Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2010 COMC 46      

Date de la décision : 2010-04-01

TRADUCTION

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION produite par les Producteurs Laitiers du Canada/Dairy Farmers of Canada à l’encontre de la demande d’enregistrement no 1238002 pour la marque de commerce DairyLogic au nom de ThaiDesserts Inc.

 

 

 

Les procédures

[1]               Le 15 novembre 2004, ThaiDesserts Inc. (la Requérante) a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce DairyLogic (la Marque) – demande no 1238002 – en liaison avec des desserts surgelés, des poudings, des yogourts, des boissons au yogourt sans alcool et des boissons à base de produits laitiers (les Marchandises) et des services de restaurant et de repas pour emporter (les Services). La Requérante a renoncé au droit à l’usage exclusif du mot « Dairy » [produit laitier] en dehors de la marque de commerce dans son ensemble.

[2]               La demande est fondée sur l’emploi projeté de la Marque au Canada et a été annoncée dans le Journal des marques de commerce du 20 juillet 2005 aux fins de la procédure d’opposition.

[3]               Les Producteurs Laitiers du Canada/Dairy Farmers of Canada (l’Opposante) a produit une déclaration d’opposition le 20 décembre 2005, que le registraire a transmis à la Requérante le 24 janvier 2006. Le 1er février 2006, la Requérante a produit un document considéré comme une contre‑déclaration. Elle contient la déclaration suivante : [traduction] « Leurs observations ne sont pas fondées… » Je considérerai cette déclaration comme une réfutation des motifs d’opposition de l’Opposante. La partie argumentative de la contre-déclaration ne sera pas examinée. Les arguments des parties devraient être exprimés dans un plaidoyer écrit ou présentés à l’audience.

[4]               L’Opposante a produit en preuve l’affidavit d’Ian MacDonald, alors que la Requérante a choisi de ne produire aucune preuve.

[5]               Aucune des parties n’a produit de plaidoyer écrit et aucune audience n’a été tenue.

Les motifs d’opposition

[6]               Les motifs d’opposition invoqués sont les suivants :

  1. La demande n’est pas conforme aux exigences de l’article 30 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13 (la « Loi »), parce que la Requérante a déjà employé la Marque ou, subsidiairement ou cumulativement, n’a jamais eu l’intention d’employer la Marque au Canada.
  2. La demande n’est pas conforme aux exigences de l’article 30 de la Loi parce que la Requérante a faussement déclaré qu’elle était convaincue avoir le droit d’employer la Marque au Canada compte tenu de ce qui précède et du contenu de plusieurs lois fédérales et provinciales.
  3. La demande n’est pas conforme aux exigences de l’alinéa 30a) de la Loi parce qu’elle ne renferme pas d’état, dressé dans les termes ordinaires du commerce, des marchandises précises en liaison avec lesquelles la Marque aurait été employée. En effet, les termes « desserts surgelés » et « poudings » n’ont pas, dans le contexte de la demande d’opposition, le degré de précision exigé par la Loi.
  4. La Marque n’est pas enregistrable au sens de l’alinéa 12(1)b) de la Loi car, qu’elle soit sous forme graphique, écrite ou sonore, elle donne une description claire ou une description fausse et trompeuse, en langue anglaise, de la nature ou de la qualité des marchandises à l’égard desquelles on projette de l’employer, puisque le consommateur moyen conclurait que les marchandises contiennent ou contiendront toujours des produits laitiers.
  5. La Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque puisque la demande en cause n’est pas conforme aux exigences de l’article 30 de la Loi, la Marque n’est pas enregistrable et la Marque n’est pas une marque dont l’emploi est projeté, mais plutôt une marque employée ou abandonnée, puisqu’elle n’a pas été employée continuellement, selon le cas. Par conséquent, la demande devrait être rejetée conformément à la disposition liminaire du paragraphe 16(3) de la Loi.
  6. Conformément à l’alinéa 38(2)d) et à l’article 2 de la Loi, la Marque n’est pas distinctive à l’égard des marchandises de la Requérante, car elle ne distingue pas véritablement les Marchandises en liaison avec lesquelles la Requérante projette de l’employer des marchandises ou services d’autres propriétaires, notamment l’Opposante, ni n’est adaptée à les distinguer ainsi.

 

Le fardeau de preuve dans une procédure d’opposition à une marque de commerce

[7]               Bien qu’il incombe à la Requérante de démontrer que sa demande est conforme aux dispositions de la Loi, l’Opposante a toutefois le fardeau initial de présenter suffisamment d’éléments de preuve admissibles à partir desquels on puisse raisonnablement conclure à l’existence des faits allégués au soutien de chaque motif d’opposition. Si l’Opposante s’acquitte de ce fardeau initial, la Requérante doit ensuite prouver, selon la prépondérance des probabilités, que les motifs d’opposition ne devraient pas faire obstacle à l’enregistrement de la Marque [voir Joseph E. Seagram & Sons Ltd. et al. C. Seagram Real Estate Ltd., 3 C.P.R. (3d) 325, p. 329 et 330; John Labatt Ltd. c. Les Compagnies Molson Ltée., 30 C.P.R. (3d) 293; et Wrangler Apparel Corp. c. The Timberland Company, [2005] C.F. 722].

