Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2014 COMC 100

Date de la décision : 2014-05-13
TRADUCTION

DANS L'AFFAIRE DE L'OPPOSITION produite par Forest Stewardship Council, A.C. à l'encontre de la demande d'enregistrement no 1,524,862 pour la marque de commerce TREE Dessin, au nom de G.H. Imported Merchandise & Sales Limited

[1]               G.H. Imported Merchandise & Sales Limited a produit une demande d'enregistrement pour la marque de commerce TREE Dessin, reproduite ci-dessous, en liaison avec des [traduction] sacs, nommément fourre-tout, sacs à dos, sacs à bandoulière, porte-documents, étuis d'ordinateur, serviettes.

 

Tree Design

[2]               Forest Stewardship Council, A.C. s'est opposée à cette demande, principalement au motif qu'il existe une probabilité raisonnable de confusion entre cette marque de commerce et sa marque FSC & Dessin, enregistrement no LMC528,235, reproduite ci-dessous. Cette marque est enregistrée en liaison avec du mobilier et des produits faits en bois, des imprimés se rapportant à la gestion forestière et à la préservation des forêts et aux services connexes, et est prétendument employée en liaison avec, notamment, des vêtements, des accessoires, des jouets et des sacs.

FSC & DESIGN

Forest Stewardship Council, A.C. s'est également opposée à cette demande pour des motifs techniques en vertu de l'article 30 de la Loi, dont la non-conformité à l'article 30i) de la Loi, compte tenu d'une violation alléguée de la Loi sur le droit d'auteur.

[3]               Pour les raisons exposées ci-dessous, j'ai conclu que la présente opposition devait être rejetée.

Contexte

[4]               Le 26 avril 2011, G.H. Imported Merchandise & Sales Limited (la Requérante) a produit la demande no 1,524,862 en vue de faire enregistrer la marque TREE Dessin (la Marque) fondée sur l'emploi de la Marque au Canada en liaison avec des [traduction] sacs, nommément fourre-tout, sacs à dos, sacs à bandoulière, porte-documents, étuis d'ordinateur, serviettes depuis au moins 2009.

[5]               La demande a été annoncée le 14 décembre 2011, et Forest Stewardship Council, A.C. (l'Opposante) a produit une déclaration d'opposition le 14 février 2012. L'Opposante allègue que la Marque n'est pas enregistrable en vertu de l'article 12(1)d) de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch. T-13 (la Loi) et que la Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la Marque en vertu de l'article 16(1) de la Loi, parce que la Marque crée de la confusion avec la marque de commerce déposée FSC & Dessin de l'Opposante (enregistrement no LMC528,235), employée antérieurement au Canada par l'Opposante. L'Opposante allègue également que la demande d'enregistrement relative à la Marque n'est pas conforme aux exigences de l'article 30i) de la Loi, parce que la Marque viole le droit d'auteur que l'Opposante possède sur sa marque de commerce, la Marque n'est pas distinctive, compte tenu de la marque de commerce de l'Opposante et du droit d'auteur détenu à son égard, et la demande n’est pas conforme à l’article 30b) de la Loi, parce que la Requérante n'a pas, elle-même ou par l'entremise d'un prédécesseur en titre, employé la Maque en liaison avec les marchandises visées par la demande depuis la date revendiquée.

[6]               Au soutien de son opposition, l'Opposante a produit les affidavits de Michael Stephen, un enquêteur privé agréé, employé par CKR Global Investigations (CKR Global), d'Elenita Anastacio, recherchiste en marques de commerce pour l'agent de l'Opposante, et de Monika Patel, agente de programme au Forest Stewardship Council (FSC) Canada, le bureau national canadien de l'Opposante. Comme preuve, la Requérante a produit les affidavits de David Woods, directeur général de la Requérante, de Mary P. Noonan, recherchiste en marques de commerce, employée par l'agent de la Requérante, et de Scott J. Douglas, étudiant en droit, employé par l'agent de la Requérante. Aucun des déposants n'a été contre-interrogé.

[7]               Seule la Requérante a produit un plaidoyer écrit, mais les deux parties étaient représentées à une audience lors de laquelle l'opposition produite par l'Opposante à l'encontre de la demande d'enregistrement no 1,475,642 pour la même marque de commerce (visant des marchandises et des services différents) a également été instruite. Une décision distincte sera rendue pour ce dossier.

