Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION

 

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2012 COMC 212

Date de la décision : 28-11-2012

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION de Hillerich & Bradsby Co. à la demande no 1 282 602 produite par X-Technology Swiss GmbH en vue de l’enregistrement de la marque de commerce X BIONIC

 

[1]               Le 12 décembre 2005, X-Technology Swiss GmbH (la Requérante) a produit une demande en vue de faire enregistrer la marque de commerce X BIONIC (la Marque) sur la base d’un emploi projeté de la Marque par la Requérante au Canada en liaison avec des vêtements, des couvre-chefs et des articles chaussants. La demande été modifiée subséquemment et l’état déclaratif des marchandises est désormais rédigé comme suit :

[TRADUCTION]
vêtements, nommément chemises, combinaisons-jupons (sous-vêtements), sous-vêtements, bandanas, chemises en tricot; articles chaussants, nommément sandales, chaussures de ski, pantoufles, chaussures d’athlétisme, sandales de bain, pantoufles de bain, souliers de plage, bottes de sports, chaussures en bois, sandales de fibres de sparte, chaussures de football, chaussures de football, chaussures de gymnastique et pièces connexes, nommément crampons pour souliers et bottes de football, semelles intérieures et semelles de traction pour bottes et souliers; couvre-chefs, nommément casquettes et chapeaux; vêtements sport, nommément chandails sport, léotards, jerseys, shorts, pantalons pour cyclisme et costumes pour gymnastique; bonneterie, nommément mi-chaussettes et chaussettes et bretelles connexes; sont expressément exclus des marchandises précitées les gants, gants de golf, gants de jardinage, gants d’équitation, gants d’entraînement, gants de conduite, gants de musculation, gants de tennis, gants de hockey, gants de baseball et gants de frappeur (les Marchandises).

 

[2]               La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 27 septembre 2006.

[3]               Le 27 février 2007, Hillerich & Bradbsy Co. (l’Opposante) a produit une déclaration d’opposition dans laquelle elle soulève les motifs d’opposition résumés ci-dessous :

(a)    suivant l’alinéa 30i) de la Loi, la Requérante ne pouvait pas être convaincue d’avoir le droit d’employer la Marque en liaison avec les Marchandises, car elle connaissait l’existence des droits antérieurs de l’Opposante au Canada;

(b)   suivant l’alinéa 12(1)d) de la Loi, la Marque n’est pas enregistrable, car elle crée de la confusion avec la marque BIONIC de l’Opposante enregistrée sous le no TMA614 187;

(c)    suivant l’alinéa 16(1)a) de la Loi, la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque, car à la date de production de la demande, la Marque créait de la confusion avec la marque de l’Opposante antérieurement employée et révélée au Canada;

(d)   suivant l’article 2, la Marque n’est pas distinctive de la Requérante.

Je souligne que le motif d’opposition ayant trait à l’absence de droit à l’enregistrement contient une erreur typographique. La demande en l’espèce étant fondée sur un emploi projeté, il faudrait lire « alinéa 16(3)a) » et non « 16(1)a) ».

[4]               La Requérante a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle elle nie les allégations de l’Opposante.

[5]               Au soutien de son opposition, l’Opposante a produit l’affidavit de Lawrence B. Edlin, Jr. Au soutien de sa demande, la Requérante a produit les affidavits de Lesley Gallivan et du professeur Bodo W Lambertz. Les parties ont toutes deux présenté des observations écrites et pris part à une audience qui s’est tenue le 10 juillet 2012. 

Fardeau de preuve et dates pertinentes

[6]               La Requérante a le fardeau ultime de démontrer que sa demande d’enregistrement satisfait aux exigences de la Loi. Il incombe toutefois à l’Opposante de s’acquitter du fardeau initial consistant à présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de chacun des motifs d’opposition soulevés [voir John Labatt Limited c. The Molson Companies Limited (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.), p. 298].

