Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2015 COMC 111

Date de la décision : 2015-06-18

TRADUCTION

DANS L'AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L'ARTICLE 45, engagée à la demande de McMillan LLP, visant l'enregistrement no LMC339,381 de la marque de commerce LA CACHE au nom de April Cornell Holdings, Ltd.

[1]               La présente décision concerne une procédure de radiation sommaire engagée à l'égard de l'enregistrement no LMC339,381 de la marque de commerce LA CACHE (la Marque) appartenant à April Cornell Holdings, Ltd.

[2]               La marque de commerce est enregistrée pour emploi en liaison avec les produits suivants [Traduction] :

Vêtements pour dames et pour hommes (excepté sous-vêtements) : chaussures et bottes, sandales, pantoufles, bas et jambières, pantalons, pantalons décontractés, combinaisons, jumpers, chemises de nuit, pyjamas, robes de nuit, shorts, salopettes, blousons, manteaux, pardessus, ponchos, robes, jupes, chemisiers, chemises, chandails, gilets et cardigans, chapeaux, foulards, gants, mitaines; linges de lit et de table : draps, taies d'oreiller, couvertures, coussins, housses de couette, housses de coussin, napperons, serviettes de table, nappes; bijoux : bagues, bracelets, colliers, épinglettes, brassards, serre-têtes, broches, boucles d'oreilles; vaisselle : tasses, soucoupes, assiettes, verres, plateaux de service, cristal, articles en cristal; articles ménagers : paniers, lampes, mobilier, tapis; cadeaux et objets d'art : toiles, blocs-notes, affiches, supports pour serviettes de table, papier d'emballage et cartes de souhaits.

[3]               Le 16 avril 2013, à la demande de McMillan LLP (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l'avis prévu à l'article 45 de la Loi sur les marques de commerce LRC 1985, ch T-13 à April Cornell Holdings, Ltd. (la Propriétaire). L'avis enjoignait à la Propriétaire de fournir une preuve établissant que la Marque a été employée au Canada à un moment quelconque entre le 16 avril 2010 et le 16 avril 2013, en liaison avec chacun des produits spécifiés dans l'enregistrement. Dans le cas où la Marque n'aurait pas été employée, la Propriétaire devait fournir une preuve établissant la date du dernier emploi de la Marque et les raisons du défaut d'emploi depuis cette date.

[4]               La définition pertinente d'« emploi » en liaison avec des produits est énoncée à l'article 4(1) de la Loi :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, au moment du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les colis dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu'avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[5]               Il est bien établi que l'article 45 de la Loi a pour objet et portée d'offrir une procédure simple, sommaire et expéditive pour débarrasser le registre du « bois mort ». Les critères pour établir l'emploi sont peu exigeants et il n'est pas nécessaire de produire une surabondance d'éléments de preuve. Cependant, il n'en faut pas moins présenter des faits suffisants pour permettre au registraire de conclure que la marque de commerce a été employée en liaison avec chacun des produits spécifiés dans l'enregistrement au cours de la période pertinente [voir Uvex Toko Canada Ltd c Performance Apparel Corp (2004), 31 CPR (4th) 270 (CF)]. En outre, de simples allégations d'emploi ne sont pas suffisantes pour établir l'emploi [voir Plough (Canada) Ltd c Aerosol Fillers Inc (1980), 53 CPR (2d) 62 (CAF)].

[6]               En réponse à l'avis du registraire, la Propriétaire a produit l'affidavit de Mme April Cornell, souscrit le 15 novembre 2013 et accompagné des pièces A à C. Les parties ont toutes deux produit des représentations écrites; aucune audience n'a été tenue.

[7]               Les représentations de la Partie requérante s'articulent autour de deux prétentions principales, soit les suivantes :

i)        La preuve démontre que la Propriétaire n'était pas l'entité qui « employait » la Marque et n'établit pas que la Propriétaire exerçait un quelconque contrôle sur l'emploi de la Marque pendant la période pertinente;

ii)      La preuve n'établit pas comment la Marque était liée à chacun des produits spécifiés dans l'enregistrement pendant la période pertinente.

[8]               Pour les raisons exposées ci-après, je conclus qu'il y a lieu de maintenir l'enregistrement, mais uniquement à l'égard de certains des produits spécifiés dans l'enregistrement.

[9]               Avant d'examiner les observations des parties et d'exposer les motifs de ma décision, je présenterai un bref résumé de la preuve.