Fardeau de preuve et dates pertinentes

[8]               C'est à la Requérante qu'incombe le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. L'Opposante a toutefois le fardeau initial de présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l'existence des faits allégués à l'appui de chacun des motifs d'opposition [voir John Labatt Ltd c. Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst.), p. 298; Dion Neckwear Ltd c. Christian Dior, SA (2002), 20 CPR (4th) 155 (CAF)].

[9]               Les dates pertinentes qui s'appliquent aux motifs d'opposition sont les suivantes :

         article 38(2)a)/article 30 – la date de production de la demande [voir Georgia-Pacific Corp c. Scott Paper Ltd (1984), 3 CPR (3d) 469 (COMC), p. 475];

         article 38(2)b)/article 12(1)d) – la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. et le Registraire des marques de commerce (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)];

         article 38(2)c)/article 16(1) – la date de premier emploi par la Requérante [article 16(1)];

         article 38(2)d)/article 2 (absence de caractère distinctif) – la date de production de la déclaration d'opposition [voir Metro-Goldwyn-Mayer Inc c. Stargate Connections Inc (2004), 34 CPR (4th) 317 (CF)].

Questions préliminaires

[10]           L'Opposante a soulevé plusieurs objections à l'affidavit de M. Douglas. Avant d'examiner ces objections, je crois utile de résumer le contenu de son affidavit.

[11]           M. Douglas est un étudiant en droit, employé par l'agent de la Requérante. Le 26 novembre et le 28 novembre 2012, il a acheté divers types de sacs présentant des dessins d'arbre dans des magasins de l'Ontario. Les magasins dans lesquels il a fait ces achats comprenaient Billabong, West 49 et Canadian Tire.

[12]           M. Douglas a aussi effectué une recherche sur le marché en ligne des détaillants offrant en vente des sacs ou des vêtements en liaison avec des dessins d'arbre. Des imprimés de pages Web des marchands en ligne suivants présentant divers types de sacs en liaison avec des dessins d'arbre sont joints à son affidavit : West 49, Shreadhead, Element, Canadian Tire, Army & Navy et Outbound.

[13]           Les 28 et 29 novembre 2012, après avoir examiné les résultats de la recherche qu’il a effectuée dans le registre et qui composent les Pièces A et B jointes à l'affidavit de Mme Noonan, M. Douglas a repéré les marques de commerce suivantes employées en liaison avec des sacs ou des vêtements sur Internet et a joint des imprimés des sites Web suivants : Mulberry (demande no 1,355,615); Beverly Hills Country Club (demande no 1,591,764); REI (demande no 1,555,025); Lrg (demande no 1,205,410); Los Angeles Sparks (demande no 834,970); et Timberland (demande no 834,970).

[14]           Les trois objections soulevées par l'Opposante à l'affidavit de M. Douglas sont les suivantes. En premier lieu, l'Opposante soutient que les pages jointes comme pièces à l'affidavit de M. Douglas n'ont pas été assermentées. L'Opposante soutient donc qu'elles ne sont pas admissibles.

[15]           En second lieu, l'Opposante s'oppose au fait que la preuve de M. Douglas a été produite par un employé de la firme de la Requérante. L'argument général invoqué est que les employés ne sont pas des témoins indépendants qui présentent des témoignages objectifs lorsqu'ils fournissent un témoignage d'opinion sur des questions contestées [voir Cross Canada Auto Body Supply (Windsor) Ltd c. Hyundai Auto Canada (2006), 53 CPR (4th) 286 (CAF) (Cross-Canada)]. L'Opposante soutient que peu de poids, sinon aucun, ne devrait donc être accordé à cet affidavit.

[16]           En troisième lieu, l'Opposante soutient que même si les pièces jointes à l'affidavit de M. Douglas sont admissibles, ces pièces ne sont pas admissibles comme preuve de la véracité de leur contenu, étant donné que les imprimés de sites Web de tiers tiennent du ouï-dire.

[17]           S'agissant d'abord de l'objection de l'Opposante quant au fait que les pages jointes comme pièces à l'affidavit de M. Douglas ne sont pas notariées, je souligne que les pièces non notariées sont jugées admissibles par le registraire lorsqu'aucune objection n'a été soulevée par l'autre partie ou lorsqu'une objection a été soulevée à un stade si avancé de la procédure d'opposition que la partie qui a produit les éléments de preuve n'a que peu ou pas la possibilité de corriger cette lacune [voir Maximillian Fur Co c. Maximillian for Men's Apparel Ltd (1983), 82 CPR (2d) 146 (COMC); Time Inc c. Moisescu (1990), 31 CPR (3d) 255 (COMC)]. En l'espèce, l'Opposante n'a pas soulevé le fait que les documents joints à l'affidavit de la Requérante n'avaient pas été certifiés par le commissaire. Compte tenu de ce qui précède, j'estime que les documents joints à l'affidavit de la Requérante constituent des pièces admissibles.

