Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

 

Référence : 2014 COMC 76

Date de la décision : 2014-04-01

                                                                                        TRADUCTION

DANS L’AFFAIRE DES DEUX OPPOSITIONS produites par la Canadian Football League Players’ Association à l’encontre des demandes d’enregistrement nos 1,344,153 et 1,344,156 pour les marques de commerce PRO PLAYER et P2 BY PRO PLAYER & Dessin, respectivement, au nom de PEI Licensing, Inc.

DEMANDE No 1,344,153 – PRO PLAYER

Dossier

[1]        Le 19 avril 2007, PEI Licensing, Inc. a produit une demande d’enregistrement de la marque PRO PLAYER, pour emploi en liaison avec les marchandises suivantes :

 

(1)             valises, sacs, sacs à dos et sacs de sport tout usage, sacs d'école, sacs de sport, sacoches de messager, sacs à lacet coulissant, sacs tout usage, sacs de fin de semaine, sacs banane, sacs à gourde, étuis à CD, sacs à main, valises à parois souples, valises de pilote à roulettes, sacs pour appareils photo, fourre-tout de voyage, bagages à main, sacs pour ordinateur, agendas, sacs à cosmétiques, chaînes porte-clés;

 

articles de papeterie nommément porte-documents, reliures, livres de composition, chemises de classement, blocs-notes, blocs-notes coupés à l'emporte-pièce, carnets, journaux, cahiers thématiques à spirale, crayons, stylos, embouts de crayon, gommes à effacer, étuis à crayons, couvre-livres extensibles, trousses scolaires, nommément support à cahiers qui peut aussi contenir des règles, des stylos, des crayons et d'autres petites fournitures scolaires;

 

trousses d'outils (règle, taille-crayon, agrafeuse, gommes à effacer, marqueurs), tableaux de liège, tableaux d'affichage combinés, calendriers/tableaux d'affichage effaçables, planchettes à pince avec blocs-notes, aimants pour casier, boîtes repas, glacières.

 

(2)             sous-vêtements techniques, nommément shorts et maillots.

 

La demande était fondée sur un emploi projeté au Canada en liaison avec les marchandises énumérées en (1) et sur l’emploi depuis au moins mars 2005 en liaison avec les marchandises énumérées en (2).

 

[2]        La demande a été modifiée subséquemment pour inclure une base d’enregistrement supplémentaire, soit l’emploi et l’enregistrement de la marque dans le pays d’origine de la requérante, les États-Unis d’Amérique, en liaison avec les marchandises énumérées ci-dessous :

(3)             vêtements, nommément pantalons, shorts, pantalons de sport, pantalons d'exercice, sous-vêtements, boxeurs, caleçons, soutiens-gorges de sport, maillots de bain, uniformes de sport, jerseys, chemises, hauts, vêtements molletonnés, chemises en tricot et tissées, tee-shirts, chemises tout-aller, pulls de survêtement, chemises de sport, pulls d'entraînement, tee-shirts, pantalons d'entraînement, vêtements d'extérieur, vestes, chandails, manteaux, survêtements, vêtements de bain, cache-maillots;

 

couvre-chefs, nommément chapeaux, casquettes, visières, feutres mous; gants;

 

tous types d'articles chaussants pour hommes, femmes et enfants,

nommément chaussures, bottes, espadrilles, pantoufles, tongs

 

tous types de chaussettes et de bonneterie pour hommes, femmes et enfants.

 

[3]        La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 25 mars 2009 et Canadian Football League Players’ Association s’y est opposée le 25 mai 2010 – la production de la déclaration d’opposition a été différée, car l’opposante s’est vu accorder une « période de réflexion » de neuf mois pour trouver une solution à ses préoccupations. Le 6 juillet 2010, le registraire a transmis une copie de la déclaration d’opposition à la requérante, comme l’exige l’article 38(5) de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch. T-13. En réponse, la requérante a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle elle nie de façon générale les allégations contenues dans la déclaration d’opposition.

 

[4]        La preuve de l’opposante est constituée des affidavits de Stuart Laird et de Kyle Runzer. La preuve de la requérante est constituée des affidavits de Mark Faassen et de Lester Blum. La preuve en réponse de l’opposante est constituée de l’affidavit de Jada Lui. Les parties ont toutes deux produit un plaidoyer écrit. Une audience avait été fixée au 4 février 2014, mais les parties ont informé la Commission (le 29 janvier 2014) qu’elles cherchaient un arrangement à l’amiable et qu’aucune d’elle ne serait présente à l’audience. Les parties n’ont toutefois pas demandé de remise ni de nouvelle date d’audience. Dans les circonstances, la Commission a informé les parties que l’audience prévue pour le 4 février 2014 était annulée et qu’une décision serait rendue en temps voulu : voir l’avis de la Commission du 3 février 2014.

 

Déclaration d’opposition

[5]        L’opposante plaide qu’elle est la propriétaire de (i) les noms commerciaux CFLPA PRO PLAYERS et AJLCF PRO PLAYERS, et de (ii) les marques de commerce enregistrées sous les nos LMC659743 et LMC660479, reproduites ci-dessous :


Il se peut que les illustrations ci-dessous ne permettent pas de voir clairement que les lettres CFLPA et AJLCF figurent dans la première et dans la seconde marque, respectivement.

 

[6]        Les marques de l’opposante sont, à l’heure actuelle, enregistrées pour emploi en liaison avec les services suivants :

 

[TRADUCTION]
(1)             concession de licences d’utilisation des services de joueurs de football membres de la Ligue canadienne de football et d’anciens joueurs membres de l’organisation du requérant à des tiers, nommément apparitions en personne et participation à des expositions et activités promotionnelles, nommément, apparitions publiques et discours liminaires,

 

(2              concession de licences d’utilisation de noms, de surnoms, de photographies, de dessins, de portraits, d’images, de représentations visuelles et de signatures de joueurs de football professionnels et d’anciens joueurs membres de l’organisation du requérant à des tiers,

 

(3)             concession de licences d’emploi du nom, des marques de commerce et des logos du requérant à des tiers.

 

Les activités de concession de licences de l’opposante sont décrites en des termes informels à la pièce E de l’affidavit de Kyle Runzer :

[TRADUCTION]
CFLPA PRO PLAYERS, la filiale de la Canadian Football league [sic] Players Association spécialisée dans le marketing et la concession de licences a été créée en 2003 avec la mission de mettre en valeur les joueurs actifs de la LCF [Ligue canadienne de football] à titre de personnalités et d’athlètes professionnels respectés « en dehors du terrain de football ». Représentant plus de 450 joueurs actifs et 1 500 anciens joueurs, CFLPA PRO PLAYERS offre à ses partenaires un large éventail de possibilités en matière de marketing.

