Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

PROCÉDURE PRÉVUE À L’ARTICLE 45

MARQUE DE COMMERCE : INTERNATIONAL-LAMONT

NO D’ENREGISTREMENT : LMC610931

 

 

[1]                           Le 6 juillet 2007, à la demande de De Grandpré Chait LLP (la Partie requérante), le registraire a envoyé l'avis prévu à l'article 45 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13 (la Loi), à Indeck Boiler Corporation (l’Inscrivante), propriétaire inscrite de la marque de commerce susmentionnée (la Marque), laquelle est enregistrée pour emploi en liaison avec des « [c]haudières à eau chaude, chaudières à vapeur et chaudières de chauffage au mazout » (les Marchandises).

 

[2]                           L’article 45 de la Loi enjoint au propriétaire inscrit de la marque de commerce de montrer, à l'égard de chacune des marchandises ou de chacun des services que spécifie l'enregistrement, si la marque de commerce a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois ans précédant la date de l'avis et, dans la négative, la date où elle a été ainsi employée en dernier lieu et la raison de son défaut d'emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour cette preuve est la période allant du 6 juillet 2004 au 6 juillet 2007 (la période pertinente).

 

[3]                           L’« emploi » en liaison avec des marchandises est défini aux paragraphes 4(1) et (3) de la Loi :

4. (1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des marchandises si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces marchandises, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les marchandises mêmes ou sur les colis dans lesquels ces marchandises sont distribuées, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux marchandises à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[]

(3) Une marque de commerce mise au Canada sur des marchandises ou sur les colis qui les contiennent est réputée, quand ces marchandises sont exportées du Canada, être employée dans ce pays en liaison avec ces marchandises.

 

C’est le paragraphe 4(1) qui s’applique en l’espèce.

 

[4]                           En réponse à l’avis du registraire, l’Inscrivante a produit un affidavit souscrit par son directeur général − Opérations canadiennes, M. André Granger, accompagné des pièces P-1 à P-5. Les deux parties ont produit un plaidoyer écrit et toutes deux étaient représentées à l’audience.

 

[5]                           Dans son affidavit, M. Granger déclare que l’Inscrivante est une société constituée en Nouvelle‑Écosse, dont la principale activité est la fabrication et la distribution de chaudières et appareils de chauffage au Canada. L’Inscrivante est une filiale en propriété exclusive d’Indeck Power Manufacturing Inc. (Indeck USA), une société américaine qui, suivant les déclarations de M. Granger, est l’un des plus importants fabricants et distributeurs de systèmes de génération de vapeur.

 

[6]                           M. Granger déclare que l’Inscrivante et ses prédécesseurs en titre, Volcano et IBW, ont employé la Marque sans interruption dans tout le Canada pendant la période pertinente, ajoutant que la Marque est employée au moins depuis la date indiquée dans l’enregistrement, à savoir depuis le mois de décembre 1989.

 

[7]                           À l’appui de son affidavit au sujet de l’emploi de la Marque, M. Granger a joint les pièces suivantes :

        la pièce P-2, qui consiste en une feuille de papier à en‑tête où diverses marques de commerce, dont la Marque, apparaissent dans la partie inférieure; bien que M. Granger ait affirmé que l’Inscrivante a utilisé ce papier à en‑tête pendant toute la période pertinente pour écrire à ses clients canadiens, je relève qu’il porte l’adresse du siège social d’Indeck – Power Equipment Company en Illinois, ainsi que celle d’une « usine » à St-Hyacinthe, au Québec;

        la pièce P-3 consiste en un [traduction] « document publicitaire » dont la page couverture porte diverses marques de commerce, dont la Marque. Bien que M. Granger déclare que ce document était distribué pendant la période pertinente aux clients canadiens de l’Inscrivante, je constate qu’il indique l’adresse du siège social d’Indeck en Illinois. Comme pour le papier à en‑tête, ce document émane d’Indeck Power Equipment Company, une société américaine. Au bas de la brochure, on peut lire l’inscription Indeck Keystone Energy, LLC; il s’agit d’une société américaine, décrite comme un [traduction] « cabinet d’ingénierie » situé à Erie, en Pennsylvanie; l’Inscrivante est décrite comme une [traduction] « installation de fabrication » située à St-Hyacinthe, au Québec;

