Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2015 COMC 229

Date de la décision : 2015-12-23

[TRADUCTION CERTIFIÉE,
NON RÉVISÉE]

DANS L'AFFAIRE DE L'OPPOSITION

 

 

HALL-CHEM MFG. INC.

Opposante

et

 

Growmark, Inc.

Requérante

 

 

 



 

1,567,649 pour la marque de commerce DIESELEX

 

Demande

Contexte

[1]               La Requérante a produit la demande d'enregistrement no 1,567,649 pour la marque de commerce DIESELEX (la Marque) le 7 mars 2012. La demande d'enregistrement est fondée sur un emploi de la Marque au Canada depuis le 3 septembre 2010 et couvre le [Traduction] « carburant diesel ».

[2]               L'Opposante est la propriétaire des enregistrements des marques de commerce suivantes : DR. DIESEL (LMC594,007); SUPER DIESEL (LMC596,787); DOCTOR DIESEL (LMC593,750); et DR. DIESEL-X (LMC644,178), lesquelles couvrent toutes du [Traduction] « liquide de refroidissement et antigel pour radiateurs de véhicules automobiles ».

[3]               La demande relative à la Marque a été annoncée aux fins d'opposition dans le Journal des marques de commerce du 22 mai 2013 et, le 23 juillet 2013, l'Opposante s'y est opposée en vertu de l'article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi). Les motifs d'opposition sont fondés sur les articles 30i), 12(1)d), 16(1)a) et 2 (caractère distinctif) de la Loi.

[4]               La Requérante a produit une contre-déclaration le 27 septembre 2013 dans laquelle elle nie les allégations énoncées dans la déclaration d'opposition.

[5]               À titre de preuve pour étayer son opposition, l'Opposante a produit des copies de ses enregistrements.

[6]               À titre de preuve pour étayer sa demande d’enregistrement, la Requérante a produit l’affidavit de Krista Wolf, souscrit le 9 juillet 2014 (l'affidavit de Mme Wolf). Mme Wolf n'a pas été contre-interrogée.

[7]               Seule la Requérante a produit un plaidoyer écrit.

[8]               Une audience a été tenue le 8 décembre 2015 et les parties y étaient toutes deux présentes.

Fardeau de preuve

[9]               La Requérante a le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. L’Opposante a toutefois le fardeau initial de présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de chacun des motifs d’opposition soulevés [John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst), à la p 298].

Question préliminaire

[10]           À l'audience, l'Opposante a retiré le motif d’opposition énoncé au paragraphe 4(ii) de la déclaration d'opposition, étant donné qu'il est visé au motif d'opposition fondé sur l' absence de caractère distinctif qui apparaît au paragraphe 4(v) de la déclaration d'opposition, et qu'il est plus adéquatement plaidé à ce titre. Je n'aborderai donc pas dans ma décision le motif énoncé au paragraphe 4(ii) de la déclaration d'opposition.

Motifs d'opposition rejetés sommairement

Non-conformité – article 30i)

[11]           L'Opposante a allégué que la Requérante ne pouvait pas être convaincue d'avoir le droit d'employer la Marque puisqu'à la date de production de la demande, la Requérante savait ou aurait dû savoir que la Marque créait de la confusion, ou risquait de créer de la confusion, avec les marques de commerce DR. DIESEL, SUPER DIESEL, DOCTOR DIESEL et DR. DIESEL-X de l'Opposante, lesquelles ont toutes déjà été employées au Canada par l'Opposante.

[12]           L'article 30i) de la Loi exige simplement qu'un requérant se déclare convaincu dans sa demande d'avoir droit à l'enregistrement de sa marque de commerce. Lorsqu'un requérant a fourni la déclaration exigée, un motif d'opposition fondé sur l'article 30i) ne devrait être accueilli que dans des cas exceptionnels, comme lorsqu'il existe une preuve que le requérant est de mauvaise foi [Sapodilla Co Ltd c Bristol-Myers Co (1974), 15 CPR (2d) 152 (COMC), à la p 155]. La simple connaissance de l'existence de la marque de commerce d'un opposant n'étaye pas en soi une allégation portant que le requérant ne pouvait pas être convaincu de son droit à l'emploi d'une marque [Woot, Inc c WootRestaurants Inc Les Restaurants Woot Inc 2012, COMC 197 (CanLII)]. La Requérante a fourni la déclaration exigée et l'Opposante n'a pas démontré qu'il s'agissait d'un cas exceptionnel. Par conséquent, ce motif d'opposition est rejeté.

