Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2015 COMC 227

Date de la décision : 2015-12-22
[TRADUCTION CERTIFIÉE,
NON RÉVISÉE]

DANS L'AFFAIRE DE L'OPPOSITION

 

 

Les Marques Metro / Metro Brands S.E.N.C.

Opposante

et

 

1161396 Ontario Inc.

Requérante

 

 

 



 

1,333,541 pour IRRESISTIBLES

 

Demande d'enregistrement

[1]               Les Marques Metro / Metro Brands S.E.N.C. s'oppose à l'enregistrement de la marque de commerce IRRESISTIBLES (la Marque), qui est l'objet de la demande no 1,333,541 produite par 1161396 Ontario Inc.

[2]               Produite le 1er février 2007, la demande est fondée sur l'emploi de la Marque au Canada en liaison avec des [Traduction] « bonbons et collations, nommément barres de friandises, tablettes de chocolat, confiseries au sucre, nougatines dures aux arachides, barres au caramel, biscuits et petits gâteaux, confiseries gélifiées, confiseries de chocolat, menthes au chocolat, boîtes de chocolats assortis et bonbons en dérivé de guimauve » depuis au moins aussi tôt qu'août 2001.

[3]               L'Opposante allègue que la demande n'est pas conforme aux exigences énoncées dans l'article 30b) de la Loi sur les marques de commerce LRC 1985, ch T-13 (la Loi), en ce sens que la Marque ne peut pas avoir été employée avec chacun des produits énoncés dans la demande depuis la date de premier emploi alléguée.

[4]               Pour les raisons exposées ci-dessous, je rejette l'opposition.

Le dossier

[5]               L'Opposante a produit sa déclaration d'opposition le 19 juillet 2013. Dans une lettre datée du 15 octobre 2013, la Requérante a demandé qu'une décision interlocutoire soit rendue, sous prétexte que la déclaration d'opposition doit être entièrement retranchée parce qu'elle n'est pas conforme à l'article 38(3) de la Loi et ne soulève pas de question sérieuse au sens de l'article 38(4) de la Loi. Le registraire a refusé la demande de la Requérante de retrancher et rejeter la déclaration d'opposition, par voie d'une lettre datée du 31 octobre 2013. Le 2 décembre 2013, la Requérante a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle elle conteste le motif d'opposition formulé dans la déclaration d'opposition.

[6]               À l'appui de son opposition, l'Opposante a produit une copie certifiée de l'affidavit de Sarbjit Singh, et les pièces connexes, qui avait déjà été produit en preuve en vertu de l'article 41 du Règlement sur les marques de commerce, SOR/96-195 (le Règlement) dans le cadre d'une opposition distincte intentée par 1161396 Ontario Inc (la Requérante en l'espèce) contre l'enregistrement de la marque de commerce IRRESISTIBLE visée par la demande no 1,329,344 par Les Marques Metro / Metro Brands S.E.N.C. (l'Opposante en l'espèce).

[7]               À l'appui de sa demande, la Requérante a produit l'affidavit de Karol Pawlina, qui présente en preuve des copies certifiées d'extraits du dossier de la procédure d'opposition susmentionnée concernant la marque de commerce IRRESISTIBLE, visée par la demande no 1,329,344. À l'audience, la Requérante a demandé que soit versée au dossier une autre copie de la déclaration d'opposition modifiée concernant la demande no 1,329,344, déjà jointe en pièce A de l'affidavit de M. Pawlina, étant donné que la pièce jointe originale était incomplète. L'Opposante, qui a reçu une copie du document de remplacement à l'audience, a accepté la demande. La nouvelle copie de la déclaration d'opposition modifiée concernant la demande no 1,329,344 a été versée au dossier.

[8]               Les parties ont toutes deux produit un plaidoyer écrit et étaient présentes à l'audience.


L'audience

[9]               Pour commencer, j'aborderai certaines préoccupations formulées dans la lettre du 13 octobre 2015, envoyée au nom de la Requérante, concernant la décision que j'ai rendue à l'audience au sujet de la présence du sténographe de la Requérante et la présentation de la transcription aux participants à l'audience. Je présenterai d'abord des renseignements contextuels au sujet des audiences tenues par la Commission des oppositions des marques de commerce (la Commission) et l'affaire qui nous occupe.

[10]           Les audiences sont tenues à la demande de l'une ou des deux parties à une procédure d'opposition conformément à l'article 46 du Règlement. Les pratiques administratives de la Commission relativement aux audiences sont généralement énoncées dans l'énoncé de pratique intitulé Énoncé de pratique concernant la procédure dopposition en matière de marque de commerce. Particulièrement, il est énoncé dans la section X de l'énoncé de pratique que dans l'avis écrit de sa demande d'audience, une partie doit indiquer, entre autres, la ou les langues officielles dans lesquelles les représentations seront faites et si une traduction simultanée sera nécessaire de sorte que le registraire puisse faire le nécessaire pour assurer la présence d'interprètes à l'audience. Les audiences durent généralement deux heures et demie. La Commission se conforme au principe de la publicité des débats judiciaires et a installé de l'équipement de téléconférence et de vidéoconférence pour faciliter l'accès à distance aux audiences pour les participants comme les agents de marques de commerce ou les parties elles-mêmes, ainsi que pour des observateurs tiers comme des associés et des stagiaires en droit auprès des agents de marques de commerce, l'avocat interne, des homologues étrangers et le grand public.

