Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2011 COMC 26

Date de la décision : 2011-02-15

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION produite par D & S Meat Products Ltd. à l’encontre de la demande d’enregistrement no 1311504 pour la marque de commerce PEAMEAL BACON BACON au nom de Peameal Bacon of Canada Ltd.

[1]               Le 2 août 2006, The Meat Factory Limited (la Requérante initiale) a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce PEAMEAL BACON BACON (la Marque); la demande est fondée sur l’emploi projeté du mot « bacon ». Le droit à l’usage exclusif des mots PEAMEAL BACON et BACON en dehors de la Marque a fait l’objet d’un désistement.

[2]               La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans l’édition du Journal des marques de commerce du 28 février 2007.

[3]               Le 12 avril 2007, D & S Meat Products Ltd. (l’Opposante) a produit une déclaration d’opposition. Le 11 mai 2007, l’Opposante a produit une déclaration d’opposition modifiée. Le 28 mai 2007, elle a produit une nouvelle déclaration d’opposition modifiée.

[4]               Le 18 juin 2007, la Requérante initiale a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle elle nie les allégations de l’Opposante. Elle a concurremment demandé la radiation de la déclaration d’opposition, alléguant que les motifs d’opposition ne sont ni valables ni régulièrement invoqués. Par lettre en date du 4 juillet 2007, le registraire des marques de commerce a refusé de radier la déclaration d’opposition. 

[5]               Le 25 octobre 2007, la Requérante initiale a sollicité l’enregistrement d’une cession en faveur de la société Peameal Bacon of Canada Ltd. Donnant suite à la demande, la Section des cessions et renouvellement de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada a inscrit Peameal Bacon of Canada Ltd. à titre de propriétaire de la demande le 21 novembre 2007. Le terme « Requérante » sera utilisé ci-après pour désigner collectivement Peameal Bacon of Canada Ltd. et The Meat Factory Limited.

[6]               Le 21 décembre 2007, l’Opposante a produit une fois de plus une nouvelle déclaration modifiée. Je confirme que par lettre du 27 février 2008, elle a obtenu l’autorisation de modifier sa déclaration d’opposition.

[7]               En janvier et février 2008, l’Opposante a produit, au soutien de son opposition, des affidavits souscrits par les quatre personnes suivantes : Peter Daly (directeur des ventes de l’Opposante); Sasha Milanovic (vice‑président de l’Opposante); Dan Milanovic (président de l’Opposante); Robert Trought (gestionnaire de Ivanhoe Cheese Inc.).

[8]               Le 3 avril 2008, la Requérante a modifié sa demande pour restreindre les marchandises à « bacon enrobé, nommément longe de porc fumée roulée dans de la semoule de maïs ».

[9]               En août 2008, la Requérante a produit, au soutien de sa demande, un affidavit de Carla Edwards (secrétaire au service de l’agent de la Requérante). L’Opposante a obtenu une ordonnance lui permettant de contre‑interroger Mme Edwards sur son affidavit, et elle a produit une transcription de ce contre‑interrogatoire.

[10]           En réponse, l’Opposante a produit un deuxième affidavit de Peter Daly.

[11]           La Requérante a obtenu une ordonnance pour le contre‑interrogatoire de M. Daly et a produit une transcription du contre‑interrogatoire tenu ainsi qu’une réponse à un engagement donné pendant le contre‑interrogatoire.

[12]           Les deux parties ont produit un plaidoyer écrit. Par lettre en date du 8 mars 2010, la Requérante a fait objection au plaidoyer écrit de l’Opposante, alléguant qu’il n’était rien de plus qu’une reformulation des différents motifs d’opposition et que l’Opposante tentait de présenter de nouvelles preuves par cet acte de procédure. La Requérante a demandé que le plaidoyer écrit de l’Opposante [traduction] « soit totalement laissé de côté ou, à tout le moins, qu’il ne soit tenu aucun compte de toute mention d’éléments de preuve additionnels ». Je confirme que je ferai abstraction de toute mention d’éléments qui n’ont pas été régulièrement introduits dans le cadre de la présente procédure.

[13]           Les parties n’ont pas demandé la tenue d’une audience.