[18]           En ce qui concerne la deuxième objection de l'Opposante, j'estime que les préoccupations soulevées par la Cour d'appel fédérale dans Cross-Canada, précité ne s'appliquent pas en l'espèce. L'affidavit de M. Douglas ne renferme pas de conclusions ni d'opinions sur les questions litigieuses de l'opposition. M. Douglas a simplement acheté divers sacs dans quelques magasins et il a également effectué des recherches sur Internet pour trouver d'autres exemples de telles marchandises présentant un dessin d'arbre. Je ne vois pas comment le fait que cette preuve a été produite par un employé de l'agent de la Requérante la rend moins fiable que si la Requérante ou son agent avait retenu les services d'un enquêteur externe pour effectuer ces achats ou ces recherches sur Internet et souscrire un affidavit. Dans l'ensemble, la preuve ne m'apparaît pas controversée [voirCanadian Jewellers Association c. American Gem Society, 2010 COMC 106 (CanLii)].

[19]           En ce qui concerne la troisième objection de l'Opposante, j'estime que la preuve de M. Douglas présentant diverses marques sur des sites Web de tiers n'est pas produite comme preuve de la véracité du contenu des pages, mais plutôt simplement comme preuve de leur existence. Par conséquent, je suis d'avis que cette preuve suffit à démontrer que des tiers ont présenté des dessins d'arbre en liaison avec leurs marchandises en ligne à la date à laquelle M. Douglas a effectué ses recherches sur Internet.

Motifs d'opposition

Non-conformité – article 30b)

[20]           L'Opposante allègue également que la demande n'est pas conforme à l'article 30b) de la Loi, parce que la Requérante n'a pas employé la Marque au Canada en liaison avec les marchandises visées par la demande à la date de premier emploi revendiquée, à savoir en 2009.

[21]           Un fardeau de preuve initial est imposé à l'Opposante en ce qui concerne la question de la non-conformité de la demande à l'article 30b). L'Opposante peut s'acquitter de ce fardeau en s'appuyant sur sa propre preuve, mais également sur celle de la Requérante [voir Labatt Brewing Company Limited c. Molson Breweries, a Partnership (1996), 68 CPR (3d) (CF 1re inst. ) 216, p. 230]. Cependant, si elle choisit d'invoquer la preuve de la Requérante pour s'acquitter de son fardeau initial à l'égard de ce motif, l'Opposante doit démontrer que la preuve de la Requérante est clairement incompatible avec les revendications que la Requérante a formulées dans sa demande [voir Ivy Lea Shirt Co c. 1227624 Ontario Ltd (1999), 2 CPR (4th) 562, p. 565-566 (COMC), confirmée par 11 CPR (4th) 489 (CF 1re inst.)]. Si l'Opposante démontre une incompatibilité manifeste de la preuve quant aux dates de premier emploi revendiquées par la Requérante, il incomberait alors à la Requérante d'appuyer formellement les dates qu'elle a revendiquées.

[22]           En l'espèce, l'Opposante s'est fondée exclusivement sur la preuve de la Requérante pour s'acquitter de son fardeau initial. À cet égard, l'Opposante a mis l'accent sur ce qui manquait dans l'affidavit de M. Woods pour établir la date de premier emploi revendiquée par la Requérante, plutôt que de souligner les incohérences éventuelles dans la preuve de la Requérante, en vue de s'acquitter de son fardeau initial à l'égard de ce motif. Par exemple, l'Opposante soutient que la Pièce B jointe à l'affidavit de M. Woods ne constitue pas une preuve directe d'emploi de la Marque en liaison avec des sacs en 2009. En outre, contrairement à la demande connexe (demande no 1475642), aucune facture ne vient corroborer les ventes de la Requérante.

[23]           Bien qu'il eût été préférable que la Requérante fournisse des détails relatifs à l'emploi de la Marque en liaison avec les marchandises visées par la demande remontant à 2009, le fait qu'elle ne l'a peut-être pas fait n'équivaut pas à une incohérence. De plus, le fait qu'il n'y a aucune preuve directe d'emploi de la Marque en liaison avec des sacs en 2009 ne signifie pas nécessairement que la Requérante n'a pas employé correctement la Marque en liaison avec des sacs depuis la date de premier emploi revendiquée. Je ne suis donc pas en mesure de conclure que l'Opposante s'est acquittée de son fardeau de preuve.