Absence de droit à l’enregistrement – article 16(1)a)

[13]           L'Opposante a allégué que la Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la Marque compte tenu de son emploi antérieur de ses marques de commerce DR. DIESEL, SUPER DIESEL, DOCTOR DIESEL et DR. DIESEL-X. L'Opposante a, relativement à ce motif d'opposition, le fardeau initial de démontrer que ses marques de commerce étaient déjà employées à la date de premier emploi alléguée de la Marque et d'établir qu'elle n'avait pas abandonné ses marques de commerce à la date de l'annonce de la demande de la Requérante [article 16(5)]. En l'espèce, l'Opposante a seulement fourni comme preuve des copies de ses enregistrements. L'Opposante n'a fourni aucune preuve d'emploi. Par conséquent, ce motif d'opposition est rejeté.

Absence de caractère distinctif – article 2

[14]           L'Opposante a allégué que la Marque ne distingue pas, ni n'est adaptée à distinguer, les produits de la Requérante de ceux de l'Opposante en liaison avec lesquels elle a enregistré et elle emploie ses marques de commerce DR. DIESEL, SUPER DIESEL, DOCTOR DIESEL et DR. DIESEL-X.

[15]           Pour s'acquitter de son fardeau de preuve initial à l'égard d'un motif d'opposition fondé sur l'absence de caractère distinctif, un opposant doit démontrer qu'au moins une de ses marques de commerce était devenue suffisamment connue au moment où la procédure d'opposition a été engagée pour faire perdre à la marque de commerce visée par la demande son caractère distinctif [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc (2004), 34 CPR (4th) 317 (CF) et Motel 6, Inc c No. 6 Motel Ltd (1981), 56 CPR (2d) 44, à la p 58 (CF 1re inst)]. L’Opposante n’a produit aucune preuve pour établir que l'une ou l'autre de ses marques était devenue connue. Elle ne s'est donc pas acquittée de son fardeau de preuve initial à l'égard de ce motif. Par conséquent, ce motif d'opposition est rejeté.

Analyse des autres motifs d’opposition

Non-enregistrabilité – article 12(1)d)

[16]           L'Opposante a allégué que la Marque n'est pas enregistrable parce qu'elle crée de la confusion avec ses marques de commerce DR. DIESEL (LMC594,007), SUPER DIESEL (LMC596,787), DOCTOR DIESEL (LMC593,750) et DR. DIESEL-X (LMC644,178).

[17]           La date pertinente pour l'examen du motif d'opposition fondé sur l'article 12(1)d) est la date de ma décision [Park Avenue Furniture Corporation c Wickes/Simmons Bedding Ltd et le Registraire des marques de commerce (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)].

[18]           L'Opposante a produit comme preuve des copies de ses enregistrements; j'ai exercé mon pouvoir discrétionnaire de consulter le registre et je confirme qu'ils sont en règle [Quaker Oats Co of Canada c Menu Foods Ltd (1986), 11 CPR (3d) 410 (COMC)]. L'Opposante s'est donc acquittée du fardeau de preuve initial qui lui incombait à l'égard de ce motif. Comme l'Opposante s'est acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait, la Requérante doit établir, selon la prépondérance des probabilités, qu'il n'y a pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et les marques de commerce de l'Opposante.

[19]           J'estime que l'enregistrement no LMC644,178 pour DR. DIESEL-X représente l'argument le plus solide de l'Opposante puisque, selon moi, elle ressemble davantage à la Marque que les autres marques de commerce de l'Opposante. Je vais donc me concentrer sur cet enregistrement dans mon analyse relative à la confusion. Si l'Opposante n'obtient pas gain de cause relativement à cet enregistrement, il n'en sera pas différent pour ses autres marques de commerce déposées.

[20]           Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. Le paragraphe 6(2) de la Loi porte que l'emploi d'une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l'emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits ou les services liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont impartis ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

[21]           Lorsqu'il applique le test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce, y compris celles expressément énoncées au paragraphe 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de produits, services ou entreprises; d) la nature du commerce; et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Le poids qu'il convient d'accorder à chacun de ces facteurs n'est pas nécessairement le même [Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc (2006), 49 CPR (4th) 321 (CSC) et Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc (2011), 92 CPR (4th) 361 (CSC)].

