Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2013 COMC 82

Date de la décision : 2013-04-30
TRADUCTION

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION produite par American Pacific Industries, Inc. à l’encontre de la demande no 1433293 pour la marque de commerce GLADIATOR au nom de Chrysler, LLC

[1]               Le 2 avril 2009, Chrysler LLC (la Requérante) a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce GLADIATOR (la Marque) fondée sur l’emploi et l’enregistrement de la Marque aux États-Unis et l’emploi projeté de la Marque au Canada. L’état déclaratif des marchandises est actuellement rédigé comme suit :  

[TRADUCTION]
(1) Véhicules automobiles, nommément véhicules automobiles concept, nommément véhicules utilitaires sport fabriqués sur mesure sur la base de concepts originaux, par exemple en ce qui a trait au style, à la technologie, au mode de fabrication, aux matériaux et à l'utilisation.

La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 9 juin 2010.

[2]               Le 23 juillet 2010, American Pacific Industries, Inc. (l’Opposante) s’est opposée à la demande susmentionnée. Comme nous le verrons plus en détail, le principal motif d’opposition soulevé par l’Opposante est que la Marque crée de la confusion avec la marque de commerce GLADIATOR (enregistrement no LMC18327) de l’Opposante, laquelle est enregistrée et a été antérieurement employée au Canada en liaison avec des pneus.

[3]               La Requérante a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle elle nie les allégations de l’Opposante.

[4]               À titre de preuve, l’Opposante a produit la déclaration de Jeffrey Kreitzman, directeur général de American Pacific Industries, Inc. M. Kreitzman a été contre-interrogé relativement à sa déclaration, et la transcription de son contre-interrogatoire et les réponses aux engagements ont été versées au dossier.

[5]               La Requérante a produit les affidavits de Jean Lee, un étudiant en droit travaillant pour les agents de la Requérante, de Lynda Palmer, une recherchiste en marques de commerce, et de Jacques Duval, un expert présumé de l’industrie automobile canadienne. Aucun de ces déposants n’a été contre-interrogé. 

[6]               La Requérante et l’Opposante ont toutes deux produit un plaidoyer écrit. Aucune audience n’a été tenue.

Questions préliminaires

Admissibilité de la déclaration de M. Kreitzman

[7]               S’appuyant sur les décisions rendues dans Bereskin & Parr c. Teletronic (1997), 78 C.P.R. (3d) 406 (C.O.M.C.) et dans 88766 Canada Inc c. 167407 Canada Inc (2010), 89 C.P.R. (4th) 293 (C.O.M.C.), la Requérante soutient que la déclaration solennelle de M. Kreitzman n’est pas admissible au motif qu’elle n’est pas conforme à l’article 41 de la Loi sur la preuve au Canada, L.R.C. 1985, ch. C-5.

[8]               La déclaration de M. Kreitzman a été faite devant un notaire public dans l’État de la Californie, le 16 décembre 2010. M. Kreitzman n’a pas expressément affirmé qu’il faisait cette déclaration solennelle en la croyant consciencieusement vraie  

[9]               Il a été établi que lorsqu’une déclaration solennelle faite à l’étranger ne comporte pas la formule prescrite par la Loi sur la preuve au Canada, mais que le déclarant a été contre-interrogé et a reconnu sous serment que toute l’information contenue dans la déclaration était vraie, les exigences fondamentales de la Loi sur la preuve au Canada sont réputées avoir été respectées [voir Datascope of Canada Ltd. c. Datascope Corp (1997), 81 C.P.R. (3d) 409]. Le membre de la Commission qui était saisi de cette affaire a également conclu que puisque le déclarant avait été contre-interrogé, la partie adverse ne devait pas être autorisée à contester la validité de la déclaration à l’étape du plaidoyer écrit. J’estime que le raisonnement suivi dans cette affaire s’applique également en l’espèce. J’ajouterai que les affaires citées par la Requérante se distinguent de la présente procédure par le fait que les déclarations solennelles qui ont été produites dans ces affaires n’avaient pas été faites à l’étranger.

[10]            J’estime, par conséquent, que la déclaration de M. Kreitzman est admissible.

