Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

Informations sur la décision

Contenu de la décision

BW v2 Logo

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2016 COMC 106

Date de la décision : 2016-06-30

[TRADUCTION CERTIFIÉE,
NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45

 

 

Mincov Law Corporation

Partie requérante

et

 

G C jewellers

Propriétaire inscrit

 

 

 



 

LMC630,155 pour l'image-miroir de deux « P » dont un P positionné tête en bas

 

Enregistrement

[1]               La présente décision concerne une procédure de radiation sommaire engagée à l'égard de l'enregistrement no LMC630,155 de la marque de commerce figurative reproduite ci-dessous (la Marque) appartenant à G C jewellers (le Propriétaire) :

[2]               La Marque est enregistrée en liaison avec les produits [Traduction] « bijoux ».

[3]               Pour les raisons exposées ci-dessous, je conclus qu'il y a lieu de radier l'enregistrement.

La procédure

[4]               Le 10 novembre 2014, le registraire des marques de commerce a donné l'avis prévu à l'article 45 de la Loi sur les marques de commerce LRC 1985, ch T-13 (la Loi) au Propriétaire. L'avis a été donné à la demande de Mincov Law Corporation (la Partie requérante).

[5]               L'avis enjoignait au Propriétaire de fournir une preuve établissant qu'il a employé la Marque au Canada à un moment quelconque entre le 10 novembre 2011 et le 10 novembre 2014 (la Période pertinente), en liaison avec les produits visés par l'enregistrement. Dans le cas où la Marque n'avait pas été ainsi employée, le Propriétaire devait fournir une preuve établissant la date à laquelle la Marque a été employée en dernier lieu et les raisons de son défaut d'emploi depuis cette date.

[6]               La définition pertinente d'« emploi » est énoncée à l'article 4(1) de la Loi, lequel est ainsi libellé :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu'avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[7]               Il est bien établi que l'article 45 de la Loi a pour objet et portée d'offrir une procédure simple, sommaire et expéditive pour débarrasser le registre du « bois mort ». Les critères pour établir l'emploi ne sont pas exigeants et il n'est pas nécessaire de produire une surabondance d'éléments de preuve. Il n'en faut pas moins, cependant, présenter des faits suffisants pour permettre au registraire de conclure que la marque de commerce a été employée en liaison avec chacun des produits ou des services spécifiés dans l'enregistrement pendant la période pertinente [voir Performance Apparel Corp c Uvex Toko Canada Ltd, 2004 CF 448, 31 CPR (4th) 270]. De simples allégations d'emploi ne sont pas suffisantes pour établir l'emploi de la marque de commerce [voir Aerosol Fillers Inc c Plough (Canada) Ltd (1980), 53 CPR (2d) 62 (CAF)]. En outre, toute ambiguïté dans la preuve doit être interprétée à l'encontre du propriétaire, car le fardeau de preuve repose entièrement sur lui [Diamant Elinor Inc c 88766 Canada Inc, 2010 CF 1184, 90 CPR (4th) 428].

[8]               En réponse à l'avis du registraire, le Propriétaire a produit l'affidavit de Ping Szeto, souscrit le 18 décembre 2014.

[9]               Les parties ont toutes deux produit des représentations écrites; aucune audience n'a été tenue.

Preuve du Propriétaire

[10]           L'affidavit de M. Szeto, qui est intitulé [Traduction] « AFFIDAVIT DE Ping Szeto (G C Jewellers) », contient trois paragraphes. M. Szeto affirme ce qui suit :

       Il est le propriétaire exploitant d'un magasin de détail du nom de G C Jewellers qui est situé au 267, route Lakeshore Est, à Oakville, en Ontario.

       Il est le propriétaire légitime de l'enregistrement de la Marque employée à l'égard de [Traduction] « nos » produits de bijouterie depuis 2001.

       Il joint des images des produits [Traduction] « marqués ».

[11]           L'affidavit est accompagné d'une seule page, qui n'a pas été endossée ou autrement identifiée en tant que pièce. Cette page présente neuf photographies imprimées sur un fond constitué des mots « G C Jewellers 2014 » reproduits à maints endroits sur la page.