La preuve

[10]           Dans son affidavit, Mme Cornell affirme qu'elle est la présidente de la Propriétaire, une société dont le bureau principal est situé à Burlington, au Vermont (États-Unis). Elle atteste être membre de la direction de la Propriétaire depuis 1992. Mme Cornell affirme qu'elle est également la présidente de April Cornell Ltd., dont le bureau principal se trouve à Westmount, au Québec (Canada), et qu'elle est membre de la direction de cette société depuis 1975.

[11]           Mme Cornell explique que les produits spécifiés dans l'enregistrement sont [Traduction] « généralement » fabriqués en Inde par Cornell Overseas Pvt Ltd., une société qui fait également partie du groupe de sociétés April Cornell. Elle précise que les produits sont ensuite expédiés au Canada où ils sont vendus dans les magasins de détail LA CACHE, lesquels sont exploités par April Cornell Ltd. Mme Cornell affirme que ces produits sont vendus en liaison avec la Marque aux termes d'une licence concédée par la Propriétaire qui, atteste-t-elle, exerce un contrôle sur l'emploi de la Marque, ainsi que sur la qualité et les caractéristiques des produits liés à la Marque.

[12]           En ce qui concerne la façon dont la Marque était liée aux produits, Mme Cornell atteste que la Marque figurait sur divers éléments d'affichage et enseignes qui étaient fixés aux rayons, aux supports, aux tables et aux comptoirs sur lesquels les produits étaient offerts en vente.

[13]           En ce qui a trait aux ventes des produits spécifiés dans l'enregistrement pendant la période pertinente, Mme Cornell atteste que le montant total approximatif des ventes réalisées dans les magasins de détail a été supérieur à 1 200 000 $.

[14]           Pour étayer son allégation d'emploi, Mme Cornell a joint les pièces suivantes à son affidavit :

         La pièce A est constituée de photographies montrant des éléments d'affichage en magasin et des enseignes de magasins qui ont été prises à deux des magasins de détail, soit le magasin LA CACHE de Westmount, au Québec, qui est l'établissement phare, et le magasin de Hudson, au Québec. Mme Cornell atteste que ces photographies constituent des exemples représentatifs de la façon dont la Marque est employée et était employée pendant la période pertinente en liaison avec les produits dans la pratique normale du commerce.

         La pièce B est constituée de copies de plusieurs reçus de caisse représentatifs de ventes qui ont eu lieu pendant la période pertinente dans les magasins LA CACHE de Westmount et de Hudson. La Marque figure au haut des reçus. Bien qu'il soit fait référence à Cornell Trading Ltd. sur les reçus, Mme Cornell atteste que cette société a fusionné avec April Cornell Ltd. en 2009. Elle explique que le système informatique du magasin de détail de Westmount n'a pas encore été mis à jour de façon à refléter ce changement.

[15]           Enfin, comme pièce C, Mme Cornell a joint à son affidavit un imprimé d'une page Web tirée du site Web Corporations Canada, qui présente l'information relative à la société fédérale Cornell Trading Ltd. L'information indique que cette société a fusionné avec April Cornell Ltd. en 2009.

Analyse

[16]           Comme je l'ai indiqué précédemment, la Partie requérante soutient que la Propriétaire n'est pas l'entité qui « emploie » la Marque et qu'elle n'a exercé aucun contrôle sur l'emploi de la Marque. La Partie requérante soutient, dans un premier temps, que les reçus de caisse n'identifient pas la source des produits vendus, puisqu'ils renvoient [Traduction] « soit à une société qui n'existait pas pendant la période pertinente, soit à une société qui n'a carrément jamais existé ». À cet égard, la Partie requérante soutient que les reçus de caisse du magasin de détail de Westmount renvoient à Cornell Trading Ltd., une société qui est inactive depuis 2009, et que les reçus de caisse du magasin de détail de Hudson renvoient à « Boutique La Cache » plutôt qu'à la Propriétaire ou à un licencié autorisé.

[17]           Or, comme je l'ai mentionné ci-dessus, dans son affidavit, Mme Cornell explique les raisons de la présence de Cornell Trading Ltd. sur les reçus de caisse du magasin de détail de Westmount. Mme Cornell a également fourni une preuve documentaire qui établit que Cornell Trading Ltd. a fusionné avec April Cornell Ltd. en 2009. Qui plus est, Mme Cornell a solennellement déclaré que les magasins de détail sont exploités par April Cornell Ltd., une utilisatrice licenciée de la Marque. Quant aux reçus de caisse du magasin de détail de Hudson, je suis d'avis que les consommateurs percevraient simplement « Boutique La Cache » comme une référence au nom du magasin.