[11]           En l'espèce, les deux parties ont demandé une audience. L'agente de l'Opposante a indiqué que les représentations seraient faites en français; l'agente de la Requérante a indiqué que les représentations seraient faites en anglais et qu'il faudrait prévoir un service de traduction simultanée. Le 23 juillet 2015, le registraire a donné un avis fixant la date, l'heure et l'emplacement de l'audience et confirmant la présence d'interprètes.

[12]           Le matin de l'audience, le directeur des opérations de la Commission a revu, avec l'aide de plusieurs techniciens, la logistique pour les services d'interprétation demandés par l'agente de la Requérante et ses associés, ainsi que la logistique permettant de connecter un membre du public qui avait préalablement demandé l'occasion d'observer par téléconférence un certain nombre d'audiences relatives à une opposition. Peu après le début de l'audience, j'ai été informée pour la première fois, par le directeur des opérations, qu'un sténographe accompagnait l'agente de la Requérante.

[13]           Au début de l'audience, j'ai demandé à l'agente de la Requérante d'expliquer la présence du sténographe dans la salle d'audience, qui, avais-je remarqué, avait déjà commencé à enregistrer sans avoir demandé la permission. L'agente de la Requérante a fait valoir que rien n'interdisait une partie de se présenter avec son propre sténographe afin d'avoir une transcription des procédures et qu'en fait, il était courant de conserver des transcriptions d'instances judiciaires. L'agente de la Requérante a aussi indiqué, dans une lettre datée du 28 septembre 2015, qu'elle avait déjà informé le registraire et l'Opposante qu'elle avait l'intention de se présenter avec un sténographe. L'agente de la Requérante a ajouté que, peu importe, l'observateur tiers pouvait facilement enregistrer par téléphone la totalité des procédures à distance sans que je le sache et sans ma permission.

[14]           En réponse à ma demande de commentaires, l'agente de l'Opposante a indiqué qu'elle n'avait pas préalablement été informée de l'intention de la Requérante et qu'elle n'était au courant d'aucune lettre datée du 28 septembre 2015. L'agente de l'Opposante a ajouté qu'elle ne conteste pas la transcription de l'audience en soi, à condition qu'une copie de la transcription soit accessible sans frais à l'Opposante. L'agente de l'Opposante a toutefois contesté l'utilisation de la transcription par le registraire au moment de décider de la question et toute utilisation future de la transcription par la Requérante.

[15]           À l'audience, j'ai noté qu'il n'existait aucune exigence législative ou réglementaire relativement à la présence de sténographes sur place ou à l'obtention de la transcription des audiences tenues, et qu'il n'est pas non plus dans la pratique de la Commission de procéder ainsi. J'ai également ajouté que je n'avais pas été mise au courant du fait que la Requérante avait l'intention de se présenter avec un sténographe à l'audience, ni que le registraire semble avoir reçu une copie de la lettre du 28 septembre. Néanmoins, compte tenu des observations de l'Opposante, du droit qu'ont les deux parties à une audience équitable et du principe selon lequel le registraire est maître de ses propres procédures, j'ai informé l'agente de la Requérante à l'audience que j'accepterais que la transcription se poursuive, à condition que des copies de la transcription soient communiquées à tous les participants présents à l'audience. J'ai aussi indiqué que, comme je n'ai aucun contrôle sur le produit final ou la qualification de la personne qui prend les notes, la transcription ne sera pas considérée comme une transcription officielle de l'audience et ne fera pas partie du dossier des présentes procédures. En outre, j'ai confirmé que je ne m'appuierai pas sur la transcription dans ma décision.

[16]           À l'audience, l'agente de la Requérante a indiqué qu'elle n'avait reçu aucune directive de la Requérante concernant le coût lié à la communication de la transcription à l'Opposante ou à la Commission. J'ai ensuite informé l'agente de la Requérante que si c'est le cas, l'audience se poursuivra sans les services du sténographe, auquel moment l'agente a indiqué que la Requérante fournirait des copies de la transcription à l'Opposante et à la Commission. L'agente de la Requérante a aussi rappelé le fait que la lettre du 28 septembre avait été envoyée à l'Opposante et au registraire et que la présence d'un sténographe a été abordée avec le président de la Commission dans une conversation antérieure. L'agente de la Requérante a déclaré qu'une copie de cette lettre, ainsi qu'un rapport confirmant la transmission de la lettre, sera remise à l'Opposante et au registraire après l'audience. L'audience a ensuite commencé et l'Opposante a présenté ses observations.

[17]           Quelques jours après l'audience, le registraire a reçu une lettre datée du 13 octobre 2015, envoyée de la part de la Requérante. En bref, la Requérante soutient que ma décision d'autoriser la présence d'un sténographe à l'audience, sous réserve que des copies de la transcription soient fournies à tous les participants présents, dépasse la compétence du registraire et constitue une violation des principes du droit administratif.

[18]           L'agente de la Requérante soulève aussi plusieurs questions concernant le président, lesquelles ont été abordées séparément par ce dernier. Aux fins de la présente décision, je note que dans cette lettre, l'agente de la Requérante allègue que j'ai agi sous la direction du président concernant la question de la présence du sténographe de la Requérante à l'audience. Je note également que l'agente de la Requérante n'a fourni aucune preuve pour corroborer cette allégation. Je me contenterai de dire que je n'ai pas agi « sous la direction » du président à l'audience. Je n'ai reçu aucune directive de quiconque concernant cette procédure d'opposition ou la question du sténographe, et ma décision finale n'a pas été revue par le président avant que je la rende, puisque chaque membre et agent d'audience de la Commission se voit déléguer par le registraire, en vertu de l'article 63(3) de la Loi, le pouvoir particulier d'exécuter certaines fonctions énoncées dans la Loi de manière impartiale et indépendante, y compris celles se rapportant aux procédures d'opposition.