[12]           Les photographies sont de qualité variable et certains détails sont trop petits pour qu'on puisse les voir distinctement. On a même du mal à déterminer quel objet est représenté sur une des photographies. Je peux néanmoins identifier divers types de bijoux, dont un anneau, un collier, un pendentif, une paire de boucles d'oreilles et un bracelet.

Représentations écrites de la Partie requérante

[13]           Les principales représentations de la Partie requérante peuvent être résumées comme suit :

      La preuve n'indique pas si la Marque figure sur les produits.

      La preuve ne contient aucune description de la nature du commerce du Propriétaire.

      La preuve n'est pas datée et, par conséquent, peut ne pas se rapporter à la Période pertinente.

      La preuve n'établit aucun transfert des produits.

Représentations écrites du Propriétaire

[14]           À titre de représentations écrites, le Propriétaire a produit une lettre de deux paragraphes signée par M. Szeto, dans laquelle ce dernier affirme fournir [Traduction] « de plus amples renseignements et des photos claires » pour satisfaire à la demande du registraire.

[15]           Les [Traduction] « photos claires » prennent la forme de neuf photographies, dont six qui correspondent aux photographies accompagnant l'affidavit de M. Szeto; deux qui montrent un article de journal sur le Propriétaire; et une qui montre un certificat attestant d'un prix remis à M. Szeto pour sa conception de bijoux. Quant aux renseignements contenus dans la lettre, ils indiquent que M. Szeto : i) était tenu de poinçonner la Marque et une marque de qualité sur chaque article de bijouterie fini en vertu de la [Traduction] « loi canadienne sur les métaux précieux »; ii) [Traduction] « est à la tête de G C Jewellers depuis de nombreuses années », et iii) emploie la Marque [Traduction] « presque tous les jours ».

[16]           Malheureusement, la Loi ne comprend aucune disposition qui permet de produire une preuve en réponse une fois que les représentations écrites de la Partie requérante ont été soumises ou de demander la permission de produire une preuve supplémentaire dans une procédure en vertu de l'article 45 [voir Oyen Wiggs Green & Mutula LLP c Hung Gay Enterprises Ltd, 2014 COMC 107, 125 CPR (4th) 238]. Par conséquent, si le Propriétaire voulait que les photographies jointes à ses représentations écrites soient prises en considération dans la présente procédure, il aurait fallu qu'il les fournisse par le biais de l'affidavit de M. Szeto. De même, les allégations concernant la Loi sur le poinçonnage des métaux précieux contenues dans les représentations écrites du Propriétaire ne font pas partie de la preuve dans la présente procédure. En effet, selon l'article 45 de la Loi, la preuve doit être produite sous la forme d'un affidavit ou d'une déclaration solennelle.

[17]           Par conséquent, je ne tiens aucun compte des déclarations factuelles qui constitueraient une nouvelle preuve contenues dans les représentations écrites du Propriétaire, ni des photographies qui les accompagnent. Bien qu'elles aient été versées au dossier, elles ne seront pas considérées comme faisant partie de la preuve dans la présente procédure.

Analyse

[18]           Avant d'aborder les points soulevés par la Partie requérante, je formulerai quelques remarques préliminaires en ce qui concerne la preuve.

[19]           En premier lieu, je souligne que l'affirmation de M. Szeto selon laquelle il est le [Traduction] « propriétaire légitime » de l'enregistrement de la Marque semble incompatible avec les détails de l'enregistrement au dossier, qui indiquent que le nom du propriétaire inscrit est « G C Jewellers ».

[20]           Toutefois, selon une interprétation raisonnable de l'affidavit dans son ensemble, j'infère que M. Szeto et « G C Jewellers » ne sont qu'une seule et même personne ou entité. Plus particulièrement, je conclus que G C Jewellers est simplement le nom sous lequel M. Szeto fait affaire. Considérant que la Partie requérante n'a présenté aucune observation à cet égard, aux fins de la présente procédure, j'admets que tout emploi démontré de la Marque effectué par M. Szeto dans le cadre de l'exploitation de G C Jewellers constitue un emploi par le Propriétaire.