[7]               Les dates pertinentes qui s’appliquent aux motifs d’opposition sont les suivantes :

- alinéa 38(2)a)/article 30 de la Loi – la date de production de la demande [Georgia-Pacific Corp c. Scott Paper Ltd (1984), 3 C.P.R. (3d) 469 (C.O.M.C.), p. 475];

 

- alinéas 38(2)b)/12(1)d) de la Loi – la date de ma décision [Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd et le Registraire des marques de commerce (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.)];

 

- alinéa 38(2)c)/paragraphe 16(3) de la Loi – la date de production de la demande;  

 

- alinéa 38(2)d) de la Loi – la date de production de la déclaration d’opposition [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c. Stargate Connections Inc (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (C.F.)].

 

Motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30i)

[8]               Le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30i) peut être rejeté sommairement d’une part parce que la Requérante a fourni la déclaration exigée à l’alinéa 30i) et, d’autre part, parce que ce motif ne peut être retenu que dans des circonstances exceptionnelles, comme lorsqu’il est démontré que la partie requérante agit de mauvaise foi [Sapodilla Co Ltd c. Bristol-Myers Co (1974), 15 C.P.R. (2d) 152 (C.O.M.C.); Multi-Marques Inc c. Gesfor Aktiengesellschaft (2008), 74 C.P.R. (4th) 15 (C.O.M.C.), p. 89]. Comme la demande comprend la déclaration exigée et qu’il n’existe en l’espèce aucune allégation ou preuve de mauvaise foi ou d’autres circonstances exceptionnelles, ce motif d’opposition est rejeté.

Motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d)

[9]               J’ai exercé le pouvoir discrétionnaire du registraire de consulter le registre et obtenu confirmation que l’enregistrement no TMA614 187 de la marque BIONIC pour emploi avec des gants est bien en vigueur [Quaker Oats Co of Canada c. Menu Foods Ltd (1986), 11 C.P.R. (3d) 410 (C.O.M.C.)]. L’Opposante s’est donc acquittée de son fardeau initial à l’égard de ce motif. 

[10]           Le test à appliquer pour évaluer la probabilité de confusion est énoncé au paragraphe 6(2) de la Loi, qui prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale. Aux fins de cette évaluation, je dois tenir compte de toutes les circonstances pertinentes de l’espèce, y compris celles énumérées au paragraphe 6(5), à savoir le caractère distinctif inhérent des marques et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle les marques ont été en usage; le genre de marchandises, services ou entreprises; la nature du commerce; et le degré de ressemblance entre les marques dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent.

[11]           Cette liste de critères n’est pas exhaustive et le poids qu’il convient d’accorder à chaque critère varie en fonction du contexte [voir Mattel, Inc c. 3894207 Canada Inc, [2006] 1 R.C.S. 772 (C.S.C.), para. 54]. Je me fonde également sur l’arrêt Masterpiece Inc c. Alavida Lifestyles Inc (2011), 92 C.P.R. (4th) 361 (C.S.C.), dans lequel la Cour suprême du Canada a déclaré, au para. 49, que la ressemblance entre les marques (alinéa 6(5)e)) est souvent le facteur qui revêt le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion. 

Le caractère distinctif inhérent et la mesure dans laquelle les marques sont connues

[12]           Il m’est permis de prendre d’office connaissance de définitions du dictionnaire [Tradall SA c. Devil's Martini Inc (2011), 92 C.P.R. (4th) 408 (C.O.M.C.), para. 29]. Le dictionnaire en ligne www.dictionary.com définit « bionic » [la bionique] en partie comme [TRADUCTION] « le fait d’utiliser des dispositifs électroniques et des pièces mécaniques dans le but d’aider les humains à accomplir des tâches difficiles, dangereuses ou complexes, notamment en imitant des parties du corps ou en améliorant leurs capacités ». À la lumière de cette définition, j’estime que les marques des parties ne possèdent ni l’une ni l’autre un caractère distinctif prononcé, car toutes deux suggèrent que, grâce à la technologie et à une conception spéciale, les marchandises en liaison avec lesquelles elles sont employées peuvent aider les consommateurs à accomplir des tâches en améliorant les capacités du corps humain. Le X compris dans la Marque confère à la Marque un caractère distinctif légèrement plus marqué que celui de la marque de commerce BIONIC de l’Opposante.

[13]           La preuve présentée par Lawrence B. Edlin Jr., le président de la division PowerBilt Golf de l’Opposante, révèle ce qui suit :

          L’Opposante distribue les gants BIONIC au Canada depuis le 1er novembre 2005 (para. 9). La marque de commerce figure sur les gants eux-mêmes, comme en fait foi la publicité annonçant les gants fournie à la pièce E (voir, à titre d’exemples, les publicités parues dans Style at Home et dans Sports Illustrated).