[18]           La Partie requérante soutient également que tout emploi en liaison avec les produits pendant la période pertinente appert avoir été effectué par April Cornell Ltd., sans qu'un contrôle ne soit exercé par la Propriétaire. La Partie requérante soutient que, bien que Mme Cornell soit présidente à la fois de la Propriétaire et de April Cornell Ltd., une relation d'affaires n'est pas suffisante, à elle seule, pour établir une licence [citant Cheung Kong Holdings Ltd c Living Realty Inc (1999), 4 CPR (4th) 71 (FC)].

[19]           Il est vrai qu'une relation d'affaires ne serait pas suffisante, à elle seule, pour établir une licence valable aux termes de l'article 50(1) de la Loi. Cependant, je conviens avec la Propriétaire que la déclaration solennelle que fait Mme Cornell au paragraphe 5 de son affidavit concernant l'existence d'une licence et l'exercice d'un contrôle est suffisante pour satisfaire aux exigences de l'article 50 de la Loi [voir Gowlings, Strathy & Henderson c Samsonite Corp (1996), 66 CPR (3d) 560 (COMC); Central Transport, Inc c Mantha & Associates (1995), 64 CPR (3d) 354 (CAF); et Federated Department Stores, Inc c John Forsyth Co (2000), 10 CPR (4th) 571 (COMC)]. J'ajouterai qu'en l'espèce, le fait que Mme Cornell soit présidente à la fois de la Propriétaire et de sa licenciée April Cornell Ltd. tend à confirmer, encore davantage, qu'un contrôle était exercé sur l'emploi que la licenciée faisait de la Marque [voir Lindy c Canada (Registraire des marques de commerce) (1999), 241 NR 362 (CAF); et Petro-Canada c 2946661 Canada Inc (1999), 83 CPR (3d) 129, p. 138 (CF 1re inst)].

[20]           J'examinerai maintenant la prétention de la Requérante selon laquelle la Marque n'était pas liée à chacun des produits spécifiés dans l'enregistrement pendant la période pertinente. Cette prétention de la Partie requérante comporte deux volets. Dans un premier temps, la Partie requérante soutient que l'enseigne extérieure du magasin et les éléments d'affichage intérieurs arborant la Marque ne constituent pas un emploi en liaison avec un quelconque produit, mais que cet affichage constitue, au mieux, un emploi de la Marque en liaison avec des services de magasin de détail.

[21]           Dans ses représentations écrites, la Propriétaire ne conteste pas la prétention de la Partie requérante sur ce point pour ce qui est de l'enseigne extérieure des magasins, et je conviendrais qu'une telle enseigne extérieure constitue un affichage et un emploi de la Marque en liaison avec des services de magasin de détail uniquement.

[22]           La Propriétaire soutient, toutefois, que l'emploi d'une marque de commerce sur des éléments d'affichage en magasin disposés à proximité immédiate des produits est considéré comme un emploi au sens de l'article 4(1) de la Loi, [Traduction] « dans la mesure où il a pour effet d'attirer l'attention des consommateurs sur la marque de commerce au moment où la propriété ou la possession des produits est transférée aux consommateurs [citant à l'appui Riches, McKenzie & Herbert LLP c Parissa Laboratories Inc (2006), 59 CPR (4th) 219, para. 14 et 15 (COMC)].

[23]           Appliquant ce raisonnement à la présente affaire, la Propriétaire soutient qu'étant donné les nombreux éléments d'affichage arborant la Marque qui se trouvent à proximité immédiate des produits et sont bien visibles au moment du transfert de la propriété ou de la possession, le consommateur ne peut pas ne pas recevoir un avis de liaison entre la Marque et les produits.

