Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2016 COMC 108

Date de la décision : 2016-07-05

[TRADUCTION CERTIFIÉE,
NON RÉVISÉE]

DANS L'AFFAIRE DE L'OPPOSITION

 

 

Wonderful Citrus LLC

Opposante

et

 

Sunkist Growers, Inc.

Requérante

 

 

 



 

1,606,601 pour la marque de commerce THE ULTIMATE DIET DRINK

 

Demande

I           Contexte

[1]               Le 13 décembre 2012, la Requérante a produit une demande d'enregistrement pour la marque de commerce THE ULTIMATE DIET DRINK. La demande est fondée sur l’emploi projeté au Canada et elle vise les produits [Traduction] « citrons frais et eau citronnée » et les services « services d'éducation sur les bienfaits des citrons et de l'eau citronnée ».

[2]               La demande pour la Marque a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 2 juillet 2014. Le 2 septembre 2014, la prédécesseure en titre de l’Opposante (Paramount Citrus LLC) s'est opposée à la demande pour la Marque en produisant une déclaration d’opposition, conformément aux dispositions de l'article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T‑13 (la Loi).

[3]               Les motifs d'opposition sont les suivants : i) la demande n'est pas conforme aux exigences des articles 30e), 30h) et 30i) de la Loi; ii) la Marque n'est pas enregistrable suivant l'article 12(1)d) de la Loi, car elle crée de la confusion avec la marque de commerce déposée ULTIMATE de l'Opposante (enregistrement no LMC398,518) qui vise des [Traduction] « fruits frais »; iii) la Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la Marque suivant l'article 16(3)a) de la Loi compte tenu de l'emploi antérieur par l'Opposante (ou sa prédécesseure en titre) de sa marque de commerce ULTIMATE en liaison avec les produits susmentionnés; et iv) la Marque n'est pas distinctive au sens de l'article 2 de la Loi.

[4]               Le 4 novembre 2014, la Requérante a produit une contre-déclaration dans laquelle elle nie l'ensemble des allégations formulées dans la déclaration d'opposition.

[5]               Comme preuve à l'appui de son opposition, l'Opposante a produit une copie certifiée de son enregistrement, ainsi que l'affidavit de Craig B. Cooper, souscrit le 2 mars 2015 (l'affidavit Cooper). M. Cooper n'a pas été contre-interrogé. Comme preuve à l'appui de sa demande, la Requérante a produit l'affidavit de Barbara Gallagher, souscrit le 17 juin 2015 (l'affidavit Gallagher). Mme Gallagher n'a pas été contre-interrogée.

[6]               Les parties ont toutes deux produit un plaidoyer écrit et étaient toutes deux présentes à l'audience qui a été tenue.

II         Fardeau de preuve

[7]               La Requérante a le fardeau ultime d'établir, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. L'Opposante a toutefois le fardeau de preuve initial de présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l'existence des faits allégués à l'appui de chacun des motifs d'opposition [John Labatt Limited c The Molson Companies Limited (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst) à la p 298].

III        Analyses

            Motifs d'opposition abandonnés

[8]               À l'audience, l'Opposante a abandonné les motifs d'opposition fondés sur les articles 30e) et 30h) de la Loi, tels qu'ils sont formulés aux paragraphes 1.1 et 1.2 de la déclaration d'opposition. Je ne traiterai donc pas de ces motifs d'opposition dans ma décision.

[9]               En outre, l'Opposante a indiqué qu'elle maintenait le motif d'opposition fondé sur l'article 30e) de la Loi, tel qu'il est formulé au paragraphe 1.3 de la déclaration d'opposition, uniquement à l'égard de [Traduction] « l'eau citronnée ». Par conséquent, j'évaluerai ce motif d'opposition au regard uniquement de [Traduction] « l'eau citronnée ».

Analyse des autres motifs d’opposition

Non-conformité – article 30e)

[10]           L'Opposante allègue que, en contravention de l'article 30e), la Requérante n'avait pas l'intention d'employer la Marque au Canada en liaison avec les produits et services énoncés dans la demande. Comme je l'ai mentionné ci-dessus, l'Opposante a indiqué qu'elle maintenait ce motif d'opposition uniquement en ce qui a trait à [Traduction] « l'eau citronnée ».