          La technologie de marque BIONIC de l’Opposante s’inspire de l’anatomie et du fonctionnement de la main humaine et repose sur l’emploi de coussinets permettant de limiter la formation de callosités et d’ampoules et de réduire la fatigue de la main (para. 12, pièce B). Selon le site Web de l’Opposante (www.bionicgloves.com), les gants BIONIC [TRADUCTION] « améliorent la flexibilité et la dextérité naturelles, tout en aidant à garder les mains sèches et fraîches » (pièce B).

          La technologie BIONIC de l’Opposante a été développée initialement pour des gants de hockey, puis elle a évolué, de sorte qu’aujourd’hui elle est également utilisée dans la confection de gants de baseball pour receveurs, frappeurs et joueurs de premier but. Les gants de l’Opposante sont portés par des joueurs de la Ligue nationale de hockey et de la Ligue majeure de baseball (para. 14). Rien n’indique cependant que ces produits sont vendus au Canada ou utilisés par des joueurs au Canada.

          Aujourd’hui, la gamme de gants BIONIC de l’Opposante comprend également des gants de jardinage, de golf, d’équitation, d’entraînement et de conduite (para. 15; pièce C). Les Canadiens qui souhaitent se procurer des gants BIONIC peuvent le faire par l’intermédiaire du site Web www.bionicgloves.com. Ils ont la possibilité d’acheter le produit directement de l’Opposante ou d’un détaillant en ligne, de communiquer avec un représentant du service à la clientèle ou d’utiliser la fonction « retailer locator » [trouver un détaillant] pour obtenir les coordonnées d’une entreprise locale vendant les gants BIONIC (para. 39).

          Les gants BIONIC pour le jardinage, le golf et l’équitation de l’Opposante ont été mentionnés ou annoncés dans divers magazines et périodiques (pièces F et G), y compris les publications précitées. Bien que l’Opposante n’ait fourni aucune information relativement à la diffusion des magazines ou des journaux dont il est fait mention dans l’affidavit de M. Edlin, je peux admettre d’office que les publications précitées bénéficient d’un certain rayonnement au Canada [voir, à titre d’exemple, Timberland Co c. Wrangler Apparel Corp (2005), 46 C.P.R. (4th) 201 (C.O.M.C.), p. 207 et Northern Telecom Ltd c. Nortel Communications Inc (1987), 15 C.P.R. (3d) 540 (C.O.M.C.), p. 543]. 

o   8 mai 2004 – The Washington Post – gants de jardinage

o   janvier 2005 – Town & Country – gants de jardinage

o   20 juin 2005 – BusinessWeek – gants de golf

o   4 juillet 2005 – Time – gants de jardinage

o   4 novembre 2004 – The Wall Street Journal – gants de jardinage

o   janvier 2006 – Better Homes & Gardens (Garden, Deck & Landscape) – gants de jardinage

o   14 mai 2006 – New York Times – gants d’équitation

o   13 juin 2006 – Sports Illustrated – gants de golf

o   18 juillet 2006 – Sports Illustrated – gants de golf

o   5 mai 2007 – Ottawa Citizen – gants de jardinage

o   mai 2007 – Canadian Living – gants de jardinage

o   15 décembre 2005 – New York Times – gants de jardinage

          Le distributeur canadien des gants de golf de l’Opposante, le Groupe Forzani, a vendu plus de 4 000 paires en 2006, 7 000 paires en 2007 et 5 300 paires du 1er janvier au 30 avril 2008 (para. 38).

À la lumière de ce qui précède, je conclus que les gants BIONIC pour le golf et le jardinage de l’Opposante sont connus dans une certaine mesure au Canada.