[19]           Jointes à la correspondance du 13 octobre 2015 figurent des copies de deux lettres dont le contenu est semblable, toutes deux datées du 28 septembre 2015, indiquant l'intention de la Requérante de se présenter à l'audience avec un sténographe. L'une des lettres semble avoir été envoyée au registraire alors que l'autre semble avoir été envoyée à l'Opposante; un rapport confirmant la transmission des lettres par télécopieur à l'Opposante et au registraire à la même date est également inclus. Je note que le registraire n'a aucun document confirmant la réception de cette lettre par télécopieur au moment indiqué sur le rapport de transmission. De même, en réponse à la demande du registraire pour des commentaires sur la correspondance du 13 octobre 2015 de la Requérante, l'Opposante déclare qu'elle n'a pas reçu la lettre de la Requérante qui aurait été envoyée par télécopieur le 28 septembre 2015.

[20]           Comme susmentionné, je n'étais pas au courant de l'intention qu'avait la Requérante d'être accompagnée d'un sténographe à l'audience avant le matin de l'audience, pas plus que l'Opposante. Contrairement aux observations formulées par l'agente de la Requérante, les techniciens n'étaient pas là pour aider le sténographe à s'installer. Ils étaient plutôt présents pour s'assurer que l'équipement servant à la traduction simultanée et à la téléconférence fonctionnait correctement.

[21]           Bien que je sois d'accord avec l'agente de la Requérante sur le fait que des sténographes sont souvent présents lors des procédures judiciaires provinciales et fédérales, ce n'est simplement pas le cas pour les audiences tenues par le registraire, qui a choisi de ne pas adopter l'ensemble des règles de la Cour fédérale, y compris celles relatives aux sténographes et aux services de transcription. Comme l'a noté la Cour suprême dans Canadian Union of Public Employees, Local 301 c Montréal (Ville), [1997] 1 SCR 793, 1997 CanLII 386 (CSC), les organes administratifs ne sont normalement pas tenus de produire le compte rendu sténographique ou l'enregistrement de leurs procédures, sauf si cette pratique diminue grandement la capacité du tribunal d’appel de réviser la décision quant au fond.

[22]           En l'espèce, il n'y a aucune exigence légale obligeant le registraire à produire des comptes rendus sténographiques ou des enregistrements de ses audiences. Les audiences relatives à une opposition ont une portée limitée. Le compte rendu des procédures d'opposition est généralement complété au moment où les parties se présentent à l'audience. Les audiences ne comportent aucun témoignage; de façon générale, aucune nouvelle preuve n'y est présentée. Il est rare que des changements de dernière minute sont apportés au dossier. Les audiences relatives à une opposition portent principalement sur les arguments juridiques et l'application de la loi aux faits de l'espèce, lesquels figurent déjà au dossier. Les décisions qui peuvent être rendues dans le cadre d'une audience relative à une opposition sont limitées et elles sont dans tous les cas reflétées dans la décision finale écrite. Ainsi, l'absence de la transcription d'une audience relative à une opposition ne contrevient pas aux règles de justice naturelle ni à toute obligation d'agir équitablement.

[23]           J'ai maintenant examiné la lettre de la Requérante datée du 28 septembre 2015, dans laquelle l'agente confirme sa présence ainsi que celle de son associé à l'audience prévue, et déclare que la lettre vient [traduction] « confirmer que la Requérante sera également accompagnée par un sténographe bilingue » à l'audience. Ayant pris part à de nombreuses audiences relatives à une opposition et procédures sommaires de radiation, l'agente de la Requérante est certainement au courant qu'il n'est pas dans la pratique courante pour le registraire de faire venir des sténographes aux audiences ni de produire des transcriptions de celles-ci.

[24]           Dans la lettre du 28 septembre, l'agente de la Requérante n'a pas demandé la permission au registraire, ni n'a cherché à obtenir le consentement de l'Opposante, pas plus qu'elle n'a fourni de motifs au registraire expliquant sa décision unilatérale de faire venir son propre sténographe à l'audience. À l'audience, l'agente de la Requérante a simplement indiqué que rien n'empêche une partie de se présenter avec son propre sténographe pour avoir une transcription des procédures. Dans la lettre du 13 octobre, l'agente souligne l'absence d'« objections » écrites antérieures de la part du registraire comme une forme de consentement implicite.

[25]           Mis à part le fait que le registraire n'était pas au courant de l'intention de la Requérante en l'espèce, pour assurer le déroulement efficace de l'audience, une partie qui souhaite modifier les pratiques administratives du registraire doit fournir plus qu'un « avis » au registraire pour lui indiquer qu'elle ne tiendra pas compte de ces pratiques; l'objectif étant de veiller à ce que les droits des parties à une audience équitable, y compris l'équité procédurale et les principes de justice naturelle, soient respectés.

[26]           Quant à l'observation de la Requérante selon laquelle l'observateur tiers indépendant pourrait enregistrer la procédure publique par téléphone, je noterais simplement que l'audience est ouverte au public et que l'on s'attend à ce que toutes les personnes présentes, en personne ou par téléconférence, respectent le décorum pour assurer l'administration équitable de la justice, y compris la sérénité de l'audience.