[21]           De plus, comme je l'ai indiqué précédemment, la page de photographies qui accompagne l'affidavit de M. Szeto n'a pas été endossée ou autrement identifiée en tant que pièce. Sur le plan technique, il s'agit d'une irrégularité dans la forme de l'affidavit. Or, l'absence d'un endossement sur une pièce ne sera pas nécessairement fatal si, comme en l'espèce, aucune objection n'a été soulevée par l'autre partie [voir Maximilian Fur Co, Inc c Maximillian for Men’s Apparel Ltd (1983), 82 CPR (2d) 146 (COMC), au para 9]. En effet, il arrive que le registraire admette en preuve des pièces qui n'ont pas été correctement endossées par un notaire ou un commissaire à l'assermentation, si la preuve contenue dans ces pièces est clairement identifiée et expliquée dans le corps de l'affidavit [voir Borden & Elliot c Raphaël Inc (2001), 16 CPR (4th) 96 (COMC)].

[22]           En l'espèce, M. Szeto affirme dans son affidavit que la Marque est employée à l'égard de [Traduction] « produits de bijouterie » et qu'il joint des images de [Traduction] « nos produits ». Étant donné que la page qui accompagne l'affidavit comprend des images de produits de bijouterie, j'estime que la preuve jointe à l'affidavit a été correctement identifiée et expliquée dans l'affidavit. J'estime, par conséquent, que la page qui accompagne l'affidavit de M. Szeto est admissible en preuve aux fins de la présente procédure.

[23]           J'examinerai maintenant successivement les points soulevés par la Partie requérante, qui sont énoncés ci-dessus.

La preuve montre-t-elle la Marque?

[24]           La Partie requérante soutient que les photographies produites comme pièce [Traduction] « ne permettent pas de déterminer si l'un quelconque des produits représentés arbore une marque de commerce ». Je suis partiellement d'accord avec la Partie requérante.

[25]           En effet, en raison de la taille et de la qualité des photographies, il est difficile de discerner la plupart des détails. Je ne vois absolument pas la Marque sur chacun des articles de bijouterie que montrent les photographies. Lorsque j'examine les photographies de plus près, j'arrive à voir que la Marque figure à l'arrière du pendentif, en son centre.

La preuve contient-elle une description de la pratique normale du commerce?

[26]           La Partie requérante soutient que le Propriétaire n'a fourni aucune information en ce qui concerne sa pratique normale du commerce. La Partie requérante soutient en outre que le registraire ne peut pas faire de suppositions quant à la nature du commerce du Propriétaire, ou qu'on ne peut pas s'attendre à ce qu'il connaisse la nature du commerce du Propriétaire. Or, en l'espèce, M. Szeto affirme clairement dans son affidavit qu'il exploite un magasin de détail à Oakville, en Ontario.

La preuve se rapporte-t-elle à la Période pertinente?

[27]           La Partie requérante soutient que la preuve est ambigüe parce qu'elle ne fait pas spécifiquement référence à la Période pertinente. Sur ce point, je suis d'accord avec la Partie requérante.

[28]           Dans son affidavit, M. Szeto affirme simplement que la Marque a été [Traduction] « employée » à l'égard de produits de bijouterie [Traduction] « de 2001 à aujourd'hui ». On ne sait pas si cet emploi a été continu ou si une partie de cet emploi a eu lieu pendant la Période pertinente. Comme je l'ai indiqué précédemment, cette ambiguïté dans la preuve doit être interprétée à l'encontre du Propriétaire.

[29]           En outre, même si le Propriétaire affirme dans ses représentations écrites que la Marque est [Traduction] « employée » presque tous les jours, tel que mentionné précédemment, je ne peux pas tenir compte de cette affirmation dans ma décision. Cela dit, même si cette affirmation avait été faite dans l'affidavit de M. Szeto, elle n'aurait pas aidé la cause du Propriétaire. En effet, je n'aurais pas inféré de l'affirmation voulant que la Marque soit actuellement employée quotidiennement que la Marque a été employée, quotidiennement ou autrement, pendant la Période pertinente.