Motifs d’opposition sommairement rejetés

[8]               Monsieur MacDonald est le directeur national de l’Opposante, au service marketing et nutrition. J’ai examiné son affidavit et ferai référence à des parties précises pertinentes lorsque j’évaluerai les motifs d’opposition particuliers. Toutefois, après avoir examiné le contenu complet de l’affidavit de M. MacDonald, je conclus que rien ne permet d’établir les premier et troisième motifs d’opposition. Comme l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau initial, ces motifs d’opposition sont rejetés.

[9]               S’agissant du cinquième motif d’opposition, l’article 16 de la Loi est le fondement d’un motif d’opposition connu sous le nom de « droit à l’enregistrement ». L’enregistrabilité d’une marque de commerce (article 12 de la Loi) et le respect des dispositions de l’article 30 de la Loi sont des motifs d’opposition en soi. L’article 16 de la Loi énumère les faits qu’un opposant doit prouver afin que ce motif d’opposition soit accueilli. La disposition liminaire de l’article 16 de la Loi, à elle seule, ne définit pas ce qu’est un motif d’opposition permettant de soulever les questions de la non‑conformité et de l’enregistrabilité. Le cinquième motif d’opposition est également rejeté.

L’enregistrabilité de la Marque en vertu de l’alinéa 12(1)b) de la Loi

[10]           Avant d’examiner cette question, je voudrais souligner que le présent motif d’opposition, tel qu’il est formulé, ne vise que les Marchandises. L’enregistrabilité de la Marque suivant l’alinéa 12(1)b) de la Loi doit être examinée à la date de production de la demande (le 5 novembre 2004) [voir Dic Dac Holdings (Canada) Ltd c. Yao Tsai Co. (1999), 1 C.P.R. (4th) 263; Zorti Investments Inc. c. Party City Corporation (2004), 36 C.P.R. (4th) 90; Havana Club Holdings S.A. c. Bacardi & Company Limited, (2004) 35 C.P.R. (4th) 541].

[11]           Monsieur MacDonald affirme que l’Opposante est mandatée par les producteurs laitiers pour, entre autres, protéger l’emploi de termes liés aux produits laitiers comme le lait, la crème et le beurre. Je signale que le déposant allègue au paragraphe 8 de son affidavit que [traduction] « l’expression “DAIRY” [produits laitiers] dans la demande de marque de commerce de ThaiDesserts évoque le fait que les marchandises sont faites à base de produits laitiers […] comme seul ou principal ingrédient » (Je souligne). Monsieur MacDonald a produit des extraits de la définition du terme « DAIRY » dans divers dictionnaires de langue anglaise. Au paragraphe 11, il explique quelle serait la première impression du consommateur moyen à l’égard de la composition et de la nature de certains produits liés à la Marque, à savoir des desserts surgelés et des poudings. Il conclut ce paragraphe en affirmant qu’un tel consommateur estimerait que les poudings et les desserts surgelés vendus en liaison avec la Marque sont faits de produits laitiers comme seul ou principal ingrédient.

[12]           Je signale que la preuve de l’Opposante à l’égard du présent motif d’opposition concerne seulement les desserts surgelés et les poudings. Cela se comprend puisqu’il n’y a rien de mal à avoir une marque de commerce qui évoque la nature ou la qualité des marchandises. Selon la preuve de l’Opposante concernant la définition du mot « dairy », il ne fait aucun doute que le « yogourt » relève de cette catégorie générale de marchandises. Dans tous les cas, en l’absence d’un renvoi précis aux yogourts, aux boissons au yogourt sans alcool et aux boissons à base de produits laitiers dans la preuve, et sans plaidoyer écrit ou oral à l’égard de ces marchandises, il m’est impossible de conclure en faveur de l’Opposante.

[13]           L’opinion de M. MacDonald sur la façon dont la Marque peut être perçue par le consommateur canadien moyen ne lie certainement pas le registraire. Monsieur MacDonald n’a pas fourni de renseignements détaillés sur son expérience pour me permettre de conclure qu’il est qualifié pour exprimer une opinion sur cette question.