Preuve d’expert de M. Duval

[11]           M. Duval, un ancien coureur automobile qui exerce le métier de journaliste automobile depuis de nombreuses années, publie des articles dans des journaux et des magazines et participe à des émissions de radio et de télévision, a fourni une preuve d’expert en qualité de spécialiste de l’industrie automobile au Canada et de la nature du commerce dont font l’objet les marchandises des deux parties. Dans Masterpiece Inc c. Alavida Lifestyles Inc (2011), 92 C.P.R. (4th) 361 (C.S.C.), la Cour a réitéré les quatre critères [initialement établis dans R c. Mohan, [1994], 2 R.C.S. 9] auxquels doit satisfaire un témoignage d’expert pour être admis en preuve. Ces critères sont les suivants :

         la pertinence;

         la nécessité d’aider le juge des faits (le témoignage de l’expert doit contenir des renseignements qui, selon toute vraisemblance, dépassent l’expérience et la connaissance du juge);

         l’absence de toute règle d’exclusion;

         la qualification suffisante de l’expert.

 

[12]           Dans son affidavit, M. Duval décrit en détail son parcours et son expérience professionnels, et donne son avis sur la nature du commerce des marchandises des deux parties. Après examen de l’affidavit de M. Duval dans son ensemble, j’estime que la preuve fournie par M. Duval satisfait aux critères établis dans R c. Mohan et je reconnais à M. Duval la qualité d’expert de l’industrie automobile canadienne.

Fardeau de preuve et dates pertinentes

[13]           La Requérante a le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande d’enregistrement est conforme aux exigences de la Loi. Il incombe toutefois à l’Opposante de s’acquitter du fardeau initial consistant à présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de chacun des motifs d’opposition [voir John Labatt Ltd c. Molson Companies Ltd (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.), p. 298; Dion Neckwear Ltd c. Christian Dior, SA et al (2002), 20 C.P.R. (4th) 155 (C.A.F.)].

[14]           Les dates pertinentes qui s’appliquent aux motifs d’opposition sont les suivantes :

         article 30 – la date de production de la demande [voir Georgia-Pacific Corp c. Scott Paper Ltd (1984), 3 C.P.R. (3d) 469 (C.O.M.C.), p. 475];

         alinéa 12(1)d) – la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd et le Registraire des marques de commerce (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.)];

         paragraphe 16(3) – la date de production de la demande [voir le paragraphe 16(3)];

         absence de caractère distinctif – la date de production de la déclaration d’opposition [voir Metro-Goldwyn-Mayer Inc c. Stargate Connections Inc. (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (C.F.)].

Motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d)

[15]           Le motif d’opposition le plus solide de l’Opposante est fondé sur l’alinéa 12(1)d) de la Loi; l’Opposante alléguant qu’il existerait une probabilité de confusion entre sa marque de commerce déposée GLADIATOR, enregistrée sous le no LMC718,327, et la Marque.

[16]           Je souligne que l’enregistrement no LMC718,327 est en règle et que, par conséquent, l’Opposante s’est acquittée du fardeau initial qui lui incombait à l’égard du motif fondé sur l’alinéa 12(1)d). 

test en matière de confusion

[17]           Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du vague souvenir. Le paragraphe 6(2) de la Loi porte que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale. L’acheteur éventuel est décrit comme le consommateur ordinaire plutôt pressé [voir Mattel, Inc c. 3894207 Canada Inc (2006), 49 C.P.R. (4th) 321 (C.S.C.), para. 58 (Mattel)]. 

[18]           Dans l’application du test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles expressément énoncées au paragraphe 6(5) de la Loi, à savoir a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de marchandises, services ou entreprises; d) la nature du commerce; et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent.

[19]           Le poids qu’il convient d’accorder à chacun de ces facteurs n’est pas nécessairement le même et peut varier selon les circonstances [voir Clorox Co. c. Sears Canada Inc. (1992), 41 C.P.R. (3d) 483 (C.F. 1re inst.)]; Gainers Inc. c. Marchildon (1996), 66 C.P.R.(3d) 308 (C.F. 1re inst.). En outre, cette liste de facteurs n’est pas exhaustive; d’autres éléments peuvent entrer en ligne de compte [voir, de manière générale, Mattel, précité; United Artists Corp. c. Pink Panther Beauty Corp. (1988), 80 C.P.R. (3d) 247 (C.A.F.), pp. 263 et 264; Veuve Cliquot Ponsardin c. Boutiques Cliquot Ltée. (2006), 49 C.P.R. (4th) 401 (C.S.C)].