[24]           Il est vrai que la présence d'une marque de commerce sur une affiche qui se trouve à proximité immédiate des produits au moment du transfert de la possession ou de la propriété de ses produits peut satisfaire aux exigences de l'article 4(1) de la Loi. Voir, par exemple, l'utilisation d'affichettes d'étagère, d'affichettes de comptoir et d'autres éléments d'affichage ou de présentation dans les affaires suivantes : Loblaws Ltd c Richmond Breweries Ltd (1983), 73 CPR (2d) 258 (COMC); General Mills Canada Ltd c Procter & Gamble Inc (1985), 6 CPR (3d) 551 (COMC); Canadian Council of Professional Engineers c Randolph Engineering Inc (2001), 19 CPR (4th) 259, p. 262 (COMC); Lafco Enterprises Inc c Canadian Home Publishers, 2013 COMC 44; Fogler, Rubinoff LLP c Blistex Inc, 2014 COMC 181. Chaque affaire doit cependant être jugée en fonction des faits qui lui sont propres et lorsqu'il s'agit de déterminer si un avis de liaison est donné « de toute autre manière », le contexte est important. Par exemple, la question de savoir si d'autres marques de commerce sont présentes et, dans l'affirmative, s'il s'agit de marques de commerce de tiers, compte parmi les facteurs à considérer [voir, à titre d'exemple, Clark, Wilson c Myriad Innovative Designs Inc, 2001 CanLII 37728 (COMC); et Batteries Plus, LLC c La Source (Bell) Electronics Inc, 2012 COMC 202]. En d'autres termes, la présence d'une marque de commerce sur une affiche qui se trouve à proximité immédiate de produits n'est pas nécessairement déterminante. En réalité, lorsqu'il s'agit de la vente de produits de tiers, elle est souvent non pertinente.

[25]           En l'espèce, Mme Cornell atteste que les produits vendus dans les magasins de détail LA CACHE sont généralement fabriqués en Inde pour le compte de la Propriétaire. J'estime que cette affirmation est quelque peu ambiguë, car elle donne à penser que des produits de tiers sont peut-être offerts dans les magasins de détail LA CACHE.

[26]           Néanmoins, comme le montrent les photographies de la pièce B, la Marque figure bel et bien sur des éléments d'affichage qui sont situées à proximité immédiate d'un certain nombre de produits. À titre d'exemple, on peut voir qu'une affichette de comptoir arborant la Marque est posée sur le dessus d'une vitrine en verre dans laquelle est exposé un vaste assortiment de bijoux. En outre, la Marque est affichée dans des cadres et figure sur des étiquettes de comptoir qui sont positionnées un peu partout en magasin, notamment sur les rayonnages muraux, sur une table, de même que sur le dessus de présentoirs à vêtements dans lesquels sont exposés divers articles vestimentaires. La photographie montrant les présentoirs à vêtements ne permet pas, cependant, de déterminer quels produits parmi ceux spécifiés dans l'enregistrement sont exposés à proximité des affichettes de comptoirs. En outre, on peut voir que des bourses et une variété de sacs sont exposés sur les rayons muraux, bien que ces articles ne comptent pas parmi ceux spécifiés dans l'enregistrement. Quant aux autres articles qui sont exposés sur les rayons muraux, là encore, les photographies ne permettent pas de déterminer avec certitude lesquels de ces articles sont apparentés aux produits spécifiés dans l'enregistrement. Dans les cas des articles qui sont exposés sur une table, je peux distinguer du linge de table, de la verrerie, des chandelles et des chandeliers. J'admets que ces articles pourraient correspondre aux produits décrits dans l'enregistrement comme des « linges de table : […], napperons, serviettes de table, nappes » et comme de la « vaisselle : […] assiettes, verres, […] ». Aucune autre marque de commerce ne figure sur les photographies et ne semble donc être employée en conjugaison avec ces produits précis, à l'exception toutefois d'une étiquette volante qui arbore le nom April Cornell accompagné d'un élément graphique. Par conséquent, j'admets que ces produits sont, selon toute vraisemblance, les produits de la Propriétaire. Compte tenu de ce qui précède, j'admets qu'un avis de liaison à la Marque était donné uniquement à l'égard des produits spécifiés dans l'enregistrement qui sont décrits comme suit : linges de table : napperons, serviettes de table, nappes, bijoux : bagues, bracelets, colliers, épinglettes, brassards, serre-têtes, broches, boucles d'oreilles; vaisselle : assiettes, verres.

