

[23]           M. Tremblay commence par exposer le contexte dans lequel l'Opposante mène ses activités. Il affirme que l'Opposante fait figure de pionnière au Québec dans le domaine des services de restaurant et des mets préparés végétariens. Il explique que le premier restaurant COMMENSAL a ouvert ses portes en 1977 et que l'Opposante n'a depuis cessé d'évoluer en conjuguant avant-gardisme et art culinaire.

[24]           M. Tremblay affirme que l'Opposante exploite actuellement neuf restaurants COMMENSAL : huit dans la province de Québec et un en Ontario. Je souligne que la Requérante a mis en doute l'exactitude de cette affirmation. Dans son affidavit, Mme Jiew affirme que le ou vers le 18 mai 2012, elle a consulté le site Web de l'Opposante à l'adresse www.commensal.com. Elle a joint, comme Pièce VJ-6, des copies d'écran de ce site Web montrant les adresses de sept restaurants au Québec et d'un restaurant en Ontario. Je considère que cet écart quant au nombre de restaurants exploités au Québec ne porte pas à conséquence.

[25]           S'appuyant sur son expérience considérable et sur le succès que connaissaient ses services de restaurant, l'Opposante a lancé en 1991 une gamme de mets préparés commercialisés sous la marque de commerce COMMENSAL. M. Tremblay affirme que les produits alimentaires de l'Opposante sont vendus à différents services d'alimentation. Il affirme également que près de 41 différents mets préparés sont vendus sous la marque de commerce COMMENSAL dans quelque 990 points de vente au Québec ainsi que dans 130 points de vente en Ontario. Je reviendrai plus loin sur les catégories de produits alimentaires et de mets préparés vendus par l'Opposante, ainsi que sur ses voies de commercialisation dans mon analyse des facteurs énoncés aux articles 6(5)c) et d), soit le genre de marchandises et/ou de services, et la nature du commerce.

[26]           M. Tremblay aborde ensuite la question de l'emploi sous licence de la marque nominale COMMENSAL et de ses variantes, telles qu'elles figurent dans les enregistrements susmentionnés, (collectivement appelées les Marques COMMENSAL), par les licenciées de l'Opposante, y compris Commensal S.E.C. Il affirme, entre autres choses, que l'Opposante a concédé une licence à Commensal S.E.C. pour la production, la commercialisation et la distribution de produits alimentaires et de mets préparés destinés à la restauration (« catering ») et à la vente au détail. Cette licence confère à Commensal S.E.C. le droit d'employer les Marques COMMENSAL en liaison avec les marchandises et services décrits dans les enregistrements susmentionnés dans la pratique normale du commerce. M. Tremblay soutient que l'Opposante contrôle les caractéristiques et la qualité des marchandises et des services associés aux Marques COMMENSAL, ainsi que la façon dont ces marques sont employées et publicisées au Canada. Contrairement aux observations que la Requérante a formulées à ce sujet dans son plaidoyer écrit, ces déclarations de M. Tremblay sont suffisantes pour les besoins de l'article 50 de la Loi.

[27]           En effet, ce qui est exigé par l'article 50, c'est que « le propriétaire [...], aux termes de la licence, contrôle, directement ou indirectement, les caractéristiques ou la qualité des marchandises et services ». En l'espèce, il n'existe aucun élément de preuve permettant de croire que l'Opposante n'exerce pas, directement ou indirectement, de contrôle sur les caractéristiques ou la qualité des marchandises et services. Au contraire, M. Tremblay a expressément déclaré sous serment que l'Opposante exerce un contrôle direct et indirect sur les caractéristiques et la qualité des marchandises et des services vendus ou offerts en vente par Commensal S.E.C. dans le cadre de l'accord de licence, et ce témoignage n'a pas été mis en doute par la voie d'un contre-interrogatoire. Je n'ai aucune raison de ne pas accepter telles quelles les déclarations de M. Tremblay. Par conséquent, j'estime que l'emploi de la Marque par Commensal S.E.C. bénéficie à l'Opposante conformément aux dispositions de l'article 50 de la Loi.

[28]           M. Tremblay expose ensuite les chiffres de vente concernant les marchandises et services de l'Opposante commercialisés sous les Marques COMMENSAL pour les années 2001 à 2011. Ces ventes s'élèvent à plus de 118 millions de dollars. Aucune ventilation n'est toutefois fournie.

[29]           M. Tremblay expose également les dépenses relatives au marketing des marchandises et services de l'Opposante commercialisés sous les Marques COMMENSAL au cours des mêmes années, lesquelles s'élèvent à plus de 16 millions de dollars. Aucune ventilation n'est toutefois fournie.