        la pièce P-4 consiste en un catalogue non daté décrivant les chaudières et appareils de chauffage INTERNATIONAL-LAMONT. M. Granger déclare que ce catalogue a été distribué aux clients canadiens de l’Inscrivante pendant la période pertinente, mais je relève qu’il émane du prédécesseur en titre de celle‑ci, IBW, une société américaine située en Pennsylvanie. Je ne dispose d’aucun renseignement sur le moment où IBW est devenue l’Inscrivante ou a fusionné avec elle. Le catalogue me semble quelque peu désuet. La mention « Bulletin 3400B. IM-8-90 » dans le coin inférieur droit de la page couverture peut ou non indiquer que le document a été préparé au mois d’août 1990 mais, quoi qu’il en soit, elle ne fait pas nécessairement conclure que le catalogue ne servait pas pendant la période pertinente. Des photos des installations centralisées de chauffage de cinq campus, dont celui du collège communautaire de St-Clair à Windsor (Ontario) figurent sur la page couverture. La date des installations n’est pas fournie;

        la pièce P-5 est la photo d’une plaque apposée sur les produits de l’Inscrivante. M. Granger déclare que cette pièce [traduction] « montre clairement la [Marque] sur la plaque et indique que la chaudière a été fabriquée en 2005, c.‑à‑d. pendant la période pertinente, et vendue peu après ».

 

[8]                           M. Granger déclare au paragraphe 15 de son affidavit que [traduction] « dans le secteur de la chaudronnerie et, plus particulièrement, dans le segment du marché qu’occupent les chaudières INTERNATIONAL-LAMONT, le prix de chaque produit peut se chiffrer en dizaines voire en centaines de dollars, et il est donc inévitable que, dans un marché comme le Canada, le nombre de produits vendus soit très peu élevé ».

 

[9]                           M. Granger ajoute, au paragraphe 17, que [traduction] « la nature des [M]archandises – la taille, le prix, le fait que quelques chaudières seulement sont vendues chaque année – fait qu’à l’exception des plaques, il n’y a pas d’autocollant, d’étiquette ou de logo apposé sur les chaudières ».

 

[10]                       M. Granger conclut son affidavit en disant que l’Inscrivante [traduction] « a vendu des chaudières à eau chaude, des chaudières à vapeur et des chaudières de chauffage au mazout en liaison avec la Marque pendant la période pertinente et continue à en vendre ».

 

[11]                       Pour la Partie requérante, l’affidavit de M. Granger n’établit pas que la Marque a été employée pendant la période pertinente et il ne fait pas non plus état de circonstances particulières justifiant le défaut d’emploi. Je suis du même avis.

 

[12]                       On ne voit pas bien quelle est la pratique normale du commerce de l’Inscrivante au Canada. M. Granger affirme que l’Inscrivante est une filiale en propriété exclusive d’Indeck USA et qu’elle est successeur en titre d’IBW, mais il reste qu’il n’explique pas quelle entité fait quoi et à quel moment et qu’il ne fait état d’aucun accord de licence, écrit ou verbal, entre l’Inscrivante et Indeck USA au sujet de l’emploi de la Marque. Il est bien établi que la structure de l’entreprise ne permet pas, à elle seule, d’établir qu’une marque est employée au Canada en vertu d’une licence et que cet emploi est contrôlé par l’inscrivant [voir MCI Communications Corp. c. MCI Multinet Communications Inc. (1995), 61 C.P.R. (3d) 245 et Dynatech Automation Systems Inc. c. Dynatech Corp. (1995), 64 C.P.R. (3d) 101].