[24]           Par conséquent, ce motif d'opposition est rejeté.

Non-conformité – article 30i)

[25]           L'article 30i) de la Loi exige que tout requérant se déclare convaincu d'avoir le droit d'employer la marque visée par la demande. Selon la jurisprudence, on peut conclure à la non-conformité à l'article 30i) lorsqu'il existe une preuve prima facie de non-conformité à une loi fédérale [comme la Loi sur le droit d'auteur, LRC 1985, ch. C-42, la Loi sur les aliments et drogues, LRC 1985, ch. F-27 ou la Loi sur la Société canadienne des postes, LRC 1985, ch. C-10; voir également Interactiv Design Pty Ltd c. Grafton-Fraser Inc (1998), 87 CPR (3d) 537 (COMC), p. 542-543)].

[26]           En l'espèce, l'Opposante allègue que la demande n'est pas conforme à l'article 30i) parce que la Requérante a enfreint la Loi sur le droit d'auteur. Pour s'acquitter de son fardeau initial à l'égard de ce motif d'opposition, l'Opposante doit établir une preuve prima facie de violation du droit d'auteur [voir E Remy Martin & Co SA c. Magnet Trading Corp (HK) Ltd (1988), 23 CPR (3d) 242 (COMC)].

[27]           Afin d'établir une preuve prima facie de violation du droit d'auteur, l'Opposante est tenue de prouver i) qu'elle est titulaire d'un droit d'auteur sur son dessin d'arbre et ii) que la Marque est une reproduction substantielle de ce dessin d'arbre [voir Jones c. Dragon Tales Production Inc (2002), 27 CPR (4th) 369 (COMC)].

[28]           Une copie d'un acte constatant une cession de droit d'auteur provenant des registres de l'entreprise de l'Opposante et dans lequel Tristan Kent de Kent, en Angleterre, cède à l'Opposante tous les droits d'auteur dans tous les pays et territoires du monde sur les œuvres définies dans l'acte (dont la marque FSC & Dessin de l'Opposante) est jointe comme Pièce A à l'affidavit de Monika Patel. L'Opposante soutient que le document parle de lui-même et démontre que l'Opposante détient un droit d'auteur sur son dessin d'arbre et qu'elle est la titulaire du droit d'auteur.

[29]           L’Opposante soutient également que la Marque est une reproduction substantielle de la marque de l'Opposante parce que les deux dessins d'arbre intègrent les éléments uniques suivants :

         une silhouette d'arbre vide;

         une ouverture au bas du dessin; et

         l'emploi d'une ligne continue unique dans le dessin.

[30]           J'estime qu'il y trop de dissemblance entre la Marque et le dessin d'arbre de l'Opposante et trop peu de ressemblance entre ceux-ci pour me permettre de conclure à l'existence d'une preuve prima facie de violation du droit d'auteur. À cet égard, la Marque comporte un arbre de forme arrondie, délimité par un élément de forme carrée. La marque de l'Opposante, en revanche, comporte un arbre de forme plutôt triangulaire combiné à un crochet, tous deux étant présentés dans un style gras régulier noir sur fond blanc. La marque de l'Opposante intègre aussi les lettres FSC inscrites en gros et bien en vue.

[31]           Comme je ne suis pas convaincue de l'existence d'une preuve prima facie de violation du droit d'auteur, ce motif d'opposition est rejeté.

Non-enregistrabilité – article 12(1)d)

[32]                 L’Opposante allègue également que la Marque n'est pas enregistrable, parce qu'elle crée de la confusion avec sa marque de commerce FSC & Dessin susmentionnée. J'ai exercé mon pouvoir discrétionnaire de consulter le registre pour confirmer que l'enregistrement no LMC528,235 de l'Opposante est en vigueur [voir Quaker Oats Co of Canada c. Menu Foods Ltd (1986), 11 CPR (3d) 410 (COMC)]. L'Opposante s'est donc acquittée de son fardeau de preuve initial à l'égard de ce motif.

[33]                 Comme l'Opposante s'est acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait, la Requérante doit donc établir, selon la prépondérance des probabilités, qu'il n'y a aucune probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et les marques de commerce de l'Opposante.

[34]                 La marque de l'Opposante est enregistrée pour emploi en liaison avec les marchandises et services suivants :

[traduction]
MARCHANDISES :

Mobilier et produits faits en bois, nommément papier, pâte de bois, bois de construction de dimensions courantes; imprimés se rapportant à la gestion forestière et à la préservation des forêts, nommément livres, magazines, périodiques, brochures.