[30]           À l'appui de ces affirmations concernant l'emploi et la promotion des Marques COMMENSAL, M. Tremblay a joint les pièces suivantes :

  • Pièce PMT-2 : photographies de l'enseigne extérieure de l'un des restaurants COMMENSAL de l'Opposante, laquelle, selon M. Tremblay, est représentative du type d'enseignes employées par l'Opposante.
  • Pièce PMT-3 : photographies d'emballages représentatifs utilisés pour certains des produits alimentaires de l'Opposante. M. Tremblay affirme que la marque de commerce COMMENSAL figure toujours sur l'emballage de tous les produits alimentaires de l'Opposante;
  • Pièce PMT-4 : une petite affiche exposée dans les épiceries et faisant la promotion des vinaigrettes COMMENSAL;
  • Pièce PMT-5 : affiches représentatives faisant la promotion des mêmes vinaigrettes ainsi que d'autres produits alimentaires COMMENSAL qui ont été distribuées dans divers points de vente, ainsi que des photographies des emballages de ces produits;
  • Pièce PMT-6 : exemples d'annonces publiées en 2009 dans le magazine canadien COUP DE POUCE , y compris des photos d'emballages utilisés pour certains des mets préparés de l'Opposante;
  • Pièce PMT-7 : extraits du site Web www.commensal.com de l'Opposante fournissant de l'information sur les marchandises et produits de l'Opposante.

[31]           J'ai constaté, lors de l'examen de ces diverses pièces, que certaines d'entre elles arborent une variante de la marque de commerce COMMENSAL & Dessin visée par l'enregistrement no 552036. Plus précisément, les mots NATURALLY BON – NATURALLY GOOD ont été supprimés. D'autres arborent la marque COMMENSAL Dessin visée par l'enregistrement no 737835 accompagnée des mots GOUTEZ LA VIE, figurant soit au-dessus soit au-dessous en caractères nettement plus petits, et d'un dessin de bonhomme-allumettes stylisé. J'estime qu'il n'est pas nécessaire, pour les besoins de mon analyse, que je détermine si l'emploi de ces variantes constitue un emploi des marques de commerce déposées COMMENSAL & Dessin et COMMENSAL Dessin respectivement. En effet, je suis convaincue que l'emploi de chacune de ces variantes équivaut à un emploi de la marque nominale COMMENSAL, laquelle constitue l'élément dominant des marques et constitue, comme je l'ai mentionné précédemment, l'argument le plus solide de l'Opposante.

[32]           Pour conclure relativement à ce premier facteur, je suis convaincue, à la suite d’une lecture objective de l'affidavit de M. Tremblay et des pièces qui l'accompagnent, que la marque de commerce COMMENSAL de l'Opposante a été employée au Canada et y est devenue connue au moins dans une certaine mesure, en particulier dans les provinces du Québec et de l'Ontario. Bien que M. Tremblay ne fournisse aucune ventilation annuelle des ventes et des dépenses de marketing relatives à chacune des marchandises et à chacun des services de l'Opposante, les photographies d'emballages fournies aux Pièces PMT-3, 5 et 6, combinées aux autres spécimens de documents publicitaires produits par M. Tremblay, apportent la preuve que divers types de mets préparés et de vinaigrettes sont commercialisés et vendus sous la marque au Canada. Les photographies de l'enseigne extérieure fournies à la Pièce PMT-2 constituent une preuve supplémentaire de l'exécution des services de restaurant de l'Opposante. J'estime qu'en conséquence, la force de la marque de commerce COMMENSAL de l'Opposante s'en trouve accrue.

[33]           En somme, l'examen global de ce premier facteur, qui concerne à la fois le caractère distinctif inhérent et le caractère distinctif acquis, favorise l'Opposante.

La période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

[34]           Pour les raisons exposées précédemment, ce facteur favorise également l'Opposante. Bien que l'affidavit de M. Tremblay n'établisse pas nécessairement l'emploi de chacune des Marques COMMENSAL depuis les dates de premier emploi indiquées dans leur enregistrement respectif, je suis convaincue qu’à la suite d’une lecture objective de l'affidavit et des pièces qui l'accompagnent, on peut raisonnablement conclure que la marque nominale COMMENSAL est employée, de façon générale, en liaison avec les marchandises et les services de l'Opposante depuis passablement longtemps.