[14]           La preuve présentée par le professeur Bodo W. Lambertz, le directeur général de la Requérante, révèle ce qui suit :

          La marque X BIONIC a trait à des [TRADUCTION] « vêtements de sport fonctionnels » (para. 16). À la pièce D 9 (p. 4), les produits X BIONIC de la Requérante sont décrits de la manière suivante : 

[TRADUCTION]
X BIONIC a réussi à mettre au point des articles d’habillement uniques qui vous gardent au frais lorsque vous transpirez et au chaud lorsqu’il fait froid … Les produits X-BIONIC sont révolutionnaires! Ils épousent votre corps comme une seconde peau, mieux que la nature elle-même et intègrent des fonctionnalités conçues pour répondre aux exigences particulières de toute la gamme des sports.

           Le distributeur canadien de la Requérante est Sport Dinaco (para. 30). La marque de commerce X BIONIC a été employée en liaison avec les Marchandises au Canada pour la première fois en novembre 2006 et les Marchandises sont distribuées depuis par Sport Dinaco à des détaillants de toutes les régions du Canada (para. 36). Les produits X BIONIC ont également été présentés lors d’un salon qui s’est tenu à Montréal en 2008 auquel Dinaco participait à titre d’exposante (para. 30; pièce G).

          Les quantités approximatives d’unités des produits de marque X BIONIC vendues au Canada depuis novembre 2006 (para. 38) sont indiquées ci-dessous :

o   2006 – 750

o   2007 – 2 250

o   2008 – 3 900

La preuve de la Requérante donne à penser que la Marque est également connue dans une certaine mesure au Canada.

[15]           Au vu de la preuve produite par chacune des parties, j’estime que ce facteur joue légèrement en faveur de l’Opposante, car la preuve permet d’inférer que la marque de commerce BIONIC est davantage connue que la Marque.

Le degré de ressemblance

[16]           Il existe un degré de ressemblance considérable entre les marques en cause dans la présentation et dans le son; l’ajout d’un X au début du mot BIONIC ne modifiant pas de manière notable les dimensions visuelle et phonétique de la Marque. Les marques des parties évoquent, en outre, la même idée, soit celle de produits de haute technologie conçus pour aider les consommateurs à accomplir des tâches difficiles ou exigeantes sur le plan physique.

Le genre de marchandises, services ou entreprises, et la nature du commerce

[17]           S’agissant des marchandises, des services et des activités commerciales des parties, l’analyse de la question de la confusion aux termes de l’alinéa 12(1)d) repose sur l’examen des états déclaratifs des marchandises ou services qui figurent dans la demande et dans l’enregistrement des parties. [Esprit International c. Alcohol Countermeasure Systems Corp (1997), 84 C.P.R. (3d) 89 (C.O.M.C.), pp. 98 et 99]. L’examen de ces états déclaratifs doit cependant avoir pour but de déterminer le genre probable d’entreprise ou de commerce envisagés par les parties et non l’ensemble des commerces pouvant être visés par le libellé. La preuve relative aux activités commerciales réellement exercées par les parties est utile à cet égard [McDonald's Corp c. Coffee Hut Stores Ltd (1996), 68 C.P.R. (3d) 168 (C.A.F.)].

[18]           La marque de l’Opposante est enregistrée pour emploi en liaison avec des gants. L’enregistrement ne comporte aucune restriction quant aux types de gants visés. La Requérante soutient que dans l’esprit du consommateur moyen le mot « gants » évoque des gants que l’on peut porter pendant la saison froide et, donc, un produit différent des Marchandises. J’estime que cet argument n’est pas convaincant, car la preuve de l’Opposante démontre clairement que les gants BIONIC sont des articles à vocation fonctionnelle conçus pour être utilisés lors de la pratique de sports ou de loisirs bien précis, notamment le golf et le jardinage. Le site Web www.bionicgloves.com de l’Opposante comprend des photos des gants BIONIC suivants : gants de golf, gants de jardinage, gants d’entraînement, gants d’équitation, gants habillés, gants de tennis, gants de moto, gants de racquetball (pièce C). Selon la preuve de l’Opposante, les gants de golf de marque BIONIC de cette dernière sont vendus au Canada par l’intermédiaire du Groupe Forzani, un détaillant d’articles de sports (para. 9), du site Web www.bionicgloves.com de l’Opposante et d’autres détaillants locaux (para. 39).

