Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

AFFAIRE INTÉRESSANT LOPPOSITION

de Accupro Trademark Services Ltd. à la demande

no 1,051,529 produite par Robert H. Barrigar

en vue de lenregistrement de la marque

de commerce ACCULEX

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Le 20 mars 2000,  le requérant Robert H. Barrigar a déposé une demande en vue de l’enregistrement de la marque de commerce ACCULEX, fondée sur l’utilisation projetée de cette marque au  Canada en liaison avec des

 

« services juridiques et services d’agence pour brevets et marques de commerce ».

 

Cette demande a été publiée dans le Journal des marques de commerce du 25 juillet 2001 et a fait l’objet d’une opposition par Accupro Trademark Services Ltd. le 21 décembre 2001. Le 22 janvier 2002, le registraire a fait parvenir une copie de la déclaration d’opposition au requérant, lequel a répondu en produisant et signifiant une contre-déclaration.

 


Suivant le premier motif d’opposition, fondé sur les alinéas 16(3)a) et 16(3)c) et sur le paragraphe 16(5) de la Loi sur les marques de commerce, le requérant n’a pas droit à l’enregistrement de la marque demandée. À cet égard, l’opposante plaide que la marque demandée ACCULEX crée de la confusion avec sa propre marque ACCUPRO TRADEMARK SERVICES et son nom commercial Accupro Trademark Services Ltd., qu’elle a antérieurement employés et fait connaître en liaison avec tous les aspects des services d’agence de marques de commerce depuis au moins le 1er février 1999.

 

Suivant le second motif d’opposition, fondé sur l’alinéa 30i) de la Loi, le requérant ne pouvait être convaincu d’avoir droit d’employer la marque ACCULEX parce qu’il savait, ou aurait dû savoir que l’opposante avait utilisé antérieurement la marque ACCUPRO TRADEMARK SERVICES. Enfin, l’opposante allègue, comme dernier motif, que la marque demandée n’est pas distinctive des services du requérant étant donné l’emploi antérieur par l’opposante de sa marque ACCUPRO TRADEMARK SERVICES.

 

Dans sa contre-déclaration, le requérant nie globalement les allégations de l’opposante et plaide comme suit :

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

L’opposante a produit en preuve les affidavits de Sandra Wright, présidente de la société, et de Karin Binder, chercheure en marques de commerce.  Le requérant a produit pour sa part l’affidavit de Erin Frith, technicien juridique. Les deux parties ont déposé des observations écrites et toutes deux étaient représentées à l’audience.

 

Le témoignage de Mme Wright peut se résumer ainsi. La société opposante a été constituée sous le nom de Accupro Trademark Services Ltd. en décembre 1998. Avant de lancer son entreprise, Mme Wright s’est assurée que la marque de commerce ACCUPRO était unique dans le monde de la propriété intellectuelle. L’opposante a annoncé ses services aux membres de la communauté juridique, principalement en Colombie-Britannique. Depuis 1999, elle a dépensé plus de 20 000 $ en frais de publicité. Elle compte plus de 250 clients de base au Canada, aux États-Unis et dans le monde entier. Elle a obtenu, en avril 2002, l’enregistrement de la marque (no 560,965) ACCUPRO TRADEMARK SERVICES.

 


 Mme Binder a fait une recherche dans le registre des marques de commerce pour y trouver les marques incorporant le préfixe ACCU ou ACU et utilisées en liaison avec des marchandises ou des services liés aux mots « patent » (brevet), « trade-mark » (marque de commerce), « legal » (juridique) ou « intellectual property » (propriété intellectuelle). Aucune marque significative appartenant à des tiers et répondant aux paramètres donnés n’a ainsi été repérée. Comme le souligne le requérant au paragraphe 27 de ses observations écrites, la recherche n’incluait pas parmi ses paramètres des mots tels « attorney » (avocat), « law » (droit, loi), « professional » (professionnel), « invention », « computer » (ordinateur) ou « software » (logiciel), susceptibles d’être pertinents dans le domaine de la propriété intellectuelle.                       

 

Le témoignage de Mme Frith, déposée au nom du requérant, fait lui aussi état, entres autres, de recherches effectuées dans le registre des marques de commerce. Une recherche a permis de repérer 338 enregistrements en vigueur ayant le préfixe ACCU; une autre recherche a localisé 203 marques de commerce archivées ayant le préfixe ACU.

 

La question déterminante en l’espèce est celle de savoir si la marque demandée ACCULEX crée de la confusion avec la marque de l’opposante ACCUPRO TRADEMARK SERVICES, soit à la date pertinente du 20 mars 2000 s’agissant du motif d’opposition fondé sur l’absence de droit à l’enregistrement (voir le paragraphe 16(3) de la Loi sur les marques de commerce), soit à la date pertinente du 21 décembre 2001, s’agissant du motif d’opposition fondé sur la non-distinctivité : voir Re Andres Wines Ltd. and E. & J. Gallo Winery (1975), 25 C.P.R.(2d) 126, à la p. 130 (C.A.F.), et Clarco Communications Ltd. c. Sassy Publishers Inc. (1994), 54 C.P.R.(3d) 418 (C.F. 1re inst.). Je conviens avec le requérant que le second motif, tel qu’il est plaidé, ne fournit pas suffisamment de précisions. De plus, eu égard aux circonstances de la présente affaire, la date d’appréciation de la question de la confusion importe peu. Pour l’examen de cette question, j’assimile l’emploi du nom commercial de l’opposante à l’emploi de sa marque, vu leur ressemblance.