[27]           Le fait qu'il n'existe aucune règle interdisant à une partie d'être accompagnée de son propre sténographe dans une salle d'audience ne suppose pas qu'il est automatiquement permis de le faire. Il existe de nombreuses autres pratiques généralement observées lors d'une audience qui ne sont pas établies dans un énoncé de pratique ou dans la législation, y compris le temps accordé à chaque partie pour présenter ses observations, ainsi que la structure de l'audience. On s'attend à ce que les parties qui demandent une audience relative à une opposition et qui y assistent observent ces pratiques, à moins qu'il existe des motifs légitimes de s'en écarter. Le fait de fournir l'enregistrement d'une audience à un client représenté par son agent en personne ou d'obtenir sa propre transcription de l'audience ne constitue pas un motif légitime de déroger aux pratiques du registraire. Comme susmentionné, la Commission a installé de l'équipement de téléconférence et de vidéoconférence pour faciliter l'accès à distance aux audiences pour les parties qui ne souhaitent pas assister en personne.

[28]           Dans James Bauer c La Reine (Commission de l'immigration du Canada) [1984] 2 CF 455, 1984 CarswellNat 68, on a demandé à la Cour fédérale de déterminer si [traduction] « le refus de la demande formulée par le requérant pour les services d'un sténographe pour enregistrer les procédures d'examen des motifs de la détention, à ses frais et pour ses besoins, contrevient aux droits enchâssés en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés ou viole un principe d'équité fondamentale » [para 16]. La Cour a déterminé qu'en l'absence d'une disposition légale contraire, un tribunal administratif n'est pas tenu de produire une transcription sténographique de ses procédures et que le refus d'autoriser le requérant à retenir les services de son propre sténographe ne contrevient aucunement à l'obligation d'agir équitablement [para 19 et 23].

[29]           Je note également qu'une demande de production d'un enregistrement électronique d'une audience relative à une opposition a déjà été refusée par un autre membre de la Commission dans le cadre d'une autre procédure d'opposition [Gemological Institute of America, Inc c Gemology Headquarters International, LLC, 2012 COMC 172, 105 CPR (4th) 220].

[30]           Bien que je n'aie aucune raison de douter de la conduite ou du professionnalisme du sténographe à l'audience, je considère sa présence comme une distraction et je ne connais aucun document de jurisprudence portant sur l'administration équitable de la justice qui viendrait corroborer la présence inattendue d'un sténographe embauché par une partie aux seules fins d'obtenir sa propre transcription de l'audience.

[31]           Même là, étant donné le consentement conditionnel de l'Opposante, et pour assurer des conditions équitables pour l'ensemble des participants à l'audience qui avaient en main un dossier semblable à celui de la Requérante, je considère qu'il est raisonnable de demander à la Requérante de fournir des copies de la transcription à tous les participants, ce qui cause un préjudice moindre que de refuser carrément la présence du sténographe de la Requérante. Il a été permis à l'agente de la Requérante de poursuivre l'audience sans les services du sténographe. Cela n'aurait pas porté atteinte au droit de la Requérante à une audience juste et équitable que le sténographe eut été dispensé, puisque les parties ne détiennent aucun droit inhérent ou implicite d'imposer un sténographe au registraire et à l'autre partie, ni d'avoir une transcription personnelle d'une audience publique lorsqu'un tel service n'est pas offert par le registraire.

[32]           Étant donné ce qui précède, je ne vois aucune raison de réviser ma décision et je ne suis pas d'accord avec l'observation de l'agente de la Requérante portant que la décision constitue une attribution des dépens de facto, un abus de procédure ou une violation des principes fondamentaux du droit administratif.

Décision interlocutoire du 31 octobre 2013

[33]           Dans son plaidoyer écrit et à l'audience, la Requérante demande que soit révisée la décision interlocutoire du 31 octobre 2013, dans laquelle le registraire a refusé la demande de la Requérante pour retrancher et rejeter la déclaration d'opposition.

[34]           À cet égard, la Requérante soutient que le registraire a commis une erreur dans l'examen du droit relativement à l'article 30b) de la Loi, lorsqu'il a conclu que l'unique motif soulevé dans la déclaration d'opposition révélait une cause défendable. Plus précisément, la Requérante est d'avis que l'article 30b) de la Loi [traduction] « exige simplement que le requérant démontre l'emploi en liaison avec la catégorie générale de produits et non avec chaque produit énuméré dans une demande d'enregistrement ». À l'appui de sa position, la Requérante cite Pronuptia de Paris c Pronovias 2007 COMC 3, 2007 CanLII 80847 (COMC). Ainsi, la Requérante fait valoir que, comme il est allégué dans la déclaration d'opposition que l'Opposante n'a pas employé la Marque en liaison avec chacun des produits énoncés dans la demande à la date de premier emploi alléguée, l'Opposante n'a pas dûment plaidé son unique motif d'opposition [je souligne].

[35]           À l'audience, s'appuyant sur l'affaire Produits Ménagers Coronet Inc c Coronet-Werke Heinrich Schlerf Gmbh (1986), 10 CPR (3d) 482 (CF 1re inst) concernant le pouvoir du registraire de rendre une décision partagée, l'Opposante conteste l'interprétation que fait la Requérante de l'affaire citée et des exigences prévues à l'article 30b). L'Opposante soutient aussi qu'il n'existe aucun motif justifiant la révision de la décision interlocutoire.

[36]           Le registraire ne peut réviser une décision que si celle-ci a été rendue par abus de compétence, est fondée sur une erreur de droit ou est fondée sur une erreur d'interprétation des faits présentés au registraire au moment où la décision a été rendue (voir Jalite Public Ltd c Lencina (2001), 19 CPR (4th) 406 (COMC) et Simmons Ltd c A to Z Comfort Beddings Ltd. (1987), 18 CPR (3d) 84 (COMC)).