[11]           L'article 30e) de la Loi exige qu'un requérant fasse une déclaration portant qu'il a l'intention d'employer la marque de commerce visée par la demande au Canada, lui-même ou par l'entremise d'un licencié. La demande contient une telle déclaration. Elle est donc conforme aux exigences de l’article 30e) de la Loi, quant à la forme. Dans ce contexte, je dois maintenant déterminer si quoi que ce soit dans la preuve met en doute la conformité de la demande à cet article.

[12]           Comme il a été souligné dans Tune Masters c Mr P's Mastertune Ignition Services Ltd (1986), 10 CPR (3d) 84 à la p 89 (COMC) : [Traduction] « il est difficile pour un opposant de prouver une allégation de défaut d'emploi par un requérant, car le requérant a d’emblée accès aux faits pertinents ». Bien que ces commentaires concernent un motif d'opposition fondé sur l'alinéa 30b) de la Loi, ils s'appliquent tout autant à un motif d'opposition fondé sur l'alinéa 30e) [105272 Canada Inc c Grands Moulins de Paris, Société Anonyme (1990), 31 CPR (3d) 79 (COMC)]. Ainsi, dans la mesure où un requérant a plus facilement accès aux faits, le fardeau de preuve dont doit s'acquitter l'opposant à l'égard du motif d'opposition fondé sur la non-conformité à l'article 30e) est moins exigeant [Tune Masters, supra].

[13]           Pour s'acquitter de son fardeau initial à l'égard de l'article 30e), l'Opposante peut s'appuyer aussi bien sur sa propre preuve que sur la preuve de la Requérante [Labatt Brewing Company Limited c Molson Breweries, a Partnership (1996), 68 CPR (3d) 216 (CF 1re inst)]. Cependant, l'Opposante ne peut invoquer avec succès la preuve de la Requérante pour s'acquitter de son fardeau initial que si l'Opposante démontre que la preuve de la Requérante met en doute les revendications formulées dans la demande de la Requérante [Corporativo de Marcas GJB, SA de CV c Bacardi & Company Ltd 2014 CF 323 aux para 30 à 38 (CanLII); Garbo Group Inc c Glamour Secrets Pro Inc, 2016 COMC 59 (CanLII) au para 48].

[14]           À l'audience, l'Opposante a indiqué qu'elle s'appuyait sur l'affidavit Gallagher pour s'acquitter de son fardeau initial à l'égard de ce motif d'opposition. Mme Gallagher est une assistante juridique à l'emploi de l'agent de la Requérante [para 1]. Le 25 avril 2015, elle a consulté la Base de données sur les marques de commerce canadienne et a fait imprimer des copies d'un certain nombre d'enregistrements et de demandes pour des marques contenant le terme ULTIMATE [para 2; pièces A1 à A28]. L'une de ces demandes est la demande pour la Marque de la Requérante [pièce A8]. Entre le 8 juin 2015 et le 16 juin 2015, Mme Gallagher a ensuite effectué des recherches sur Internet dans le but de repérer des sites Web liés aux marques de commerce présentées aux pièces A1 à A28 et elle a joint à son affidavit des imprimés tirés de certains de ces sites Web comme pièces B1 à B17 [para 3]. C'est la pièce B4 que l'Opposante invoque à l'égard de son motif fondé sur l'article 30e).

[15]           La pièce B5 est constituée de deux imprimés tirés du site Web de la Requérante, arborant la Marque. Il n'apparaît pas clairement que le site Web est canadien. Le premier imprimé présente un corps de texte sous la Marque qui suggère de prendre la « Ultimate Diet Drink Break » [pause « Ultimate Diet Drink » (boisson minceur par excellence)] et de s'offrir un « tall, cool glass of water flavored with the juice of one Sunkist lemon » [un grand verre d'eau fraîche aromatisée avec le jus d'un citron Sunkist]. Le second imprimé est intitulé « Sunkist Citrus Fruit Uses and Information » [Information sur les agrumes Sunkist et leurs utilisations] et commence par la phrase « What I Want…Sunkist Lemons & Water The Ultimate Diet Drink » [Ce que je veux... des citrons Sunkist et de l'eau, la boisson minceur par excellence].

[16]           L'Opposante soutient que ces documents montrent que la Requérante à l'intention d'employer la Marque uniquement en liaison avec des citrons frais qui peuvent être ajoutés dans un verre d'eau et non en liaison avec de [Traduction] « l'eau citronnée » en soi.