Le genre de marchandises, de services ou d'entreprises; et la nature du commerce

[35]           Pour évaluer le genre des marchandises et la nature du commerce, je dois comparer l’état déclaratif des marchandises figurant dans la demande de la Requérante avec l’état déclaratif des marchandises figurant dans les enregistrements invoqués par l'Opposante [voir Henkel Kommanditgesellschaft Auf Aktien c. Super Dragon Import Export Inc (1986), 12 CPR (3d) 110 (CAF); et Mr Submarine Ltd c. Amandista Investments Ltd (1987), 19 CPR (3d) 3 (CAF)]. L’examen de ces états déclaratifs doit cependant être effectué dans l'optique de déterminer le genre probable d’entreprise ou de commerce envisagés par les parties, et non l’ensemble des commerces que le libellé est susceptible d’englober. À cet égard, une preuve de la nature véritable des commerces exercés par les parties est utile [voir McDonald's Corp c. Coffee Hut Stores Ltd (1996), 68 CPR (3d) 168 (CAF); Procter & Gamble Inc c. Hunter Packaging Ltd (1999), 2 CPR (4th) 266 (COMC); et American Optical Corp c. Alcon Pharmaceuticals Ltd (2000), 5 CPR (4th) 110 (COMC)].

[36]           La demande de la Requérante vise des « pâtes alimentaires » tandis que les enregistrements de l'Opposante visent, entre autres marchandises et services, des [TRADUCTION] « pâtes alimentaires » et des [TRADUCTION] « repas et entrées congelés, préparés et emballés composés principalement de pâtes alimentaires, riz, viande, poisson, volaille ou légumes ».

[37]           M. Tremblay explique dans son affidavit que les produits alimentaires et les mets préparés de l'Opposante comprennent, entre autres, les catégories de produits suivantes :

         solutions-repas (y compris mélanges de seitan et de tofu);

         plats principaux (y compris lasagne et chili);

         repas congelés en portion individuelle;

         soupes;

         tartinades;

         pizzas;

         vinaigrettes;

         desserts.

[38]           M. Tremblay explique également que ces produits alimentaires sont offerts en vente dans ses restaurants ainsi que dans des fruiteries, des magasins d'alimentation naturelle et dans les principales chaînes de supermarchés, telles que IGA, METRO et LOBLAWS. Je souligne que la Requérante semble mettre en doute l'exactitude de cette affirmation. Dans son affidavit, Mme Jiew affirme que le ou vers le 17 janvier 2012, elle a consulté les sites Web de ces trois chaînes de supermarchés et n'a obtenu aucun résultat de recherche pour les produits COMMENSAL [voir les Pièces VJ-4, VJ-5 et VJ-7]. Je ne suis pas prête à discréditer l'affirmation de M. Tremblay sur la base de ces simples résultats de recherche. Qu'il suffise de dire que rien n'indique que les sites Web consultés par Mme Jiew répertorient sans exception chacun des produits offerts en vente dans ces supermarchés.

[39]           S'appuyant sur la preuve présentée par l'intermédiaire de l'affidavit de Mme Jiew, la Requérante soutient que :

[TRADUCTION]
85. La presque totalité des marchandises de [l'Opposante] ne s'apparentent même pas de loin aux marchandises de la Requérante, à savoir des pâtes alimentaires sans gluten. Celles qui s'en rapprochent le plus sont, bien sûr, les marchandises décrites comme des repas et entrées congelés, préparés et emballés composés principalement de pâtes alimentaires, riz, viande, poisson, volaille ou légumes, et comme des produits alimentaires, nommément des pâtes alimentaires. L'Opposante n'est pas censée vendre de pâtes alimentaires sans gluten, et ses produits alimentaires à base de pâtes, si toutefois elle en vend, semblent prendre la forme de repas préemballés, à la différence des pâtes alimentaires exclusivement sans gluten destinées à la vente en gros de la Requérante.

[…]

87. […] Les marchandises ou les entreprises respectives de la Requérante et de l'Opposante sont d'un genre à ce point différent que la confusion entre les marques de commerce des parties est totalement improbable. Des repas végétariens préemballés prêts-à-servir et des pâtes alimentaires non cuites exclusivement sans gluten fabriquées dans un établissement exempt de gluten sont des marchandises carrément différentes. […] Bien que les marchandises de la Requérante et les marchandises de l'Opposante appartiennent à la même catégorie générale, soit celle des « produits alimentaires », il existe des différences évidentes entre des pâtes alimentaires non cuites exclusivement sans gluten qui ont été fabriquées dans un établissement totalement exempt de gluten et des repas végétariens préemballés précuisinés.

[40]           Bien que ces observations de la Requérante ne soient pas dépourvues de mérite, il n'en demeure pas moins que les marchandises visées par la demande de la Requérante ne sont pas limitées à des « pâtes alimentaires non cuites exclusivement sans gluten ». En d'autres termes, rien n'empêcherait la Requérante de fabriquer et de vendre un autre genre de pâtes alimentaires entrant dans la catégorie des marchandises « pâtes alimentaires » visée par sa demande.