[20]           Dans la plupart des cas, le facteur déterminant lorsqu’il s’agit de trancher la question de la confusion est le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son ou dans les idées qu’elles suggèrent; les autres facteurs jouant un rôle secondaire dans l'ensemble des circonstances de l’espèce [voir Beverly Bedding & Upholstery Co c. Regal Bedding & Upholstery Ltd (1980), 47 C.P.R. (2d) 145, conf. 60 C.P.R. (2d) 70 (C.F. 1re inst.)]. Récemment, dans Masterpiece, précité, la Cour suprême du Canada s’est exprimée ainsi relativement à l’importance que revêt l’alinéa 6(5)e) dans l’analyse de la probabilité de confusion (voir para. 49) :

[TRADUCTION]
[...] il arrive souvent que le degré de ressemblance soit le facteur susceptible d’avoir le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion, et ce même s'il est mentionné en dernier lieu au par. 6(5) [...] si les marques ou les noms ne se ressemblent pas, il est peu probable que l’analyse amène à conclure à la probabilité de confusion même si les autres facteurs tendent fortement à indiquer le contraire. En effet, ces autres facteurs ne deviennent importants que si les marques sont jugées identiques ou très similaires [...] En conséquence, certains prétendent que, dans la plupart des cas, l’étude de la ressemblance devrait constituer le point de départ de l’analyse relative à la confusion.

[21]           En l’espèce, il est évident, au regard de l’alinéa 6(5)e), que la marque de commerce GLADIATOR de l’Opposante et la Marque sont identiques, aussi bien dans le son et dans la présentation que dans les idées qu’elles suggèrent. Par conséquent, et conformément au raisonnement suivi dans Masterpiece, les autres facteurs doivent être examinés avec attention, car ils prennent une importance accrue dans les circonstances.

alinéa 6(5)a) – le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle chaque marque de commerce est devenue connue

[22]           Les marques des parties possèdent toutes deux un caractère distinctif inhérent relativement élevé. 

[23]           De 2007 à 2010, les ventes annuelles de pneus arborant la marque de l’Opposante à des marchands de pneus au Canada ont été de l'ordre de 441 304 $ à 2 288 799 $ (en dollars américains) [Kreitzman, para. 7 à 10]. Bien que M. Kreitzman affirme que l’Opposante annonce ses marchandises dans une publication, intitulée Tire Business, qui est distribuée au Canada, M. Kreitzman ne fournit aucune information quant à la diffusion de cette publication. Par conséquent, je peux uniquement conclure que la marque de l’Opposante est devenue connue dans une certaine mesure au Canada.

[24]           Comme je ne dispose d’aucune preuve d’emploi ou de promotion de la Marque au Canada, ce facteur favorise l’Opposante.

alinéa 6(5)b) – la période pendant laquelle chaque marque de commerce a été en usage

[25]           La période pendant laquelle chaque marque a été en usage favorise également l’Opposante. 

alinéas 6(5)c) et d) – le genre de marchandises, services ou entreprises; et la nature du commerce

[26]           Ma décision quant à ce facteur repose sur la comparaison de l’état déclaratif des marchandises figurant dans la demande de la Requérante avec les marchandises visées par l’enregistrement de l’Opposante [voir Henkel Kommanditgesellschaft auf Aktien c. Super Dragon Import Export Inc. (1986), 12 C.P.R. (3d) 110 (C.A.F.); Mr Submarine Ltd c. Amandista Investments Ltd (1987), 19 C.P.R. (3d) 3 (C.A.F.); Miss Universe Inc c. Bohna (1994), 58 C.P.R. (3d) 381 (C.A.F.)]. L’examen de ces états déclaratifs doit toutefois avoir pour but de déterminer le genre probable d’entreprise ou de commerce envisagés par les parties, et non tous les types de commerces susceptibles d’être visés par le libellé. À cet égard, une preuve établissant la nature véritable des commerces des parties est utile [voir McDonald’s Corp c. Coffee Hut Stores Ltd (1996), 68 C.P.R. (3d) 168 (C.A.F.), p. 169; Metro-Goldwyn-Mayer Inc c. Stargate Connections Inc (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (C.F.)].