Article 6(5)a) – le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[22]           Les marques de commerce des deux parties sont constituées du mot DIESEL, auquel s'ajoutent des éléments supplémentaires (c.-à-d. « Dr. » et « -X dans le cas de la marque de commerce DR. DIESEL-X de l'Opposante, et simplement « EX » dans le cas de la Marque). Il est vrai que l'inclusion d'éléments supplémentaires fait en sorte que les marques de commerce des parties sont des marques forgées. Cependant, étant donné qu'elles comportent toutes deux le mot DIESEL comme élément principal, je considère que ni l'une ni l'autre des marques des parties ne possède un caractère distinctif inhérent particulièrement fort. La Marque possède peut-être un caractère distinctif inhérent légèrement plus faible, puisque le mot DIESEL est suggestif des produits de la Requérante.

[23]           Le caractère distinctif d'une marque de commerce peut être renforcé par la promotion ou l'emploi. En l'espèce, l’Opposante n’a produit aucune preuve pour établir que sa marque de commerce DR. DIESEL-X, ou n'importe quelle autre de ses marques de commerce d'ailleurs, a été employée ou est devenue connue dans une quelconque mesure au Canada. Bien que la Requérante ait produit une certaine preuve, elle n'est pas très détaillée, comme il en est question ci-dessous.

[24]           La preuve de la Requérante consiste uniquement en l'affidavit de Mme Wolf. Mme Wolf est la directrice, Stratégie de marque et Communications marketing, pour la Requérante [au para 1]. Selon Mme Wolf, la Requérante vend ses produits sur les marchés de gros et de détail. Le commerce de gros de la Requérante consiste en la vente de carburant en vrac à des coopératives membres et à des distributeurs indépendants, qui à leur tour vendent ce carburant en le distribuant à l'aide de pompes à essence [au para 2].

[25]           Mme Wolf affirme que la Requérante et ses licenciés ont largement annoncé les produits de la Requérante sous la Marque. En pièce 2, Mme Wolf joint des extraits de pages Web qui, indique-t-elle, montrent des annonces faites par la Requérante, ses licenciés et des tiers [au para 2]. En plus des annonces parues sur le Web, Mme Wolf affirme que la Requérante a aussi annoncé la Marque au Canada dans des journaux, des magazines et d'autres publications imprimées, à la radio et sur la partie latérale de camions-citernes et de pompes à essence [au para 2]. Mme Wolf souligne que la pièce 2 montre des annonces sur des camions-citernes et des annonces en ligne.

[26]           À l'audience, l'Opposante a souligné que sur un grand nombre de pages Web jointes en pièce 2, le mot « Gold » apparaît avec la Marque. L'Opposante fait valoir que la manière dont la Marque est apposée ne constitue pas un emploi de la Marque qui est conforme à celui visé par la demande. Même s'il est vrai que le mot « Gold » apparaît après la Marque dans un bon nombre de pages Web, ce n'est pas le cas pour toutes les pages Web. En outre, je souligne que dans de nombreux cas où ce mot est visible, la Marque en soi a été indiquée comme une marque de commerce à l'aide du symbole ®. Même si, techniquement, il fallait indiquer la marque à l'aide du symbole ™ plutôt que du symbole ®, elle a néanmoins été indiquée en tant que marque de commerce et se démarque ainsi, malgré le fait qu'elle est suivie du mot « Gold » dans certains cas.

[27]           À mon avis, ce qui est plus problématique pour la Requérante, c'est que Mme Wolf n'a fourni aucun chiffre de ventes ni aucune facture, et que son affidavit n'indique pas la mesure dans laquelle la Marque a véritablement été employée. Son affidavit ne contient aucune déclaration solennelle pour corroborer la date de premier emploi alléguée de la Marque dans la demande, et Mme Wolf n'a fourni aucune autre indication du moment où l'emploi de la Marque a commencé au Canada, ni de quelle manière cet emploi a commencé. En outre, aucune dépense de publicité n'a été présentée et, même si Mme Wolf indique la manière dont la Requérante a annoncé ses produits, elle n'a fourni aucun chiffre concernant la distribution et n'a pas indiqué la mesure dans laquelle les pages Web jointes en pièce 2 ont été consultées par les consommateurs canadiens.

[28]           Compte tenu de ce qui précède, je n'estime pas que ce facteur, qui concerne à la fois le caractère distinctif inhérent des marques et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues, favorise largement l'une ou l'autre des parties.