[41]           À cet égard, il convient de souligner que la preuve produite aussi bien par la Requérante que par l'Opposante semble avoir pour but de démontrer que la Requérante fabrique et vend déjà sous la Marque d'autres produits alimentaires, tels qu'un mélange à muffins, un mélange à gaufres, un mélange à crêpes, des croûtes à pizza, etc. [Voir les copies d'écran extraites du site Web de la Requérante www.comensolifoods.com jointes comme Pièce PMT-8 à l'affidavit de M. Tremblay; et la déclaration non corroborée de Mme Jiew fondée sur l'information et la croyance selon lesquelles [TRADUCTION] « la Requérante est une entreprise établie à […] en Colombie-Britannique qui se spécialise dans la fabrication et la vente de produits alimentaires sans gluten de spécialité comprenant, mais sans s'y limiter, des muffins, des mélanges à muffins, des mélanges à crêpes et à gaufres, des croûtes à pizza, des pains, des carrés au chocolat, des mélanges à pâte et des pâtes alimentaires ».]

[42]           Aussi, bien que la Requérante insiste fortement sur le fait que ses pâtes alimentaires sont sans gluten et destinées à [TRADUCTION] « la communauté des consommateurs de produits sans gluten aux prises avec la maladie coeliaque ou une intolérance ou une sensibilité au gluten », cela n'a pas pour effet de distinguer les marchandises « pâtes alimentaires » visées par la demande des marchandises de l'Opposante. Je répète que l'état déclaratif des marchandises de la Requérante ne comporte aucune restriction de ce genre. Il en va de même pour les marchandises de l'Opposante qui pourraient très bien être exemptes de gluten. Le simple fait que Mme Jiew indique dans son affidavit qu'elle a passé en revue le site Web de l'Opposante et qu'aucun des produits de l'Opposante [TRADUCTION] « ne semble être sans gluten ou spécialement destiné à la communauté des consommateurs de produits sans gluten » ne permet pas de conclure que l'Opposante n'offre aucun produit sans gluten ou ne pourrait pas offrir de produits sans gluten à l'avenir. J'ajouterai que la preuve de la Requérante concernant ce marché de niche sans gluten est loin d'être convaincante.

[43]           En effet, l'essentiel du témoignage de Mme Jiew est fondé sur des renseignements et des croyances et relève, par conséquent, du ouï-dire. Comme il est indiqué précédemment, Mme Jiew travaille comme assistante juridique au sein du cabinet représentant la Requérante. Elle décrit brièvement l'entreprise de la Requérante sur la base de renseignements et de croyances, sans faire référence à quelque pièce justificative que ce soit. Mme Jiew a produit une série d'articles tirés d'Internet censés décrire la maladie cœliaque et l'intolérance au gluten. Toutefois, aucune de ces copies d'articles n'établit la véracité de son contenu. Mme Jiew a également joint, comme Pièce VJ-8, une photographie prise dans un supermarché « Real Canadian Superstore » de Colombie-Britannique qu'elle a visité le ou vers le 21 janvier 2012. La photographie est censée montrer la section sans gluten du magasin. Or, le fait que cette section soit séparée et distincte du reste du magasin et soit censée contenir uniquement des produits sans gluten n'empêche pas que d'autres produits exempts de gluten puissent être offerts en vente ailleurs dans le magasin. Qui plus est, le témoignage de Mme Jiew sur ce point indique plutôt que les marchandises des parties pourraient être vendues par des voies de commercialisation identiques ou similaires, à savoir des épiceries, et être destinées conséquemment à la même clientèle.

[44]           En somme, j'estime que l'examen global du genre de marchandises et/ou de services des parties et de leurs voies de commercialisation respectives favorise l'Opposante en raison du recoupement existant entre les marchandises et/ou services et entre les voies de commercialisation.

Le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'elles suggèrent

[45]           Comme l'a souligné la Cour suprême dans Masterpiece, précité, au paragraphe 49, « il arrive souvent que le degré de ressemblance soit le facteur susceptible d’avoir le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion, et ce même s’il est mentionné en dernier lieu [à l'article] 6(5) [...] si les marques ou les noms ne se ressemblent pas, il est peu probable que l’analyse amène à conclure à la probabilité de confusion même si les autres facteurs tendent fortement à indiquer le contraire.