 

[13]                       Les pièces P-2 à P-4 ne sont d’aucun secours pour ce qui est de préciser la pratique normale du commerce de l’Inscrivante ou d’établir quelle(s) entité(s) emploient la Marque. En outre, les brochures publicitaires et le papier à en‑tête du genre de ceux qui constituent ces pièces ne peuvent être considérés comme un emploi de la marque en liaison avec les Marchandises [voir Burroughs Wellcom Inc. c. Kirby, Shapiro, Eades & Cohen, (1983) 73 C.P.R. (2d) 13]. Ces pièces n’indiquent pas comment la Marque est apposée sur les Marchandises ou sur leur emballage ni si elle est liée aux Marchandises d’une quelconque autre manière. Il n’a pas non plus été prouvé que les pièces P-2 à P-4 accompagnent les Marchandises au moment du transfert de propriété.

 

[14]                       La pièce P-5 n’est pas non plus utile à l’Inscrivante car elle ne fait qu’établir qu’une chaudière a été construite en 2005. M. Granger n’a fourni aucun renseignement comme l’identité du client ou la date de la vente. Il importe de signaler que M. Granger ne fournit aucune donnée concernant le chiffre d’affaires de l’inscrivante et qu’il n’a pas non plus soumis d’échantillon de facture démontrant que des Marchandises ont été vendues au Canada.

 

[15]                       De plus, bien que le maintien d’un enregistrement ne requière pas de degré minimal d’activité commerciale [voir Vogue Brassiere Inc. c. Sim & McBurney (2000), 5 C.P.R. (4th) 537, à la page 549 (C.F. 1re inst.)], j’estime que les déclarations précitées faites par M. Granger aux paragraphes 15 et 17 de son affidavit renferment des ambiguïtés. Il affirme que très peu d’unités sont vendues dans le segment du marché qu’occupent les chaudières INTERNATIONAL-LAMONT, mais il dit aussi qu’en raison de la nature des Marchandises, seuls quelques produits sont vendus [traduction] « chaque année ». On ne voit pas clairement si M. Granger tente d’invoquer la nature des Marchandises de l’Inscrivante à titre de circonstance exceptionnelle justifiant le non‑emploi de la Marque pendant la période pertinente.

 

[16]                       Il n’est pas difficile de comprendre que des marchandises aussi coûteuses et perfectionnées que celles de l’Inscrivante ne soient pas vendues tous les jours et que les ventes puissent même être très espacées dans le temps [voir Country-Wide Automotive Ltd. c. CWA Constructions S.A., (1994) 57 C.P.R. (3d) 435 (C.O.M.C.)], mais la preuve dans son ensemble ne me permet pas de faire les inférences nécessaires pour conclure que, pendant la période pertinente, la Marque a été employée au sens du paragraphe 4(1) de la Loi en liaison avec les Marchandises ou qu’il existe des circonstances exceptionnelles justifiant le non‑emploi.

 

[17]                       Certes, la procédure prévue à l’article 45 n’exige pas la présentation d’une preuve surabondante, mais il faut que soit établi un nombre de faits suffisant pour étayer la conclusion qu’il y a emploi. S’agissant de l’examen des affidavits, il faut également prendre en compte ce qu’ils ne disent pas. Ainsi, on peut lire à la page 198 de la décision Aerosol Fillers Inc. c. Plough (Canada) Ltd. (1980), 45 C.P.R. (2d) 194 :

 

Les allégations consignées dans un affidavit doivent être précises, surtout lorsqu'il s'agit d'un affidavit produit conformément à l'article 44(2) [aujourd'hui le paragraphe 45(2)] car il constitue alors la seule preuve que le registraire est autorisé à recevoir. L'affidavit ne doit donc pas être sujet à plus d'une interprétation; si tel est le cas, il convient alors d'adopter l'interprétation qui va à l'encontre de l'intérêt de la partie pour laquelle le document a été rédigé.

 

[18]                       M. Granger n’a formulé que des affirmations générales d’emploi; il n’a pas présenté de faits démontrant l’emploi.

 

[19]                       Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, l’enregistrement sera radié conformément aux dispositions de l’article 45 de la Loi.

 

FAIT à Montréal (Québec), le 9 novembre 2009.

 

 

 

Annie Robitaille

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

 

 

Traduction certifiée conforme

Ghislaine Poitras, LL.L., Trad. a.

 

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