Le fardeau de preuve

[14]           Le fardeau d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande satisfait aux exigences de la Loi incombe à la Requérante. Toutefois, l’Opposante a le fardeau initial de produire une preuve suffisante pour établir la véracité des faits sur lesquels elle appuie chacun de ses motifs d’opposition [voir John Labatt Limitée c. Les Compagnies Molson Limitée (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.), à la page 298].

Les motifs d’opposition

[15]           L’Opposante a soulevé les motifs d’opposition suivants prévus à la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T‑13 (la Loi) :

1)      alinéa 30i) – la Requérante initiale savait, lorsqu’elle a produit sa demande, qu’elle n’avait pas droit à l’enregistrement, compte tenu des faits exposés dans la déclaration d’opposition; de plus, la clause de désistement a été incluse de mauvaise foi;

2)      alinéa 30e) – la Requérante initiale [traduction] « n’avait pas l’intention d’employer la Marque, elle-même ou par l’entremise d’un licencié, ni elle‑même et par l’entremise d’un licencié »;

3)      alinéa 12(1)e) / article 10 – la Marque est interdite en vertu de l’article 10, parce que les mots PEAMEAL BACON BACON sont devenus reconnus au Canada, en raison d’une pratique commerciale ordinaire, comme désignant le genre ou la qualité d’un produit carné;

4)      alinéa 12(1)b) – la Marque n’est pas enregistrable parce qu’elle donne à la fois une description claire et une description fausse et trompeuse – PEAMEAL et BACON sont des mots du dictionnaire utilisés dans le commerce pour décrire le produit – BACON est le nom du produit – PEAMEAL est un mot employé pour décrire du BACON préparé d’une certaine façon et enrobé de pois [« peameal »] – le produit de la Requérante ne consiste pas en des pois ni n’en contient;

5)      alinéa 12(1)c);

6)      article 16 – la Requérante n’est pas la personne qui a droit à l’enregistrement de la Marque, parce que [traduction] « la marque en cause était déjà employée par des tiers au Canada depuis plusieurs années au moment la production de la demande » (bien que l’Opposante ait fait référence au paragraphe 16(1), la Requérante a reconnu dans son plaidoyer écrit que le paragraphe 16(3) aurait dû être invoqué au soutien de ce motif d’opposition et elle y a répondu en conséquence);

7)      article 2 – la Marque n’est pas distinctive, car elle ne distingue pas véritablement les marchandises de la Requérante de celles d’autres propriétaires au Canada ni n’est adaptée à les distinguer ainsi; en outre, la marque de commerce alléguée n’est pas une marque de commerce au sens de l’article 2.

[16]           J’analyserai de façon plus détaillée seulement trois des motifs d’opposition soulevés.

Le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)b)

[17]           La question de savoir si la Marque donne une description claire ou une description fausse et trompeuse doit être examinée du point de vue de l’acheteur ordinaire des marchandises liées à la Marque. En outre, il ne faut pas décomposer les éléments constitutifs de la Marque et les analyser minutieusement, mais bien examiner la Marque dans son ensemble, en fonction de la première impression [voir Wool Bureau of Canada Ltd. c. Registraire des marques de commerce, 40 C.P.R. (2d) 25, aux pages 27 et 28 (C.F. 1re inst.); Atlantic Promotions Inc. c. Registraire des marques de commerce, 2 C.P.R. (3d) 183, à la page 186 (C.F. 1re inst.)]. Le mot « nature » s’entend d’une particularité, d’un trait ou d’une caractéristique du produit, et le mot « claire » signifie « facile à comprendre, évident ou simple » [voir Drackett Co. of Canada Ltd. c. American Home Products Corp. (1968), 55 C.P.R. 29, à la page 34 (C. de l’É.)].

[18]           La date pertinente pour l’examen d’un motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)b) est celle de la production de la demande [voir Shell Canada Limited c. P.T. Sari Incofood Corporation (2005), 41 C.P.R. (4th) 250 (C.F.); Fiesta Barbeques Limited c. General Housewares Corporation (2003), 28 C.P.R. (4th) 60 (C.F.)].