[19]           La preuve produite par la Requérante révèle que les vêtements X BIONIC sont des vêtements fonctionnels conçus pour être portés lors de la pratique d’activités sportives ou étant destinés à un usage sportif en général (para. 6). La preuve présentée par M. Lambertz contient même une mention selon laquelle les produits X BIONIC intègrent des fonctionnalités [TRADUCTION] « conçues pour répondre aux exigences particulières de toute la gamme des sports » (pièce D). Rien dans la preuve de M. Lambertz ne donne à penser que les Marchandises pourraient être destinées à un usage autre que sportif.  

[20]            Par conséquent, j’estime qu’il existe un recoupement entre les marchandises – qui, dans les deux cas, sont constituées de vêtements ou d’articles d’habillement fonctionnels intégrant des technologies de pointe et étant destinés à un usage sportif. Je souligne que l’enregistrement de l’Opposante ne comporte aucune restriction limitant l’emploi de la marque à un type particulier de gants de sport, tels des gants de golf. Je suis d’avis qu’il existe également un recoupement potentiel entre les voies de commercialisation des parties, car les produits des parties peuvent les uns comme les autres être vendus dans des magasins d’articles de sport. Ma conclusion concorde avec la preuve présentée par Lesley Gallivan, une employée de l’agent de la Requérante, qui a indiqué avoir effectué des recherches sur l’état du marché et avoir consulté dans le cadre de ces recherches des boutiques virtuelles [TRADUCTION] « où des produits tels que ceux vendus par l’Opposante, par la Requérante et par des concurrents sont offerts en vente » (para. 3).  

[21]           Dans ses observations écrites et à l’audience, la Requérante a fait valoir que la restriction contenue dans l’état déclaratif des Marchandises reproduite ci-dessous réduisait la mesure dans laquelle les marchandises se recoupent.

[TRADUCTION]
sont expressément exclus des marchandises précitées les gants, gants de golf, gants de jardinage, gants d’équitation, gants d’entraînement, gants de conduite, gants de musculation, gants de tennis, gants de hockey, gants de baseball et gants de frappeur.

 

J’estime que cette restriction ne réduit en rien le recoupement des marchandises ou des commerces; les gants ne faisant pas partie des marchandises visées par la demande, l’ajout de cette restriction me semble superflu. Il reste que les parties offrent toutes deux des marchandises destinées à être utilisées lors de la pratique d’activités sportives et récréatives – différentes certes – et que, par conséquent, il existe un recoupement entre les marchandises du fait de cette similarité [Wolverine Outdoors Inc c. Marker Völkl (2012), 102 C.P.R. (4th) 450 (C.O.M.C.), para. 69]. En outre, certaines des Marchandises pourraient être annoncées comme pouvant être utilisées lors de la pratique d’activités sportives ou récréatives comme le golf, le jardinage, l’équitation ou le vélo, ce qui augmente le risque de recoupement. Par conséquent, ce facteur joue en faveur de l’Opposante.

L’état du registre et l’état du marché

[22]           À son affidavit, Lesley Gallivan, une assistante en marques de commerce à l’emploi de l’agent de la Requérante, a joint les résultats d’une recherche effectuée dans la Base de données sur les marques de commerce et d’une recherche visant à repérer des boutiques virtuelles.

[23]           La preuve relative à l’état de registre n’est pertinente que dans la mesure où on peut en tirer des inférences quant à l’état du marché. Or, de telles inférences sur l’état du marché ne peuvent être tirées que lorsqu’un nombre important d’enregistrements pertinents ont été repérés [voir Ports International Ltd c. Dunlop Ltd (1992), 41 C.P.R. (3d) 432 (C.O.M.C.); Welch Foods Inc c. Del Monte Corp (1992), 44 C.P.R. (3d) 205 (C.F. 1re inst.); Maximum Nutrition Ltd c. Kellogg Salada Canada Inc (1992), 43 C.P.R. (3d) 349 (C.A.F.)]. Mme Gallivan a joint quatre enregistrements et une demande à son affidavit (pièce A). Comme la Requérante n’a fourni aucun élément de preuve établissant l’emploi de ces marques au Canada, j’estime que le nombre limité d’enregistrements et de demandes fournis par Mme Gallivan n’est pas suffisant pour me permettre de tirer quelque conclusion que ce soit sur l’état du marché.