SERVICES :


1) Services de gestion forestière; évaluation du bois sur pied, nommément évaluation de l'état de santé, de la biodiversité, de la production, de la valeur marchande, des utilisations, du statut juridique, des objectifs de gestion, de la chaîne de possession, de la certification et de la garde du bois sur pied; services de gestion des affaires et d'administration des affaires reliés au bois et aux produits faits en bois; services de consultation techniques et réglementaires reliés au bois et aux produits faits en bois; coupe et transformation du bois d'œuvre.

Test en matière de confusion

[35]           Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. L'article 6(2) de la Loi prévoit que l'emploi d'une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l'emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale. Lorsqu'il applique le test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce, y compris celles expressément énoncées à l'article 6(5) de la Loi, à savoir a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de marchandises, services ou entreprises; d) la nature du commerce; e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent.

[36]           Ces facteurs ne constituent pas une liste exhaustive et le poids qu'il convient d'accorder à chacun d'eux n'est pas nécessairement le même [voir, de manière générale, Mattel, Inc c. 3894207 Canada Inc. (2006), 49 CPR (4th) 321 (CSC); Veuve Clicquot Ponsardin c. Boutiques Cliquot ltée (2006), 49 CPR (4th) 401 (CSC)]. Dans Masterpiece Inc c. Alavida Lifestyles Inc et al. (2011), 92 CPR (4th) 361 (CSC), la Cour suprême du Canada a clairement indiqué que le facteur le plus important parmi ceux énoncés à l'article 6(5) de la Loi est souvent le degré de ressemblance entre les marques.

Article 6(5)a) – le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[37]           Si ni l'une ni l'autre des marques des parties n'est intrinsèquement forte, j'estime que la Marque possède un caractère distinctif inhérent plus fort que la marque de l'Opposante du fait qu'elle n'évoque pas les marchandises visées par sa demande. La marque de l'Opposante, en revanche, évoque une idée lorsqu'elle est employée en liaison avec les produits du bois et du papier et les services connexes de l'Opposante.

[38]           La Requérante soutient que sa preuve selon laquelle les dessins d'arbre sont communs au commerce des deux parties permet également de conclure que les marques des parties ne sont pas distinctives (voir l'affidavit de Mme Noonan). Le fait que d'autres marques de commerce présentant un dessin d'arbre peuvent figurer au registre des marques de commerce n'entre, toutefois, pas en ligne de compte lorsqu'il s'agit d'évaluer le caractère distinctif inhérent des marques des parties en soi. Comme la preuve de l'état du registre constitue une circonstance pertinente de l'espèce qu'il convient d'examiner à titre de circonstance supplémentaire dans le cadre du test en matière de confusion, ce point sera approfondi ci-après.

[39]           Une marque de commerce peut acquérir une force accrue en devenant connue par la promotion ou l'emploi. La preuve du déposant de l'Opposante, M. Stephen, est que plusieurs magasins de vente au détail dans la région de Toronto vendent des articles vestimentaires qui arborent la marque FSC & Dessin de l'Opposante sur l'étiquette volante. L'Opposante n'a produit aucun élément de preuve démontrant que sa marque a une certaine notoriété en liaison avec les produits du bois et du papier et les services connexes visés par l'enregistrement.

[40]           En revanche, la Requérante a fourni la preuve non contredite qu'elle a employé sa Marque en liaison avec les marchandises visées par la demande depuis juin 2009. Par exemple, l'affidavit de M. Woods démontre que les ventes au Canada de sacs arborant la Marque ont dépassé les 200 000 $ depuis juin 2009. La Requérante a aussi fourni la preuve de l'annonce et de la promotion de ses produits au Canada grâce à la distribution de plus d’un million de catalogues.

[41]           Compte tenu de ce qui précède, je conclus que la Marque est devenue connue dans une plus large mesure au Canada que la marque de l'Opposante. Dans l'ensemble, j'estime que ce facteur favorise la Requérante.

Article 6(5)b) – la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

[42]           Bien que l'enregistrement de l'Opposante soit fondé sur l'emploi depuis l'an 2000, l'Opposante n'a fourni aucune preuve non équivoque de l'emploi de sa marque en liaison avec ses marchandises ou ses services visés par l'enregistrement. En outre, comme l'a souligné la Requérante, le registraire ne présumera qu'un emploi de minimis à la lumière de la copie certifiée de l'enregistrement de l'Opposante [voir Entre Computer Centers, Inc c. Global Upholstery Co (1991), 40 CPR (3d) 427 (COMC)].

