Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

    Référence: 2015 COMC  63    

Date de la décision: 2015-03-30

DANS L’AFFAIRE DES OPPOSITIONS produites par Dollarama L.P. à l’encontre des demandes d’enregistrement nos 1,550,102 et 1,567,494 pour la marque de commerce PETSTORY au nom de J.E. Mondou Ltée

Introduction

[1]               Dollarama L.P. (l’Opposante) s’oppose à l’enregistrement de la marque de commerce PETSTORY (la Marque) faisant l’objet de chacune des demandes nos 1,550,102 et 1,567,494 au nom de J.E. Mondou Ltée (la Requérante).

[2]               La demande no 1,550,102 produite le 25 octobre 2011 est basée sur l’emploi projeté de la Marque au Canada en liaison avec les services suivants :

Services de vente au détail de nourriture pour animaux et d’accessoires pour animaux. (les Services)

[3]               La demande no 1,567,494 produite le 1er mars 2012 est basée sur l’emploi projeté de la Marque au Canada en liaison avec les produits suivants, tels que révisés :

Nourriture pour animaux; accessoires pour animaux, nommément bols, brosses, peignes, câbles d'attache, cages, colliers, vêtements pour animaux, coussins, foulards, jouets, laisses, litières, manteaux, médailles, os, pelles à litière, poteaux à gratter, rasoirs, sacs à litière, bacs à litière, shampoings, revitalisants, eau de cologne, parfums, onguents, gouttes pour les yeux, gouttes pour les oreilles, répulsifs, tapis à litière, tentes, hamacs, transporteurs à animaux, coupe-griffes, tapis d'entraînement; vitamines pour les animaux; traitements contre les puces et contre les tiques sous la forme de colliers, gouttes, shampoings, vaporisateurs et pulvérisateurs. (les Produits)

[4]               L’Opposante fonde chacune de ses oppositions sur divers motifs de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi), tournant tous autour de la question de la probabilité de confusion entre la Marque et la marque de commerce PETSTORE & Footprint Dessin, reproduite ci-après, enregistrée sous le no 778,967 en liaison avec divers produits et accessoires pour animaux tel que détaillés en annexe, appartenant à l’Opposante et ayant été antérieurement employée au Canada par celle-ci :

PetStore & footprint DESIGN

[5]               Tel qu’il ressortira de mon analyse, j’estime qu’il y a lieu de rejeter chacune des oppositions.

Les dossiers

[6]               Chacune des déclarations d’opposition fut produite le 19 novembre 2012. Les motifs d’opposition plaidés sont essentiellement les mêmes dans les deux dossiers. La Requérante a produit une contre-déclaration dans chaque dossier déniant les motifs d’opposition plaidés.

[7]               Au soutien de chacune de ses oppositions, l’Opposante a produit un affidavit de Geoffrey Robillard, vice-président senior, Division des importations de l’Opposante, souscrit le 13 mai 2013. J’emploierai le singulier pour référer à ces deux affidavits puisque ceux-ci sont identiques à la différence près que dans le dossier no 1,550,102, les pièces produites au soutien de l’affidavit consistent en des originaux alors que dans le dossier no 1,567,494, ces pièces consistent en des photographies couleur des pièces originales.

[8]               Au soutien de chacune de ses demandes, la Requérante a produit les affidavits de François-Alexandre Gagné, stagiaire en droit au sein du cabinet représentant la Requérante, souscrit le 12 septembre 2013; Anick Desautels, analyste en marques de commerce au sein de la firme Thomson CompuMark, souscrit le 6 septembre 2013; et Sandro Roméo, analyste en marques de commerce au sein de la même firme et également souscrit le 6 septembre 2013. J’emploierai le singulier pour référer aux deux affidavits de chacun de ces témoins puisque ces affidavits sont essentiellement identiques.

[9]               Aucun des témoins n’a été contre-interrogé.