[24]           Mme Gallivan a également joint des copies de pages Web tirées de différents sites et annuaires Web. Elle a fourni des copies d’écran tirées de sites Web montrant que les marques pertinentes énumérées ci-dessous sont employées en liaison avec différents types de vêtements, de vêtements de sport et d’équipement et d’accessoires de sport. Je souligne que, pour chacune de ces marques, Mme Gallivan a également fourni des copies d’écran indiquant que les entités qui offrent ces produits font affaire avec des marchands ou des détaillants au Canada. Dans ces circonstances, je suis disposée à admettre cette preuve, mais comme il s’agit de ouï-dire, je n’y accorderai qu’un poids limité.

o   Blousons et gants APEX BIONIC (pièces C et D);

o   BIONIC T-SHIRT (pièce E);

o   Bâtons de jeu de crosse BIONIC (pièce G).

Je signale que j’ai exclu de la preuve pertinente les éléments de preuve relatifs à la marque ALPINESTARS (pièce F) et à la marque BIONIC BAND (pièce F), car bien qu’un tarif d’expédition vers le Canada soit fourni, rien n’indique que ces produits soient connus des Canadiens ou que des Canadiens aient déjà acheté ces produits. 

[25]           Bien qu’à mon avis, la preuve présentée par Mme Gallivan corrobore le fait que la marque de commerce BIONIC de l’Opposante n’est pas une marque forte, cette preuve n’est pas suffisante pour me permettre de conclure qu’il s’agit là d’une circonstance additionnelle significative au point d’éclipser la ressemblance entre les marques elles-mêmes et entre les marchandises.

Autres emplois par la Requérante et autres enregistrements au nom de la Requérante

[26]           D’après la preuve produite par la Requérante, cette dernière possède, en plus de la Marque, plusieurs autres marques, dont X SOCKS et X UNDERWEAR (voir, à titre d’exemple, la pièce A) et X TECHNOLOGY (voir, à titre d’exemple, la pièce D). La marque X-SOCKS est enregistrée sous le no TMA569 734 pour emploi en liaison avec des articles de bonneterie, nommément des mi-chaussettes et des chaussettes ainsi que des fixe-chaussettes (para. 13; pièce B) et avec le dessin reproduit ci-dessous (enregistrement no TMA607 932), lequel est employé en conjugaison avec les marques X-SOCKS, X TECHNOLOGY, X UNDERWEAR et X BIONIC (pièces A, D, H).

X DESIGN

L’existence de ces enregistrements n’aide en rien la cause de la Requérante. En effet, le fait d’être propriétaire de plusieurs enregistrements ne confère pas de droit automatique à l’enregistrement d’autres marques, même si ces marques sont étroitement liées à la marque de commerce visée par le premier enregistrement [Coronet-Werke Heinrich Schlerf GmbH c. Produits Ménagers Coronet Inc (1984), 4 C.P.R. (3d) 108 (C.O.M.C.), p. 115].

Absence de cas de confusion

[27]           M. Lambertz affirme que [TRADUCTION] « mon entreprise offre les produits X BIONIC partout au Canada… depuis novembre 2006 et n’a jamais été confrontée à quelque obstacle ou opposition que ce soit. Aucun cas de confusion avec les marchandises ou services d’autres entreprises ou avec d’autres marques de commerce n’a été porté à l’attention de mon entreprise et je n’ai personnellement jamais eu connaissance de quelque cas de confusion que ce soit » (para. 37). Une inférence négative peut être tirée quant à la probabilité de confusion lorsque la preuve démontre un emploi simultané significatif des marques en cause et que la partie opposante n’a présenté aucun élément de preuve confirmant l’existence de cas de confusion [Christian Dior SA c. Dion Neckwear Ltd (2002), 20 C.P.R. (4th) 155 (C.A.F.), para. 19]. En l’espèce, cependant, il m’est impossible de tirer une telle inférence, car je ne dispose d’aucun élément de preuve attestant l’existence d’un emploi simultané significatif.