[27]           En l’espèce, les marchandises de la Requérante sont les suivantes : [TRADUCTION] « véhicules automobiles, nommément véhicules automobiles concept, nommément véhicules utilitaires sport fabriqués sur mesure sur la base de concepts originaux, par exemple en ce qui a trait au style, à la technologie, au mode de fabrication, aux matériaux et à l'utilisation », tandis que l’enregistrement de l’Opposante vise des pneus. La preuve relative à la nature véritable du commerce exercé par l’Opposante démontre que les pneus de l’Opposante sont destinés principalement aux camions légers, aux véhicules utilitaires, aux remorques à grande vitesse et aux véhicules commerciaux [contre-interrogatoire de M. Kreitzman, questions 233 à 258].

[28]           En ce qui concerne le genre des marchandises des parties, j’estime qu’il existe un lien entre les pneus de l’Opposante et les véhicules automobiles de la Requérante dans la mesure où les pneus sont installés sur les véhicules automobiles. Cela dit, M. Duval atteste que les consommateurs sont conscients du fait que les fabricants de pneus ne fabriquent pas d’automobiles et que les fabricants d’automobiles ne fabriquent pas de pneus [Duval, para. 47]. De plus, il est rare qu’au moment d’acheter un véhicule automobile neuf, les consommateurs s’enquièrent du type de pneus installés sur le véhicule; ils conservent généralement les pneus d’origine qui sont déjà installés sur le véhicule [Duval, para. 44]. Les consommateurs font également une distinction entre, d’une part, les automobiles et, d’autre part, les pièces et accessoires d’automobiles interchangeables tels les pneus, les roues et les batteries [Duval, para. 48]. 

[29]           En ce qui concerne les voies de commercialisation des parties, il ressort clairement de la preuve que les automobiles sont vendues principalement par l’intermédiaire de concessionnaires automobiles autorisés et que les pneus sont vendus principalement par l’intermédiaire de marchands de pneus [Duval, para. 39]. En outre, si les concessionnaires automobiles se spécialisent dans la vente d’automobiles, les marchands de pneus, eux, se spécialisent dans la vente de pneus; aucun ne se spécialise dans les deux [Duval, para. 47]. Enfin, s’il est vrai que les concessionnaires automobiles comprennent généralement un centre de service où sont vendues différentes pièces automobiles, tels des pneus, rien dans la preuve dont je dispose n’indique que l’Opposante vend ses pneus à des concessionnaires automobiles. Ainsi, bien qu’il ne soit pas exclu que les voies de commercialisation des parties se recoupent, j’estime qu’il est peu probable que cela se produise.

Autres circonstances de l’espèce

[30]           La Requérante a également fait valoir que d’autres circonstances contribuaient à réduire la probabilité de confusion; ces circonstances sont les suivantes : le fait que les marques constituent un facteur important dans les décisions d’achat des consommateurs, le prix élevé des marchandises des parties et le fait que des marques identiques employées en liaison avec des automobiles et des pneus coexistent dans le registre. J’examinerai chacune de ces circonstances séparément.

Le fait que les marques de fabrique constituent un facteur important dans les décisions d’achat

[31]           M. Duval atteste qu’au moment d’acheter un véhicule automobile, les consommateurs choisissent d’abord une marque de fabrique (p. ex. HONDA) et sélectionne ensuite un modèle (p. ex. CIVIC) en fonction de leurs besoins et de leur budget [Duval, para. 38]. La Requérante soutient que l’importance accrue que revêt la marque du fabricant a pour effet de réduire la probabilité de confusion avec un nom de modèle en particulier. À cet égard, la Requérante fait valoir que, dans la mesure où les consommateurs désireux d’acheter une nouvelle voiture commencent par sélectionner un fabricant d’automobiles, ils savent pertinemment que les différents modèles de véhicules parmi lesquels ils feront ensuite leur choix proviennent du fabricant qu’ils ont sélectionné au départ, et ce, peu importe qu’ils connaissent ou non la marque de l’Opposante. Je conviens que ce facteur réduit la probabilité de confusion en l’espèce.