[19]           Le dictionnaire Oxford Canadian Dictionary (Second Edition) définit ainsi le terme « peameal bacon » [bacon enrobé de pois] : [traduction] « n. can. Bacon de dos roulé dans un enrobage de fine semoule de maïs. » Il n’offre pas de définition pour « peameal », mais il définit comme suit le terme « back bacon » [bacon de dos] : [traduction] « n. can. et brit. bacon rond et maigre provenant de la noix d’une longe de porc » et le mot « bacon » : [traduction] « n.  viande salaisonnée du dos ou du flanc d’un porc ». L’acception courante, tirée du dictionnaire, des mots constituant la marque visée par la demande suffit pour satisfaire au fardeau initial de l’Opposante à l’égard du motif fondé sur l’alinéa 12(1)b) [voir Flowers Canada/Fleurs Canada Inc. c. Maple Ridge Florist Ltd. (1998), 86 C.P.R. (3d) 110 (C.O.M.C.)].

[20]           Monsieur Daly, qui a œuvré dans l’industrie des produits carnés au Canada de 1976 à 2007, a fourni des éléments de preuve additionnels concernant la signification des mots formant la Marque. Dans son premier affidavit, il affirme que le « peameal bacon » [bacon enrobé de pois] n’est pas du « bacon » ni n’est « enrobé de pois ». Il déclare qu’il s’agit de longe de porc saumurée et roulée dans la semoule de maïs, et précise que selon les règlements sur les aliments au Canada, le seul terme qui peut être employé pour ce type de produit est [traduction] « bacon de dos salé à sec et enrobé de semoule de maïs ». Il ajoute que selon les règlements de l’Agence canadienne d’inspection des aliments, un produit ne peut être désigné comme du « bacon » à moins d’être fumé; or, le « peameal bacon » n’est pas fumé. Monsieur Daly affirme qu’en dépit de ces règlements, le terme « peameal bacon » [bacon enrobé de pois] est [traduction] « employé partout dans les marchés d’alimentation, boucheries, charcuteries et restaurants, tant au sein de l’industrie que dans le grand public, pour désigner un produit qui n’est composé ni de pois ni de bacon ».  

[21]           Monsieur Daly expose aussi l’historique du terme « peameal bacon » [bacon enrobé de pois]. Il semble que le terme ait vu le jour au XIXe siècle; à une époque où la réfrigération n’existait pas, on a découvert que le fait de faire mariner les longes de porc et de les enrober de pois prolongeait suffisamment leur durée de conservation pour qu’elles puissent être expédiées du Canada en Europe. Cette viande est devenue connue sous le nom de « peameal bacon » [bacon enrobé de pois] et apparemment, le nom est resté même si la semoule de maïs a remplacé les pois depuis de nombreuses années.

[22]           Je remarque que la Requérante n’a produit aucun élément de preuve qui contredit les déclarations de M. Daly concernant la nature, la signification ou l’historique du terme « peameal bacon ».

[23]           Monsieur Daly a aussi présenté des pages du site Web de la Requérante initiale (pièce PD 7). On y emploie le terme « peameal bacon » [bacon enrobé de pois] pour décrire un type d’aliments; ainsi peut‑on lire, sur une liste de produits : [traduction] « […] filets de saumon de l’Atlantique dans une sauce au vin blanc citronnée, osso bucco de veau, bacon enrobé de pois », et, dans des suggestions de menus, [traduction] « le bacon enrobé de pois constitue un élément de choix dans la composition d’un dîner […] ». Parallèlement, les pages Web mentionnent Peameal Bacon™, Largest Producer of Peameal Bacon™, Peameal Bacon of Canada Ltd™, etc. Il est bien établi que le seul fait d’ajouter ™ à un terme générique n’a pas pour effet de faire perdre à ce terme son caractère descriptif.

[24]           Carla Edwards, secrétaire au service des agents de la Requérante, a produit une copie imprimée du Règlement de 1990 sur l’inspection des viandes, tirée d’Internet, mais elle n’a attiré mon attention sur aucune disposition particulière de ce document.  

[25]           Je suis d’accord avec la Requérante pour dire que la Marque ne donne pas une description fausse et trompeuse des Marchandises, parce que les consommateurs canadiens de produits de type bacon comprennent que le « peameal bacon » [bacon enrobé de pois] est en réalité de la longe de porc enrobée de semoule de maïs. Je souligne que la preuve de M. Daly étaye cette conclusion; ainsi, durant son contre‑interrogatoire, celui‑ci a reconnu que, d’après son expérience, on considère que la description « longe de porc salée à sec et enrobée de semoule de maïs » désigne du bacon de type bacon enrobé de pois (voir les questions 99 et 100 du contre‑interrogatoire de M. Daly).