[17]           Je ne considère pas que cette preuve est suffisante pour permettre à l'Opposante de s'acquitter de son fardeau de preuve initial à l'égard de ce motif d'opposition. Premièrement, il est postérieur à la date pertinente pour l'évaluation de ce motif. Deuxièmement, la demande est fondée sur l'emploi projeté au Canada et il n'apparaît pas clairement que le site Web est canadien. Ainsi, ce document peut, ou pas, refléter avec exactitude les plans éventuels de la Requérante en ce qui concerne l'emploi de sa Marque au Canada. Troisièmement, comme l'a fait observer la Requérante, le simple fait que l'Opposante fournisse sur son site Web des instructions quant à la façon dont les consommateurs peuvent fabriquer leur propre [Traduction] « eau citronnée » ne signifie pas nécessairement que la Requérante elle-même n'a pas l'intention de vendre un tel produit.

[18]           En conséquence, ce motif d'opposition est rejeté.

Non-conformité – article 30i)

[19]           Lorsqu'un requérant a fourni la déclaration exigée à l'article 30i), un motif d'opposition fondé sur cet article ne devrait être accueilli que dans des cas exceptionnels, comme lorsqu'il existe une preuve que le requérant est de mauvaise foi [Sapodilla Co Ltd c Bristol-Myers Co (1974), 15 CPR (2d) 152 (COMC) à la p 155]. Le simple fait de connaître l'existence de la marque de commerce d'un opposant ne peut pas, en soi, servir de fondement à une allégation selon laquelle un requérant ne pouvait pas être convaincu de son droit à l'emploi de la Marque [Woot, Inc c WootRestaruants Inc Les Restaurants Woot Inc 2012 COMC 197 (CanLII)]. La demande pour la Marque contient la déclaration exigée et rien dans la preuve n'indique que la présente espèce est un cas exceptionnel.

[20]           En conséquence, ce motif est également rejeté.

Enregistrabilité – article 12(1)d)

[21]           L'Opposante allègue que la Marque n'est pas enregistrable parce qu'elle crée de la confusion avec sa marque de commerce déposée ULTIMATE (enregistrement no LMC398,518) employée en liaison avec des [Traduction] « fruits frais ».

[22]           La date pertinente pour évaluer un motif d'opposition fondé sur l'article 12(1)d) est la date de ma décision [Park Avenue Furniture Corporation c Wickes/Simmons Bedding Ltd et le Registraire des marques de commerce (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)].

[23]           J'ai exercé mon pouvoir discrétionnaire de consulter le registre et je confirme que l'enregistrement de l'Opposante existe bel et bien [Quaker Oats Co of Canada c Menu Foods Ltd (1986), 11 CPR (3d) 410 (COMC)]. L'Opposante s'étant acquittée de son fardeau initial à l’égard de ce motif, la Requérante doit établir, selon la prépondérance des probabilités, qu'il n'existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et la marque de commerce ULTIMATE de l'Opposante.

Test en matière de confusion

[24]           Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. L'article 6(2) de la Loi prévoit que l'emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

[25]           Le test doit être appliqué sous l'angle de la première impression que laisse dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé la vue de la marque en liaison avec les services de la Requérante alors que ce consommateur n'a qu’un souvenir imparfait de la marque de commerce ULTIMATE de l'Opposante et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner de près les ressemblances et les différences entre les marques [Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23 au para 20]. La question qui se pose est de savoir si cette personne serait portée à conclure que les produits et services de la Requérante sont fabriqués, vendus, loués, retenus ou exécutés par l'Opposante.

[26]           Lorsqu'il applique le test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce, y compris celles expressément énoncées à l'article 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de produits, services ou entreprises; d) la nature du commerce; et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Le poids qu'il convient d'accorder à chacun de ces facteurs n'est pas nécessairement le même [Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc (2006), 49 CPR (4th) 321 (CSC) et Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc (2011), 92 CPR (4th) 361 (CSC)].

Article 6(5)a) – le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[27]           Les marques des parties possèdent toutes deux un caractère distinctif inhérent plutôt faible en raison de la nature laudative du terme « ultimate » [suprême; par excellence]. À l'audience, les parties ont concédé que le mot « ultimate » [suprême; par excellence] est laudatif et ont admis qu'il a la même signification dans chacune des marques.

[28]           Une marque de commerce peut aussi acquérir un caractère distinctif en devenant connue par la promotion ou l'emploi. Cependant, en l'espèce, la Requérante n'a pas démontré la promotion et l'emploi de sa Marque et la preuve de l'Opposante est insuffisante à de nombreux égards.