Conclusion

[28]           La question que je dois trancher est celle de savoir si, à la vue de la marque de commerce de la Requérante, un consommateur qui n’a qu’un vague souvenir de la marque de commerce de l’Opposante serait susceptible de conclure que les Marchandises proviennent de la même source que les marchandises de l’Opposante. Après examen de l’ensemble des circonstances pertinentes, un doute subsiste dans mon esprit à savoir s’il existe ou non une probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et la marque déposée BIONIC de l’Opposante. Comme il a été dit dans Conde Nast Publications Inc c. Union des éditions modernes (1979), 46 C.P.R. (2d) 183, p. 188 (C.F. 1re inst.), [TRADUCTION] « si l’on craint que l’enregistrement d’une marque de commerce puisse créer la confusion entre elle et une marque plus ancienne, cette dernière doit tirer le bénéfice de ce doute ». Mes doutes découlent des similarités visuelles entre les marques de commerce et du recoupement des marchandises et des voies de commercialisation. En effet, les parties offrent toutes deux des produits destinés à un usage sportif et, donc, susceptibles d’être vendus dans des magasins d’articles de sport.

Motif d’opposition fondé sur l’alinéa 16(3)a)

[29]           L’Opposante a également plaidé, aux termes de l’article 16 de la Loi, que la Marque créait de la confusion avec sa marque de commerce BIONIC antérieurement employée au Canada. L’appréciation de ce motif d’opposition diffère de celle du motif fondé sur l’alinéa 12(1)d), car la date pertinente aux termes de l’alinéa 16(3)a) est le 12 décembre 2005. 

[30]           Pour s’acquitter de son fardeau initial aux termes de l’article 16, l’Opposante doit démontrer qu’elle employait déjà sa marque de commerce BIONIC au Canada à la date du 12 décembre 2005 et qu’elle n’avait pas abandonné l’emploi de cette marque à la date du 27 septembre 2006, soit la date d’annonce de la demande en cause (paragraphe 16(5) de la Loi). L’Opposante a uniquement établi l’emploi de sa marque de commerce en liaison avec des gants de golf de marque BIONIC (voir les para. 9 et 18 de l’affidavit de Mme Edlin au sujet des ventes; et la pièce E qui est constituée de publicités parues dans le magazine Sports Illustrated dans lesquelles figure un gant de golf portant la marque de l’Opposante). Étant donné qu’à la date pertinente la marque de commerce BIONIC avait uniquement été employée en liaison avec des gants de golf et de façon limitée, j’estime, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe pas de probabilité de confusion, car, je suis d’avis que les consommateurs seraient en mesure, du fait des petites différences entre les marques des parties, de faire la distinction entre la marque BIONIC employée en liaison avec des gants de golf et la marque X BIONIC employée en liaison avec les Marchandises vu la différence dans la nature spécifique des marchandises en cause. En conséquence, ce motif d’opposition est rejeté.

Motif d’opposition fondé sur l’article 2

[31]           L’Opposante allègue que la Marque n’est pas distinctive. À cet égard, l’Opposante a le fardeau initial d’établir qu’à la date du 27 février 2007, sa marque de commerce BIONIC était connue dans une mesure suffisante pour annuler le caractère distinctif de la Marque [Bojangles' International, LLC c. Bojangles Café Ltd (2006), 48 C.P.R. (4th) 427 (C.F.), para. 33]. La vente de marchandises au Canada n’est pas le seul facteur que l’on puisse invoquer à l’appui d’un motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif. Un tel motif peut également s’appuyer sur la preuve que la marque de commerce de l’Opposante est devenue connue ou a acquis une notoriété ou une renommée soit par le bouche-à-oreille, soit par suite d’articles parus dans des journaux ou des magazines. [Motel 6, Inc c. No. 6 Motel Ltd (1981), 56 C.P.R. (2d) 44 (C.F. 1re inst.), para. 58 et 59]. La preuve de l’Opposante concernant la période antérieure au 2 février 2007, que j’ai examinée dans le cadre de mon analyse du motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d), est suffisante pour permettre à l’Opposante de s’acquitter de son fardeau de preuve relativement à l’emploi de sa marque de commerce BIONIC en liaison avec des gants de golf. Pour les mêmes raisons que celles énoncées relativement au motif d’opposition fondé sur l’alinéa 16(3)a), je conclus que la Requérante s’est acquittée de son fardeau de démontrer qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion. En conséquence, ce motif d’opposition est rejeté.


Décision

[32]           Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, je rejette la demande en application du paragraphe 38(8) de la Loi.

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Natalie de Paulsen

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

Traduction certifiée conforme
Judith Lemire

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