Le prix élevé des marchandises des parties

[32]           La Requérante fait également valoir que les marchandises respectives des parties sont des marchandises dispendieuses que les consommateurs n’achètent pas sans s’être renseignés ou avoir effectué des recherches considérables. D’après la preuve dont je dispose, le prix des véhicules neufs de la Requérante varie de 16 000 $ à 72 000 $, tandis qu’il faut généralement débourser plus de 700 $ pour un ensemble de quatre pneus d’automobile [Duval, para. 49]. La preuve indique également qu’avant d’arrêter son choix sur un modèle de véhicule en particulier, le consommateur effectue généralement des recherches considérables sur les qualités et particularités associées à la marque du fabricant (p. ex. cote de sécurité, qualité du service, valeur de revente) [Duval, para. 41]. S’agissant des pneus, le consommateur qui a besoin de nouveaux pneus pour son véhicule n’a d’autre choix que de traiter avec un spécialiste des pneus (p. ex. un vendeur de pneus ou un mécanicien); il ne peut pas simplement prendre un pneu sur une tablette, payer et sortir. Les pneus doivent avoir la taille qui convient au véhicule et répondre aux exigences de performance du consommateur [Duval, para. 50]. 

[33]           Je conviens avec la Requérante que les marchandises respectives des parties ne sont pas des marchandises que les consommateurs achètent à la hâte ou sur un coup de tête, comparativement à des marchandises moins dispendieuses. À cet égard, la Cour suprême du Canada a confirmé que les consommateurs à la recherche de biens dispendieux sont moins susceptibles de confondre des marques de commerce [Mattel, précité]. Dans Masterpiece, cependant, la Cour a précisé que le test en matière de confusion demeurait celui de la première impression qu’une marque de commerce produit dans l’esprit du consommateur s’apprêtant à faire un achat, au moment où celui-ci l'aperçoit. Le prix des marchandises n’est donc pas un facteur qui réduit la probabilité de confusion.

Le fait que des marques identiques employées en liaison avec des automobiles et des pneus coexistent dans le registre

[34]           L’affidavit de Mme Palmer fournit des détails relatifs à 34 cas où la même marque de commerce a été enregistrée en liaison avec des automobiles par une partie et en liaison avec des pneus par une autre partie. La seule chose que l’on puisse inférer de cette situation est que la section de l’examen du Bureau des marques de commerce fait vraisemblablement une distinction entre les automobiles et les pneus, ou entre le commerce des automobiles et le commerce des pneus.

Conclusion quant à la probabilité de confusion

[35]           Dans l’application du test en matière de confusion, j’ai considéré que ce dernier tenait de la première impression et du vague souvenir. Après examen de l’ensemble des circonstances de l’espèce, j’estime que la Requérante s’est acquittée du fardeau ultime qui lui incombait de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que la confusion entre les marques est improbable. L’improbabilité de la confusion tient aux différences entre les pneus de l’Opposante et les véhicules automobiles de la Requérante, et entre les voies de commercialisation respectives des parties. Bien que les marques soient identiques et que la marque de l’Opposante soit employée depuis plus longtemps, j’estime qu’il est peu probable que le consommateur moyen n’ayant qu’un vague souvenir de la marque GLADIATOR employée en liaison avec des pneus pense que les véhicules automobiles de la Requérante proviennent de l’Opposante.

[36]           En conséquence, le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d) est rejeté.

Motifs d’opposition fondés sur l’absence de droit à l’enregistrement et l’absence de caractère distinctif

[37]           Les motifs d’opposition fondés sur l’absence de droit à l’enregistrement et l’absence de caractère distinctif portent également sur la question de la confusion à la date de production de la demande et à la date de production de la déclaration d’opposition. Dans l’ensemble, mes conclusions quant au motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d) s’appliquent aussi à ces motifs. Comme j’ai conclu qu’il n’est pas probable que la Marque soit confondue avec la marque de l’Opposante, ces motifs sont également rejetés.

Motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30i)

[38]           Lorsqu’un requérant a fourni la déclaration exigée par l’alinéa 30i), un motif fondé sur l’alinéa 30i) ne devrait être retenu que dans des cas exceptionnels, comme lorsqu’il existe une preuve de mauvaise foi de la part du requérant [voir Sapodilla Co Ltd c. Bristol-Myers Co (1974), 15 C.P.R. (2d) 152 (C.OM.C.), p. 155]. La présente espèce n’étant pas un cas exceptionnel, je rejette ce motif d’opposition.

Décision

[39]           Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition selon les dispositions de l’article 38(8) de la Loi.

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Cindy R. Folz

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

Traduction certifiée conforme
Judith Lemire

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