[37]           Dans sa décision du 31 octobre 2013, le registraire a établi que la déclaration d'opposition révèle une cause défendable, étant donné que [traduction] « la demande vise non seulement les produits d'une catégorie générale, mais aussi des produits particuliers nommés individuellement » par l'utilisation du terme [traduction] « nommément » et que [traduction] « le fait que les produits soient séparés par une virgule ou un point virgule ne détermine pas si les produits sont énoncés en tant que catégorie générale ou catégorie distincte ».

[38]           Comme le registraire l'a souligné dans sa décision du 31 octobre 2015, les faits de l'affaire Pronuptia se distinguent de ceux de l'espèce, étant donné la formulation différente des états déclaratifs des produits en cause. Dans la décision Pronuptia, il est établi que la preuve d'emploi [traduction] « des vêtements prêts-à-porter, nommément robes de mariée » ne peut pas servir de preuve d'emploi pour un ensemble de produits indiqués comme étant des [traduction] « dentelles et broderie, parures de fleurs artificielles pour résilles », ces produits étant séparés des premiers par un point virgule; on ne mentionne pas si les produits particuliers nommés individuellement et séparés par des virgules après le mot [traduction] « nommément » dans un état déclaratif font toujours partie d'une catégorie générale de produits.

[39]           Comme je ne suis pas en mesure de conclure que le registraire a commis une erreur de droit ou d'interprétation évidente dans son appréciation des faits de l'espèce au moment où la décision a été rendue, je ne suis pas disposée à réviser la décision du 31 octobre 2013.

[40]           Je note également que, à plusieurs reprises récemment, le registraire a conclu que la date de premier emploi revendiquée n'avait pas été corroborée par un requérant pour certains produits ou services visés par la demande et contenus dans un état déclaratif des produits ou des services semblant s'inscrire dans la même catégorie générale, nonobstant le fait que l'emploi a été démontré pour d'autres produits et services d'un état déclaratif qui comprend le terme « nommément » [voir à titre d'exemple MAPA GmbH c 2956-2691 Quebec Inc, 2013 COMC 22, 111 CPR (4th) 281 et Sky Solar Holdings Co, Ltd c Skypower Global, 2014 COMC 262, 2014 CarswellNat 6175].

L'opposition – le fardeau de preuve incombant à chacune des parties

[41]           C'est à la Requérante qu'incombe le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. Il incombe toutefois à l'Opposante de présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l'existence des faits allégués à l'appui de chacun des motifs d'opposition [voir John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd. (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst), à la p 298].

La demande d'enregistrement est-elle conforme aux exigences de l'article 30b) de la Loi?

[42]           L’Opposante allègue que, contrairement à l’article 30b) de la Loi, la Requérante n’a pas employé la Marque en liaison avec chacun des produits visés par la demande à la date de premier emploi alléguée. Dans son plaidoyer écrit et à l'audience, l'Opposante limite son plaidoyer fondé sur l'article 30b) aux produits visés par la demande que sont les [traduction] « bonbons et collations, nommément [...] biscuits et petits gâteaux [...] » (les Produits contestés). Ma décision sera donc centrée seulement sur les Produits contestés.

[43]           Au début de ses observations, la Requérante prétend que le plaidoyer fondé sur l'article 30b) dans la déclaration d'opposition est incorrect puisqu'il allègue que la Marque n'a pas été employée en liaison avec les produits visés par la demande [traduction] « depuis au moins août 2001 », même si la demande indique que la date de premier emploi au Canada comme étant [traduction] « depuis au moins aussi tôt qu'août 2001 » et non [traduction] « depuis au moins août 2001 » [je souligne].

[44]           Après avoir revu la déclaration d'opposition dans son ensemble, je suis convaincue que le motif fondé sur l'article 30b) a été présenté avec suffisamment de détails pour permettre à la Requérante de répondre aux allégations et de comprendre la preuve qu'elle doit réfuter, nonobstant les écarts dans le libellé du plaidoyer par rapport à celui de la demande en cause.

[45]           La question que pose l'article 30b) est celle de savoir si la Requérante a employé la Marque de manière continue dans la pratique normale du commerce pendant la période comprise entre la date de premier emploi alléguée et la date pertinente [voir Immuno AG c Immuno Concepts, Inc (1996) 69 CPR (3d) 374 (COMC); Labatt Brewing Co c Benson & Hedges (Canada) Ltd (1996), 67 CPR (3d) 258 (CF 1re inst., à la p 262; et Corporativo de Marcas GJB, SA de CV c Bacardi & Company Ltd 2014 CF 323, 122 CPR (4th) 389]. La date pertinente pour l'évaluation d'un motif fondé sur l'article 30 est la date de production de la demande, soit le 1er février 2007 [voir Georgia-Pacific Corp c Scott Paper Ltd (1984), 3 CPR (3d) 469 (COMC) à la p 475].

[46]           Comme susmentionné, l'Opposante a le fardeau de preuve initial de présenter une preuve suffisante pour étayer son allégation de non-conformité de la demande à l'article 30b) de la Loi, en gardant à l'esprit que les faits en rapport avec le premier emploi par la Requérante relèvent essentiellement de la connaissance de la Requérante [voir Tune Masters c Mr Ps Mastertune Ignition Services Ltd (1996), 10 CPR (3d) 84 (COMC), à la p 89 et Corporativo de Marcas, précitée]. Si l'Opposante réussit à s'acquitter du fardeau de preuve initial qui lui incombe, la Requérante doit alors, en réponse, corroborer sa revendication d'emploi pendant la période pertinente.