 


Le requérant a le fardeau ultime d’établir qu’il n’y aura pas de probabilité raisonnable de confusion, au sens du paragraphe 6(2), entre la marque demandée ACCULEX et la marque de l’opposante ACCUPRO TRADEMARK SERVICES. L’imposition de cette charge de preuve au requérant signifie que s’il est impossible d’arriver à une conclusion ferme eu égard à l’ensemble de la preuve, la question doit être tranchée à l’encontre du requérant : voir John Labatt Ltd. c. Molson Companies Ltd. (1990) 30 C.P.R.(3d) 293, aux p. 297 et 298 (C.F. 1re inst.). Le critère à appliquer en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. Les facteurs à examiner pour déterminer si deux marques prêtent à confusion sont énoncés au paragraphe 6(5) de la Loi : le caractère distinctif inhérent des marques et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle chacune a été en usage; le genre de marchandises, services ou entreprises; la nature du commerce; le degré de ressemblance entre les marques dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'elles suggèrent. Cette liste n’est pas exhaustive; tous les facteurs pertinents doivent être pris en considération, même s’ils n’ont pas tous nécessairement le même poids. Le poids à accorder à chacun des facteurs dépend des circonstances : voir Gainers Inc. c. Tammy L. Marchildon et le Registraire des marques de commerce (1996), 66 C.P.R. (3d) 308 (C.F. 1re inst.).       

 

La marque demandée ACCULEX ne possède pas un degré élevé de caractère distinctif relativement aux services associés à la marque. À cet égard, le préfixe ACCU fait penser au mot « accurate » (exact) et le suffixe LEX serait reconnu par la clientèle cible du requérant comme se rapportant au mot « law » (loi, droit). Prise comme un tout, la marque fait penser à des services « accurate legal services » (services juridiques exacts) et a donc une connotation laudative. La marque demandée est une marque relativement faible.


De même, le préfixe ACCU, qui constitue le premier élément de la marque de l’opposante, fait penser au mot « accurate » (exact) alors que le suffixe PRO, relativement aux services associés à la marque, fait penser au mot « professional » (professionnel). Prise comme un tout, la marque évoque, pour la clientèle cible de l’opposante, des services professionnels exacts. La marque de l’opposante est aussi une marque faible qui tire son caractère distinctif inhérent de la première composante de la marque, à savoir ACCUPRO. À cet égard, les composantes TRADEMARK et SERVICES sont clairement descriptives des services de l’opposante et ne contribuent pas à la distinctivité inhérente de la marque. La marque de l’opposante aurait acquis une certaine notoriété grâce à l’emploi et à la publicité (touchant également le nom commercial) à partir de février 1999 jusqu’aux dates pertinentes du 20 mars 2000 et du 21 décembre 2001. La marque demandée ACCULEX n’avait acquis aucune notoriété à l’une ou l’autre de ces dates. La période pendant laquelle les marques ont été en usage milite en faveur du requérant, mais seulement dans une certaine mesure.

 

Les services des parties se recoupent en ce que les services du requérant englobent les services de marques de commerce de l’opposante, en plus d’autres services dans le domaine de la propriété intellectuelle. De même, il y aurait recoupement dans la clientèle cible des parties en ce que le requérant fournirait des services additionnels à ceux fournis par l’opposante.

 


Les marques en cause se ressemblent dans la mesure où elles ont le même préfixe ACCU. Toutefois, lorsqu’on les considère dans leur entièreté, elles sont distinctes sur les plans visuel et auditif ainsi que dans les idées qu’elles suggèrent. À cet égard, la marque de l’opposante ACCUPRO TRADEMARK SERVICES a un impact visuel et auditif différent de la marque demandée ACCULEX. Comme nous l’avons vu, l’idée suggérée par la marque de l’opposante est celle de services de marques de commerce professionnels et exacts alors que l’idée suggérée par la marque demandée est « accurate law » (loi exacte).

 

Pour ce qui est des circonstances de l’espèce, le requérant attire l’attention sur les faits mis en preuve dans l’affidavit de Mme Frith et fait valoir que le public est inondé de préfixes ACCU et ACU pour une pléthore de marques se rapportant à nombre de marchandises et services, de sorte que les consommateurs se sont habitués à faire les distinctions nécessaires. De plus, les services des parties étant hautement spécialisés, on peut penser que les clients potentiels se renseigneront soigneusement avant de choisir un service de marques de commerce. Je conviens avec le requérant que la notion de l’acheteur pressé faisant un achat hâtif en ayant un souvenir imprécis de la marque antérieure n’est pas applicable dans le présent contexte factuel mettant en cause des services professionnels spécialisés et coûteux.

 

Considérant ce qui précède, compte tenu que les marques faibles n’ont pas droit à une protection étendue et que de petites différences suffisent à distinguer de telles marques, j’estime que le requérant s’est acquitté de son fardeau d’établir, selon la prépondérance de la preuve, que les marques en cause ne créaient pas de confusion aux dates pertinentes.

 

En conséquence, l’opposition de l’opposante est rejetée.

 


J’ajouterais que l’opposante aurait pu modifier sa déclaration d’opposition pour invoquer l’enregistrement no 560,965 qui lui a été délivré pour la marque ACCUPRO TRADEMARK SERVICES pendant la présente instance. La date pertinente aux fins d’appréciation de la question de la confusion aurait alors inclus la date de la décision. Toutefois, si l’on extrapole à partir de la preuve d’emploi et de publicité de la marque (et du nom commercial) présentée par l’opposante, le possible motif d’opposition additionnel fondé sur l’alinéa 12(1)d) aurait également été rejeté.

 

FAIT À GATINEAU (QUÉBEC), LE 6 AVRIL 2005.

 

 

 

 

 

Myer Herzig,

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

  

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