[46]           En outre, comme je l'ai mentionné précédemment, il est bien établi dans la jurisprudence que la probabilité de confusion tient de la première impression et du souvenir imparfait. À cet égard, [TRADUCTION] « bien que les marques de commerce doivent être évaluées dans leur ensemble, il demeure possible de s’attarder à des caractéristiques particulières susceptibles d’avoir une influence déterminante sur la perception du public » [Pink Panther Beauty Corp c. United Artists Corp (1998), 80 CPR (3d) 247 (CAF), para. 34]. L'approche à privilégier consiste à se demander d'abord si l'un des aspects de la marque de commerce est particulièrement frappant ou unique [voir Masterpiece, précité, au paragraphe 64].

[47]           M'appuyant sur ces principes, je conviens avec la Requérante qu'il existe des différences considérables entre les marques des parties et qu'il est facile de distinguer les marques l'une de l'autre. Les marques des parties sont formées de mots différents qui s'écrivent différemment.

[48]           Comme je l'ai mentionné précédemment, le mot COMENSOLI qui constitue l'élément dominant de la Marque ne revêt aucune signification particulière en anglais ou en français. La Marque dans son ensemble possède une connotation italienne, en particulier sur le plan visuel du fait de la présence des couleurs rouge, blanc et vert, qui sont celles du drapeau italien. Le mot COMENSOLI est un mot à quatre syllabes qui se prononce avec l'accent tonique sur l'avant-dernière syllabe.

[49]           En revanche, comme je l'ai mentionné précédemment, la marque de commerce de l'Opposante est formée du mot français COMMENSAL qui décrit l'idée de personnes mangeant ensemble à la même table. Il s'agit d'un mot à trois syllabes qui se prononcent avec l'accent tonique sur la dernière syllabe.

[50]           En somme, l'examen global de ce cinquième facteur favorise la Requérante.

Conclusion quant à la probabilité de confusion

[51]           Comme l'a souligné la Cour d'appel fédérale dans Dion Neckwear, précité, à la page 163, [TRADUCTION] « Il n'est pas nécessaire [que le registraire] soit convaincu hors de tout doute qu'il n'y a aucun risque de confusion. Si la norme de preuve « hors de tout doute » s'appliquait, les requérants seraient, dans la plupart des cas, confrontés à un fardeau insurmontable parce qu'en matière de risque de confusion, la certitude est une denrée rare. Dans le meilleur des scénarios, ce n'est que lorsque les probabilités sont égales qu'on peut dire qu'il existe une sorte de doute, lequel doute doit être résolu en faveur de l'opposant. Mais la notion de doute est un concept trompeur et déroutant en matière civile et le registraire devrait éviter d'y recourir. » [Voir également John Labatt Ltd c. Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF)]

[52]           À l'issue de mon analyse, exposée ci-dessus, j'estime que la Requérante a démontré, selon la prépondérance des probabilités, qu'il serait peu probable qu'un consommateur ayant un souvenir imparfait de la marque de commerce COMMENSAL de l'Opposante conclut que les marchandises de la Requérante proviennent de la même source ou sont d'une quelque autre manière liées ou associées aux marchandises et services de l'Opposante.

[53]           En effet, j'estime que les différences qui existent entre les marques des parties en l'espèce sont en elles-mêmes déterminantes et plus que suffisantes pour prévaloir sur les facteurs favorisant l'Opposante.

[54]           En conséquence, le motif d'opposition fondé sur l'article 12(1)d) est rejeté dans la mesure où il repose sur l'enregistrement no 737834. De plus, l'enregistrement no 737834 constituant l'argument le plus solide de l'Opposante, il va de soi que l'Opposante n'obtiendrait pas davantage gain de cause relativement à l'article 12(1)d) si l'examen de ce motif était fondé sur l'un ou l'autre des autres enregistrements invoqués.

Motif d'opposition fondé sur la non-enregistrabilité

[55]           L'Opposante allègue que la Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la Marque parce que :

  • suivant l'article 16(3)a) de la Loi, à la date de production de la demande, la Marque créait de la confusion avec les Marques COMMENSAL, lesquelles avaient été antérieurement employées au Canada par l'Opposante;
  • suivant l'article 16(3)b) de la Loi, à la date de production de la demande, la Marque créait de la confusion avec la marque de commerce COMMENSAL VÉGÉ CUISINE, à l'égard de laquelle une demande d'enregistrement avait été antérieurement produite au Canada par l'Opposante;
  • suivant l'article 16(3)c) de la Loi, à la date de production de la demande, la Marque créait de la confusion avec les noms commerciaux COMMENSAL, LE COMMENSAL, CORPORATION DE DÉVELOPPEMENT DU COMMENSAL, et CORPORATION DE DÉVELOPPEMENT DU COMMENSAL II, lesquels avaient été antérieurement employés au Canada par l'Opposante.