[10]           Chacune des parties a produit un plaidoyer écrit pour chaque dossier et était représentée à l’audience tenue pour ces deux dossiers. Il convient de noter à ce stade-ci de ma décision que l’Opposante a retiré par le biais de ses plaidoyers écrits, chacun des motifs d’opposition basés sur l’article 30(i) de la Loi.

Le fardeau qui repose sur les parties

[11]           C’est à l’Opposante qu’il appartient au départ d’établir le bien-fondé de chacune de ses oppositions. Le fardeau ultime de démontrer que la Marque est enregistrable repose toutefois sur la Requérante, selon la prépondérance de preuve [voir John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst); et Dion Neckwear Ltd c Christian Dior, SA et al (2002), 20 CPR (4th) 155 (CAF)].

Analyse

[12]           Les motifs d’opposition plaidés dans chaque dossier peuvent être résumés comme suit :

         la Marque n’est pas enregistrable au sens de l’article 12(1)(d) de la Loi parce qu’elle porte à confusion avec la marque enregistrée PETSTORE & Footprint Dessin de l’Opposante;

         la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque au sens de l’article 16(3)(a) de la Loi car à la date de production de chacune des demandes de la Requérante, la Marque portait à confusion avec la marque de commerce PETSTORE & Footprint Dessin de l’Opposante, précédemment employée par celle-ci au Canada; et

         la Marque n’est pas distinctive au sens de l’article 2 de la Loi en ce qu’elle n’est pas adaptée à distinguer les Produits et Services de la Requérante des produits de l’Opposante offerts en liaison avec la marque PETSTORE & Footprint Dessin.

[13]           Tel qu’il ressortira de mon analyse, bien que le test en matière de confusion demeure le même, le fardeau de preuve initial imposé à l’Opposante de même que les dates pertinentes applicables varient en fonction de chacun de ces motifs. Je débuterai mon analyse au regard du motif fondé sur la non-enregistrabilité de la Marque.

Motif fondé sur la non-enregistrabilité de la Marque au sens de l’article 12(1)(d) de la Loi.

[14]           La date pertinente pour décider d’un motif d’opposition fondé sur la non-enregistrabilité d’une marque de commerce au regard de la confusion créée avec une marque de commerce enregistrée est la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corporation c Wickes/Simmons Bedding Ltd (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)]. J’ai exercé ma discrétion et vérifié que l’enregistrement allégué par l’Opposante est toujours en vigueur sur le registre des marques de commerce. Puisque cela est le cas, l’Opposante a satisfait le fardeau de preuve initial lui incombant. La Requérante doit dès lors démontrer dans chaque dossier, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a pas de risque de confusion entre la Marque et cette marque enregistrée de l’Opposante.

Le test en matière de confusion

[15]           Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. Selon l’article 6(2) de la Loi, l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués ou que les services liés à ces marques de commerce sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

[16]           En décidant si des marques de commerce créent de la confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, notamment de celles énumérées à l’article 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de produits, services ou entreprises; d) la nature du commerce; et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Cette liste n’est pas exhaustive et un poids différent pourra être accordé à chacun de ces facteurs selon le contexte [voir Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc (2006), 49 CPR (4th) 321 (CSC); Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée et al (2006), 49 CPR (4th) 401 (CSC); et Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc (2011), 92 CPR (4th) 361 (CSC)].

a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[17]           Je conviens avec la Requérante que la Marque possède en soi un caractère distinctif inhérent plus grand que la marque PETSTORE & Footprint Dessin de l’Opposante.

[18]           La Marque se traduit littéralement par « histoire d’animaux de compagnie ». Bien que la Marque suggère, dans le contexte des Produits et Services lui étant associés, un lien avec les animaux, elle ne saurait être qualifiée de descriptive de la nature ou de la qualité de ceux-ci. Il s’agit plutôt d’une marque fantaisiste.