[26]           Par contre, je ne saurais souscrire à la prétention de la Requérante selon laquelle la Marque ne donne pas non plus une description claire de ses marchandises. Du fait que le terme « peameal » désigne un type de bacon, chaque mot constituant la Marque donne une description claire des marchandises visées par la demande. En apercevant les mots PEAMEAL BACON BACON sur un produit carné, le consommateur s’attendrait à ce que cette viande appartienne au type de viande connu au Canada comme étant du « peameal bacon » [bacon enrobé de pois]; aussi la Marque donne‑t‑elle une description claire de la nature des marchandises. (À mon avis, le consommateur ne connaîtrait pas les exigences techniques de l’Agence canadienne d’inspection des aliments ni les autres règlements). Je souligne que la Requérante désigne même ses marchandises, dans son état déclaratif des marchandises actuel, comme étant du [traduction] « bacon de type enrobé de pois ».

[27]           La Requérante soutient que la Marque ne donne pas une description claire parce que PEAMEAL BACON BACON est une construction linguistique inédite qui ne place pas la concurrence légitime en situation désavantageuse par rapport à des termes que chacun devrait pouvoir utiliser. Elle invoque l’affaire Pizza Pizza Ltd. c. Registraire des marques de commerce (1992), 67 C.P.R. (2d) 202 (C.F. 1re inst.) [Pizza Pizza]. Or, la décision Pizza Pizza ne portait pas sur une opposition; il s’agissait d’un appel d’une décision du registraire, fondée sur l’alinéa 12(1)b), de refuser une demande en cours d’examen. De ce fait, le fardeau qui incombait à la requérante dans Pizza Pizza était moins exigeant que celui qui incombe au requérant dans une opposition. Je signale également que dans Pizza Pizza, la requérante utilisait sa marque depuis environ dix ans, alors que dans le cas présent, la Marque de la Requérante n’a pas été employée, et que la Cour, dans Pizza Pizza, a expressément fait état de la preuve démontrant la promotion et l’emploi abondants de la marque visée par la demande. De plus, la requérante dans Pizza Pizza a fourni une preuve d’un expert en linguistique et le résultat d’un sondage téléphonique étayant la conclusion que la marque visée par la demande, PIZZA PIZZA, possédait une identité qui permettait de la distinguer sur le marché.

[28]           En d’autres termes, je ne crois pas que la décision Pizza Pizza permet d’affirmer que le simple fait pour une marque de commerce d’inclure la répétition d’un mot fait en sorte qu’on ne peut conclure que cette marque donne une description claire.

[29]           Je remarque par ailleurs que le juge Joyal, dans 101482 Canada Inc. c. Registraire des marques de commerce (1985), 7 C.P.R. (3d) 289 (C.F. 1re inst.), a donné de la décision Pizza Pizza l’interprétation restrictive suivante :

17       Il y a aussi la cause Pizza Pizza Ltd. (déjà citée). Cette cause, à mon humble opinion, ne traite que marginalement de la prohibition qui se trouve à l'alinéa 12(1)b). Elle se penche plutôt sur le paragraphe 12(2) de la Loi qui se lit comme suit :

 

12. (2) Une marque de commerce qui n’est pas enregistrable en raison de l’alinéa (1)a) ou b) peut être enregistrée si elle a été employée au Canada par le requérant ou son prédécesseur en titre de façon à être devenue distinctive à la date de la production d’une demande d’enregistrement la concernant.

18        Il est à remarquer que ce paragraphe ne peut faire exception à la règle « descriptive » qu’en autant qu’une marque quelconque soit devenue distinctive à la date de la production de la demande. Je ne peux trouver au dossier suffisamment de preuve pour permettre que, tout comme dans la cause Pizza Pizza, l’exception prévue au paragraphe 12(2) de la loi soit appliquée. […]

[30]           De la même façon, il n’y a évidemment en l’espèce aucun fondement permettant l’application de l’exception créée par le paragraphe 12(2).

[31]           Pour les motifs qui précèdent, je conclus que la Requérante ne s’est pas acquittée de son fardeau à l’égard de l’allégation selon laquelle la Marque donne une description claire, et il est fait droit en conséquence au motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)b).