[27]           Dans le cas des autres produits spécifiés dans l'enregistrement, cependant, soit la Marque n'est pas affichée à proximité immédiate de ces produits, de façon à donner au consommateur un avis de liaison entre la Marque et ces produits, soit les photographies ne permettent pas de déterminer avec certitude à quels produits, parmi ceux spécifiés dans l'enregistrement, ces produits correspondent ou s'apparentent. Qui plus est, bon nombre des produits qui figurent sur les photographies semblent porter des étiquettes fixes ou volantes qui, bien qu'on ne voit pas très bien, peuvent arborer d'autres marques de commerce. À titre d'exemple, une affichette de vente qui semble arborer la mention « JAG jeans » est fixée à une table sur laquelle est exposé un assortiment de pantalons. De ce fait, et compte tenu de l'absence de déclarations précises à cet égard dans l'affidavit de Mme Cornell, il m'est impossible de déterminer si les autres produits spécifiés dans l'enregistrement sont des produits LA CACHE ou des produits de tiers arborant des marques de commerce de tiers. Par conséquent, j'estime que la preuve relative à l'emploi de la Marque sur des éléments d'affichage en magasin est ambiguë en ce qui concerne les autres produits spécifiés dans l'enregistrement, de sorte qu'il m'est impossible de conclure qu'un avis de liaison entre la Marque et ces produits était donné aux consommateurs, au sens de l'article 4(1) [voir Plough (Canada) Ltd c Aerosol Fillers Inc (1980), 53 CPR (2d) 62 (CAF)].

[28]           La seconde observation que formule la Partie requérante relativement à sa prétention selon laquelle la Marque n'était pas liée à chacun des produits spécifiés dans l'enregistrement pendant la période pertinente concerne les reçus de caisse de la pièce B. À cet égard, la Partie requérante soutient que les reçus de caisse indiquent que des chemisiers et des poignées pour le four figurent parmi les articles vendus pendant la période pertinente. La Partie requérante ajoute que bien qu'il soit fait mention de la catégorie générale « bijoux » sur certains reçus de caisse, ces derniers n'indiquent pas quels articles de bijouterie ont été vendus exactement. Partant du principe que l'emploi de la Marque doit être établi en liaison avec chacun des produits spécifiés dans l'enregistrement, la Partie requérante soutient que les reçus de caisse ne permettent pas de conclure que la Marque a été employée avec les produits spécifiés dans l'enregistrement excepté, dans l'hypothèse la plus optimiste, avec des chemisiers pour dames et des poignées pour le four.

[29]           La Propriétaire soutient, pour sa part, que, bien que les éléments d'affichage en magasin et les reçus de caisse ne constituent pas une preuve directe que la Propriétaire a réalisé des ventes de tous les produits spécifiés dans l'enregistrement, la preuve est néanmoins suffisante pour justifier le maintien de l'enregistrement à l'égard de tous les produits, car ces derniers appartiennent aux mêmes [Traduction] « catégories générales » (s'appuyant sur Saks & Co c Canada (Registraire des marques de commerce) (1989) 24 CPR (3d) 49 (CF 1re inst)]. En outre, la Propriétaire invoque les reçus de caisse comme preuve qu'un avis de liaison entre la Marque et les produits fût donné au moment du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits. Je commencerai par examiner cette dernière observation.

[30]           La Propriétaire fait valoir que la Marque est imprimée au haut des reçus de caisse en gros caractères et dans une police stylisée comportant des éléments graphiques qui diffère du reste du texte, ce qui la fait ressortir et la distingue des autres renseignements figurant sur les reçus. Elle fait également valoir que la Marque n'est pas employée à titre de dénomination sociale, puisque le nom et l'adresse de la société sont imprimés dans une police et une taille de caractères différentes sous les mots « LA CACHE ». Je souscris à toutes ces observations.

[31]            La Propriétaire soutient qu'un client se voyant remettre un reçu de caisse comprendrait immédiatement que « LA CACHE » est une marque de commerce liée aux produits qu'il vient tout juste d'acheter, compte tenu surtout qu'elle est affichée sur différents éléments d'affichage en magasin et enseignes fixées aux rayons, etc. à proximité immédiate des produits offerts en vente.

[32]           À cet égard, la Propriétaire cite Hortilux Schreder BV c Iwasaki Electric Co, 2011 CF 967, au para. 60 à 64, conf. par 2012 CAF 321, qui traite des facteurs à prendre à considération pour déterminer si la présence d'une marque de commerce au haut d'une facture (ou par analogie au haut d'un reçu de caisse comme en l'espèce) constitue un emploi au sens de l'article 4(1) de la Loi. Ces facteurs comprennent, ainsi que l'a correctement indiqué la Propriétaire, la place prédominante occupée par la marque de commerce sur les reçus de caisse et la question de savoir si la marque de commerce se distingue des autres renseignements ou coordonnées de l'entreprise.