[56]           J'examinerai ces motifs un à un.

Motif d'opposition fondé sur l'article 16(3)a)

[57]           Pour s’acquitter de son fardeau de preuve initial à l’égard d’un motif d’opposition fondé sur l’article 16(3)a), un opposant doit démontrer que sa marque de commerce avait déjà été employée au Canada à la date de production de la demande du requérant, et qu’elle n’avait pas été abandonnée à la date d’annonce de la demande du requérant [article 16(5) de la Loi]. Tel qu'il appert de mon examen de l'affidavit de M. Tremblay ci-dessus, l'Opposante s'est acquittée de son fardeau initial au moins en ce qui concerne l'emploi de la marque nominale COMMENSAL en liaison avec des mets préparés et des vinaigrettes, ainsi qu'avec des services de restaurant.

[58]           Le fait que les dates pertinentes diffèrent n’a pas d’incidence substantielle sur mon analyse du motif d’opposition fondé sur l'article 12(1)d), exposée ci-dessus. En conséquence, le motif d'opposition fondé sur l'article 16(3)a) est rejeté dans la mesure où il repose sur la marque nominale COMMENSAL.

[59]           La marque nominale COMMENSAL constituant l'argument le plus solide de l'Opposante, j'estime qu'il n'est pas nécessaire que je détermine si l'Opposante s'est acquittée de son fardeau de preuve initial à l'égard des autres marques invoquées. En effet, même s'il s'avérait que l'Opposante s'est acquittée de son fardeau initial à l'égard de ces autres marques, l'Opposante n'obtiendrait pas davantage gain de cause relativement à l'article 16(3)a) en s'appuyant sur l'une ou l'autre des autres marques invoquées.


Motif d'opposition fondé sur l'article 16(3)b)

[60]           Pour s’acquitter de son fardeau de preuve initial à l’égard d’un motif d’opposition fondé sur l’article 16(3)b), un opposant doit démontrer que sa demande a été produite avant la date de production de la demande du requérant et qu'elle était en instance à la date d'annonce de la demande du requérant [article 16(4) de la Loi]. La demande d'enregistrement produite par l'Opposante à l'égard de la marque COMMENSAL VÉGÉ CUISINE était encore en instance au moment où la demande de la Requérante a été annoncée; l'Opposante s'est donc acquittée de son fardeau de preuve initial à l'égard de ce motif. Le fait que cette demande ait depuis été abandonnée par l'Opposante ne porte pas à conséquence.

[61]           Cela étant dit, une analyse détaillée des facteurs énoncés à l'article 6(5) n'est pas nécessaire dans ce cas. En effet, les différences entre la Marque et la marque de commerce COMMENSAL VÉGÉ CUISINE de l'Opposante sont encore plus prononcées que celles existant entre la Marque et la marque nominale COMMENSAL de l'Opposante, qui constitue l'argument le plus solide de l'Opposante.

[62]           En conséquence, le motif d'opposition fondé sur l'article 16(3)b) est rejeté.

Motif d'opposition fondé sur l'article 16(3)c)

[63]           Pour s’acquitter de son fardeau de preuve initial à l’égard d’un motif d’opposition fondé sur l’article 16(3)c), un opposant doit démontrer que son nom commercial avait déjà été employé au Canada à la date de production de la demande du requérant, et qu’il n’avait pas été abandonné à la date d’annonce de la demande du requérant [article 16(5) de la Loi]. Bien que l'affidavit de M. Tremblay établisse l'emploi de la marque nominale COMMENSAL, il n'établit pas l'emploi de ce mot comme nom commercial. En fait, l'affidavit de M. Tremblay n'établit l'emploi d'aucun des noms commerciaux invoqués par l'Opposante à l'appui de ce motif d'opposition. Il s'ensuit que l'Opposante ne s'est pas acquittée de son fardeau de preuve initial. En conséquence, le motif d'opposition fondé sur l'article 16(3)c) est rejeté.

Motif d'opposition fondé sur l'absence de caractère distinctif

[64]           L'Opposante allègue que la Marque n'est pas distinctive au sens de l'article 2 de la Loi en ce qu'elle ne distingue pas et n'est pas adaptée à distinguer les marchandises visées par la demande de la Requérante des marchandises et services de l'Opposante, compte tenu des faits allégués relativement aux précédents motifs d'opposition.