[29]           Selon l'affidavit Cooper, l'Opposante (ou sa prédécesseure en titre) vend des fruits frais en liaison avec la marque de commerce ULTIMATE, au Canada, depuis au moins aussi tôt que novembre 1987 [para 3]. M. Cooper affirme que l'Opposante a depuis réalisé des ventes continues et abondantes de fruits frais au Canada, en liaison avec sa marque de commerce [para 6]. Il fournit les ventes annuelles totales approximatives et les ventes en cageots pour les années 2011 à 2014. Les ventes approximatives en cageots pour ces années varient de 247 000 à 452 000 et la valeur approximative des ventes pour ces années varie de 3 600 000 $ à 5 400 000 $.

[30]           Comme pièce 2 sont joints à l'affidavit de M. Cooper des exemples de factures représentatives établissant des ventes de fruits frais réalisées par l'Opposante au Canada en liaison avec sa marque de commerce [para 7].

[31]           M. Cooper affirme que la marque de commerce de l'Opposante figure bien en vue sur l'emballage et l'étiquette des fruits frais vendus en liaison avec la marque et qu'il a en toujours été ainsi depuis 1987 [para 8]. Comme pièce 3 sont joints des imprimés des spécifications d'emballage des produits présentant la marque de commerce de l'Opposante.

[32]           Il convient de souligner que la marque de commerce de l'Opposante figure sur l'emballage uniquement parmi d'autres éléments descriptifs (c.-à-d. tels que « ultimate sweet California mandarins » [mandarines sucrées de Californie par excellence), dont on pourrait dire qu'ils contribuent à renforcer ou à accentuer sa nature laudative. Elle ne figure nulle part sur l'emballage sans être accompagnée d'éléments descriptifs, et l'Opposante n'a fourni aucun autre élément de preuve à cet égard. Le seul autre élément de preuve au dossier qui montre la marque est l'affidavit Gallagher [pièce 15]. Il contient un imprimé tiré du site Web de la Requérante dans lequel on retrouve les termes suivants : « ultimate limes » [limes par excellence], « ultimate lemons » [citrons par excellence] et « ultimate oranges » [oranges par excellence].

[33]           Je souligne que la facture jointe comme pièce 2 à l'affidavit de M. Cooper fait mention d'une multitude de noms commerciaux/d'entreprise, dont Paramount Citrus, Paramount Citrus Cooperative, Paramount Growers Cooperative, Inc. et Paramount Consolidated LLC. Cependant, elles ne font pas mention du nom de la prédécesseure en titre de l'Opposante (Paramount Citrus LLC), qui est l'entité qui était propriétaire de la marque de commerce au moment où l'affidavit de M. Cooper a été souscrit et au moment où la présente procédure d'opposition a été engagée. Il n'y a aucune indication dans l'affidavit de M. Cooper selon laquelle la marque a été employée sous licence par l'une quelconque de ces entités et M. Cooper n'a pas expliqué la nature de la relation entre ces entités et l'Opposante ou sa prédécesseure. En l'absence de renseignements ou d'explications supplémentaires à cet égard, il m'est impossible d'inférer qu'un quelconque emploi associé à ces factures s'appliquerait au profit de l'Opposante conformément à l'article 50 de la Loi, et je suis d'avis que ces factures n'aident en rien l'Opposante à établir l'emploi ou le caractère distinctif de sa marque.

[34]           L'emballage joint comme pièce 3 à l'affidavit de M. Cooper pose problème pour des raisons similaires. L'emballage comprend une indication selon laquelle le produit est emballé par une entité du nom de « Paramount Citrus Packing Company », ainsi qu'une indication selon laquelle les mots et les images sont des marques de commerce de [Traduction] « Paramount Citrus ou ses affiliées » et sont protégées par des droits d'auteur. L'avis de droit d'auteur fait ensuite mention du nom de la prédécesseure en titre de l'Opposante (Paramount Citrus LLC). J'admets que la plupart des consommateurs comprendraient que l'établissement d'emballage n'est pas nécessairement la source ou le producteur des produits, mais simplement un établissement d'emballage. En ce qui concerne l'avis de droit d'auteur, je reconnais qu'il fait mention de la prédécesseure de l'Opposante. Cependant, vu sa taille et son emplacement sur l'emballage, ainsi que ce qui le précède, je ne considère pas qu'il équivaut à une quelconque indication claire quant à la propriétaire de la marque ou à la source des produits.

