Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2012 COMC 66

 Date de la décision : 2012-03-28

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45, engagée à la demande de Johnston Wassenaar LLP, visant l’enregistrement no LMC613422 de la marque de commerce IRS Instant Rock Star au nom de IRS Australia Pty Ltd.

[1]               Le 20 août 2008, le registraire transmettait, à la demande de Johnston Wassenaar LLP (la partie Requérante), un avis au titre de l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce LRC 1985, c T‑13 (la Loi) à IRS Australia Pty Ltd (l’Inscrivante), la propriétaire inscrite de l’enregistrement no LMC613422 se rapportant à la marque de commerce IRS Instant Rock Star (la Marque).

[2]               La Marque est enregistrée en vue d’un emploi en liaison avec les marchandises suivantes : préparations de soins capillaires, traitements capillaires, lotions, shampooings, shampooings-revitalisants, revitalisants, crèmes de mise en plis, et cires (les Marchandises).

[3]               L’article 45 de la Loi oblige le propriétaire inscrit de la marque de commerce à indiquer si la marque a été employée au Canada en liaison avec chacune des Marchandises énumérées dans l’enregistrement à un moment quelconque au cours des trois ans précédant la date de l’avis et, dans la négative, la date où elle a été employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. Par conséquent, la période pertinente durant laquelle l’emploi à un moment quelconque doit être établi en l’espèce s’étend du 20 août 2005 au 20 août 2008 (la Période pertinente).

[4]               La définition pertinente du mot « emploi » est énoncée au paragraphe 4(1) de la Loi :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des marchandises si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces marchandises, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les marchandises mêmes ou sur les colis dans lesquels ces marchandises sont distribuées, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux marchandises à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[5]               En réponse à l’avis fondé sur l’article 45, l’Inscrivante a fourni l’affidavit de Margaret Ardono, qui occupe la fonction d’administratrice et directrice dans l’entreprise. Seule la partie Requérante a déposé des observations écrites; il n’y a pas eu d’audience.

[6]               Il est bien établi que de simples allégations d’emploi ne suffisent pas à établir l’emploi d’une marque de commerce dans le cadre de la procédure prévue à l’article 45 [Plough (Canada) Ltd. c. Aerosol Fillers Inc. (1980), 53 CPR (2d) 63 (CAF)]. S’il est vrai que le critère applicable à l’établissement de l’emploi dans les procédures de cette nature est très peu rigoureux [Woods Canada Ltd. c. Lang Michener (1996), 71 C.P.R. (3d) 477 (CFPI), p. 480], et qu’il n’appelle pas la production d’une surabondance d’éléments de preuve, [Union Electric Supply Co. Ltd. c. Registraire des marques de commerce (1982), 63 CPR (2d) 56 (CFPI)], il n’en faut pas moins communiquer des faits suffisants pour permettre au registraire d’arriver à la conclusion que la marque de commerce a été employée en liaison avec chacune des marchandises que spécifie l’enregistrement au cours de la Période pertinente.

[7]               Mme Ardono précise dans son affidavit que l’Inscrivante est une entreprise australienne qui vend une gamme de préparations de soins capillaires arborant la Marque. Elle explique que jusqu’à une date non déterminée, les produits de l’Inscrivante étaient distribués au Canada par un certain M. Kurt Bruun. Ce dernier a toutefois été victime d’un grave accident et a mis fin à ses activités commerciales, ce qui a nui à la vente des produits de l’Inscrivante au Canada. Il semblerait que cet événement soit survenu avant la Période pertinente, mais l’affidavit ne le mentionne pas explicitement.

[8]               Mme Ardono déclare néanmoins au paragraphe 7 de l’affidavit que [traduction] « s’agissant de la Marque de commerce au Canada, la vente et l’emploi les plus récents remontent à avril 2008 ». Elle atteste à cet égard qu’un [traduction] « client actuel » a demandé par courriel que plusieurs produits lui soient expédiés en Colombie-Britannique. La pièce B est composée de trois courriels échangés entre ce client et des employés de l’Inscrivante. Deux de ces courriels sont datés de mars 2004, ce qui est antérieur à la Période pertinente. Dans le troisième courriel, le client demande des renseignements concernant un autre achat daté d’avril 2008. La pièce C est composée de deux factures qui, d’après Mme Ardono, [traduction] « confirment que le placement et l’expédition de cette commande ont bel et bien eu lieu et font foi des dernières ventes au Canada ». Je remarque toutefois que les factures en question sont datées de septembre 2006 et de janvier 2007. Il ne semble donc pas qu’elles soient liées aux courriels figurant en pièce B.

[9]               Quoi qu’il en soit, je constate que la Marque, telle qu’elle est enregistrée, n’apparaît pas sur les factures. Bien que le logo « instant ROCKSTAR » de l’Inscrivante figure en tête du document, et nonobstant les observations de la partie Requérante sur les variantes, un tel emploi n’est généralement pas considéré comme se rapportant aux marchandises facturées [voir Tint King of California Inc c Canada (Registraire des marques de commerce) (2006), 56 CPR (4th) 223 (CF)]. Par ailleurs, chaque facture contient la description du produit suivante : « HARD ROCK 100ml RRP 19,95 $ ». Comme le signale la partie Requérante, l’auteure de l’affidavit n’explique pas la signification des termes HARD ROCK et ne précise pas clairement quelles Marchandises, si tant est qu’il y en ait, étaient visées par ces ventes, ou si celles‑ci relevaient de la pratique normale du commerce.