[19]           Par comparaison, la marque de l’Opposante se traduit littéralement par « magasin d’animaux de compagnie ». Tel que mis en preuve par la Requérante par le biais de l’affidavit de M. Gagné, et non contesté en tant que tel par l’Opposante lors de l’audience, un « pet store » est défini comme suit :

A pet store or pet shop is a retail business which sells different kinds of animals, pet food, animal supplies, and pet accessories. [extrait du site Wikipedia mis en preuve sous la pièce « C »]

[20]           À cet égard, je note que l’Opposante elle-même emploie l’expression « pet store » dans son sens courant tout au long de son plaidoyer écrit comme lorsque commentant la pièce D de l’affidavit de M. Gagné : « An analysis of Exhibit D reveals that the results essentially provide details about different pet stores across Canada. ». Au surplus, l’Opposante elle-même a reconnu dans son plaidoyer écrit que sa marque « is not inherently distinctive » dans le contexte des produits lui étant associés et a réitéré cette position lors de l’audience, allant même jusqu’à concéder que la marque PETSTORE & Footprint Dessin serait clairement descriptive si elle était employée en liaison avec des services de vente au détail de nourriture et d’accessoires pour animaux plutôt qu’avec ces produits en tant que tels. Le fait que le mot « PetStore » apparaisse dans un rectangle contrasté n’augmente pas de manière significative le caractère distinctif inhérent de la marque. Il en est de même du dessin d’empreinte de patte d’animal hautement suggestif dans le contexte des produits de l’Opposante. Celle-ci fait cependant valoir que sa marque de commerce jouit néanmoins d’un caractère distinctif significatif en raison de l’emploi qui en a été fait au Canada et de la mesure dans laquelle sa marque de commerce est devenue connue au Canada.

[21]           Ceci m’amène à revoir la preuve de l’Opposante, introduite par le biais de l’affidavit de M. Robillard. Cet affidavit établit essentiellement ce qui suit :

         l’Opposante exploite des magasins de commerce de détail à rabais de produits variés sous la bannière Dollarama à travers le Canada [paragr. 3 de l’affidavit];

         l’Opposante est le plus grand détaillant canadien d’articles à deux dollars et moins [paragr. 4 de l’affidavit, pièce « 1 » - liste des 702 magasins opérés sous la bannière Dollarama, incluant la date d’ouverture par magasin];

         l’Opposante a « adopté » la marque PETSTORE & Footprint Dessin au début de l’année 2005 afin d’identifier une ligne de produits pour animaux domestiques à être vendus dans ses magasins Dollarama à travers le Canada [paragr. 5 de l’affidavit];

         la marque PETSTORE & Footprint Dessin a depuis été enregistrée au Canada [paragr. 6 à 8 incl.; pièce « 2 » - copie certifiée de l’enregistrement no 778,967];

         depuis août 2005, et continuellement depuis, l’Opposante a offert en vente et vendu à travers ses magasins Dollarama, divers produits sous la marque PETSTORE & Footprint Dessin comprenant de la nourriture, des vêtements, des jouets, et des accessoires pour les animaux de compagnie [paragr. 9 et 10; pièces « 3 » à « 75 »]. Tel que relevé par la Requérante, cette affirmation de M. Robillard contredit quelque peu les diverses dates de premier emploi par catégorie de produits alléguées dans l’enregistrement de l’Opposante;

         l’Opposante a livré à ses magasins Dollarama des millions de ces articles depuis 2006, soit :

-          3,148,268 articles en 2006

-          2,722,488 articles en 2007

-          3,452,444 articles en 2008

-          4,407,754 articles en 2009

-          5,864,438 articles en 2010

-          7,797,066 articles en 2011

-          10,585,628 articles en 2012

-          4,096,254 articles de janvier 2013 à la date de signature de l’affidavit le 13 mai 2013 [paragr. 11].

 

Tel que relevé par la Requérante, ces chiffres ne sont pas ventilés par catégorie de produits;

         les divers produits vendus sous la marque PETSTORE & Footprint Dessin l’ont été soit durant l’année de leur livraison, soit durant l’année suivante [paragr. 12].