 

 

[7]        Au moment où la déclaration d’opposition a été produite, les enregistrements de l’opposante visaient également des services supplémentaires, divers articles vestimentaires et d’autres marchandises. Les services supplémentaires et l’ensemble des marchandises ont été radiés dans le cadre d’une procédure en vertu de l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce : voir PEI Licensing Inc c. Canadian Football League Players Association, 2013 COMC 110 (CanLII).

 

[8]        Divers motifs sont soulevés dans la déclaration d’opposition; deux d’entre eux ont toutefois été abandonnés à l’étape du plaidoyer écrit. Les principales questions à trancher, eu égard aux motifs d’opposition restants, sont celles de savoir si la marque PRO PLAYER visée par la demande crée de la confusion, au sens de la Loi sur les marques de commerce, avec soit (i) l'un ou l’autre des noms commerciaux de l’opposante, soit (ii) l'une ou l’autre des marques de commerce de l’opposante. La date pertinente la plus lointaine pour évaluer la question de la confusion est la date de premier emploi revendiquée par la requérante, c’est-à-dire le 31 mars 2005, pour ce qui est des marchandises énumérées en (2), tandis que la date pertinente la plus rapprochée est la date de ma décision : pour un examen de la jurisprudence concernant les dates pertinentes dans les procédures d’opposition, voir American Retired Persons c. Canadian Retired Persons (1998), 84 CPR(3d) 198, pp. 206 à 209 (CF 1re inst.).

 

[9]        Je mentionnerai également que l’emploi des logos de l’opposante serait sans doute considéré comme un emploi de la marque nominale PRO PLAYERS en soi : à cet égard, voir la décision rendue par la Commission dans Nightingale Interloc c. Prodesign Ltd. (1984), 2 CPR (3d) 535, p. 538. Bien sûr, l’opposante n’a invoqué aucune marque nominale dans sa déclaration d’opposition; elle s’est fondée uniquement sur ses logos et ses noms commerciaux. Néanmoins, compte tenu de la preuve produite par l’opposante et des observations formulées par la Cour dans Novopharm Limited c. AstraZeneca AB et al., (2002), 21 CPR (4th) 289 (CAF) au para. 10 relativement à la façon dont la preuve peut élargir la portée de la déclaration d’opposition, il importe de tenir compte également de la question de la confusion entre la marque nominale PRO PLAYERS de l’opposante et la marque PRO PLAYER visée par la demande. Étant donné que la marque visée par la demande partage avec la marque PRO PLAYERS de l’opposante une ressemblance plus marquée qu’avec les autres marques (ou noms commerciaux) de l’opposante, la question déterminante à trancher est celle de savoir si la marque PRO PLAYER visée par la demande crée de la confusion avec la marque PRO PLAYERS de l’opposante.

 

Quand une marque de commerce est-elle réputée employée au Canada?

[10]      Le sens technique de l’« emploi » d’une marque au Canada revêtant une certaine importance en l’espèce, la définition de l’« emploi » d’une marque de commerce, énoncée à l’article 4 de la Loi sur les marques de commerce, est reproduite ci-dessous :

4. (1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des marchandises si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces marchandises, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les marchandises mêmes ou sur les colis dans lesquels ces marchandises sont distribuées, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux marchandises à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

 

 (2) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l’exécution ou l’annonce de ces services.

 

 (3) Une marque de commerce mise au Canada sur des marchandises ou sur les colis qui les contiennent est réputée, quand ces marchandises sont exportées du Canada, être employée dans ce pays en liaison avec ces marchandises.

 

[11]      Avant d’examiner la preuve des parties, j’établirai d’abord le sens du terme « confusion » dans le contexte de la Loi sur les marques de commerce, et fournirai des précisions sur le test en matière de confusion et sur les facteurs à prendre en considération pour déterminer la probabilité de confusion.

 

Quand une marque ou un nom crée-t-il de la confusion?

[12]      Les marques de commerce et les noms commerciaux créent de la confusion lorsqu’il existe une probabilité raisonnable de confusion au sens des articles 6(2) et 6(3) de la Loi sur les marques de commerce, lesquels sont libellés comme suit :

6(2) L’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

 

6(3) L’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec un nom commercial, lorsque l’emploi des deux dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à cette marque et les marchandises liées à l’entreprise poursuivie sous ce nom sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à cette marque et les services liés à l’entreprise poursuivie sous ce nom sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou services soient ou non de la même catégorie générale.

 

 

[13]      Ainsi, la question de la confusion ne concerne pas la confusion entre les marques et les noms commerciaux eux-mêmes, mais la confusion portant à croire que des biens et services provenant d’une source proviennent d’une autre source. En l’espèce, la question que soulève l’article 6(2) est celle de savoir si les acheteurs des vêtements et autres marchandises de la requérante vendues sous la marque PRO PLAYER croiraient que ces articles vestimentaires et autres marchandises ont été fabriqués ou autorisés par l’opposante ou font l’objet d’une licence concédée par l’opposante qui exécute ses services en liaison avec ses logos, ses noms commerciaux et ses marques de commerce. C’est à la requérante qu’incombe le fardeau ultime de démontrer, selon la norme habituelle de la prépondérance des probabilités qui s’applique en matière civile, qu’il n’y aurait pas de probabilité raisonnable de confusion.

 

Test en matière de confusion

[14]      Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. Les facteurs à prendre en considération pour déterminer si deux marques créent de la confusion sont « toutes les circonstances de l’espèce, y compris » celles expressément énoncées aux articles 6(5)a) à 6(5)e) de la Loi, à savoir, le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle chaque marque a été en usage; le genre de marchandises, services ou entreprises; la nature du commerce; le degré de ressemblance entre les marques dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Cette liste n’est pas exhaustive, et il importe de tenir compte de tous les facteurs pertinents. En outre, ces facteurs n’ont pas nécessairement tous le même poids, car le poids qu’il convient d’accorder à chacun d’eux varie selon les circonstances : voir Gainers Inc. c. Tammy L. Marchildon et le Registraire des marques de commerce (1996), 66 CPR (3d) 308 (CF 1re inst.). Toutefois, comme l’a souligné le juge Rothstein dans Masterpiece Inc. c. Alavida Lifestyles Inc. (2011), 92 CPR (4th) 361 (CSC), le degré de ressemblance est souvent le facteur susceptible d’avoir le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion, et ce, même s’il est mentionné en dernier lieu à l’article 6(5).