[47]           La Cour a établi que pour s'acquitter de ce fardeau initial en vertu de l'article 30b), l'Opposante peut s'appuyer aussi bien sur sa propre preuve que sur celle de la Requérante [voir Labatt Brewing Company Limited c Molson Breweries, a Partnership (1996), 68 CPR (3d) (CF 1re inst) 216, à la p 230]. En l'espèce, la Requérante a choisi de ne produire aucune preuve d'emploi de sa Marque. Je vais donc déterminer si la preuve présentée par l'Opposante est suffisante pour qu'elle s'acquitte du fardeau de preuve initial qui lui incombe.

[48]           L'Opposante s'appuie sur la copie certifiée de l'affidavit de Sarbjit Singh, souscrit le 27 juillet 2010 et les pièces qui y sont jointes. Cet affidavit a été précédemment produit en tant que preuve visée par la règle 41 produite par la Requérante dans une procédure d'opposition distincte entre les parties, mais dans des rôles inverses. Avant d'aborder les objections de la Requérante à la preuve en question, il m'apparaît utile de présenter un résumé de l'affidavit de M. Singh.

[49]           M. Singh est le président et l'unique propriétaire de la Requérante. Dans son affidavit, M. Singh affirme qu'il est aussi le président et l'unique propriétaire de l'entreprise One Better Inc depuis 1995. Selon M. Singh, la Requérante emploie de façon continue et étendue la Marque au Canada [traduction] « depuis au moins aussi tôt que 2000 » en liaison avec des [traduction] « bonbons et collations ». M. Singh affirme également que la Requérante autorise l'emploi de la Marque au Canada en vertu d'une licence à One Better Inc.


[50]           M. Singh poursuit en présentant des chiffres de vente en gros de bonbons et de collations offerts par la Requérante en liaison avec la Marque au Canada depuis 2000 et ses voies de commercialisation partout au Canada. M. Singh joint en pièce 1 [traduction] « des étiquettes et des emballages représentatifs des bonbons et des collations » de la Requérante, comme preuve d'emploi de la Marque, et en pièce 2 [traduction] « des factures et des bons de commande représentatifs » de ces ventes au Canada.

[51]           La pièce 1 de l'affidavit de M. Singh contient plus de 100 exemples d'étiquettes et d'emballages de divers bonbons et collations arborant la Marque. La pièce 2 de l'affidavit de M. Singh contient plus d'une douzaine d'exemples de factures datées de 2000 à 2010 pour divers bonbons et collations.

[52]           La Requérante soutient que la preuve de l'Opposante n'est pas pertinente et qu'elle ne doit pas être prise en compte, puisque l'affidavit de M. Singh ne présente pas un portrait global de la preuve qui a été produite par la Requérante dans cette procédure d'opposition distincte. Pour corroborer ses dires, la Requérante souligne la pièce B de l'affidavit de M. Pawlina, laquelle consiste en une lettre datée du 16 août 2010 envoyée par la Requérante à l'Office, dans le contexte de cette procédure d'opposition distincte, indiquant quatre affidavits produits à titre de preuve en vertu de la règle 41, y compris l'affidavit de M. Singh. La Requérante conteste aussi l'admissibilité de l'affidavit de M. Singh puisqu'il a été produit dans le cadre d'une procédure distincte impliquant les deux parties, dans laquelle la marque de commerce visée par la demande de l'Opposante faisait l'objet de l'opposition.

[53]           Quant à la pertinence de la preuve, comme l'a souligné l'Opposante, la Cour a établi à maintes reprises que le fardeau de preuve initial de l'Opposante relativement à un motif fondé sur l'article 30b) est relativement peu contraignant [voir Tune Master, précitée, et Molson Canada c Anheuser-Busch Inc, 2003 CF 1287, 29 CPR (4th) 315 (CF 1re inst)]. D'après une juste interprétation de la copie certifiée de l'affidavit de M. Singh, je suis d'avis que la preuve concerne directement les questions relatives à l'emploi de la Marque à la date de premier emploi alléguée dans la demande et qu'elle est donc pertinente.

[54]           Quant à l'observation de la Requérante portant que la preuve produite par l'Opposante ne présente pas un portrait global de sa preuve dans ce cas, rien n'empêchait la Requérante de produire une copie certifiée du reste de sa preuve produite en vertu de la règle 41 afin de bien mettre en contexte l'affidavit de M. Singh. La Requérante a plutôt choisi de fournir de nombreux documents provenant de cette autre procédure d'opposition, y compris la demande de l'Opposante, sa propre déclaration d'opposition modifiée et des extraits d'échanges entre l'Office et les parties à cette procédure, et non la preuve « manquante ».

[55]           En ce qui concerne l'objection de la Requérante relativement à la preuve par ouï-dire que constitue la copie certifiée de l'affidavit de M. Singh, citant Hardees Food Systems, Inc c Foodcorp Ltd (1980) 48 CPR (2d) 29 (CF 1re inst) au para 7, l'Opposante soutient que la copie certifiée de l'affidavit de M. Singh est une preuve admissible à l'encontre la Requérante en l'espèce puisqu'elle a d'abord été produite dans une procédure antérieure impliquant les mêmes parties et portant essentiellement sur des questions semblables. À cet égard, l'Opposante fait référence à la pièce A de l'affidavit de M. Pawlina où l'emploi antérieur de la Marque par la Requérante et les références à la demande en cause sont plaidés à l'appui de son motif fondé sur la non-conformité à l'article 30i), ses motifs fondés sur le droit à l'enregistrement et sur son motif fondé sur l'absence de caractère distinctif, dans la déclaration d'opposition modifiée à l'encontre de la demande de l'Opposante pour la marque de commerce IRRESISTIBLE visée par la demande no 1,329,344.