[43]           Étant donné que la Requérante a fourni une preuve d'emploi de sa Marque au Canada depuis juin 2009, j'estime que ce facteur favorise la Requérante.

Articles 6(5)c) et d) – le genre de marchandises, services ou entreprises; la nature du commerce

[44]           Pour évaluer ce facteur, je dois comparer l'état déclaratif des marchandises qui figure dans la demande de la Requérante avec les marchandises visées par l'enregistrement de l'Opposante [voir Henkel Kommanditgesellschaft auf Aktien c. Super Dragon Import Export Inc (1986), 12 CPR (3d) 110 (CAF); Mr Submarine Ltd c. Amandista Investments Ltd. (1987), 19 CPR (3d) 3 (CAF); Miss Universe Inc c. Bohna (1994), 58 CPR (3d) 381 (CAF)].

[45]           Le genre de marchandises et de services des parties et les voies de commercialisation pour ces marchandises et ces services sont fort différents. À cet égard, la Marque de la Requérante a fait l'objet d'une demande en liaison avec divers sacs, tandis que la marque de l'Opposante est enregistrée pour emploi en liaison avec un éventail de produits du bois et du papier et de services forestiers. La marque de commerce de l'Opposante n'est pas enregistrée pour emploi en liaison avec des sacs, pas plus que l'Opposante n'a fourni de preuve d'emploi de sa marque comme marque de commerce employée en liaison avec de tels produits. Tout ce que l'Opposante a démontré, c'est que sa marque est apposée sur des étiquettes volantes recyclées attachées à des vêtements. Les étiquettes volantes arborant la marque de l'Opposante n'indiquent pas si l'Opposante est la source ou le fabricant des vêtements auxquels elles sont attachées.

[46]           Si les marchandises des parties peuvent être vendues aux mêmes consommateurs (p. ex., les détaillants de vêtements et d'accessoires comme des sacs), je ne considère pas que cela signifie qu'il y a un recoupement entre les voies de commercialisation des parties pour leurs marchandises et services respectifs. À cet égard, je ne crois pas que des étiquettes volantes faites de papier recyclé ou de produits du papier emprunteraient les mêmes voies de commercialisation grâce auxquelles on achèterait habituellement des sacs, même des sacs écologiques. En outre, je ne considère pas que la portée des marchandises visées par la demande pourrait éventuellement inclure les mêmes voies de commercialisation que pour les marchandises et services de l'Opposante.

[47]           Ces facteurs favorisent donc la Requérante.

Article 6(5)e) – le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent

[48]           Si la Cour suprême du Canada a observé dans Masterpiece que le premier mot d'une marque de commerce peut constituer le plus important au regard du caractère distinctif [voir aussi Conde Nast Publications c. Union des éditions modernes (1979), 46 CPR (2d) 183 (CF 1re inst.)], elle s'est dit d'avis qu'il est préférable de se demander d'abord si les marques de commerce comportent un aspect particulièrement frappant ou unique.

[49]           Je ne considère pas qu'il existe un degré de ressemblance élevé entre les marques dans la présentation ou le son. À cet égard, la Marque comporte un arbre de forme arrondie, délimité par un élément de forme carrée. La marque de l'Opposante, en revanche, comporte un arbre de forme plutôt triangulaire combiné à un crochet, tous deux étant présentés dans un style gras régulier noir sur fond blanc. La marque de l'Opposante intègre aussi les lettres FSC inscrites en gros et bien en vue.

[50]           J'estime toutefois que les idées suggérées par les marques sont similaires du fait qu'elles évoquent toutes deux l'idée de la sensibilisation à l'environnement ou de la durabilité de l'environnement. Cependant, comme je l'expliquerai ci-après, les marques de commerce évoquant cette idée sont très courantes tant dans le secteur de la Requérante que dans celui de l'Opposante.