[22]           Bien que les observations de la Requérante décrites plus haut soient exactes et que la preuve de l’Opposante ne soit pas des plus précises, j’estime raisonnable de conclure, considérant les quelque 70 spécimens d’articles produits sous les pièces « 3 » à « 75 » et le nombre total d’articles vendus depuis 2006, que la marque PETSTORE & Footprint Dessin de l’Opposante est devenue connue à tout le moins dans une certaine mesure au Canada. Partant, je conviens avec l’Opposante que cette reconnaissance renforce le caractère distinctif de la marque PETSTORE & Footprint Dessin. Ceci étant dit, j’estime que la marque PETSTORE & Footprint Dessin demeure néanmoins une marque relativement faible compte tenu du fait que la preuve au dossier ne me permet pas de conclure qu’elle est devenue connue au Canada de façon telle à contrebalancer significativement le fait qu’elle est essentiellement dénuée de caractère distinctif intrinsèque.

b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

[23]           Compte tenu du fait que la marque PETSTORE & Footprint Dessin a été employée au Canada depuis 2006, alors que les présentes demandes sont basées sur l’emploi projeté de la Marque et que nous ne disposons d’aucune preuve à l’effet que l’emploi de celle-ci a débuté, ce facteur favorise l’Opposante.

c) le genre de produits, services ou entreprises et d) la nature du commerce

[24]           En considérant le genre de produits et services, et la nature du commerce, je dois comparer l’état déclaratif des produits et services couverts par les demandes sous opposition avec l’état déclaratif des produits couverts par l’ enregistrement allégué dans chacune des déclarations d’opposition [voir Henkel Kommanditgesellschaft auf Aktien c Super Dragon Import Export Inc (1986), 12 CPR (3d) 110 (CAF); et Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd (1987), 19 CPR (3d) 3 (CAF)].

[25]           Les produits et/ou services des parties se recoupent en ce qu’ils sont associés au domaine de la nourriture et des accessoires pour animaux.

[26]           La Requérante fait cependant valoir que le risque de chevauchement des canaux de distribution des parties est essentiellement nul compte tenu de fait que tel qu’indiqué plus haut, la marque de l’Opposante est employée à titre de marque privée. La Requérante cite à l’appui de sa position les affaires Clorox Co c Sears Canada (1992), 41 CPR (3d) 483 (CF 1re inst), conf. par 49 CPR (3d) 217; Canada Wire & Cable Ltd c Heatex Howden Inc (1986), 13 CPR (3d) 183 (CF 1re inst) 186; et London Drugs Limited c Coty Deutschland GmbH, 2012 TMOB 193. Plus particulièrement, la Requérante me réfère au passage suivant de ma collègue Andrea Flewelling tiré de l’affaire London Drugs :

[42] [TRADUCTION] Comme je l’ai mentionné précédemment, ma décision quant à ce facteur est dictée par la comparaison de l’état déclaratif des marchandises figurant dans la demande de la Requérante avec l’état déclaratif des marchandises et services figurant dans l’enregistrement de la marque de commerce LONDON DRUGS de l’Opposante. En l’espèce, ni la marque de commerce visée par la demande de la Requérante ni la marque de commerce enregistrée au nom de l’Opposante ne sont restreintes aux voies de commercialisation actuellement utilisées par les parties. Il appert de la preuve que la Requérante a vendu ses marchandises dans les magasins de l’Opposante, et que son réseau de distribution comprend les grands magasins, les pharmacies et les détaillants de produits de grande consommation. Il existe donc une possibilité que les voies de commercialisation des parties se recoupent. Toutefois, au vu de la preuve relative à la nature des activités commerciales réellement exercées par les parties depuis 1950 et 2009 respectivement, j’estime, comme le soutient la Requérante, qu’il est peu probable que les voies de commercialisation des parties se recoupent autrement qu’en ce qui a trait à la vente des produits de la Requérante par l’Opposante. À cet égard, il ressort clairement de la preuve que l’Opposante vend ses marchandises de marque LONDON DRUG uniquement dans ses propres points de vente au détail LONDON DRUGS, et il n’y aucune raison de croire que l’Opposante puisse éventuellement dévier de cette stratégie de commercialisation. Il est, par conséquent, peu probable qu’en dehors des magasins LONDON DRUG de l’Opposante, les marchandises des parties empruntent les mêmes voies de commercialisation.  