[14]           Je dois déterminer si la Marque, lorsqu’employée en liaison avec des poudings et des desserts surgelés, donne une description claire ou une description fausse ou trompeuse dans la langue anglaise de la nature ou de la qualité de ces marchandises. Le test applicable a été bien décrit dans la décision 242183 Ontario Ltd. c. Black Forrest Inn Inc. (1984), 3 C.P.R. (3d) 23, dans laquelle la Cour a clairement affirmé que l’on doit analyser la marque de commerce dans son ensemble et non la fragmenter en différentes parties. L’alinéa 12(1)b) n’interdit pas l’enregistrement d’une marque de commerce à moins que, lorsque considérée dans son ensemble, elle donne une description claire ou une description fausse ou trompeuse.

[15]           La Marque est composée de deux mots tout aussi dominants : « Dairy » et « Logic » [logique]. Ces deux mots ne sont habituellement pas combinés dans la langue anglaise. À part le terme « Dairy » qui peut évoquer la nature des « desserts surgelés » et des « poudings », il reste un élément distinctif, soit le terme « Logic ». La combinaison de « Dairy » et « Logic » ne crée pas un marque de commerce qui peut être perçue dans son ensemble comme donnant une description de la nature ou de la qualité des « poudings » et des « desserts surgelés ».

[16]           Puisque la Marque, lorsqu’examinée dans son ensemble, ne donne pas une description claire des Marchandises, elle ne peut être considérée comme donnant une description fausse ou trompeuse. Comme il est indiqué dans Molson Companies Ltd. c. Carling O’Keefe Breweries of Canada Ltd. (1981), 55 C.P.R. (2d) 15, une marque de commerce doit d’abord donner une description claire avant de pouvoir être considérée comme donnant une description fausse ou trompeuse. Par conséquent, le quatrième motif d’opposition est également rejeté.

Non‑conformité à l’article 30 de la Loi (lois provinciales et fédérales)

[17]           S’agissant du deuxième motif d’opposition, M. MacDonald a produit des extraits pertinents de la Loi sur l’emballage et l’étiquetage des produits de consommation, L.R.C. 1985, ch. C-38, de la Loi sur les aliments et drogues, L.R.C. 1985, ch. F-27, du Règlement sur les aliments et drogues, (C.R.C., ch. 870), de la Loi sur les produits alimentaires, L.R.Q., ch. P-29, de la Milk Industry Act, R.S.B.C., ch. 289, et du Dairy Manufacturing Plant Regulations, (Règlement de la Saskatchewan 53/79), ainsi que certains articles pertinents du Guide d’étiquetage et de publicité sur les aliments de 2003 de l’Agence canadienne d’inspection des aliments. Rien n’indique que l’emploi de la Marque en liaison avec les Marchandises contreviendrait à ces lois ou règlements.

[18]           Dans Dairy Bureau of Canada c. Popsicle Industries Ltd. 1990 CarswellNat 1379, le registraire s’est trouvé dans une situation semblable, où les marques de commerce en cause étaient STRAWBERRIES 'N CREAM, RASPBERRIES 'N CREAM et BLUEBERRIES 'N CREAM, toutes fondées sur l’emploi projeté. L’opposante alléguait que les demandes n’étaient pas conformes à l’alinéa 30i) de la Loi et que l’emploi de ces marques était contraire à la Loi sur les aliments et drogues et à la Loi sur l’emballage et l’étiquetage des produits de consommation. Le registraire a rejeté le motif d’opposition en affirmant ce qui suit :

[traduction] […] le registraire doit présumer que la requérante respectera la législation en matière d’emballage et d’étiquetage au Canada et emploiera sa marque de commerce d’une manière équitable, c’est‑à‑dire d’une manière qui ne vise pas à tromper le public ou à l’induire en erreur (voir Fox, Canadian Law of TradeMarks and Unfair Competition, aux p. 158 et 159). Si l’opposante avait établi que la requérante fabriquait ou distribuait des confiseries surgelées sur un bâton au Canada en liaison avec la marque de commerce en cause et que ces confiseries surgelées ne comportaient pas de crème, une conclusion différente aurait bien pu être tirée à l’égard de ce motif d’opposition.

[19]           De même, rien dans le dossier n’indique que les Marchandises ne seraient pas des produits laitiers. En l’absence d’une telle preuve, je dois rejeter le présent motif d’opposition puisque l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau initial.

Caractère distinctif de la Marque

[20]           Le libellé du dernier motif d’opposition est une répétition du libellé de la Loi. Il n’y a pas d’allégation de faits pour étayer ce motif d’opposition dans la déclaration d’opposition. Rien n’indique que l’Opposante a employé des marques de commerce qui comprenaient le mot « dairy » de sorte que la Marque ne distinguerait pas les Marchandises de celles de l’Opposante. Non seulement le motif d’opposition, tel qu’il est formulé, n’est pas allégué de manière opportune, mais aucune preuve n’a été présentée à l’appui. Il est en conséquence rejeté.

Conclusion

Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions du paragraphe 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition selon les dispositions du paragraphe 38(8) de la Loi.

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Jean Carrière

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

Traduction certifiée conforme

Mylène Boudreau, B.A. en trad.

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