Autres circonstances de l'espèce

Preuve de l'état du registre

[51]           Comme autre circonstance de l'espèce, la Requérante a invoqué la preuve de l'état du registre produite dans l'affidavit de Mme Noonan pour établir que le dessin d'arbre est un élément répandu dans les marques de commerce visant les sacs, les vêtements et/ou les services connexes ainsi que les marchandises reliées au papier et/ou au bois et/ou les services forestiers au Canada. Évidemment, la preuve de l'état du registre n'est pertinente que dans la mesure où l'on peut en dégager des conclusions sur l'état du marché [voir Ports International Ltd c. Dunlopo Ltd (1992), 41 CPR (3d) 432 (COMC); Del Monte Corporation c. Welch Foods Inc (1992), 44 CPR (3d) 205 (CF 1re inst.)]. Par ailleurs, l'on ne peut tirer de conclusions sur l'état du marché de cette preuve que si l'on relève un grand nombre d'enregistrements pertinents [voir Kellogg Salada Canada Inc c. Maximum Nutrition Ltd (1992), 43 CPR (3d) 349 (CAF)].

[52]           L'Opposante fait valoir que fort peu des enregistrements présentés en preuve par Mme Noonan présentent une grande ressemblance avec la marque de l'Opposante. L'Opposante soutient que la recherche était beaucoup trop large et comprenait des inscriptions sans dessin d'arbre de même que des dessins qui ne présentaient pas les mêmes éléments uniques que les marques des parties, c.-à-d. une silhouette d'arbre vide au feuillage arrondi, une ouverture au bas du dessin et une ligne continue unique formant le dessin.

[53]           Je conviens avec l'Opposante que ce ne sont pas tous les dessins d'arbre enregistrés et présentés en preuve qui ont une grande ressemblance avec la marque de l'Opposante. Ceci étant dit, en toute déférence, je ne partage pas l'avis de l'Opposante selon lequel seuls les dessins d'arbre qui renferment les mêmes éléments uniques que les marques des parties sont pertinents en l'espèce. À mon avis, la preuve de l'état du registre est pertinente lorsqu'elle permet de relever des marques ou des portions de marque semblables pour des marchandises ou des services semblables. Au vu de la preuve produite, je suis d'avis qu'il y a au moins 12 enregistrements pertinents présentant un dessin d'arbre (de même que plusieurs demandes pertinentes) reliés à des sacs et au moins 40 enregistrements pertinents avec un dessin d'arbre pour des marchandises en papier et/ou en bois et/ou des services forestiers. Compte tenu du nombre d'enregistrements pertinents, il faut présumer que les consommateurs ont l'habitude de voir couramment ces éléments employés dans le commerce pour ces types de marchandises ou de services.

[54]           Comme l'a souligné la Requérante, un commerçant qui emploie une marque de commerce intégrant un élément courant dans le commerce ne peut s'attendre à une protection très étendue pour sa marque. Lorsqu'une marque de commerce adopte un élément couramment employé comme marque de commerce, les petites différences suffisent à éviter la confusion [voir Multiplicant Inc c. Petit Bateau Valton SA (1994), 55 CPR (3d) 372 (CF 1re inst.), para. 30, citant à l'appui General Motors Corporation c. Bellows (1949), RCS 678 (CSC), p. 691].

[55]           En ce qui concerne la preuve de M. Douglas, au moins cinq des marques de commerce qu'il a repérées sur des sites Web de tiers ou qui sont apposées sur des produits qu'il a achetés dans des magasins de vente au détail de Toronto représentent des enregistrements que je juge pertinents ou des demandes présentées dans la preuve de l'état du registre de Mme Noonan. Cette preuve vient corroborer la preuve de Mme Noonan et appuyer la présomption que les consommateurs ont l'habitude de voir couramment ces éléments employés dans le commerce pour ces types de marchandises ou de services.

Absence de preuve de confusion réelle

[56]           La Requérante soutient que l'absence d'une preuve de confusion en dépit de la coexistence des marques constitue une autre circonstance de l'espèce favorable à la conclusion qu'il n'existe pas de probabilité de confusion entre les marques des parties.

[57]           Bien qu'il ne soit pas nécessaire qu'un opposant prouve qu'il y a confusion pour que je conclue qu'il existe une probabilité de confusion, l'absence de confusion malgré le recoupement des services et des voies de commercialisation pourrait donner lieu à une inférence défavorable à la cause de l'Opposante [voir Mattel, précité; Christian Dior SA c. Dion Neckwear Ltd (2002), 20 CPR (4th) 155 (CAF)].

[58]           En l'espèce, étant donné que l'Opposante n'a pas établi l'emploi de sa marque et que j'estime que les marchandises ou les services des parties ne se recoupent pas, je ne suis pas disposée à tirer une inférence négative.

Coexistence dans d'autres pays

[59]           La Requérante soutient également qu'une autre circonstance pertinente est que la demande d'enregistrement correspondante de la marque de commerce de la Requérante aux États-Unis a franchi avec succès les étapes du délai d'opposition dans ce pays sans être contestée par l'Opposante.