Article 6(5)b) – la période pendant laquelle chaque marque a été en usage

[29]           L'existence des enregistrements de l'Opposante me permet seulement de conclure à un emploi de minimus [Entre Computer Centers Inc c Global Upholstery Co (1991), 40 CPR (3d) 427 (COMC), à la p 430], et la Requérante n'a produit aucune preuve claire pour corroborer la date de premier emploi alléguée dans sa demande. Compte tenu de cela, j'estime également que ce facteur ne favorise de manière significative aucune des parties.

Articles 6(5)c) et d) – le genre de produits, services ou entreprises; la nature du commerce

[30]           S'agissant des facteurs énoncés aux articles 6(5)c) et d) de la Loi, l'appréciation de la probabilité de confusion en vertu de l'article 12(1)d) de la Loi repose sur la comparaison de l'état déclaratif des produits qui figure dans la demande relative à la Marque avec l'état déclaratif des produits qui figure dans l'enregistrement de l'Opposante [Henkel Kommanditgesellschaft auf Aktien c Super Dragon Import Export Inc (1986), 12 CPR (3d) 110 (CAF) et Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd (1987), 19 CPR (3d) 3 (CAF)]. Ces états déclaratifs doivent être interprétés dans l'optique de déterminer le genre probable d'entreprise ou de commerce envisagé par les parties, et non l'ensemble des commerces que le libellé est susceptible d'englober. Une preuve de la nature véritable des commerces des parties est utile à cet égard [McDonald's Corp c Coffee Hut Stores Ltd (1996), 68 CPR (3d) 168 (CAF); Procter & Gamble Inc c Hunter Packaging Ltd (1999), 2 CPR (4th) 266 (COMC); et American Optical Corp c Alcon Pharmaceuticals Ltd (2000), 5 CPR (4th) 110 (COMC)].

[31]           La demande relative à la Marque couvre le [Traduction] « carburant diesel ». En revanche, l'enregistrement de l'Opposante couvre du [Traduction] « liquide de refroidissement et antigel pour radiateurs de véhicules automobiles ». Même si l'on peut considérer les produits des parties comme étant généralement liés à l'industrie automobile, ils sont différents.

[32]           Quant aux voies de commercialisation des parties, l'Opposante n'a produit aucune preuve à cet égard. Selon l'affidavit de Mme Wolf, la Requérante vend ses produits sur les marchés de gros et de détail. Son commerce de gros consiste en la vente de carburant en vrac à des coopératives membres et à des distributeurs indépendants, qui à leur tour vendent ce carburant en le distribuant à l'aide de pompes à essence. Mme Wolf affirme que la Requérante entretient des relations contractuelles avec les coopératives membres et les distributeurs indépendants. Mme Wolf affirme que, étant donné cette relation, les coopératives membres et les distributeurs connaissent très bien la source du carburant qu'ils achètent [au para 2]. En outre, Mme Wolf affirme que la Requérante et l'Opposante vendent leurs produits au moyen de différentes voies de commercialisation [au para 2]. Je ne suis pas disposée à accorder de poids à ces deux dernières déclarations, puisqu'elles ne sont corroborées par aucune preuve.

[33]           À la lumière de la preuve dont je suis saisie, je suis en mesure de conclure que le genre des produits respectifs des parties est différent et qu'il est possible que le genre de leurs entreprises et la nature de leurs commerces le soient également.

Article 6(5)e) – le degré de ressemblance entre les marques de commerce

[34]           Dans Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc et al [précité], la Cour suprême du Canada a clairement indiqué que le facteur le plus important parmi ceux énoncés à l'article 6(5) de la Loi est souvent le degré de ressemblance entre les marques de commerce des parties [voir également Beverley Bedding & Upholstery Co c Regal Bedding & Upholstering Ltd (1980), 47 CPR (2d) 145 (CF), à la p 149, conf. par (1982), 60 CPR (2d) 70 (CAF)]. Si les marques de commerce des parties ne se ressemblent pas, il est peu probable que l'analyse amène à conclure à la probabilité de confusion même si les autres facteurs tendent fortement à indiquer le contraire.

[35]           Dans Masterpiece, la Cour suprême a fait observer que, même si le premier mot d'une marque de commerce est souvent l'élément le plus important pour établir le caractère distinctif [Conde Nast Publications Inc c Union des éditions modernes (1979), 46 CPR (2d) 183 (CF 1re inst)], il est préférable, lorsqu'il s'agit de comparer des marques entre elles, de se demander d'abord si l'un des aspects de la marque de commerce est particulièrement frappant ou unique.