[10]           Par conséquent, je ne puis conclure que l’Inscrivante a démontré l’emploi de la Marque en liaison avec l’une des Marchandises durant la Période pertinente au sens des articles 4 et 45 de la Loi.

Circonstances spéciales

[11]           Compte tenu de cette conclusion, j’examinerai maintenant s’il existait des circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi, conformément au paragraphe 45(3) de la Loi.

[12]           En général, cette question suppose l’examen des trois critères énoncés dans l’arrêt Registraire des marques de commerce c. Harris Knitting Mills Ltd. (1985), 4 CPR (3d) 488 (CAF). Le premier porte la période pendant laquelle la marque n’a pas été en usage; les deuxième et troisième concernent respectivement la question de savoir si les raisons du non-emploi étaient indépendantes de la volonté du propriétaire inscrit et si ce dernier a sérieusement l’intention de recommencer à employer la marque dans un bref délai. L’arrêt Smart & Biggar c. Scott Paper Ltd. (2008), 65 CPR (4th) 303 (CAF) a apporté des précisions sur l’interprétation du deuxième critère, à savoir qu’il doit être satisfait à ce critère pour pouvoir conclure que l’absence d’emploi de la marque est justifiée par des circonstances spéciales.

[13]           En l’espèce, Mme Ardono soutient que l’incapacité de l’Inscrivante de trouver un distributeur fiable au Canada est une circonstance spéciale justifiant le non-emploi de la Marque.

[14]           Pour ce qui est du premier volet du critère Harris, l’affidavit de Mme Ardono ne permet pas d’établir clairement la date de la dernière utilisation de la Marque au Canada dans la pratique normale du commerce. La preuve relative aux efforts déployés par l’Inscrivante pour trouver un distributeur au Canada remonte aussi loin que 2003, ce qui tend à indiquer une période de non-emploi d’au moins six ans. Cependant, hormis la déclaration vague de Mme Ardono selon laquelle l’Inscrivante [traduction] « assurait la distribution de ses produits au Canada » par l’entremise de M. Bruun avant qu’il ne soit victime d’un accident, rien n’indique que la Marque a été employée au Canada à un quelconque moment au sens de l’article 4.

[15]           En ce qui a trait au deuxième critère, les pièces E et F jointes à l’affidavit sont des copies de la correspondance électronique qu’ont échangée en 2003 et en 2004 l’Inscrivante, un courtier d’exportation et des distributeurs canadiens au sujet d’une éventuelle entente commerciale. Il semblerait que ces démarches n’aient pas abouti et que l’Inscrivante ait ensuite suspendu ses efforts en ce sens pendant un certain temps.

[16]           Quant aux activités de l’Inscrivante au cours de la Période pertinente, les pièces G et I jointes à l’affidavit concernent ses initiatives générales de marketing, notamment sa présence à un salon professionnel à Hong Kong et l’usage de pages de réseaux sociaux sur Internet. Aucune de ces activités ne paraît cibler le marché canadien, ou alors elles s’y rapportent apparemment de manière incidente. Je constate ainsi que l’Inscrivante n’a fourni aucun élément de preuve relativement aux présentations commerciales ou aux salons professionnels auxquels elle aurait participé au Canada au cours de la Période pertinente.

[17]           Le seul autre élément de preuve présenté quant aux efforts récents de mise en marché au Canada, ou aux efforts visant des Canadiens, est postérieur à l’avis fondé sur l’article 45. Divers documents joints en pièce H décrivent les efforts déployés par l’Inscrivante pour établir une présence au Canada avec l’aide d’une agence de développement des entreprises gérée par le gouvernement australien. En pièce J figurent des factures se rapportant à divers échantillons de produits de l’Inscrivante expédiés à des détaillants canadiens à la fin de 2008 et au début de 2009.

[18]           Cependant, en ce qui concerne le troisième critère établi dans la décision Harris, on ne sait pas vraiment si l’Inscrivante a réalisé des progrès dans ses tentatives de reprendre l’emploi au Canada ou si elle est susceptible d’y renoncer encore une fois. En l’absence de détails sur la manière dont l’emploi de la Marque sera renouvelé, et plus particulièrement à défaut d’un élément de preuve quant à la date à laquelle les ventes des Marchandises de l’Inscrivante sont susceptibles de reprendre au Canada, je ne puis conclure que l’Inscrivante a fourni une preuve suffisante de son intention sérieuse de reprendre sous peu l’emploi de la Marque au Canada.

[19]           Quoi qu’il en soit, comme la preuve montre que l’Inscrivante n’a pas déployé des efforts constants pour trouver un distributeur canadien durant la Période pertinente, je ne suis pas convaincu que les raisons du défaut d’emploi échappaient à son contrôle.

[20]           En conséquence, il me faut conclure que l’Inscrivante n’a pas démontré l’existence de circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi de la Marque pendant la Période pertinente, au sens du paragraphe 45(3) de la Loi.

Décision

[21]           Compte tenu de ce qui précède, dans l’exercice des pouvoirs qui me sont conférés en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, l’enregistrement sera radié conformément aux dispositions de l’article 45 de la Loi.

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Andrew Bene

Agent d’audience

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Édith Malo, LL.B.

 

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