[56]           En réponse, la Requérante soutient que ces principes ne s'appliquent pas en l'espèce puisque les parties se trouvaient dans des rôles inverses et que les motifs d'opposition dans les deux cas sont différents. La Requérante met aussi en doute l'interprétation que fait l'Opposante de l'affaire Hardee's et souligne la décision de la Cour d'appel reversant la décision de la Section de première instance [voir Foodcorp Ltd c Hardees Food Systems Inc (1982) 61 CPR (2d) 37 (CAF)].

[57]           Les décisions relatives à l'affaire Hardee's concernent une demande pour retrancher certains paragraphes d'un affidavit, ainsi que les portions connexes de l'avis de motion initial, dans une procédure de radiation intentée en vertu des articles 57 à 59 de la Loi, une procédure régie par les Règles des Cours fédérales concernant l'admissibilité des affidavits et de la preuve. En référence à la décision de la Section de première instance dans laquelle le juge indique qu'il est convaincu que [traduction] « la preuve soumise par chaque partie à une procédure d'opposition est admissible contre elle dans la demande » [para 7], la Cour d'appel a déclaré que [traduction] « l'admissibilité ou la non-admissibilité du matériel soumis dans le cadre d'une procédure de radiation est normalement établie par le juge qui entend la procédure de radiation et ne doit pas être considérée de façon préliminaire avant que la Cour n'ait rendu sa décision dans la procédure de radiation » [para 4].

[58]           Quant à la Commission des oppositions, le registraire a déjà accepté des copies certifiées ou des photocopies d'affidavits produites dans le cadre d'autres procédures d'opposition alors que les circonstances justifiaient une telle mesure [voir à titre d'exemple Beachcombers Restaurant Ltd c Vita-Park Citrus Products Co (1976), 26 CPR (2d) 282 (COMC) et Barbaras Bakery Inc c Sparkles Photo Ltd 2011 COMC 28, 91 CPR (4th) à la p 457]. Dans Springwall Sleep Products Ltd c Ther-a-Pedic Associates, Inc (1984), 79 CPR (2d) 227 (COMC), le membre Martin a également souligné des facteurs qui ont été pris en considération dans l'acceptation de telles preuves, y compris a) la question de savoir si les parties aux procédures sont les mêmes; b) la question de savoir si la marque de commerce visée par la demande est la même dans les deux procédures; c) la disponibilité du déposant aux fins d'un contre-interrogatoire; et d) la question de savoir si l'ensemble ou la plupart des questions dans les deux procédures sont les mêmes.

[59]           Même si les circonstances dans lesquelles la copie certifiée de l'affidavit de M. Singh a été produite en l'espèce ne sont pas identiques à celles des décisions antérieures de la Commission visant des preuves semblables, je suis disposée à accorder un certain poids à la preuve qu'a produite l'Opposante en l'espèce car je considère que cette preuve est fiable et nécessaire dans le contexte du fardeau de preuve initial qui incombe à l'Opposante en vertu de l'article 30b) de la Loi.

[60]           Les parties sont identiques, mais les rôles sont inversés. Comme susmentionné, le premier affidavit a été produit par la Requérante, à titre de partie opposante dans l'autre procédure, comme preuve d'emploi de la Marque à l'appui de son emploi antérieur et du droit à l'enregistrement plaidé. Un tel emploi antérieur, plus particulièrement la date de ce premier emploi, est en cause dans le cadre de la présente procédure. Rien n'indique que l'information contenue dans l'affidavit de M. Singh n'est plus fiable quant à la véracité de son contenu ou qu'elle est prise hors contexte. Il aurait été facile pour la Requérante de produire une preuve pour corriger toute distorsion, le cas échéant. Aucune preuve du genre n'a été produite. Comme les faits relatifs au premier emploi par la Requérante sont particulièrement connus de la Requérante et non de l'Opposante, je suis convaincue qu'il était nécessaire pour l'Opposante de produire une copie certifiée de l'affidavit de M. Singh pour corroborer son motif d'opposition fondé sur l'article 30b) et que cette preuve est fiable, étant donné que la Requérante a eu l'occasion de la réfuter [voir Reliant Web Hostings Inc c Tensing Holding BV, 2012 COMC 48, 106 CPR (4th) 294 au para 35 et Zillow Inc c HomeZilla Inc, 2014 COMC 131, 123 CPR (4th) 345].

[61]           Compte tenu de ce qui précède, je tiendrai compte de la copie certifiée de l'affidavit de M. Singh produite par l'Opposante en l'espèce, même si elle ne représente pas la totalité de la preuve produite par la Requérante en vertu de la règle 41 dans l'autre procédure d'opposition, pour déterminer si l'Opposante s'est acquittée du fardeau de preuve initial qui lui incombait en vertu de son motif d'opposition fondé sur l'article 30b).

[62]           En ce qui concerne la valeur probante de l'information contenue dans l'affidavit de M. Singh, l'Opposante soutient que, comme l'affidavit est censé établir l'emploi de la Marque en liaison avec les produits visés par la demande en cause, il est raisonnable de croire que si la preuve d'emploi de la Marque en liaison avec les Produits contestés était accessible, la Requérante l'aurait produite, car il était dans son intérêt de le faire. Néanmoins, rien n'est mentionné à cet égard dans l'affidavit de M. Singh. Ainsi, l'Opposante soutient qu'il est raisonnable de conclure que la Marque n'a pas été employée en liaison avec les Produits contestés, étant donné l'absence de preuve d'un tel emploi dans l'autre procédure d'opposition. L'Opposante ajoute que c'est la Requérante qui a le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi.