[36]           L'Opposante fait valoir que la dernière partie des marques (c.-à-d. le suffixe « EX » dans la Marque et le suffixe « -X » dans la marque de commerce de l'Opposante) est plus importante ou a une incidence plus forte dans les marques, parce que c'est ce qui en fait des marques forgées. À l'audience, l'Opposante a attiré mon attention sur certaines décisions faisant jurisprudence et qui, prétend-elle, viennent appuyer son opinion [Merial LLC c Novartis Animal Health Canada, Inc, 2001 CanLII 22108 (CF); Bell Expressvu Limited c Mariner Partners Inc, 2011 COMC 243 (CanLII)].

[37]           Je souligne que dans la décision Merial, la Cour a conclu que le suffixe « -EX », lorsqu'il est employé en combinaison avec le préfixe « ELIMIN- » revêtait une certaine importance, parce qu'il créait un mot inventé dans la marque du requérant, ELIMINEX, alors que le suffixe « -ATOR » dans la marque de commerce de l'opposant donnait le mot ordinaire du dictionnaire « ELIMINATOR ». Dans Bell Expressvu, la Commission a conclu que la lettre « X » au début des marques « xVu » et « xVue TV Care » du requérant et les lettres « EX » qui forment la première portion du mot EXPRESS dans la marque de l'opposant ont la même sonorité. Dans ce cas, la Commission a également conclu que l'idée suggérée par les marques du requérant était semblable à celle suggérée par la marque de commerce EXPRESSVU de l'opposant, et que « VU » représentait la partie dominante de toutes les marques de commerce des parties.

[38]           Je ne conteste pas le fait que les suffixes « EX » et « X » sont importants en l'espèce, dans la mesure où ils font en sorte que les marques de commerce des parties sont des mots inventés, et dans la mesure où ils ont la même sonorité. Cependant, bien que ces suffixes puissent donner lieu à des marques forgées et que l'on puisse dire que ces marques sont plus distinctives que le mot DIESEL employé seul, je ne considère pas que ces suffixes représentent des aspects particulièrement frappants ou uniques, ni qu'ils sont un élément dominant des marques. Comme il a été mentionné dans Merial et dans Masterpiece, les marques des parties doivent être prises dans leur totalité au moment d'apprécier le degré de ressemblance entre elles. En l'espèce, la construction des marques des parties est différente et les suffixes eux-mêmes sont différents, sans compter que la marque de commerce de l'Opposante comprend également le mot « DR. » dans la première partie dominante de la marque ce qui, à mon avis, crée une connotation très différente ainsi qu'une impression visuelle et phonétique globale distincte entre les marques de commerce des parties. Par conséquent, même si les marques de commerce des parties se ressemblent dans une certaine mesure, je ne considère pas qu'il existe un degré de ressemblance particulièrement élevé entre elles.

Circonstances de l'espèce

État du registre

[39]           Comme autre circonstance de l'espèce, la Requérante s'appuie sur les résultats d'un rapport de recherche de marques de commerce effectuée avec le logiciel NUANS, joint en pièce 1 de l'affidavit de Mme Wolf [au para 1]. Selon Mme Wolf, la recherche de marques de commerce effectuée avec le logiciel NUANS a été menée au moment où la Requérante a produit sa demande d'enregistrement relative à la Marque. Mme Wolf souligne qu'une liste des marques de commerce de l'Opposante figure à la page 22 du rapport de 27 pages, indiquant que le logiciel NUANS a repéré plusieurs autres marques qui ressemblent davantage à la Marque que les marques de l'Opposante.

[40]           La Requérante souligne que lorsque de nombreux commerçants emploient des marques de commerce semblables, de petites différences entre ces marques suffisent généralement pour qu'on puisse les distinguer [Hermes SA c Fletcher Golf Enterprises Ltd (1984), 78 CPR (2d) 134 (CF 1re inst)]. Cependant, je souligne que la Requérante n'a produit aucune preuve d'emploi réel des marques repérées dans la recherche effectuée avec le logiciel NUANS.

[41]           La preuve de l'état du registre peut être utile pour apprécier le caractère commun ou le caractère distinctif d'une marque de commerce ou d'une partie d'une marque de commerce par rapport à l'ensemble des marques qui figurent au registre. Cependant, elle n'est pertinente que dans la mesure où elle permet de tirer des conclusions quant à l'état du marché, et de telles conclusions ne peuvent être tirées que si un nombre important d'enregistrements pertinents est repéré [voir Ports International Ltd c Dunlop Ltd (1992), 41 CPR (3d) 432 (COMC); Welch Foods Inc c Del Monte Corp (1992), 44 CPR (3d) 205 (CF 1re inst); et Maximum Nutrition Ltd c Kellogg Salada Canada Inc (1992), 43 CPR (3d) 349 (CAF)].