 

Preuve de l’opposante

Stuart Laird

Contexte général

[15]      M. Laird atteste qu’il est le président de l’opposante. L’opposante est une association non constituée en société qui représente les intérêts des joueurs de football professionnels de la Ligue canadienne de football (LCF). Fondée en 1965, l’opposante agit au nom des joueurs à diverses fins, y compris la négociation de la convention collective avec la LCF. Le nombre de joueurs membres de la LCF varie d’une année à l’autre; de 2004 à 2010, il a fluctué de 507 à 612.

 

[16]      En 2003, l’opposante a créé une division des ventes et du marketing, et a entrepris de concevoir une marque destinée à son propre usage dans le but de générer un revenu. La marque qu’a créée M. Laird est CFLPA PRO PLAYERS. Au début de 2004, l’opposante a conçu les nouvelles versions anglaise et française de son logo qui sont reproduites au paragraphe 5 ci-dessus. Le lancement officiel des logos de l’opposante a eu lieu le 15 mai 2004.

 

[17]      M. Laird décrit les activités de l’opposante aux paragraphes 10 et 11 de son affidavit, souscrit le 23 décembre 2010.

[TRADUCTION]
10.          L’Opposante a employé toutes les marques de commerce « PRO PLAYERS » susmentionnées conjointement et séparément (« les Marques ») en liaison avec des services que l’Opposante fournit aux joueurs de football professionnels qui sont membres de l’organisation de l’Opposante et font partie d’une équipe d’un club de football membre de la LCF, ainsi qu’en liaison avec un certain nombre d’événements organisés par l’Opposante. L’Opposante a également employé les Marques en liaison avec diverses marchandises et divers services, y compris celles et ceux énumérés dans les enregistrements des Marques et dans les demandes pour les Marques. Les services comprennent la concession de licences d’emploi des Marques à des tiers, tel qu’il est expliqué plus en détail ci-dessous.

 

11.          L’Opposante a investi des efforts et des sommes considérables pour développer le « goodwill » rattaché aux Marques en faisant connaître l’Opposante comme la représentante de l’ensemble des joueurs professionnels membres de l’organisation de l’Opposante et faisant partie d’une équipe d’un club de football membre de la LCF. L’Opposante a révélé publiquement le lien entre les Marques et les marchandises et services, tel qu’il est expliqué plus en détail ci-dessous. Les Marques ont été annoncées en liaison avec ces marchandises et ces services par l’intermédiaire des sites Web www.cf1pa.com et www.proplayers.ca de l’Opposante, au moyen de communiqués de presse et lors de salons professionnels, ainsi que d’événements publics organisés par l’Opposante, y compris des événements qui se tiennent pendant la semaine précédant le match de la Coupe Grey chaque année depuis au moins 2003. Avis public a également été donné au moyen des enregistrements de marque de commerce et par l’annonce des demandes de marque de commerce appartenant à l’Opposante. Les coûts liés à la révélation des Marques comprennent, entre autres, les dépenses engagées relativement au site, aux expositions dans des salons professionnels, aux communiqués de presse et aux bulletins d’information envoyés aux joueurs membres de l’organisation de l’Opposante.

 

 

Les contrats de licence de l’opposante

[18]      En 2005, l’opposante a conclu un contrat avec Jogo Novelties Inc. pour la fabrication de cartes de joueurs et l’emploi des marques de l’opposante en liaison avec ces cartes. Depuis 2005, l’opposante a reçu de Jogo un revenu de 12 633 $. Des copies des contrats intervenus entre l’opposante et Jogo de 2005 à 2010 sont jointes comme pièce H.

 

[19]      L’opposante a également conclu un contrat avec Canadian Football League Properties Limited (« Properties ») qui autorise Properties à accorder des droits à Reebok Canada Inc. pour la fabrication et la vente d’articles vestimentaires arborant les noms de joueurs de la LCF. L’opposante concède à Properties des licences d’emploi de ses marques depuis au moins 2004. Depuis 2005, l’opposante a reçu de Properties un revenu de 371 081 $. Des copies des contrats intervenus entre l’opposante et Properties de 2004 à 2010 sont jointes comme pièce J.

 

[20]      Au paragraphe 16 de son affidavit, M. Laird fournit de plus amples renseignements sur l’emploi des marques de l’opposante par Reebok :

[TRADUCTION]
   Des copies certifiées de 15 photographies de divers articles arborant la marque CFLPA PRO PLAYERS LOGO de l’Opposante sont jointes comme pièce « J ». Les trois premières photographies montrent des maillots fabriqués par Reebok. Les quatre photographies suivantes montrent des pull-overs ou des chandails fabriqués par Reebok. Les trois photographies suivantes montrent des pantalons en molleton fabriqués par Reebok. Les deux photographies suivantes montrent des pantalons en molleton fabriqués par Reebok contenus dans un sac arborant le nom [S. Laird] en surpiqûre. La photographie suivante montre une étiquette à bagage. La photographie suivante montre un thermos. La dernière photographie montre un cordon.

 

J’ai examiné la pièce J et je confirme que l’affirmation de M. Laird selon laquelle les logos de l’opposante figurent sur les articles vestimentaires et les autres marchandises est exacte.

 

[21]      En juillet 2008, la requérante a produit de nouvelles demandes d’enregistrement; l’une pour la marque nominale PRO PLAYERS, demande no 1,403,415, et l’autre pour le logo PRO PLAYERS, demande no 1,403,416, reproduit ci-dessous :


Les demandes d’enregistrement susmentionnées sont fondées sur un emploi projeté au Canada et visent, entre autres choses, des articles vestimentaires et de fantaisie, et le genre de services de concession de licences visés par les enregistrements de l’opposante et décrits par M. Laird dans son affidavit. Aux fins de la présente procédure, je considère le logo reproduit ci-dessus comme une variante des enregistrements de l’opposante, et non comme une marque distincte, car les caractéristiques dominantes des marques déposées ont été conservées dans le logo : à cet égard, voir Promafil Canada Ltée c. Munsingwear Inc. (1992) 44 CPR (3d) 59, au para. 36 à 38.

