Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

Informations sur la décision

Contenu de la décision

TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

PROCÉDURE FONDÉE SUR L’ARTICLE 45

MARQUE DE COMMERCE : VERITAS

NO DENREGISTREMENT : 201,517

 

 

Le 16 novembre 2000, à la demande du cabinet Brouillette Kosie, le registraire a donné un avis suivant l’article 45 à Andrés Wines Ltd., propriétaire inscrite de la marque de commerce susmentionnée.

 

La marque de commerce VERITAS est enregistrée pour emploi en liaison avec les marchandises suivantes, à savoir des vins.

 

Aux termes de l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, le propriétaire inscrit de la marque de commerce est tenu d’indiquer, à l’égard de chacune des marchandises ou de chacun des services que spécifie l’enregistrement, si la marque de commerce a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois ans précédant la date de l’avis et, dans la négative, la date où elle a ainsi été employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date.

 

En réponse à l’avis, on a produit l’affidavit de  Peter Patchet et des pièces. Les deux parties ont déposé des observations écrites et étaient représentées lors de l’audience.

 


Dans son affidavit, M. Patchet déclare qu’il est vice‑président aux finances et à l’administration de la société titulaire, qu’il occupe cette fonction depuis l’an 2000 et qu’il travaille pour la société depuis 1996. En raison de ses fonctions au sein de la société, il connaît les faits dont il est question dans son affidavit. Il affirme que la titulaire a commencé à vendre du vin en liaison avec la marque de commerce VERITAS dès 1961 et que depuis, elle a employé cette marque de manière continue en liaison avec les vins. La marque VERITAS a été appliquée à une vaste gamme de produits du vin fabriqués par la société titulaire et, comme pièces A1, A2, B et C, M. Patchet fournit des copies d’étiquettes et des échantillons d’étiquettes originales. Comme pièce D, il produit une liasse de documents comprenant des copies de factures montrant les ventes des divers produits du vin de la titulaire sur lesquels, déclare‑t‑il, les étiquettes produites comme pièces A, B et C étaient apposées au moment de la vente. Il ajoute que la titulaire a régulièrement employé la marque VERITAS en liaison avec sa marque de commerce ANDRÉS sur des articles tels que le papier à lettre et la page d’accueil Internet de la société.

 

Concernant la preuve, la partie requérante a principalement fait valoir que celle‑ci ne réussit pas à démontrer l’emploi de la marque de commerce VERITAS proprement dite ni, en outre, à établir l’emploi de la marque par la propriétaire inscrite.

 

 

Après avoir examiné les éléments de preuve, je ne peux donner raison à la partie requérante qui affirme que l’emploi démontré n’est pas par la propriétaire inscrite. Il ressort clairement de l’affidavit de Patchet que c’est la titulaire qui fabrique/produit les vins qui y sont énumérés. Qui plus est, les étiquettes indiquent le nom de la propriétaire inscrite, Andrés Wines Ltd, il est donc évident que c’est elle qui est la source des marchandises (voir Mayborn Products Ltd. c. Registraire des marques de commerce, 70 C.P.R. (2d) 1) et qui serait perçue comme telle.

 


Selon moi, même si les ventes aux différents détaillants au Canada ne sont pas faites directement par la titulaire, cela ne change rien au fait que c’est elle qui en a bénéficié. Comme il a été déclaré dans l’affaire Philip Morris Inc. c. Imperial Tobacco Ltd. et al., 13 C.P.R. (3d) 289, « [i]l est également établi que l’expression ‟ pratique normale du commerce ” vise la continuité d’une transaction depuis le fabricant jusqu’au consommateur et protège la marque de commerce du fabricant à chacune des étapes de cette transaction [...] » En l’espèce, je conviens que M. Patchet aurait pu fournir des explications sur la chaîne de distribution et des précisions sur le rôle que joue Andrés Wines Atlantic Ltd. dans cette chaîne, mais j’estime, compte tenu de l’ensemble de la preuve, que l’on peut raisonnablement supposer qu’« Andrés Wines Atlantic Ltd. » est simplement un intermédiaire dans la chaîne de distribution des vins de la titulaire au Canada. Conséquemment, je conclus que tout emploi établi par la preuve est un emploi par la titulaire.