[42]           En l'espèce, de nombreuses marques de commerce repérées dans la recherche effectuée avec le logiciel NUANS ressemblent très peu aux marques en question, certaines ont été abandonnées ou radiées, d'autres ne sont pas encore à l'étape de l'approbation, de l'admission ou de l'enregistrement, alors que d'autres visent des produits ou des services entièrement différents. Ni l'une ni l'autre des parties n'a abordé la preuve de l’état du registre en détail dans son plaidoyer écrit ou à l'audience, et la Requérante n'a souligné qu'un petit nombre d'exemples de marques qu'elle considérait comme pertinentes.

[43]           Compte tenu de ce qui précède, je considère que cette preuve n'est pas très utile à la Requérante et je ne suis pas disposée à en tirer des conclusions, au vu de l'état du marché.

La famille de marques de commerce DIESEL de l'Opposante

[44]           À l'audience, l'Opposante a indiqué que l'existence de sa famille de marques de commerce DIESEL rendrait la confusion plus probable. Il est vrai qu'en présence d'une famille de marques, il existe parfois une plus grande probabilité que le public confonde avec une autre marque de commerce de la famille une marque de commerce de nature ou de forme semblable et, par conséquent, suppose que le produit ou le service associé à cette marque de commerce est fabriqué ou exécuté par la même personne. Cependant, il a été établi que, dans une procédure d'opposition, on ne peut pas simplement présumer de l'existence d'une famille de marques de commerce. Une partie qui cherche à établir l'existence d'une famille de marques doit démontrer qu'elle emploie plus d'une ou deux marques de commerce appartenant à la famille alléguée (un enregistrement ou une demande ne suffit pas pour établir l'emploi) [voir Techniquip Ltd c Canadian Olympic Assn (1998), 1998 CanLII 7573 (CF), 145 FTR 59 (CF 1re inst), conf. par 250 NR 302 (CAF); et Now Communications Inc c CHUM Ltd (2003), 32 CPR (4th) 168 (COMC)]. En l'espèce, l'Opposante n'a produit aucune preuve d'emploi de l'une ou l'autre de ces marques de commerce. Compte tenu de cela, je n'estime pas que les arguments qu'elle a exprimés à l'audience sont convaincants.

Conclusion quant à la probabilité de confusion

[45]           Ni l'une ni l'autre des marques de commerce des parties ne possède un caractère distinctif inhérent particulièrement très élevé, et il n'y a aucune preuve établissant que l'une ou l'autre de ces marques ont été employées ou sont devenues connues dans une large mesure. Le genre des produits des parties est différent et il n'y a pas suffisamment de preuves pour me permettre de conclure qu'il y aurait recoupement des voies de commercialisation des parties. Dans l'ensemble, j'estime que les différences entre les marques de commerce dans la présentation, le son et les idées qu'elles suggèrent suffisent pour éviter toute probabilité raisonnable de confusion. Après examen de l'ensemble des circonstances de l'espèce, je conclus par conséquent que, selon la prépondérance des probabilités, il n'existe pas de probabilité de confusion entre les marques de commerce en cause.

[46]           En conséquence, le motif d'opposition fondé sur l'article 12(1)d) est rejeté.

Décision

[47]           Compte tenu de ce qui précède, dans l'exercice des pouvoirs qui m'ont été délégués en vertu des dispositions de l'article 63(3) de la Loi, je rejette l'opposition conformément aux dispositions de l'article 38(8) de la Loi.

______________________________

Lisa Reynolds

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

Sophie Ouellet, trad.a.

COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS AU DOSSIER

____________________________________________________

 

 

DATE DE L'AUDIENCE : 2015-12-08

 

COMPARUTIONS

 

Angeliki Papadimitropoulos                                                                POUR L'OPPOSANTE

 

Danielle Iampietro                                                                               POUR LA REQUÉRANTE

 

AGENT(S) AU DOSSIER

 

Phillips Friedman Kotler                                                                      POUR L'OPPOSANTE

 

Scarfone Hawkins LLP                                                                       POUR LA REQUÉRANTE

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