 

[22]      Aux paragraphes 17 à 33 de son affidavit, M. Laird fournit de plus amples renseignements sur les contrats de concession de licence intervenus entre l’opposante et d’autres tierces parties, mentionne les copies de ces contrats qui sont jointes à son affidavit et fournit les chiffres relatifs aux paiements reçus aux termes de ces contrats. Il ne m'apparaît pas utile d'examiner en détail la preuve de M. Laird concernant ces autres contrats. Il en est ainsi parce que, à mon sens, la preuve de M. Laird se rapportant aux contrats de concession de licence de l’opposante n’est pas suffisamment précise pour permettre d’établir que l’opposante a réellement employé ses marques en liaison avec des articles vestimentaires et d’autres marchandises, au sens de l’article 4 de la Loi sur les marques de commerce. À cet égard, j’estime que la critique que la requérante a formulée au paragraphe 59 de son plaidoyer écrit relativement à la preuve de M. Laird est, pour l’essentiel, juste :

 

[TRADUCTION]
59.     La Requérante souligne ce qui suit relativement aux contrats de licence susmentionnés :

 

(a)      Bien que les contrats de concession de licence visent à accorder à diverses tierces parties le droit d’employer les Marques de l’Opposante [les logos reproduits au para. 5 ci-dessus], les Nouvelles Marques de l’Opposante [PRO PLAYERS et le logo reproduit au para. 21 ci-dessus] et/ou les Marques Nominales de l’Opposante [CFLPA PRO PLAYERS; AJLCF PRO PLAYERS], les contrats n’exigent pas expressément du licencié qu’il les emploie en liaison avec les marchandises et services sous licence.

 

(b)     M. Laird n’affirme nulle part dans son affidavit que les Marques de l’Opposante, les Nouvelles Marques de l’Opposante et/ou les Marques Nominales de l’Opposante aient réellement été employées en liaison avec les marchandises ou services sous licence dans le cadre des contrats susmentionnés.

 

(c)      M. Laird n’indique pas comment les Marques de l’Opposante, les Nouvelles Marques de l’Opposante et/ou les Marques Nominales de l’Opposante ont été employées dans le cadre des contrats susmentionnés (si tant est qu’elles l’aient été), et son affidavit ne comporte aucun exemple de la façon dont les Marques de l’Opposante, les Nouvelles Marques de l’Opposante et/ou les Marques Nominales de l’Opposante ont été employées en liaison avec les marchandises ou les services sous licence (si tant est qu’elles l’aient été).

 

(d)     En l’absence de toute preuve à l’appui, on ne peut pas présumer que les parties respectives se sont acquittées de leurs obligations aux termes des contrats. Dans la plupart des cas, outre ses affirmations concernant les revenus versés à l’Opposante, M. Laird ne fournit aucune indication confirmant que les parties se sont réellement acquittées de leurs obligations.

 

(e)      Il n’y a aucune preuve qu’un contrôle est réellement exercé sur la qualité des marchandises et des services (si tant est qu’il y en ait un) prétendument offerts sous licence en liaison avec les Marques de l’Opposante, les Nouvelles Marques de l’Opposante et/ou les Marques Nominales de l’Opposante.

 

(f)      S’agissant des affirmations de l’Opposante concernant les revenus que l’Opposante a reçus aux termes des contrats de licence, dans bien des cas, le montant du revenu correspond exactement à la compensation financière qui est payable aux termes des contrats que les produits ou services aient ou non été offerts par le licencié. Dans les cas où les paiements de redevance sont supérieurs au montant garanti qui doit être versé, l’Opposante ne précise nulle part que le revenu reçu se rapporte à la fourniture de marchandises ou de services offerts ou vendus en liaison avec les Marques de l’Opposante, les Nouvelles Marques de l’Opposante et/ou les Marques Nominales de l’Opposante. Étant donné qu’aucun des contrats n’exige expressément que ces marques soient employées, les marchandises ou services auraient aussi très bien pu être offerts en liaison avec n’importe lequel des autres droits prévus dans la licence (p. ex. les droits concernant l’utilisation des noms, des images et des portraits des joueurs ou l’utilisation des logos et des couleurs de l’équipe) et les paiements de redevance auraient tout de même été dus.

 

(g)      . . . ces contrats de licence [ceux de l’opposante] n’équivalent pas, en soi, à un emploi des Marques de l’Opposante, des Nouvelles Marques de l’Opposante et/ou des Marques Nominales de l’Opposante en liaison avec les services de concession de licences. Pour que l’on puisse considérer qu’il s’agit d’un emploi de la marque de commerce en liaison avec les services, la preuve doit démontrer que la marque de commerce « est employée ou montrée dans l’exécution ou l’annonce de ces services ». Une marque n’est pas considérée comme employée, au sens de l’article 4(2) de la Loi, en liaison avec des services de concession de licences du simple fait que la Marque fait elle-même l’objet d’une licence. Pour qu’une marque soit ainsi considérée, elle doit être employée dans l’exécution ou l’annonce de ces services. Les contrats de licence eux-mêmes n’ont aucune valeur probante en ce qui concerne le caractère distinctif acquis par les Marques de l’Opposante, les Marques Nominales de l’Opposante ou les Nouvelles Marques de l’Opposante en liaison avec ces services.

 

[23]      Je souscris également, pour l’essentiel, aux commentaires généraux que la requérante a formulés au paragraphe 31 de son plaidoyer écrit relativement à la preuve de M. Laird :

 

[TRADUCTION]
31.     . . . certains des points importants qu’il convient de mentionner concernant la preuve de M. Laird comprennent les suivants :

 

(a) L’affidavit de M. Laird fournit très peu d’éléments de preuve concernant un quelconque emploi réel des Marques de l’Opposante, des marques de commerce (actuellement) déposées CFLPA PRO PLAYERS LOGO et AJLCF PRO PLAYERS LOGO, ou des marques de commerce CFLPA PRO PLAYERS et AJLCF PRO PLAYERS (les « Marques Nominales de l’Opposante »), au sens de l’article 4(2) de la Loi en liaison avec des services, et pratiquement aucune preuve de l’emploi des Marques de l’Opposante ou des Marques Nominales de l’Opposante en liaison avec des marchandises au sens de l’article 4(1) de la Loi (à l’exception d’un certain emploi de la marque nominale et du nom commercial CFLPA PRO PLAYERS LOGO et CFLPA PRO PLAYERS de l’Opposante en liaison avec des bulletins d’information qui ont été distribués uniquement aux joueurs de football professionnels de la Ligue canadienne de football (les « Joueurs »).

 

(b) M. Laird affirme dans son affidavit qu’en 2008, l’Opposante a adopté et commencé à employer un logo PRO PLAYERS différent comprenant un dessin de ballon de football (reproduit ci-dessous) et à faire connaître auprès des joueurs de la LCF et du grand public en liaison avec les mots « PRO PLAYERS » (les Nouvelles Marques de l’Opposante). Il n’y a que très peu d’éléments de preuve concernant un quelconque emploi réel des Nouvelles Marques de l’Opposante au sens de l’article 4(2) de la Loi en liaison avec des services, et pratiquement aucune preuve de l’emploi des Nouvelles Marques de l’Opposante en liaison avec des marchandises au sens de l’article 4(1) de la Loi (à l’exception d’un certain emploi des Nouvelles Marques de l’Opposante en liaison avec des bulletins d’information qui ont été distribués uniquement aux joueurs membres de l’organisation de l’Opposante).