[35]           À mon sens, ces lacunes mettent en doute le fait que les chiffres de ventes fournis au paragraphe 6 de l'affidavit de M. Cooper peuvent être attribués exclusivement à l'Opposante.

[36]           Enfin, je souligne que M. Cooper n'a pas fourni le moindre renseignement concernant la publicité ou la promotion des produits liés à la marque de commerce de l'Opposante, pas plus qu'il n'a fourni de dépenses publicitaires.

[37]           Compte tenu de ce qui précède, je ne suis pas disposée à conclure que la marque de commerce de l'Opposante a acquis un important caractère distinctif.

Article 6(5)b) – la période pendant laquelle chaque marque a été en usage

[38]           Selon l'affidavit Cooper, la marque de commerce de l'Opposante est employée depuis au moins aussi tôt que novembre 1987. Comme je l'ai mentionné précédemment, la demande pour la Marque est fondée sur un emploi projeté et rien dans la preuve ne donne à penser que la Marque a commencé à être employée au Canada.

Articles 6(5)c) et 6(5)d) – le genre de produits, services ou entreprises; la nature du commerce

[39]           En ce qui concerne les facteurs énoncés aux articles 6(5)c) et d) de la Loi, l'appréciation de la probabilité de confusion aux termes de l'article 12(1)d) de la Loi repose sur la comparaison de l'état déclaratif des produits qui figure dans une demande pour une marque avec l'état déclaratif des produits qui figure dans l'enregistrement d’un opposant [Henkel Kommanditgesellschaft auf Aktien c Super Dragon Import Export Inc (1986), 12 CPR (3d) 110 (CAF) et Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd (1987), 19 CPR (3d) 3 (CAF)]. Ces états déclaratifs doivent être examinés dans l'optique de déterminer le genre probable d'entreprise ou la nature du commerce envisagé par les parties, et non l'ensemble des commerces que le libellé est susceptible d'englober. Une preuve de la nature véritable des commerces des parties est utile à cet égard [McDonald's Corp c Coffee Hut Stores Ltd (1996), 68 CPR (3d) 168 (FCA); Procter & Gamble Inc c Hunter Packaging Ltd (1999), 2 CPR (4th) 266 (COMC); et American Optical Corp c Alcon Pharmaceuticals Ltd (2000), 5 CPR (4th) 110 (COMC)].

[40]           En l'espèce, l'enregistrement de la marque de commerce de l'Opposante vise des [Traduction] « fruits frais » et la demande pour la Marque vise des produits décrits comme des [Traduction] « citrons frais et eau citronnée » et des services décrits comme [Traduction] « services d'éducation sur les bienfaits des citrons et de l'eau citronnée ». Il convient de souligner que, dans son affidavit, M. Cooper affirme que l'Opposante vend des fruits frais, y compris des citrons, des oranges et des mandarines, en liaison avec sa marque de commerce. Ainsi, dans la mesure où les parties vendent toutes deux des [Traduction] « fruits frais » et, en particulier, des [Traduction] « citrons », il y a un recoupement direct entre leurs produits. Bien qu'il n'y ait pas de recoupement direct entre les autres produits et services visés par la demande pour la Marque et ceux de l'Opposante, je considère qu'ils sont étroitement apparentés.

[41]           Selon l'affidavit Cooper, l'Opposante vend ses fruits frais par différentes voies de commercialisation au Canada, y compris directement à des détaillants ainsi que par l'entremise de grossistes et de distributeurs en alimentation [affidavit Cooper, para 10]. Compte tenu du recoupement direct ou de l'étroite parenté entre les produits et services des parties, et en l'absence de toute preuve contraire de la part de la Requérante, je considère qu'il est raisonnable de conclure qu'il existe également une possibilité que les voies de commercialisation des parties se recoupent.

Article 6(5)e) – le degré de ressemblance entre les marques de commerce

[42]           Il est bien établi que, lorsqu'il s'agit de déterminer le degré de ressemblance entre des marques de commerce, il faut considérer les marques de commerce dans leur ensemble et éviter de les placer côte à côte pour les comparer et relever les similitudes ou les différences entre leurs éléments constitutifs. Il faut également s'abstenir de décomposer les marques.