[63]           En réponse, la Requérante soutient qu'il [traduction] « n'existe aucune trace de preuve » à l'appui de l'unique motif d'opposition de l'Opposante. Plus particulièrement, la Requérante maintient que [traduction] « le déposant ne déclare nulle part dans l'affidavit de M. Singh que la Requérante N'A PAS employé la [Marque] en liaison avec les [produits] visés par la demande ».

[64]           Après avoir revu la copie certifiée de l'affidavit de M. Singh, je ne suis pas convaincue que l'Opposante s'est acquittée du fardeau de preuve initial qui lui incombait relativement à son motif d'opposition fondé sur l'article 30b), même s'il était considéré comme peu contraignant. Plus particulièrement, l'Opposante n'a pas mis en doute la véracité de la date de premier emploi alléguée de la Marque en liaison avec les Produits contestés. Comme les deux parties l'ont souligné, l'affidavit de M. Singh contient de nombreux exemples d'emploi de la Marque en liaison avec une vaste gamme de bonbons et de collations, mais ne mentionne pas l'emploi de la Marque en liaison avec des [traduction] « biscuits et petits gâteaux ». Néanmoins, le fait que l'affidavit de M. Singh ne mentionne rien sur cet emploi ne suffit pas pour mettre en doute la date de premier emploi alléguée de la Marque relativement à ces produits en particulier.

[65]           Dans son affidavit, M. Singh affirme que la Requérante [traduction] « emploie de façon continue et étendue [la Marque] en liaison avec des bonbons et des collations ... depuis au moins aussi tôt que 2000 ». Pour étayer son témoignage, M. Singh joint [traduction] « des étiquettes et des emballages représentatifs des bonbons et des collations [de la Requérante] comme preuve d'emploi de [la Marque] au Canada » et [traduction] « des factures et des bons de commande représentatifs » de ces bonbons et collations. Dans son affidavit, M. Singh ne soutient pas établir l'emploi de la Marque en liaison avec chacun des produits visés par la demande en cause; il ne soutient pas fournir des photos d'une liste exhaustive d'étiquettes ou d'emballages de bonbons ou de collations arborant la Marque. M. Singh ne mentionne rien en particulier concernant l'emploi de la Marque en liaison avec un bonbon ou une collation en particulier dans son affidavit. Les exemples d'étiquettes et d'emballages viennent simplement corroborer l'affirmation de M. Singh concernant l'emploi de la Marque en liaison avec des [traduction] « bonbons et des collations ».

[66]           La preuve produite par M. Singh dans son affidavit n'est pas incohérente. L'affidavit de M. Singh ne met pas en doute, ne remet pas en question ni ne mentionne la date de premier emploi revendiquée de la Marque en liaison avec des [traduction] « biscuits et petits gâteaux ». L'affidavit de M. Singh n'aborde simplement pas l'emploi de la Marque relativement à ces produits en particulier. La seule conclusion que je peux tirer concernant l'absence de toute référence précise aux [traduction] « biscuits et petits gâteaux » ou l'absence d'exemples d'étiquettes ou d'emballages de ces produits dans l'affidavit de M. Singh est que je ne suis pas en mesure de déterminer si la Marque a été employée au sens de l'article 4 de la Loi en liaison avec des [traduction] « biscuits et petits gâteaux ». Je ne suis toutefois pas en mesure de conclure que la preuve suggère le défaut d'emploi de la Marque en liaison avec les Produits contestés, à la date de premier emploi alléguée, ni à tout autre moment.

[67]           Bien que l'Opposante soutienne qu'il est dans l'intérêt de la Requérante de produire une preuve d'emploi de la Marque en liaison avec des [traduction] « biscuits et petits gâteaux » pour corroborer ses allégations d'emploi antérieur dans cette autre procédure, je ne peux pas raisonnablement inférer de l'absence d'une telle preuve que la Marque n'a pas été employée en liaison avec les Produits contestés à la date de premier emploi alléguée.

[68]           En définitive, je ne peux pas spéculer quant au motif pour lequel la Requérante a choisi de ne pas produire d'exemple d'emploi de la Marque en liaison avec des [traduction] « biscuits et petits gâteaux » dans le contexte de son opposition à la marque de commerce de l'Opposante et je refuse de tirer une conclusion négative en l'espèce du fait que la Requérante ne s'est pas justifiée dans cette procédure distincte. En l'absence d'éléments de preuve donnant à penser que la Requérante n'a pas employé la Marque au Canada à la date de premier emploi alléguée en liaison avec des [traduction] « biscuits et petits gâteaux », la Requérante n'est pas tenue de produire une preuve positive d'un tel emploi. Par conséquent, je rejette le motif d'opposition fondé sur l'article 30b) étant donné que l'Opposante ne s'est pas acquittée du fardeau initial qui lui incombait.


Décision

[69]           Dans l'exercice des pouvoirs qui m'ont été délégués en vertu des dispositions de l'article 63(3) de la Loi, je rejette l'opposition conformément aux dispositions de l'article 38(8) de la Loi.

______________________________

Pik-Ki Fung

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada


Traduction certifiée conforme
Sophie Ouellet, trad.a.


COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS AU DOSSIER

                                                                                                        

 

DATE DE L'AUDIENCE : 9 octobre 2015

 

COMPARUTIONS

 

JOANNE CHRIQUI                                                              POUR L'OPPOSANTE

 

KERI JOHNSTON                                                                 FOR LA REQUÉRANTE



AGENTS AU DOSSIER

 

Norton Rose Fulbright Canada LLP/S.E.N.C.R.L.,S.R.L.     POUR L'OPPOSANTE


Johnston Law                                                                          POUR LA REQUÉRANTE

 

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