 

(c) Dans son affidavit, M. Laird ne témoigne d’aucun cas de confusion entre les Marques de l’Opposante ou les Nouvelles Marques de l’Opposante et la Marque de la Requérante.

 

(d) Il ressort clairement de l’affidavit de M. Laird que l’Opposante a commencé à employer ses nouvelles marques, le logo PRO PLAYERS comprenant un dessin de ballon de football et PRO PLAYERS, en 2008. Compte tenu de cet aveu et de la preuve dont la Commission est saisie, y compris l’absence d’une preuve établissant l’emploi des Marques de l’Opposante, CFLPA PRO PLAYERS LOGO et AJLCF PRO PLAYERS LOGO, à partir de 2009 (et de la preuve très limitée, voire inexistante, concernant l’emploi réel avant 2009), il semble évident que l’Opposante a abandonné ces marques depuis au moins 2008. En effet, l’enregistrement LMC659,743 de la marque CFLPA PRO PLAYERS LOGO et l’enregistrement LMC660,479 de la marque AJLCF PRO PLAYERS LOGO font actuellement l’objet de procédures en vertu de l’article 45 engagées par la Requérante en 2010. Si la Requérante obtient gain de cause, les enregistrements des Marques de l’Opposante sont susceptibles d’être radiés pour défaut d’emploi ou d’être modifiés de manière à supprimer une partie ou l’ensemble des marchandises ou services énumérés dans lesdits enregistrements.

 

(e) Sur l’ensemble des contrats de licence, dont le nombre s'élève à plus de trente, joints à l’affidavit de M. Laird, seuls les contrats joints comme pièce « J » concernent des articles vestimentaires, le reste des contrats visant des marchandises sont des licences se rapportant aux droits de la personnalité qui ne concernent la concession de licences d’emploi de marques de commerce que de façon secondaire, et il n’y a aucun élément de preuve confirmant que les marchandises sous licence ont été offertes en liaison l’une quelconque des marques de commerce de l’Opposante. Les produits sous licence auxquels ces contrats de licence se rapportent vont de pair avec les licences liées aux droits de la personnalité, nommément les cartes de joueurs, les figurines à tête branlante, les calendriers, les cartes de crédit prépayées, les jeux de société stratégiques inspirés du football, les photographies prises dans le vestiaire des joueurs et les photographies des joueurs de football.

 

[24]      Comme je l’ai mentionné précédemment (voir la para. 7, ci-dessus), la procédure en vertu de l’article 45 à laquelle la requérante fait référence à l’alinéa 31(f) de son plaidoyer écrit s’est soldé par la suppression de l’ensemble des marchandises et de certains des services énumérés dans les enregistrements de l’opposante.

Kyle Runzer

[25]      La preuve par affidavit de M. Runzer est résumée au paragraphe 10 du plaidoyer écrit de l’opposante, comme suit :

[TRADUCTION]
   Au moment où il a souscrit son affidavit, M. Runzer était étudiant en droit […]. Son affidavit s’accompagne de nombreuses pièces. Les pièces A à C comprennent des copies de pages extraites de sites Web appartenant à l’Opposante. Les pièces D à L contiennent de l’information sur le site Web d’archives Internet connu sous le nom « Wayback Machine » [machine à remonter le temps] et des copies de pages des sites Web de l’Opposante dans leur version de novembre 2004 et de juin 2006. Les pièces M et N contiennent de l’information sur les noms de domaine « cflpa.com » et « proplayers.ca » appartenant à l’Opposante.

 

[26]      Je souscris aux observations que la requérante a formulées aux pages 15 à 17 de son plaidoyer écrit en ce qui concerne la preuve de M. Runzer, et selon lesquelles (i) les services de l’opposante liés à ses marques CFLPA PRO PLAYERS et PRO PLAYERS sont offerts par des joueurs de football professionnels ou sont destinés ou liés à des joueurs de football professionnels (ii) à la date à laquelle M. Runzer a souscrit son affidavit, soit le 21 décembre 2010, les marques déposées de l’opposante ne semblaient faire l’objet d’aucun emploi.

 

Preuve de la requérante

Lester Blum

[27]      M. Blum atteste qu’il est le vice-président de la compagnie de la requérante, PEI Licensing, laquelle est une filiale en propriété exclusive de Perry Ellis International (« Perry Ellis » ou « la Compagnie »). Perry Ellis est un fabricant de vêtements pour hommes et femmes qui occupe une position de chef de file aux États-Unis et à l’échelle internationale. PEI Licensing est propriétaire des marques de commerce canadiennes et américaines de la Compagnie et concède des licences d’emploi des marques de commerce de la Compagnie au Canada et aux États-Unis. La requérante, PEI Licensing, exerce un contrôle sur les caractéristiques et la qualité des marchandises qui sont fabriquées et vendues sous licence par des tiers et arborent les marques de la Compagnie. Au Canada, les produits Perry Ellis sont distribués, entre autres, par La Baie, Sears, Winners et Costco.

 

[28]      Il ne m'apparaît pas utile d'examiner la preuve de Blum plus en détail. Il en est ainsi, parce que la preuve de M. Blum concernant l’emploi des marques de la requérante au Canada est constituée d’affirmations de nature générales et est trop vague pour permettre d’établir quoi que ce soit au-delà d’un emploi minimal des marques de la requérante au Canada. À cet égard, j’estime que la critique que l’opposante a formulée relativement à la preuve de M. Blum aux paragraphes 13 à 21 de son plaidoyer écrit, lesquels sont reproduits en partie ci-dessous, est, pour l’essentiel, juste :

 

[TRADUCTION]
13.     […] L’affidavit de M. Blum contient un certain nombre d’affirmations selon lesquelles une licence d’emploi de la Marque de commerce a été concédée à CBK et Knothe Apparel Group relativement à certaines marchandises, et pour la vente de ces marchandises au Canada. L’affidavit de M. Blum ne contient […] aucun élément de preuve se rapportant à des ventes des marchandises de la licenciée au Canada ou indiquant si la Marque de commerce [PRO PLAYER] était apposée sur les marchandises qui auraient été vendues au Canada.

 

14.     Aux paragraphes 3 à 7 de son affidavit, M. Blum fournit des renseignements généraux sur l’entreprise de la Requérante, mais aucun de ces renseignements ne se rapporte à l’emploi de la Marque de commerce au Canada.