[27]           Tel que souligné par l’Opposante, les faits de l’affaire London Drugs peuvent être distingués de ceux des présents dossiers en ce que nous ne disposons d’aucun élément de preuve concernant les voies de commercialisation des Produits et Services de la Requérante. Ceci étant dit, il n’en demeure pas moins qu’un parallèle peut être fait entre cette affaire et les présents dossiers en ce qu’il ressort clairement de la preuve que l’Opposante vend ses produits PETSTORE & Footprint Dessin uniquement dans ses propres magasins Dollarama et qu’il n’y a aucune raison de croire que celle-ci puisse éventuellement dévier de cette stratégie de commercialisation. Par conséquent, en dehors de l’éventualité que la Requérante vende ses Produits par le biais des magasins Dollarama de l’Opposante, il est peu probable que les produits des parties empruntent les mêmes voies de commercialisation.

e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent

[28]           Tel que rappelé par la Cour suprême dans l’affaire Masterpiece, précitée, au paragraphe 49, le facteur susceptible d’avoir le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion, et celui qui est décisif dans la plupart des cas, est le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'elles suggèrent.

[29]           Par ailleurs, tel que mentionné plus avant, il est bien établi en jurisprudence que la probabilité de confusion est une question de première impression et de souvenir imparfait. À cet égard, « [m]ême s'il faut examiner la marque comme un tout (et non la disséquer pour en faire un examen détaillé), il est tout de même possible d'en faire ressortir des caractéristiques particulières susceptibles de jouer un rôle déterminant dans la perception du public » [voir Pink Panther Beauty Corp c United Artists Corp (1998), 80 CPR (3d) 247 (CAF), au paragraphe 34].

[30]           Aussi, s’il est vrai que dans certains cas le premier mot sera l’élément le plus important pour établir le caractère distinctif d’une marque de commerce, la Cour suprême précise au paragraphe 64 de l’affaire Masterpiece qu’il est préférable de se demander d’abord si l’un des aspects de celle-ci est particulièrement frappant ou unique.

[31]           Appliquant ces principes aux présents dossiers, je conviens avec la Requérante qu’il existe des différences significatives entre les marques des parties et qu’il est facile de les distinguer.

[32]           Tel que noté plus avant, la Marque consiste en l’expression fantaisiste PETSTORY, signifiant « histoire d’animaux de compagnie » alors que la marque de l’Opposante consiste en une marque mixte constituée de l’expression descriptive « pet store » signifiant « magasin d’animaux » combinée à un dessin d’empreinte de patte d’animal.

[33]           L’Opposante fait valoir que les marques en cause diffèrent d’une seule lettre, soit par leurs dernières lettres : « Y » dans le cas de la Marque et « E » dans le cas de la marque de l’Opposante. Bien qu’il soit exact que les portions nominales des marques en cause diffèrent de par leurs dernières lettres respectives, j’estime que l’approche retenue par l’Opposante revient à disséquer les marques en cause plutôt qu’à les considérer dans leur ensemble, sur la base de la première impression. Chacune des expressions « PETSTORY » et « PETSTORE » a une signification ou évoque une idée qui lui est propre. Le fait que celles-ci soient constituées de lettres pratiquement identiques n’est pas déterminant en soi. Qu’il suffise pour s’en convaincre de penser aux homonymes « CHAUD » et « CHAUX », « MÈRE » et « MER », « COUP » et « COÛT » possédant des significations distinctes. De même, le fait que les marques incluent toutes deux l’élément « PET » dans le contexte de produits et/ou services reliés à des animaux de compagnie ou « pets » est banal en soi.