[43]           Dans Masterpiece, la Cour suprême a fait observer que, même si le premier mot d'une marque de commerce est souvent l'élément le plus important pour établir le caractère distinctif [Conde Nast Publications Inc c Union des éditions modernes (1979), 46 CPR (2d) 183 (CF 1re inst)], il est préférable, lorsqu'il s'agit de comparer des marques entre elles, de se demander d'abord si l'un des aspects de la marque de commerce est particulièrement frappant ou unique [Masterpiece, supra, au para 49].

[44]           En l'espèce, j'estime qu'il n'y a rien de frappant ou d'unique à propos des marques des parties, aussi bien l'une que l'autre. La marque de l'Opposante est constituée exclusivement du terme laudatif « ultimate » [suprême; par excellence] et la Marque est une expression unitaire constituée d'une combinaison de ce même terme et d'autres termes descriptifs. Dans la mesure où les marques de commerce des parties contiennent toutes deux le mot « ultimate » [suprême; par excellence] et où la Marque incorpore la totalité de la marque de l'Opposante, il existe entre elles un degré de ressemblance considérable. Cela dit, il y a des différences visuelles et phonétiques entre les marques des parties et la Marque possède une connotation quelque peu différente, car elle suggère que les produits et services auxquels elle est liée se rapportent à une boisson minceur.

Circonstance de l'espèce - état du registre/marché

[45]           Comme circonstance additionnelle de l'espèce, la Requérante a produit une preuve de l'état du registre/marché pour démontrer que ULTIMATE est un élément d'autres marques de commerce qui, à l'heure actuelle, coexistent dans le registre des marques de commerce et sont liées à divers produits alimentaires et boissons [affidavit Gallagher, para 2 et 3; pièces A1 à A28 et B1 à B18].

[46]           Mme Gallagher a repéré 28 demandes/enregistrements de marques de commerce contenant l'élément ULTIMATE dans le registre des marques de commerce [para 2; pièces A1 à A28]. Elle a ensuite repéré sur Internet des emplois de certaines de ces marques et joint à son affidavit des imprimés tirés de sites Web montrant de tels emplois, comme pièces B1 à B18.

[47]           Il a été statué que, bien que la preuve de l'état du registre puisse être utile pour évaluer le caractère commun ou le caractère distinctif d'une marque de commerce ou d'une partie d'une marque par rapport à l'ensemble du registre, elle n'est pertinente que dans la mesure où elle permet de tirer des inférences quant à l'état du marché, et de telles inférences ne peuvent être tirées que si un nombre significatif d'enregistrements pertinents est repéré [Ports International Ltd c Dunlop Ltd (1992), 41 CPR (3d) 432 (COMC); Welch Foods Inc c Del Monte Corp (1992), 44 CPR (3d) 205 (CF 1re inst); et Maximum Nutrition Ltd c Kellogg Salada Canada Inc (1992), 43 CPR (3d) 349 (CAF)].

[48]           À l'audience, l'Opposante a fait observer que, sur ces 28 marques au registre, seules 3 marques visent des [Traduction] « fruits frais », et qu'une de ces 3 marques est la marque de l'Opposante. L'Opposante affirme que les autres marques se rapportent toutes à d'autres produits alimentaires et boissons et que, par conséquent, elles ne limitent pas l'étendue de la protection dont peut bénéficier la marque de commerce de l'Opposante en liaison avec des [Traduction] « fruits frais ». L'Opposante a également fait observer que bon nombre de ces marques comportent des caractéristiques distinctives. L'Opposante a fait observer que la preuve tirée d'Internet pose problème pour des raisons similaires et a également souligné que ce ne sont pas tous les sites Web dont sont tirés les imprimés présentés aux pièces B1 à B18 qui semblent être canadiens.

[49]           En réponse, la Requérante a fait observer que, bien que seulement 3 de ces demandes/enregistrements soient clairement liés à des [Traduction] « fruits frais » [pièces A1, A8 et A22], y compris l'enregistrement de la marque de l'Opposante, au moins certaines autres marques visent des fruits sous diverses autres formes ou se rapportent à des fruits. À titre d'exemple, certaines visent des [Traduction] « fruits en conserve », « concentrés et purées de fruits utilisés comme ingrédients dans des boissons », « jus de fruits », « boissons gazeuses à base de fruits », « fruits emballés », « fruits en boîte », etc. [pièces A3, A4, A5, A7, A13, A23, A24 et A27].