Le motif d’opposition fondé sur l’article 2

[32]           Le paragraphe qui traite du moyen d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif n’expose pas en soi avec suffisamment de précision les motifs pour lesquels la Marque n’est pas distinctive. Toutefois, lorsqu’on considère ce paragraphe dans le cadre de l’ensemble de la déclaration d’opposition et concurremment avec la preuve au dossier, il est évident que l’une des raisons pour lesquelles l’Opposante allègue que la Marque n’est pas distinctive est qu’elle donne une description claire [voir Novopharm Ltd. c. Astrazeneca AB (2002), 21 C.P.R. (4th) 289 (C.A.F.)]. Une marque de commerce qui donne une description claire des marchandises auxquelles elle se rapporte n’est pas distinctive, à première vue. Partant, compte tenu de ma conclusion concernant le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)b), je fais droit également au  motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif.  

Le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30e)

[33]           Du fait que la demande contient une déclaration portant que la Requérante a l’intention d’employer la marque de commerce au Canada, elle‑même ou par l’entremise d’un licencié, ou elle‑même et par l’entremise d’un licencié, elle satisfait formellement à l’alinéa 30e). Toutefois, l’opposition fondée sur cette disposition peut néanmoins être accueillie au motif que la Requérante initiale ne s’est pas conformée, sur le fond, à l’alinéa 30e), c’est à dire que la déclaration portant qu’elle avait l’intention d’employer la Marque n’était pas véridique [voir Home Quarters Warehouse, Inc. c. Home Depot, U.S.A., Inc. (1997), 76 C.P.R. (3d) 219 (C.O.M.C.); Jacobs Suchard Ltd. c. Trebor Bassett Ltd. (1996), 69 C.P.R. (3d) 569 (C.O.M.C.)].

[34]           La date pertinente pour l’appréciation du motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30e) est celle de la production de la demande [voir Canadian National Railway Co. c. Schwauss (1991), 35 C.P.R. (3d) 90 (C.O.M.C.), à la page 94]. Le fardeau de preuve initial de la partie opposante est ordinairement moins exigeant en ce qui touche l’inobservation de l’alinéa 30e), parce que les faits étayant l’absence d’intention d’utiliser la marque de commerce au Canada sont connus avant tout du requérant [voir Molson Canada c. Anheuser-Busch Inc. (2003), 29 C.P.R. (4th) 315 (C.F.), à la page 334; Canadian National Railway Co. c. Schwauss, précitée, à la page 95].

[35]           L’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve initial à l’égard de ce motif en produisant une copie de l’accord entre The Meat Factory Limited et Peameal Bacon of Canada Ltd., daté du 17 septembre 2007 (affidavit de M. Daly, pièce PD 8). Ce document porte que The Meat Factory Limited cède tous ses droits, titres et intérêts afférents à la demande d’enregistrement de la Marque. Toutefois, le préambule de cet acte de cession indiquent ce qui suit : les parties sont liées; à compter du 2 août 2006, The Meat Factory Limited a eu l’intention d’employer la Marque au Canada, mais à titre de licenciée de Peameal Bacon of Canada Ltd. plutôt qu’à titre de propriétaire de la marque de commerce; et il y a eu une erreur d’écriture involontaire dans la désignation de la requérante au moment de la production de la demande. Sur la foi de ce document, il appert que la déclaration en vertu de l’alinéa 30e) comprise dans la demande au moment de sa production n’était pas véridique.

[36]           Il existe une procédure par laquelle tout requérant peut demander la correction d’une erreur d’écriture contenue dans une demande [voir le paragraphe 33(1) du Règlement sur les marques de commerce, DORS/96‑195]. Cependant, cette procédure n’a pas été suivie en l’espèce. La Requérante initiale a plutôt cédé la demande comportant l’erreur plus d’un an après sa production. S’il n’y a eu aucune mauvaise foi, il n’en reste pas moins que la demande produite contenait une fausse déclaration, pour l’application de l’alinéa 30e). Si la Requérante avait réussi à substituer Peameal Bacon of Canada Ltd. à titre de Requérante, au lieu de lui céder la demande, peut‑être le motif fondé sur l’alinéa 30e) aurait‑il été rejeté; toutefois, cela n’a pas été fait, et le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30e) est accueilli.

Décision

[37]           Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions du paragraphe 63(3) de la Loi, je repousse la demande en application du paragraphe 38(8) de la Loi.

______________________________

Jill W. Bradbury

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

Traduction certifiée conforme

Linda Brisebois, LL.B.

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