[34]           Il importe également de rappeler que la marque enregistrée de l’Opposante consiste non pas en la marque nominale « PETSTORE » mais bien en la marque mixte constituée de pareille expression combinée à un dessin d’empreinte d’animal. Ceci m’amène à considérer, à titre de circonstance additionnelle, l’argument de la Requérante à l’effet que l’Opposante ne peut monopoliser l’expression « pet store », et encore moins des marques qui ne sont pas identiques, compte tenu du fait que cette expression est clairement descriptive et employée par d’autres.

Circonstances additionnelles

État du marché

[35]           La Requérante fait valoir qu’une preuve dite de l’état du marché a été produite concernant l’emploi de l’expression « pet store ». Cette preuve est essentiellement constituée des affidavits de Mme Desautels et de M. Gagné.

L’affidavit de Mme Desautels

[36]           L’affidavit de Mme Desautels vise à introduire en preuve sous la pièce AD-1, le résultat d’une recherche de dilution canadienne effectuée le 24 juillet 2013 pour le terme « PETSTORE » en liaison avec les produits et services suivants : « vente au détail de nourriture pour animaux et d’accessoires pour les animaux; nourriture pour animaux; accessoires pour animaux; vêtements pour animaux. »

[37]           Les sources consultées par Mme Desautels incluent des sources de droit commun ainsi que des registres officiels, incluant la base de données NUANS d’Industrie Canada.

[38]           La Requérante fait valoir qu’on compte :

- 28 occurrences d’entreprises canadiennes dont le nom comporte les termes « petstore » ou « pet store » provenant du répertoire DUNS;

- 17 occurences d’entreprises canadiennes dont le nom comporte les termes « petstore » ou « pet store » provenant du répertoire Infogroup;

- 23 occurrences d’entreprises canadiennes dont le nom comporte les termes « petstore » ou « pet store » provenant du répertoire des Pages Jaunes;

- 2 occurrences d’entreprises du Québec dont le nom comporte les termes « petstore » ou « pet store » provenant du registre des entreprises du Québec; et

- 34 occurrences d’entreprises canadiennes actives dont le nom comporte les termes « petstore » ou « pet store » provenant de la base de données NUANS.

[39]           La Requérante soumet que bien que plusieurs de ces entreprises se recoupent d’un registre à l’autre, il n’en demeure pas moins que le nombre d’entreprises repérées est important.

L’affidavit de M. Gagné

[40]           L’affidavit de M. Gagné vise notamment à introduire en preuve sous les pièces A, B, D et E, le résultat d’une recherche effectuée le 10 septembre 2013 dans le moteur de recherche Google en utilisant comme mots-clés « pet store » et « definition ». Sont également inclus sous la pièce C, la définition de l’expression « pet store » tirée de Wikipedia à laquelle j’ai fait précédemment référence, et sous la pièce F, les résultats d’une recherche en date du 10 septembre 2013 au registre des entreprises du Québec en utilisant comme mot-clé « pet store ». L’affidavit de M. Gagné décrit également en détail le résultat de diverses vérifications effectuées par téléphone par celui-ci auprès de quelques-unes des entreprises révélées dans le cadre de ses recherches de même que dans un rapport de recherche effectuée dans la base de données NUANS daté du 24 juin 2013 lui ayant été remis par le procureur en charge de la poursuite des présentes demandes d’enregistrement.

[41]           La Requérante fait valoir que les recherches de M. Gagné effectuées sur Google démontrent qu’il existe au moins 21 pages de résultats faisant état d’entreprises canadiennes utilisant l’expression « pet store » dans le nom de leur entreprise ou encore pour décrire la nature de leurs activités. La Requérante fait valoir qu’il ressort des vérifications téléphoniques effectuées par M. Gagné, sur un nombre limité de ces entreprises sélectionnées au hasard qu’il a pu confirmer que 14 entreprises canadiennes employant (ou ayant employé) l’expression « pet store » dans leur nom étaient en exploitation en liaison avec la vente de nourriture et d’accessoires pour animaux, et également d’animaux.