[50]           Il est vrai que ce ne sont pas toutes les marques repérées par Mme Gallagher qui se rapportent à des [Traduction] « fruits frais » en soi et que certaines comportent d'autres caractéristiques distinctives. Je reconnais également qu'il en va de même pour certaines parties de la preuve tirée d'Internet, c'est-à-dire que ce ne sont pas tous les sites Web repérés par Mme Gallagher qui sont canadiens, et il m'est impossible de tirer une quelconque inférence significative de la simple existence de ces sites Web en ce qui concerne la mesure dans laquelle ils ont été consultés par des consommateurs ou la mesure dans laquelle les marques de commerce qu'ils contiennent sont devenues connues.

[51]           Cependant, je suis tout de même disposée à accorder à la preuve de l'état du registre/marché un certain poids limité. Je conviens avec la Requérante qu'au moins certaines des autres marques repérées lors de la recherche sur l'état du registre sont pertinentes et méritent d'être prises en considération. Bien qu'elles puissent ne pas se rapporter à des [Traduction] « fruits frais », plusieurs d'entre elles se rapportent à des fruits et la plupart sont liées à des articles qu'on pourrait s'attendre à trouver dans une épicerie ou un point de vente similaire qui vend des produits alimentaires et des boissons, tels que ceux qui sont liés aux marques des parties. Bien que cela ne représente pas un très grand nombre de marques, la preuve tirée d'Internet appuie l'inférence qu'au moins certaines de ces marques sont en usage.

Conclusion quant à la probabilité de confusion

[52]           Comme je l'ai indiqué ci-dessus, l'article 6(2) de la Loi ne porte pas sur la confusion entre les marques elles-mêmes, mais sur la confusion portant à croire que des produits provenant d'une source proviennent d'une autre source.

[53]           Le test à appliquer est celui de la première impression dans l'esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé qui voit la Marque sur les produits de la Requérante, alors qu’il n'a qu'un souvenir imparfait de la marque de commerce ULTIMATE de l’Opposante employée en liaison avec des produits identiques ou d'un genre semblable à ceux de la Requérante et qu’il ne s'arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner de près les ressemblances et les différences entre les marques [Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, supra, au para 20].

[54]           La question qui se pose est de savoir si cette personne serait portée à conclure que les produits ou services de la Requérante sont fabriqués, vendus, loués, retenus ou exécutés par la même source que ceux visés par l'enregistrement de la marque ULTIMATE de l'Opposante.

[55]           Il y a un recoupement direct dans le genre des produits et services des parties et entre leurs voies de commercialisation, et comme la Marque englobe la totalité de la marque de commerce ULTIMATE de l'Opposante, il existe entre les marques des parties un degré de ressemblance considérable. Cependant, comme je l'ai mentionné précédemment, les marques de commerce des parties sont des marques faibles.

[56]           Dans Provigo Distribution Inc c Max Mara Fashion Group SRL (2005), 2005 CF 1550 (CanLII), 46 CPR (4th) 112 au para 31 (CF 1re inst), le juge de Montigny a fait les commentaires suivants :

[Traduction]
Comme les deux marques en elles-mêmes sont faibles, il est juste d’affirmer que même de petites différences suffiraient à les différencier. S’il en était autrement, le premier utilisateur de termes couramment employés se verrait conférer injustement un monopole de ces termes. Les tribunaux ont également justifié cette conclusion en affirmant qu’on s’attend à ce que le public soit plus prudent lorsque des noms commerciaux faibles comme ceux-ci sont employés …

[57]           Il est possible d'accroître le caractère distinctif d'une marque de commerce faible par un emploi à grande échelle [Sarah Coventry Inc c Abrahamian (1984), 1 CPR (3d) 238 (CF 1re inst)]. Cependant, bien que la preuve en l'espèce puisse établir qu'il y a eu emploi de la marque de commerce de l'Opposante, il n'apparaît pas clairement que cet emploi s'applique exclusivement au profit de l'Opposante, et à la lumière de la preuve concernant l'emploi et la propriété de la marque, il m'est impossible d'inférer qu'elle a acquis un quelconque caractère distinctif significatif.