[30]           En ce qui concerne la page produite comme pièce, comme l'a souligné la Partie requérante, les photographies présentées sur cette page ne sont pas datées. Qui plus est, M. Szeto n'indique pas à quel moment les photographies ont été prises ni si elles sont représentatives de la façon dont la Marque était présentée pendant la Période pertinente. Le fond sur lequel sont présentées les photographies comprend l'inscription « G C Jewellers 2014 »; cependant, on ne sait pas si cette date correspond à la date à laquelle les photographies ont été prises ou à la date à laquelle la page produite comme pièce a été préparée et imprimée. Considérant que l'affidavit a été souscrit en décembre 2014, il n'apparaît pas clairement que « 2014 » renvoie à un moment pendant la Période pertinente, laquelle s'est terminée le 10 novembre 2014. Là encore, je dois interpréter ces ambiguïtés à l'encontre du Propriétaire.

[31]           En définitive, j'estime que la preuve est trop ambigüe pour me permettre de conclure que la Marque était apposée sur des bijoux pendant la Période pertinente. Dans l'éventualité où j'aurais tort de conclure ainsi, il demeure justifié d'examiner la preuve plus avant, car la présentation de la Marque en soi n'est pas suffisante pour établir l'emploi au sens de l'article 4(1) de la Loi. En effet, tel que mentionné ci-dessus, le Propriétaire doit également fournir au moins une certaine preuve de transferts dans la pratique normale du commerce.

La preuve établit-elle que des transferts des produits ont eu lieu?

[32]           La Partie requérante soutient que la preuve n'établit pas que des transferts ont eu lieu dans la pratique normale du commerce. Plus particulièrement, la Partie requérante souligne que M. Szeto ne fournit aucun chiffre de vente dans son affidavit, pas plus qu'il ne fournit de factures, de reçus ou de bons de commande faisant état de ventes de produits de bijouterie.

[33]           Je conviens avec la Partie requérante que l'affidavit de M. Szeto ne contient aucune preuve que des produits ont été transférés dans la pratique normale du commerce.

[34]           Tel qu'indiqué ci-dessus, l'article 45 exige que le propriétaire inscrit établisse l'emploi de la marque de commerce en liaison avec les produits à l'égard desquels elle a été enregistrée; il ne suffit pas de simplement alléguer l'emploi. En d'autres termes, un affidavit en réponse à un avis en vertu de l'article 45 doit [Traduction] « démontrer [l'emploi] en décrivant les faits qui permettront au registraire ou à la Cour de se faire une opinion ou de déduire logiquement qu’il y a eu emploi au sens de l’article 4 » [voir Guido Berlucchi & C Srl c Brouilette Kosie Prince, 2007 CF 245, 56 CPR (4th) 401, au para 18].

[35]           Bien qu'il ne soit pas obligatoire de produire des factures, il demeure nécessaire de fournir au moins certains éléments de preuve de nature à permettre au registraire de conclure que des transferts ont véritablement eu lieu dans la pratique normale du commerce au Canada. À titre d'exemple, en l'absence de factures, une telle preuve peut prendre la forme de déclarations concernant les volumes des ventes, la valeur en dollars des ventes ou des détails factuels équivalents [voir, par exemple, 1471706 Ontario Inc c Momo Design srl, 2014 COMC 79, CarswellNat 2439; et Gowling Lafleur Henderson LLP c Wertex Hosiery Incorporated, 2014 COMC 193, CarswellNat 4624]. En l'espèce, il n'y a pas la moindre preuve établissant que des ventes des bijoux arborant la Marque ‑ représentés sur les photographies produites comme pièce ou autrement ‑ ont véritablement eu lieu pendant la Période pertinente ou à un autre moment.

Décision

[36]           Compte tenu de tout ce qui précède, j'estime que la preuve du Propriétaire n'établit pas l'emploi de la Marque au Canada en liaison avec les produits visés par l'enregistrement au sens des articles 4 et 45 de la Loi. Qui plus est, le Propriétaire n'a fourni aucune preuve de circonstances spéciales justifiant ce défaut d'emploi.

[37]           En conséquence, dans l'exercice des pouvoirs qui m'ont été délégués en vertu des dispositions de l'article 63(3) de la Loi, l'enregistrement sera radié conformément aux dispositions de l'article 45 de la Loi.

______________________________

Céline Tremblay

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Judith Lemire, trad.

COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

 

 

Aucune audience tenue

 

AGENT(S) AU DOSSIER

 

Aucun agent nommé                                                                            POUR LE PROPRIÉTAIRE INSCRIT

 

Mincov Law Corporation                                                                    POUR LA PARTIE REQUÉRANTE

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.