[42]           L’Opposante soumet pour sa part que M. Gagné, en tant que stagiaire à l’emploi du cabinet représentant la Requérante, ne peut être qualifié de témoin objectif et indépendant. Partant, elle soumet que peu de poids doit être attribué à l’affidavit de M. Gagné, et particulièrement en ce qui concerne les résultats de ses vérifications téléphoniques, lesquelles sont inacceptables en preuve puisque constituant du ouï-dire.

[43]           J’estime qu’il n’est pas nécessaire d’examiner plus en détail l’affidavit de M. Gagné afin de déterminer dans quelle mesure certaines portions de celui-ci doivent ou non être écartées de la preuve. Je me contenterai de noter que les définitions de l’expression « pet store » jointes à l’affidavit de M. Gagné n’ont pas été contestées comme telles par l’Opposante et tombent sous le sens. Tel que souligné plus haut, l’Opposante elle-même emploie l’expression « pet store » dans son sens courant tout au long de son plaidoyer écrit.

[44]           Aussi, dans les circonstances, j’estime qu’il n’est pas nécessaire de me pencher plus avant sur les entreprises référencées dans les affidavits de Mme Desautels et M. Gagné aux fins d’accepter que l’expression « pet store » est communément employée dans son sens courant ou descriptif au Canada pour désigner un commerce de vente au détail d’animaux ou de nourriture pour animaux et d’accessoires pour animaux.

Conclusion – probabilité de confusion

[45]           Tel qu’indiqué dans l’affaire Dion Neckwear précitée à la page 163, il n’est pas nécessaire que le registraire soit convaincu hors de tout doute qu’il n’y a aucun risque de confusion. En effet, « [TRADUCTION] [s]i la norme de preuve 'hors de tout doute' devait s’appliquer, les requérants seraient, dans la plupart des cas, confrontés à un fardeau insurmontable parce qu'en matière de risque de confusion, la certitude est une denrée rare. » [Voir également John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd, précitée].

[46]           Compte tenu de mon analyse plus haut, je suis d’avis que la Requérante a établi, selon la prépondérance des probabilités, qu’un consommateur ayant un souvenir imparfait de la marque PETSTORE & Footprint Dessin de l’Opposante ne serait pas susceptible de conclure que les Produits et Services de la Requérante proviennent de la même source ou sont autrement reliés ou associés aux produits de l’Opposante.

[47]           J’estime en effet que les différences existant entre les marques des parties sont déterminantes en soi et plus que suffisantes pour faire contrepoids aux facteurs favorisant l’Opposante dans les présents dossiers.

[48]           Conséquemment, je rejette le motif d’opposition fondé sur la non-enregistrabilité de la Marque dans chaque dossier.

Motif fondé sur l’absence de droit à l’enregistrement au sens de l’article 16(3)(a) de la Loi.

[49]                Pour s’acquitter de son fardeau de preuve initial en ce qui a trait à l’article 16(3)(a) de la Loi, l’Opposante doit démontrer que sa marque de commerce PETSTORE & Footprint Dessin, avait été employée au Canada antérieurement à la date de production de chacune des demandes d’enregistrement de la Requérante et n’avait pas été abandonnée à la date de l’annonce de celles-ci dans le Journal des marques de commerce, en l’occurrence les 20 juin et 3 octobre 2012 respectivement [article 16(5) de la Loi]. Ce fardeau de preuve initial a été satisfait.

[50]                La Requérante doit dès lors démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y avait pas de risque de confusion entre la Marque et la marque PETSTORE & Footprint Dessin de l’Opposante à la date de production de chacune de ses demandes.