 

15.     Aux paragraphes 8 à 11 de son affidavit, M. Blum fournit de l’information sur les activités commerciales de la Requérante dans le monde, y compris au Canada, et sur ses activités de concession de licences à des tiers pour la fabrication de vêtements vendus partout dans le monde […]

 

16.     Aux paragraphes 12 à 15 de son affidavit, M. Blum fait état des revenus et des activités publicitaires de la Requérante, mais ne fournit aucun élément de preuve quant aux revenus générés par la Requérante au Canada et aucun élément de preuve indiquant si la Requérante a annoncé ses marchandises au Canada, si tant est qu’elle l’ait fait, et encore moins si les marchandises arboraient la Marque de commerce.

 

17.     Aux paragraphes 16 à 22 de son affidavit, M. Blum fournit des renseignements généraux sur l’historique de l’emploi par la Requérante de la marque de commerce PRO PLAYER, mais aucun de ces renseignements ne se rapporte à l’emploi de cette marque au Canada.

 

18.     Aux paragraphes 23 à 41 de son affidavit, M. Blum allègue l’emploi et la concession de licences d’emploi de la marque PRO PLAYER à divers tiers qui, affirme-t-il, ont employé la marque au Canada. Or, en examinant ces affirmations et les pièces correspondantes, on constate qu’il n’y a aucune preuve de l’emploi de la marque PRO PLAYER au Canada, ni par la Requérante ni par ses prétendues licenciées.

                                              . . . . .

 

20.     Comme pièces « 2 », « 3 » et « 4 » de son affidavit, M. Blum a fourni des exemples de catalogues de vêtements de Sam's Club préparés par Knights Apparel, une licenciée de la Requérante. Tous les exemples de vêtements compris dans ces pièces concernent des universités américaines; il n’y a aucun exemple de telles marchandises se rapportant à des universités canadiennes […]

 

21.     La pièce « 5 » de l’affidavit de M. Blum contient des pages du site Web de la Requérante se trouvant à l’adresse www.proplaver.com […] aucun élément de preuve n’est fourni quant à savoir si des personnes se trouvant au Canada ont visité ce site Web ni si une quelconque marchandise arborant la Marque de commerce a été vendue à une quelconque personne au Canada […] . . .

 

Mark Faasen

[29]      M. Faassen atteste qu’il est stagiaire en droit au sein du cabinet représentant la requérante. Son affidavit vise à présenter en preuve, par la voie de diverses pièces, des documents téléchargés à partir d’Internet. Ces pièces comprennent (i) des copies d’articles publiés originalement aux États-Unis relatant l’historique de la marque PRO PLAYER de la requérante et (ii) des listes de ventes aux enchères extraites de ebay.com se rapportant à divers articles vestimentaires arborant la marque reproduite ci-dessous.


[30]      La marque de requérante, reproduite ci-dessus, a été enregistrée au Canada en 1992 (sous le no LMC404,013), puis radiée en 2010 consécutivement au défaut de la requérante de produire une preuve dans le cadre d’une procédure en vertu de l’article 45 engagée en juin 2009 : voir le para. 32, ci-dessous.

 

[31]      Dans son plaidoyer écrit, l’opposante soutient que [TRADUCTION] « l’affidavit de M. Faassen ne fournit aucune preuve de l’emploi de la Marque de commerce [PRO PLAYER] au Canada. J’en conviens.

 

Preuve en réponse de l’opposante

Jada Lui

[32]      Mme Lui atteste être une parajuriste employée par le cabinet représentant l’opposante. Son affidavit vise à présenter en preuve, par la voie d’une pièce, l’historique du dossier de l’enregistrement no LMC404,013 de la marque de commerce PRO PLAYER & Dessin mentionnée au para. 30, ci-dessus.

 

Évaluation de la probabilité de confusion – Facteurs énoncés à l’article (6)(5)

[33]      Comme je l’ai mentionné précédemment, la question déterminante à trancher en l’espèce est celle de savoir si la marque PRO PLAYER visée par la demande crée de la confusion avec la marque de PRO PLAYERS de l’opposante.

 

Premier facteur – le caractère distinctif inhérent et acquis

[33]      Les marques des parties possèdent toutes deux un caractère distinctif inhérent relativement faible. En effet, les marques de l’opposante sont hautement suggestives, voire descriptives, des services de l’opposante, qui consistent à offrir les services de joueurs professionnels de la Ligue canadienne de football. Les marques de l’opposante sont des marques faibles et, par conséquent, l’étendue de la protection dont elles bénéficient est limitée. La marque visée par la demande est relativement laudative à l’égard des marchandises de la requérante, car PRO PLAYER évoque des marchandises d’une qualité de niveau professionnel destinées aux athlètes professionnels. J’estime que ni l’une ni l’autre des parties n’a démontré que ses marques ont acquis un caractère distinctif significatif au Canada; de même, l’opposante n’a pas davantage démontré que ses noms commerciaux ont acquis un caractère distinctif significatif. Par conséquent, j’estime que le premier facteur énoncé à l’article 6(5), qui concerne à la fois le caractère distinctif inhérent et le caractère distinctif acquis, ne favorise aucune des parties.

 

Deuxième facteur – la période pendant laquelle chaque marque été en usage

[34]      Il appert que l’opposante a employé ses marques et ses marques nominales déposées de 2004 à environ 2008, date à laquelle elle a commencé à employer sa nouvelle marque PRO PLAYERS & Dessin. La preuve produite n’est pas suffisante pour établir que l’une quelconque des marques de l’opposante a été employée pendant une période significative en liaison avec des marchandises plutôt qu’avec des services de concession de licence. De même, la preuve au dossier n’est pas suffisante pour établir que la marque visée par la demande a été employée pendant une période significative. Par conséquent, le deuxième facteur énoncé à l’article 6(5) ne favorise pas l’opposante dans une mesure significative, car la marque visée par la demande est destinée à un emploi en liaison avec des marchandises et non avec des services de concession de licences semblables aux services de l’opposante.

 

Troisième et quatrième facteurs – le genre de marchandises, services ou entreprises, et la nature du commerce

[35]      J’ai déjà conclu que l’opposante n’a pas établi l’emploi de ses marques en liaison avec des marchandises. Je souscris également, pour l’essentiel, aux observations que la requérante a formulées aux paragraphes 128 à 130 de son plaidoyer écrit relativement aux services et aux commerces des parties :

[TRADUCTION]
128.        Les services de l’Opposante semblent également être offerts aux athlètes professionnels de la Ligue canadienne de football, à la Ligue canadienne de football et à des entreprises désireuses d’utiliser sous licence les services, les noms, les surnoms, les photographies, les dessins, les portraits, les images, les représentations visuelles et les signatures d’athlètes professionnels de la Ligue canadienne de football et d’employer sous licence le nom, les marques de commerce et les logos du requérant. Les services de l’Opposante ne sont pas offerts par les mêmes circuits de vente au détail que ceux qu’emprunteraient les marchandises de la Requérante, à savoir les grands magasins et autres points de vente du même genre; les services de l’Opposante sont offerts par des voies de commercialisation totalement différentes.