[33]           Cependant, tel qu'il est indiqué dans Hortilux, d'autres facteurs doivent également être pris en considération, notamment les questions de savoir s'il apparaît clairement que les produits vendus sont ceux d'un seul fabricant et si d'autres marques de commerce figurent sur les reçus (dans le corps du texte ou ailleurs). En l'espèce, comme je l'ai souligné précédemment, on ne sait pas très bien si des produits de tiers sont également vendus dans les magasins de détail LA CACHE, et cette ambiguïté est renforcée par les descriptions de produits qui figurent sur les reçus de caisse, telles que [Traduction] « Chemisiers pour dames Guinevere », « Hauts pour dames Blake », et « Robes pour fillettes Blossom ». Je suis donc d'avis, du fait de ces ambiguïtés, que les consommateurs seraient plus enclins à percevoir la mention LA CACHE qui figure sur les reçus de caisse comme le nom du magasin. Par conséquent, un tel emploi constituerait un emploi de la Marque au sens de l'article 4(2) de la Loi en liaison avec des services de magasin de détail, plutôt qu'un emploi donnant un avis de liaison entre la Marque et un ou plusieurs produits particuliers, comme l'exige l'article 4(1) de la Loi.

[34]           Les reçus de caisse fournissent, cependant, une preuve corroborant le fait que des ventes de produits liés à la Marque par l’entremise des éléments d'affichage présents en magasin ont eu lieu dans la pratique normale du commerce pendant la période pertinente. À cet égard, je ne souscris pas à la prétention de la Partie requérante selon laquelle il incombait à la Propriétaire de fournir des reçus de caisse pour chacun des produits spécifiés dans l'enregistrement. Il est clair que les reçus de caisse sont représentatifs, en particulier lorsque l'on considère les chiffres de ventes substantiels dont témoigne Mme Cornell. Qui plus est, je suis disposée à inférer, compte tenu des recettes de vente substantielles réalisées aux deux magasins de détail LA CACHE, que les produits liés à la Marque par l’entremise des éléments d'affichage présents en magasin comptent pour au moins une part de ces ventes. En effet, je souligne qu'aucun type de preuve en particulier, ce qui inclut les factures et les reçus de caisse selon le cas, n'est exigé en réponse à un avis en vertu de l'article 45 [voir Lewis Thomson & Sons Ltd c Rogers, Bereskin & Parr (1988), 21 CPR (3d) 483 (CF)].

[35]           Cependant, contrairement à la Propriétaire, je ne considère pas que la preuve est suffisante pour justifier le maintien de l'enregistrement de la Marque à l'égard de l'ensemble des produits spécifiés dans l'enregistrement. D'abord, à la différence de la preuve qui avait été produite dans Saks, précitée, je ne considère pas qu'en l'espèce des exemples représentatifs de l'emploi de la Marque ont été fournis à l'égard de chaque catégorie de produits spécifiée dans l'enregistrement. Qui plus est, Mme Cornell n'affirme nulle part de façon claire dans son affidavit que la Marque a été employée en liaison avec chacun des produits pendant la période pertinente, et n'a pas non plus présenté des faits suffisants pour permettre au Registraire de conclure que la Marque était employée en liaison avec chacun des produits.

Décision

[36]           Compte tenu de ce qui précède, dans l'exercice des pouvoirs qui me sont délégués en vertu de l'article 63(3) de la Loi, l'enregistrement no LMC339,381 sera modifié, conformément aux dispositions de l'article 45 de la Loi afin de supprimer les produits suivants [Traduction] :

Vêtements pour dames et pour hommes (excepté sous-vêtements) : chaussures et bottes, sandales, pantoufles, bas et jambières, pantalons, pantalons décontractés, combinaisons, jumpers, chemises de nuit, pyjamas, robes de nuit, shorts, salopettes, blousons, manteaux, pardessus, ponchos, robes, jupes, chemisiers, chemises, chandails, gilets et cardigans, chapeaux, foulards, gants, mitaines; linges de lit [...] : draps, taies d'oreiller, couvertures, coussins, housses de couette, housses de coussin; [...] : tasses, soucoupes, assiettes, [...], plateaux de service, cristal, articles en cristal; articles ménagers : paniers, lampes, mobilier, tapis; cadeaux et objets d'art : toiles, blocs-notes, affiches, supports pour serviettes de table, papier d'emballage et cartes de souhaits.

[37]           L'état déclaratif des produits modifié sera libellé comme suit [Traduction] :

Linges de table : napperons, serviettes de table, nappes, bijoux : bagues, bracelets, colliers, épinglettes, brassards, serre-têtes, broches, boucles d'oreilles; vaisselle : assiettes, verres.

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Kathryn Barnett

Agente d'audience

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

Judith Lemire, trad.

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