[51]           La différence entre les dates pertinentes n’a pas vraiment d’incidence sur mon analyse précédente au regard du motif d’opposition sous l’article 12(1)(d) de la Loi. Bien que les dates pertinentes puissent affecter dans une certaine mesure la preuve de l’état du marché, j’ai déterminé que je n’avais pas besoin de me pencher sur pareille preuve pour conclure en faveur de la Requérante.

[52]           Conséquemment, je rejette le motif d’opposition fondé sur l’absence de droit à l’enregistrement dans chaque dossier.

Motif fondé sur l’absence de caractère distinctif de la Marque

[53]           Pour s’acquitter de son fardeau de preuve initial en ce qui a trait à l’absence de caractère distinctif, l’Opposante doit démontrer que sa marque de commerce PETSTORE & Footprint Dessin était devenue suffisamment connue au Canada à la date de ses déclarations d’opposition, soit le 19 novembre 2012, de manière à nier le caractère distinctif de la Marque [voir Motel 6, Inc c No 6 Motel Ltd (1981), 56 CPR (2d) 44 (CF 1re inst); et Bojangles’ International, LLC and Bojangles Restaurants, Inc c Bojangles Café Ltd (2006), 48 CPR (4th) 427 (CF 1re inst)].

[54]           Ce fardeau a été rencontré par l’Opposante.

[55]           Puisque l’Opposante a satisfait le fardeau de preuve initial lui incombant, la Requérante doit dès lors démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’à la date de production des déclarations d’opposition, il n’y avait pas de risque de confusion entre la Marque et la marque PETSTORE & Footprint Dessin de l’Opposante.

[56]           Tout comme dans le cas du motif d’opposition fondé sur l’absence de droit à l’enregistrement, la différence entre les dates pertinentes n’a pas vraiment d’incidence sur mon analyse précédente sous l’article 12(1)(d) de la Loi.

[57]           Partant, je suis d’avis que la Requérante s’est déchargée de son fardeau ultime d’établir que la Marque était distinctive de ses Produits et Services à la date des déclarations d’opposition en ce qu’elle ne portait pas à confusion, selon la prépondérance des probabilités, avec la marque PETSTORE & Footprint Dessin de l’Opposante.

[58]           Conséquemment, je rejette le motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif dans chaque dossier.

Décision

[59]           En vertu des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu de l’article 63(3) de la Loi, je rejette chacune des oppositions en application de l’article 38(8) de la Loi.

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Annie Robitaille

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 


Annexe

 

Produits couverts par l’enregistrement no 778,967

(1) Pet mats and pet poop scoops.
(2) Pet towels.
(3) Pet blankets and dog chews.
(4) Pet collars, leashes and leads.
(5) Pet dishes.
(6) Pet toys and pet clothing and accessories, namely coats, capes, raincoats and booties
(7) Pet food and treats.
(8) Cat pans liners.
(9) Pet brushes and combs.
(10) Litter bags.
(11) Cat pans and kitty litter.
(12) Cat scratching boards and pads.
(13) Dog training pads.
(14) Pet wipes.
(15) Cat nips and pet poop bags.

Revendications :

Used in CANADA since August 2005 on goods (1).
Used in CANADA since September 2006 on goods (2).
Used in CANADA since November 2006 on goods (3).
Used in CANADA since December 2006 on goods (4).
Used in CANADA since January 2007 on goods (5).
Used in CANADA since March 2007 on goods (6).
Used in CANADA since July 2007 on goods (7).
Used in CANADA since March 2008 on goods (8).
Used in CANADA since November 2008 on goods (9).
Used in CANADA since January 2009 on goods (10).
Used in CANADA since March 2009 on goods (11).
Used in CANADA since May 2009 on goods (12).
Used in CANADA since July 2009 on goods (13).
Used in CANADA since August 2009 on goods (14).
Declaration of Use filed September 16, 2010 on goods (15).

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