 

129.        S’agissant du recoupement (éventuel) des voies de commercialisation des marchandises visées par la demande de la Requérante et des marchandises visées par les enregistrements de l’Opposante, bien qu’il soit concevable (théoriquement) que les marchandises (présentement) visées par les enregistrements de l’Opposante puissent être vendues dans de grands magasins, il n’y a aucune preuve que l’une quelconque des marchandises visées par les enregistrements de l’Opposante (ou mentionnées dans la preuve de l’Opposante) a déjà été vendue ou offerte en vente en liaison avec l’une quelconque des marques de l’Opposante, et encore moins vendue ou offerte en vente dans des grands magasins ni même, d’ailleurs, dans des magasins de détail.

 

130.        Quant aux marchandises de l’Opposante qui pourraient en théorie être vendues dans des circuits de vente au détail, il convient de souligner également que les principaux signes distinctifs identifiant ces marchandises (y compris les maillots arborant un nom et un logo) semblent être les logos et les couleurs des équipes des clubs membres de la LCF, le nom et le numéro des joueurs membres de l’organisation de l’Opposante et, en dernier lieu, si tant est que ce soit le cas, une référence à la CFLPA.

 

Par conséquent, les troisième et quatrième facteurs énoncés à l’article 6(5) favorisent la requérante.

 

Cinquième facteur – le degré de ressemblance

[36]      Je considère qu’il existe une forte ressemblance entre les marques des parties à tous égards, c’est-à-dire dans la présentation, dans le son et dans les idées suggérées, car la marque PRO PLAYER visée par la demande est presque identique soit à la partie dominante (soit à une partie dominante) des marques (ou des noms commerciaux) de l’opposante, c’est-à-dire le terme PRO PLAYERS.

 

Jurisprudence

[37]      En ce qui concerne les marques « faibles », je me suis inspiré de la jurisprudence en général et, plus particulièrement, de l’approche de la Cour à l’égard des marques qui sont faibles parce qu’elles sont descriptives, tel qu’exposé dans la décision encore non publiée rendue dans Handi-Foil Corporation c. Sunbeam Products Inc. 2014 COMC 35 :

 

[TRADUCTION]
[38]        Dans Coventry Inc. c. Abrahamian (1984), 1 CPR (3d) 238 (CF 1re inst.), l’opposante fondait son opposition à l’enregistrement de la marque ZAREH employée en liaison avec des bijoux faits sur mesure (de vrais bijoux) sur sa marque SARAH employée en liaison avec des bijoux de fantaisie. La marque de l’opposante n’était pas intrinsèquement forte et n’avait pas acquis un caractère distinctif significatif par l’emploi, la publicité ou d’autres moyens :

 

à la p. 240

« La marque de commerce SARAH est un prénom féminin très répandu dans la chrétienté et, pour cette raison, son caractère distinctif inhérent est faible [voir Bestform Foundations Inc. c. Exquisite Form Brassiere (Canada) Ltd. (1972), 34 CPR (2d) 163]. De telles marques sont considérées comme intrinsèquement faibles et ne peuvent bénéficier d’une protection étendue. [voir American Cyanamid Co. c. Record Chemical Co. Inc. (1972), 7 CPR (2d) 1, [1972] CF 1271; et GSW Ltd. c. Great West Steel Industries Ltd. et al. (1975), 22 CPR (2d) 154]. […] Le caractère distinctif d’une marque intrinsèquement faible peut toutefois être accru par un emploi à grande échelle [voir GSW Ltd. c. Great West Steel, précitée]

                             (non souligné dans l’original)

 

 

[39]        La Cour, dans Coventry, a confirmé la conclusion de la Commission selon laquelle les marques ne créaient pas de confusion. Je reconnais que l’affaire Coventry se distingue de la présente espèce en ce que (i) le degré de ressemblance entre les marques en cause était moindre et (ii) les marchandises des parties étaient vendues par des voies de commercialisation différentes.

 

[40]        Les principes établis dans Coventry ont été appliqués dans de nombreuses affaires y compris, à titre d’exemple, dans Boston Pizza International Inc. c. Boston Chicken Inc. (2001), 15 CPR (4th) 345 (CF 1re inst.). Boston Pizza cherchait à faire radier l’enregistrement de la marque de commerce BOSTON CHICKEN, employée en liaison avec des services de traiteurs et de comptoirs de mets à emporter, alléguant la confusion avec sa marque BOSTON PIZZA, employée en liaison avec des services de restaurant et des marchandises comprenant de la pizza. La Cour a conclu que les marques ne créaient pas de confusion. Je reproduis ci-dessous les propos tenus par la Cour, au para. 66, relativement à la portée de la protection qu’il convient d’accorder aux marques descriptives :

 

[66] Je commence par l'alinéa 6(5)a)le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus. Ni la marque de la demanderesse [BOSTON PIZZA], ni celle de la défenderesse [BOSTON CHICKEN] n'est distinctive en soi. J'adopte, à cet égard, les propos du juge Rouleau dans l'affaire Prince Edward Island Mutual Insurance c. Insurance Co. of Prince Edward Island (1999), 86 C.P.R. (3d) 342 (CF 1re inst.), aux paragraphes 32, 33 et 34 :

 

[32] Quant au premier facteur énoncé au paragraphe 6(5) de la Loi, à savoir le caractère distinctif inhérent des marques de commerce en cause, il est bien établi que les marques qui contiennent des termes descriptifs n'ont pas ce caractère distinctif inhérent et que la Cour ne leur accordera qu’une protection minimale. En particulier, les marques de commerce ou les noms commerciaux qui comprennent une référence à un lieu géographique comme les noms en cause dans la présente affaire, sont descriptifs plutôt que distinctifs et ne doivent pas bénéficier d'une protection très étendue. Lorsque le tribunal est appelé à déterminer la « probabilité de confusion » à l’égard d’une marque ou d’un nom descriptif, même de légères différences entre ces marques seront suffisantes pour atténuer la « probabilité de confusion ».