 

Il s’agit maintenant de savoir si la titulaire a établi l’emploi de sa marque déposée VERITAS. À cet égard, la preuve produite par la titulaire démontre que la marque est toujours employée avec des éléments supplémentaires.  Je reproduis ci‑dessous la marque telle qu’elle figure en liaison avec les marchandises :

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

La question de savoir si une marque de commerce figurant avec des éléments supplémentaires constitue un emploi de la marque déposée a été examinée dans la décision Nightingale Interloc Ltd. v. Prodesign Ltd., 2 C.P.R. (3d) 535, à la p. 538.  Voici ce que l’agent d’audience dans cette affaire a déclaré :

Principe 1

« L’emploi d’une marque en combinaison avec des éléments supplémentaires constitue un emploi en soi de la marque comme marque commerce, lorsqu’à la première impression le public peut percevoir que la marque en soi est utilisée comme marque de commerce. Il s’agit d’une question de fait, qui est tributaire de réponses à certaines questions comme celle de savoir si la marque est plus en évidence que les éléments supplémentaires, par exemple lorsque le caractère ou la taille utilisés sont différents (voir par ex. Standard Coil Products (Canada) Ltd. c. Standard Radio Corp. et al. (1971), 1 C.P.R. (2d) 155, à la p. 163, [1971] C.F. 106), ou comme celle de savoir si les éléments supplémentaires peuvent être perçus comme purement descriptifs ou comme une marque de commerce ou un nom commercial distincts [...] »   

 

L’affaire Registraire des marques de commerce c. Compagnie Internationale pour lInformatique CII Honeywell Bull S.A., 4 C.P.R. (3d) 523 (C.A.F.) illustre l’application de ce principe. Dans cette affaire, la Cour d’appel fédérale a examiné la question de savoir si l’emploi de la marque composée CII HONEYWELL BULL constituait un emploi de la marque de commerce BULL. La Cour a déclaré ceci à la page 525 :

Il ne s’agit pas de déterminer si CII  a trompé le public quant à l’origine de ses marchandises. Elle ne l’a manifestement pas fait. La seule et véritable question qui se pose consiste à se demander si, en identifiant ses marchandises comme elle l’a fait, CII a employé sa marque de commerce « Bull ». Il faut répondre non à cette question sauf si la marque a été employée d’une façon telle qu’elle n’a pas perdu son identité et qu’elle est demeurée reconnaissable malgré les distinctions existant entre la forme sous laquelle elle a été enregistrée et celle sous laquelle elle a été employée.

 


J’estime que la décision CII Honeywell Bull s’applique en tout point à la présente affaire. En l’espèce, sur le plan de la première impression, le mot « VERITAS » figurant sur le listel serait vraisemblablement perçu comme faisant partie de l’expression « IN VINO VERITAS » et non comme la marque proprement dite. À cet égard, je ne peux souscrire à la prétention de la titulaire selon laquelle le mot VERITAS est éloigné des mots IN VINO tel qu’il crée une impression indépendante. Le fait que les mots IN VINO VERITAS figure sur un semblant de listel ayant la même couleur, la même dimension et un lettrage identique, et qu’il s’agisse d’une expression étrangère ayant un sens en français et en anglais, étaye ma conclusion selon laquelle les mots seraient vraisemblablement perçus comme une expression unitaire. Le mot VERITAS proprement dit ne serait donc pas perçu comme une marque de commerce distincte. Par conséquent, je conclus qu’en employant la marque composée « IN VINO VERITAS », la déposante n’a pas employé sa marque « VERITAS ». Les éléments de preuve n’ayant pas réussi à établir l’emploi de la marque déposée « VERITAS » en tant que telle, je conclus que l’enregistrement de cette dernière doit être radié.

 

L’enregistrement no 201,517 sera radié conformément aux dispositions de l’article 45(5) de la

 

Loi.

 

 

FAIT À GATINEAU (QUÉBEC), LE 4E  JOUR DE JUILLET 2003.                       

 

 

D. Savard

Agente d’audience principale

article  45

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.