[58]           Par conséquent, j'ai du mal à admettre l'allégation de l'Opposante selon laquelle, à la vue de la Marque de la Requérante, à savoir THE ULTIMATE DIET DRINK, un consommateur n'ayant qu'un souvenir imparfait de la marque de commerce de l'Opposante présumerait, du fait de la présence du mot « ultimate » [suprême; par excellence], que les produits et services de la Requérante proviennent de l'Opposante. J'estime plutôt qu'il est plus probable qu'un consommateur le percevrait simplement comme un élément laudatif de la Marque dans son ensemble. Je suis par conséquent d'avis que les différences entre les marques des parties sont suffisantes pour permettre aux consommateurs de les distinguer l'une de l'autre.

[59]           Compte tenu de ce qui précède, j'estime par conséquent que la Requérante s'est acquittée de son fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que la confusion entre les marques de commerce des parties est improbable.

[60]           En conséquence, le motif d'opposition fondé sur l'article 12(1)d) est rejeté.

Absence de droit à l'enregistrement – article 16(3)a)

[61]           L'Opposante allègue que la Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la Marque parce que, à la date de production de la demande, la Marque créait de la confusion avec la marque de commerce ULTIMATE, qui avait été antérieurement employée au Canada par l'Opposante ou sa prédécesseure, ou à leur profit par des licenciées.

[62]           L'Opposante a, à l'égard de ce motif d'opposition, le fardeau initial de démontrer que sa marque de commerce a été employée ou révélée avant la date de production de la demande pour la Marque et d'établir qu'elle n'avait pas abandonné sa marque de commerce à la date d'annonce de la demande de la Requérante [article 16(5)].

[63]           Même si je concluais que l'Opposante s'est acquittée de son fardeau de preuve à l'égard de ce motif, ce dernier serait rejeté pour des raisons similaires à celles exposées dans mon analyse relative à l'article 12(1)d) ci-dessus, car la date pertinente différente n'a pas d'incidence significative sur mes conclusions quant à la probabilité de confusion dans le contexte de ce motif d'opposition.

[64]           En conséquence, ce motif d'opposition est également rejeté.

Absence de caractère distinctif – article 2

[65]           L'Opposante allègue que la Marque ne distingue pas et n'est pas adaptée à distinguer les produits et services en liaison avec lesquels la Requérante projette d'employer la Marque des produits de tiers, y compris ceux de l'Opposante. Étant donné que l'Opposante n'a identifié aucun « tiers », je considère qu'il est raisonnable d'interpréter ce motif comme étant limité à l'Opposante.

[66]           La date pertinente pour évaluer ce motif d'opposition est la date de production de la déclaration d'opposition [voir Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc (2004), 34 CPR (4th) 317 (CF)].

[67]           Pour s'acquitter de son fardeau initial à l'égard d'un motif d'opposition fondé sur l'absence de caractère distinctif, un opposant doit produire une preuve démontrant que sa marque de commerce était devenue suffisamment connue au moment où la procédure d'opposition a été engagée pour faire perdre à la marque visée par la demande son caractère distinctif [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc (2004), 34 CPR (4th) 317 (CF) et Motel 6, Inc c No. 6 Motel Ltd (1981), 56 CPR (2d) 44, p. 58 (CF 1re inst)].

[68]           Comme je l'ai mentionné précédemment dans mon analyse relative à l'article 12(1)d) ci-dessus, le caractère distinctif de la marque de commerce de l'Opposante est insuffisant et la preuve au dossier ne me permet pas de conclure qu'elle a acquis un caractère distinctif dans une quelconque mesure significative.

[69]           Compte tenu de ce qui précède, il m'est impossible de conclure que l'Opposante s'est acquittée de son fardeau de preuve initial à l'égard de ce motif.

[70]           En conséquence, ce motif d'opposition est également rejeté.

VI        Décision

[71]           Compte tenu de ce qui précède, dans l'exercice des pouvoirs qui m'ont été délégués en vertu des dispositions de l'article 63(3) de la Loi, je rejette l'opposition selon les dispositions de l'article 38(8) de la Loi.

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Lisa Reynolds

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Judith Lemire, trad.

COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

 

 

DATE DE L’AUDIENCE : 2016-06-23

 

COMPARUTIONS

 

Nicholas McHaffie                                                                              POUR L'OPPOSANTE

 

Robert MacDonald                                                                              POUR LA REQUÉRANTE

 

AGENT(S) AU DOSSIER

 

Stikeman Elliott                                                                                   POUR L'OPPOSANTE

 

Gowling WLG                                                                                     POUR LA REQUÉRANTE

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