 

[33] En outre, lorsqu'une partie adopte une appellation descriptive, elle doit accepter qu’une certaine confusion puisse survenir. Dans l'arrêt Walt Disney Productions c. Fantasyland Hotel Inc. (1994), 56 C.P.R. (3d) 129 (CBR Alb.); conf. (1996) 67 C.P.R. (3d) 444 (CA Alb.); le tribunal a formulé, à cet égard, les observations suivantes, à la page 183 :

 

« Même lorsque les services sont identiques, si le nom commercial est descriptif plutôt que distinctif, une certaine confusion peut s’avérer inévitable sans sanction [...] Office Cleaning Services Ltd. c.Westminster Window and Sign General Cleaners Ltd., précitée. Dans cette dernière affaire, le juge Simonds a déclaré ce qui suit, à la page 41 :

 

"Du moment que deux commerçants utilisent des mots descriptifs dans leur nom commercial respectif, il est possible que cela entraîne de la confusion chez certaines personnes, quels que soient les mots différents qui les distinguent... En fin de compte, je crois qu'il s'agit tout simplement de ceci : lorsqu’un commerçant décide d’inclure des mots d’usage courant dans un nom commercial, un certain risque de confusion est inévitable. Mais, ce risque demeure acceptable, excepté si le premier utilisateur est autorisé injustement à monopoliser l’usage de ces mots. Le tribunal acceptera des différences relativement légères comme suffisantes pour prévenir la confusion. Il faut s'attendre à ce qu’une plus grande capacité de discernement soit nécessaire de la part du public lorsqu'un nom commercial est formé en tout ou en partie de termes qui décrivent les articles vendus ou les services offerts." »

                                    (non souligné dans l’original)

 

Bien entendu, les principes qui s’appliquent aux noms commerciaux s’appliquent également aux marques de commerce.    

 

[41]        Dans Drexel Heritage Furnishings Inc. c. Hoo Cheung Industries Limited, 1998 CanLII 18462 (CA COMC), à la page 4, l’ancien président de la Commission, M. Partington, a appliqué les principes établis dans Coventry, précitée :

 


S’agissant du caractère distinctif inhérent des marques de commerce en cause, la marque de commerce HERITAGE CEILING FANS & Dessin de la requérante qui est associée à des « ventilateurs de plafond » et la marque de commerce déposée HERITAGE de l’opposante qui est employée en liaison avec du « mobilier de séjour, de chambre à coucher et de salle à manger, des tables et des chaises d’appoint pour la maison, le bureau et les aires publiques » sont toutes deux intrinsèquement faibles. Comme l’a souligné le registraire des marques de commerce de l’époque dans Drexel Enterprises Division, U.S. Plywood-Champion Papers Inc. c. National Homes Ltd., 21 C.P.R. (2d) 149, à la p. 152, le mot « Heritage » [patrimoine] est généralement interprété comme désignant une chose de valeur issue du passé et lorsqu’il est employé en liaison avec des marchandises telles que du mobilier, ce mot évoque des meubles qui reprennent ou incorporent des éléments de conception appartenant à des styles autrefois en vogue. De la même manière, la marque de la requérante suggère que ses ventilateurs de plafond sont inspirés de styles issus du passé. Par conséquent, les marques en cause sont des marques faibles et, en l’absence d’une preuve significative indiquant qu’elles ont acquis un caractère distinctif, elles ne peuvent bénéficier que d’une protection limitée.

                                                (non souligné dans l’original)

 

[42]        Au final, l’opposition a été rejetée. Je reconnais que, à la différence de la présente espèce, le président de la Commission, M. Partington, « prévoyait qu’il n’y aurait aucun recoupement entre les voies de commercialisation » des marchandises des parties.

 

[43]        Je m’appuie également sur les observations incidentes de la Cour dans S. C. Johnson & Son, Ltd. et al. c. Marketing International Ltd. 44 CPR (2d) (1979) 16 (CSC), qui concernait une action en contrefaçon. L’action avait été intentée par S. C. Johnson, la propriétaire de la marque OFF!, employée en liaison avec un insectifuge à usage personnel, contre Marketing International qui employait la marque BUGG OFF en liaison avec un chiffon insectifuge. L’action en contrefaçon a été rejetée. Entre autres choses, la Cour a conclu (à la page 26) que « personne ne pouvait se voir accorder un droit de propriété exclusif à l’égard du mot "off" employé en liaison avec un insectifuge » parce que (tel qu’indiqué à la page 25) la marque (OFF!) était descriptive de l’effet ou de l’utilité des marchandises. De la même manière, en l’espèce, la marque COOK-N-CARRY est descriptive de l’utilité des marchandises de l’opposante et ne peut, par conséquent, bénéficier que d’une protection limitée.

 

conclusion

[38]      En l’espèce, compte tenu du fait, en particulier, que l’opposante n’a pas établi que ses marques ou ses noms commerciaux ont acquis un caractère distinctif significatif au Canada, que la notoriété des marques et des noms commerciaux de l’opposante est limitée à un cercle restreint d’entrepreneurs et de joueurs de football professionnels, qu’aucun lien n’a été établi entre les marchandises de la requérante et les services de l’opposante, et, à la lumière de la jurisprudence concernant l’accaparement par des commerçants de mots descriptifs des marchandises à vendre et/ou des services à exécuter, j’estime que, à aucune des dates pertinentes, la marque PRO PLAYER visée par la demande ne créait ou ne crée de confusion avec l’une quelconque des marques de commerce ou l’un quelconque des noms commerciaux de l’opposante. En conséquence, l’opposition est rejetée.

 

 

DEMANDE N1,344,156 – P2 BY PRO PLAYER & Dessin

[39]      La demande d’enregistrement et l’historique du dossier concernant la marque P2 BY PRO PLAYER & Dessin, reproduite ci-dessous, sont en tous points parallèles à la demande d’enregistrement et à l’historique du dossier de la marque PRO PLAYER, examinée ci-dessus.

 


[40]      Les questions, la preuve et les dates pertinentes relatives à l’opposition concernant la marque P2 BY PRO PLAYER & Dessin sont pratiquement les mêmes que dans l’opposition concernant la marque PRO PLAYER, à la différence notable cependant que la ressemblance entre la marque P2 BY PRO PLAYER & Dessin et les marques et noms commerciaux de l’opposante est nettement moins marquée en ce que la partie dominante de la marque visée par la demande est, dans ce cas-ci, l’élément stylisé P2. Par conséquent, j’estime que, à aucune des dates pertinentes, la marque P2 BY PRO PLAYER & Dessin visée par la demande ne créait ou ne crée de confusion avec l’une quelconque des marques de commerce ou l’un quelconque des noms commerciaux de l’opposante.

 

DÉCISION

[41]      Les oppositions à l’enregistrement des marques PRO PLAYER et P2 BY PRO PLAYER & Dessin sont rejetées. Les présentes décisions sont rendues dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués par le registraire des marques de commerce en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi sur les marques de commerce.

 

 

__________________

Myer Herzig, membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme
Judith Lemire, trad.

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