 

[65]           Pour s'acquitter de son fardeau de preuve initial à l'égard d'un motif d'opposition fondé sur l'absence de caractère distinctif, un opposant doit démontrer qu'à la date de production de sa déclaration d'opposition, sa marque de commerce était devenue connue dans une mesure suffisante pour faire perdre à la marque visée par la demande son caractère distinctif [voir Motel 6, Inc. c. No. 6 Motel Ltd. (1981), 56 CPR (2d) 44 (CF 1re inst.)]. Tel qu'il appert de mon examen de l'affidavit de M. Tremblay ci-dessus, l'Opposante s'est acquittée de son fardeau initial au moins en ce qui concerne l'emploi de la marque nominale COMMENSAL en liaison avec des mets préparés et des vinaigrettes, ainsi qu'avec des services de restaurant.

[66]           Le fait que les dates pertinentes diffèrent n’a pas d’incidence substantielle sur mon analyse du motif d’opposition fondé sur l'article 12(1)d), exposée ci-dessus. En conséquence, le motif d'opposition fondé sur l'absence de caractère distinctif est rejeté dans la mesure où il repose sur la marque nominale COMMENSAL.

[67]           La marque nominale COMMENSAL constituant l'argument le plus solide de l'Opposante, j'estime qu'il n'est pas nécessaire que je détermine si l'Opposante s'est acquittée de son fardeau de preuve initial à l'égard des autres marques invoquées. En effet, même s'il avérait que l'Opposante s'est acquittée de son fardeau initial à l'égard de ces autres marques, l'Opposante n'obtiendrait pas davantage gain de cause relativement à l'article 2 en s'appuyant sur l'une ou l'autre des autres marques invoquées.

Motifs d'opposition fondés sur l'article 30

[68]           L'Opposante soulève divers motifs d'opposition fondés sur l'article 30 de la Loi, à savoir que :

  • la demande n'est pas conforme aux exigences de l'article 30e) de la Loi en ce que la Requérante avait déjà commencé à employer la Marque à la date de production de la demande;
  • la demande n'est pas conforme aux exigences des articles 30e) et 30h) de la Loi en ce que la marque de commerce que la Requérante a l'intention d'employer est différente de la Marque;
  • subsidiairement ou cumulativement, la demande n'est pas conforme aux exigences de l'article 30e) de la Loi en ce que la Requérante n'a jamais eu l'intention d'employer la Marque au Canada en liaison avec les marchandises visées par la demande;
  • la demande n'est pas conforme aux exigences de l'article 30i) de la Loi en ce que la Requérante ne pouvait pas, à la date de production de la demande, être convaincue d'avoir droit d'employer la Marque au Canada en liaison avec les marchandises visées par la demande puisque, ce faisant, elle livrerait une concurrence déloyale à l'Opposante en créant expressément et intentionnellement de la confusion avec les Marques COMMENSAL de l'Opposante, le tout en contravention des articles 7b) et 22 de la Loi.

[69]           Chacun de ces motifs peut être rejeté sommairement comme suit :

Motifs d'opposition fondés sur les articles 30e) et h)

[70]           L'Opposante ne s'est pas acquittée du fardeau de preuve initial qui lui incombait de mettre en doute le bien-fondé des revendications contenues dans la demande d'enregistrement fondée sur un emploi projeté produite par la Requérante. Il n'existe aucun élément de preuve indiquant que la demande n'était pas conforme à l'article 30e) à la date de production de la demande. La demande est également conforme à l'article 30h) de la Loi, car au moment où elle a produit sa demande, la Requérante a joint à sa demande un dessin de la Marque.

Motif d'opposition fondé sur l'article 30i)

[71]           Ce motif, tel qu'il est plaidé, est lié à la probabilité de confusion entre la Marque et chacune des Marques COMMENSAL. J'estime qu'il n'est pas nécessaire que je détermine si le motif de l'Opposante fondé sur l'article 30i), tel qu'il est plaidé, constitue un motif d'opposition valable, ou si l'Opposante s'est acquittée de son fardeau de preuve initial à l'égard de ce motif. En effet, même s'il s'avérait que ce motif d'opposition est valablement plaidé et que l'Opposante s'est acquittée de son fardeau de preuve initial, ce motif devrait être rejeté, puisque mes conclusions, exposées ci-dessus, quant aux motifs d'opposition fondés sur la non-enregistrabilité, l'absence de droit à l'enregistrement et l'absence de caractère distinctif concernant l'absence de probabilité de confusion demeurent applicables, à la date de production de la demande.

Décision

[72]           Compte tenu de ce qui précède, dans l'exercice des pouvoirs qui m'ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition selon les dispositions de l’article 38(8) de la Loi.

______________________________

Annie Robitaille

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada


Traduction certifiée conforme
Judith Lemire, trad.