[60]           Si la Requérante a fourni des imprimés de ses demandes aux États-Unis, elle n'a pas démontré l'existence des enregistrements de l'Opposante aux États-Unis. Même si elle en avait fourni la preuve, on ne peut tirer de grandes conclusions du fait que des marques de commerce coexistent dans d'autres pays, comme des facteurs peuvent justifier l'enregistrement de marques dans un autre pays qui n'existent pas au Canada (p. ex., les différences dans les lois ou un état du registre différent). La décision du registraire doit reposer sur les normes canadiennes, compte tenu de la situation au Canada [voir Quantum Instruments, Inc c. Elinca SA (1995), 60 CPR (3d) 264 (COMC); Vivat Holdings Ltd c. Levi Strauss & Co (2005), 41 CPR (4th) 8 (CF), citant à l’appui Re Haw Par Brothers International Ltd c. le Registraire des marques de commerce (1979), 48 CPR (2d) 65 (CF 1re inst.) et Sun-Maid Growers of California c. Williams & Humbert Ltd (1981), 54 CPR (2d) 41 (CF 1re inst.)].

Conclusion

[61]           Conformément aux principes établis au paragraphe 33 de la décision Veuve Clicquot, précitée, [traduction] « le paragraphe 6(2) reconnaît que le consommateur ordinaire plutôt pressé peut être amené à tirer une conclusion erronée “que ces marchandises ou ces services sont ou non de la même catégorie générale”, mais il appartient toujours au tribunal de déterminer si, eu égard à toutes les circonstances, ces consommateurs sont susceptibles de le faire dans un cas particulier ».

[62]           Après examen de l'ensemble des circonstances de l'espèce, j'estime que la Requérante s'est acquittée du fardeau de prouver, selon la prépondérance des probabilités, que la confusion entre les marques est improbable. Cette conclusion repose principalement sur l'usage courant du dessin d'arbre en liaison avec le commerce des deux parties et sur les différences entre les marchandises et les services des deux parties et entre leurs voies de commercialisation respectives. Même si les marques comportent toutes deux un dessin d'arbre, le fait que la Requérante a acquis de la notoriété en liaison avec des sacs, conjugué au fait que les marchandises et les services de l'Opposante représentent des produits reliés à la gestion forestière et à la préservation des forêts et des services connexes, rend peu probable que le consommateur ordinaire penserait que les sacs arborant la marque TREE Dessin de la Requérante proviennent de l'Opposante. Le fait que la marque de l'Opposante peut apparaître sur des marchandises comme des étiquettes volantes recyclées attachées à des vêtements n'est pas suffisant en soi pour indiquer un lien entre les marchandises et les services de l'Opposante et les marchandises de la Requérante ou pour rendre la confusion probable.

[63]           Je souligne aussi que le fait de conclure en faveur de l'Opposante en l'espèce équivaudrait à conférer à l'Opposante le monopole des marques de commerce comportant un dessin d'arbre, qu'elle qu'en soit la forme relativement aux produits du bois, aux imprimés se rapportant à la gestion forestière et aux services connexes et aux sacs et accessoires. Le fait de conclure dans ce sens n'aurait pas été, selon la terminologie employée par la Cour fédérale, [traduction] « indiqué » [voir San Miguel Brewing International Limited c. Molson Canada 2005 [2013] CF 156, para. 40].

[64]           En conséquence, le motif d'opposition fondé sur l'article 12(1)d) est rejeté.

Absence de caractère distinctif – articles 38(2)d) et 2

[65]           L'Opposante fait aussi valoir que la Marque n'est pas distinctive et n'est pas apte à distinguer les marchandises de la Requérante des marchandises et services de l'Opposante, eu égard à sa marque de commerce et aux droits d'auteur détenus à son égard.

[66]           Comme je l'ai souligné, l'Opposante n'a pas établi une preuve prima facie de violation du droit d'auteur. En outre, l'Opposante n'a pas démontré que sa marque était devenue suffisamment connue pour faire perdre à la Marque son caractère distinctif à la date de production de la déclaration d'opposition.

[67]           Comme j'estime que l'Opposante ne s'est pas acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait à l'égard de ce motif, ce motif d'opposition est rejeté.

Décision

[68]           Compte tenu de ce qui précède, et dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition, conformément aux dispositions de l’article 38(8) de la Loi.

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Cindy R. Folz

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada


 

 

 

 


Traduction certifiée conforme
Marie-Pierre Hétu, trad.

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