 


Annexe

 

Marque de commerce

Numéro d'enregistrement ou de demande

Marchandises/Services

Revendications

 

REVENDICATION DE COULEUR :

Le mot COMMENSAL est écrit en blanc sur fond vert foncé avec un contour blanc et contour additionnel vert foncé, avec un lettrage vert foncé sur fond blanc se terminant avec un contour vert foncé. Les couleurs décrites sont aussi revendiquées comme caractéristiques de la marque de commerce.

 

DÉSISTEMENT :

[TRADUCTION] Désistement du droit à l'usage exclusif des mots NATURELLEMENT, NATURALLY, BON et GOOD en dehors de la marque de commerce.

552036

MARCHANDISES :

(1) Boissons non alcoolisées, nommément […]; produits alimentaires, nommément salades de légumes, œufs, pâté végétal, algues, olives, fromage, trempettes au fromage, trempettes aux légumes, taboulé, aspic aux tomates, luzerne, mayonnaise, pizza, tacos, gelée de légumes, quiches, feuilletés aux légumes, soupes, tourtière de légumes, pâtes alimentaires, sauces, légumes, tofu, seitan, purée de légumes; grains, couscous, fèves, pois chiches, riz, millet, semoule, yogourt, salade de fruits, purée de fruits, tofu glacé, pâtisseries, biscuits, gâteaux, pain, tartes, compotes, carrés: aux dattes, au caroube, au chocolat, au sucre à la crème, croissants, muffins, brioches, fruits, crème fouettée, dattes, noix, burritos, nachos, tacos, vinaigrettes, graisse de rôti (végétale), humus, gélatine aux tomates, croque-monsieur, moussaka, lasagne; lentilles, orge, ragoûts, chili, germination, pâté, tartinades, salades variées, plats de légumineuses.

 

SERVICES :

(1) Exploitation de restaurants, service de traiteur, exploitation de boutiques pour la vente, la distribution et la fabrication de produits alimentaires. Vente à des distributeurs, à des commerces de détail, à des institutions publiques et privées des marchandises décrites à l'article 4.

 

REVENDICATION :

Déclaration d'emploi produite le 28 septembre 2001.

737835

MARCHANDISES :

[TRADUCTION]
(1) Barres énergétiques, substituts de repas en barres, collations en barres constituées de [...]; repas et entrées congelés, préparés et emballés composés principalement de pâtes alimentaires, riz, viande, poisson, volaille ou légumes; produits alimentaires, nommément salades de légumes, œufs, algues, olives, fromage, trempettes pour grignotines, tartinades à base de légumes et de fruits, taboulé, luzerne, mayonnaise, pizza, gelée de légumes, quiches, pâtes feuilletées aux légumes, soupes, tartes aux légumes, pâtes alimentaires; sauces, nommément compote de pommes, sauce au fromage, sauce au chocolat, sauce, sauce piquante, sauce soya, sauce à pizza, sauce à spaghetti, sauce tartare, sauce tomate, sauce marinara et vinaigrettes; légumes, tofu, seitan, purée de légumes; céréales transformées, couscous, haricots, pois chiches, lentilles, riz, millet, semoule, yogourt, salade de fruits, purée de fruits, tofu; pâtisseries, biscuits, gâteaux, pain, tartes, compotes, carrés au caroube, chocolat, fudge, carrés aux dattes, croissants, muffins, brioches, fruits, crème fouettée, dattes, noix, burritos, nachos, tacos, gras de rôti (végétarien), hommos, gélatine aux tomates, moussaka, lasagne; lentilles, orge, ragoûts, chili, salades de pâtes alimentaires, sandwichs. Boissons non alcoolisées, nommément [...].

 

SERVICES :

[TRADUCTION]
(1) Exploitation de restaurants, services de traiteur, exploitation de magasins d’alimentation au détail, distribution et confection de produits alimentaires; exploitation de comptoirs alimentaires de cuisine végétarienne offrant des repas à emporter ou à manger sur place

 

REVENDICATION :

Employée au Canada depuis au moins janvier 2008.

COMMENSAL

737834

Mêmes marchandises et services que ceux et celles visés par l'enregistrement no 737835

LE COMMENSAL

352949

MARCHANDISES et SERVICES :

Presque identiques aux marchandises et services visés par l'enregistrement no 552036.

 

REVENDICATION :

Employée au Canada depuis au moins le 15 août 1979.

COMMENSAL VÉGÉ CUISINE

1371242

MARCHANDISES et SERVICES :

Presque identiques aux marchandises et services visés par l'enregistrement no 737835.

 

REVENDICATION :

Emploi projeté au CANADA.

 

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