Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

 

Référence : 2011 COMC 195

Date de la décision : 2011-10-31

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45, engagée à la demande de Native One Inc. visant l’enregistrement no LMC624,135 de la marque de commerce DK’S au nom de Grand River Enterprises Six Nations Ltd.

 

[1]               Le 10 mars 2009, à la demande de Native One Inc. (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l’avis prévu à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13 (la Loi), à Grand River Enterprises Six Nations Ltd., propriétaire inscrite (l’Inscrivante) de l’enregistrement no LMC624,135 visant la marque DK’S (la Marque).

[2]               Par suite d’une demande écrite fondée sur l’alinéa 41(1)c) produite le 2 novembre 2010 par l’Inscrivante, l’enregistrement a été modifié par la radiation des marchandises ainsi décrites : « tabac en vrac et tabac à coupe fine », de sorte que la Marque est enregistrée pour emploi en liaison avec les marchandises restantes suivantes :

Produits de tabac, nommément cigarettes.

[3]        L’article 45 de la Loi oblige le propriétaire inscrit de la marque de commerce à indiquer si la marque a été employée au Canada en liaison avec chacun des marchandises et/ou services que spécifie l’enregistrement à un moment quelconque au cours des trois ans précédant la date de l’avis et, dans la négative, la date où elle a été employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour l’établissement de l’emploi se situe entre le 10 mars 2006 et le 10 mars 2009. 

[4]        L’« emploi » en liaison avec des marchandises est défini en ces termes aux paragraphes 4(1) et (3) de la Loi :

4. (1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des marchandises si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces marchandises, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les marchandises mêmes ou sur les colis dans lesquels ces marchandises sont distribuées, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux marchandises à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[]

(3) Une marque de commerce mise au Canada sur des marchandises ou sur les colis qui les contiennent est réputée, quand ces marchandises sont exportées du Canada, être employée dans ce pays en liaison avec ces marchandises.

 

La disposition applicable en l’espèce est le paragraphe 4(1).

[5]        Il est bien établi que l’article 45 de la Loi a pour objet d’énoncer une procédure simple, sommaire et expéditive pour éliminer le « bois mort » du registre. Bien qu’il ne soit pas suffisant de simplement déclarer qu’il y a eu emploi pour prouver celui-ci sous le régime de l’article 45 [Plough (Canada) Ltd. c. Aerosol Fillers Inc. (1979), 45 C.P.R. (2d) 194, confirmé par (1980), 53 C.P.R. (2d) 63 (C.A.F.)], les exigences en matière de preuve d’emploi ne sont pas très élevées [Woods Canada Ltd. c. Lang Michener (1996), 71 C.P.R. (3d) 477 (C.F. 1re inst.)], et il n’est pas nécessaire de produire une surabondance de preuve [Union Electric Supply Co. Ltd. c. Canada (Registraire des marques de commerce) (1982), 63 C.P.R. (2d) 56 (C.F. 1re inst.)]. Il faut toutefois présenter des faits suffisants pour permettre au registraire de conclure que la marque de commerce a été employée au cours de la période pertinente en liaison avec chacune des marchandises ou chacun des services spécifiés dans l’enregistrement.

[6]        En réponse à l’avis du registraire, l’Inscrivante a produit les affidavits de Steve Williams et Lou Lapointe, tous deux accompagnés de pièces. Seule la Partie requérante a produit des observations écrites, mais l’Inscrivante était seule représentée à l’audience.

[7]        Dans le premier affidavit de l’Inscrivante, M. Williams se présente comme le président de l’Inscrivante et déclare avoir occupé ce poste depuis 2002 au moins. Il explique que l’inscrivante fabrique et distribue des cigarettes sous divers noms commerciaux et marques de commerce, dont la Marque. Il indique que la vente et la distribution de ces produits s’effectuent par l’intermédiaire d’un réseau de détaillants indépendants principalement installés dans les réserves autochtones canadiennes. Il fournit des renseignements au sujet des installations de fabrication et de leur capacité de production, ainsi que des données relatives aux nombres de caisses de cigarettes DK’S vendues pendant la période 2002-2008. Ces chiffres de vente sont substantiels; en 2007, par exemple, il s’est vendu 22 900 caisses contenant chacune 50 cartouches.

[8]        Pour montrer de quelle façon la Marque est liée aux marchandises lors de leur transfert, M. Williams a joint à son affidavit la pièce B, renfermant des copies de l’emballage utilisé pour les paquets de 25 cigarettes de l’Inscrivante. La marque de commerce y figure ainsi :

[9]        Enfin, pour faire la preuve de la vente des Marchandises, M. Williams joint la pièce C, constituée d’échantillons de factures pris au hasard, dont quatre constatent des ventes réalisées au Canada au cours de la période pertinente. Parmi ce qui paraît être plusieurs marques de cigarettes, on trouve sur ces factures la description des produits DK 25’S et DK 20’S, complétée par les mots Full Flavour 25’s et Full Flavour Hinge Lids.

[10]      Le deuxième affidavit de l’Inscrivante a été souscrit par M. Lapointe, lequel s’y présente comme le président de Whitehouse Inc., l’entreprise qui imprime les emballages de l’Inscrivante et qui l’a fait pendant la période pertinente. Le déposant a joint à son affidavit les pièces A, B et C, consistant en des copies de ces emballages. Je constate qu’ils ressemblent beaucoup aux emballages formant la pièce B de l’affidavit Williams, notamment par la façon dont la marque de commerce est montrée. La pièce D compte un nombre important de bordereaux de marchandises visant à établir le volume de vente des emballages à l’Inscrivante pendant les années 2002‑2008.

 

[11]      Dans ses observations, la Partie requérante fait principalement valoir que la preuve de l’Inscrivante n’établit pas l’emploi de la Marque telle qu’elle est enregistrée. Elle soutient à cet égard que l’emballage établit l’emploi d’une marque figurative où le dessin de la couronne opère visuellement une séparation entre la lettre « D » et les lettres « K’S ». Elle ajoute que les lettres ne peuvent être détachées facilement des éléments graphiques qui, selon elle, constituent des composantes importantes de la marque figurative dans son ensemble. Elle affirme donc, en invoquant le premier principe énoncé dans Nightingale Interloc Ltd. c. Prodesign Ltd. (1984), 2 C.P.R. (3d) 535, à la page 538 (C.O.M.C.), relativement aux variations, que la première impression du public ne serait pas que les lettres DK’S constituent par elles-mêmes une marque distincte. Elle cite en outre Brouillette Kosie Prince c. Andrés Wines Ltd. (2004), 38 C.P.R. (4th) 424 (C.F. 1re inst.), comme exemple de décision concluant au non‑emploi d’une marque parce que celle‑ci fait partie d’un ensemble graphique plus grand. J’estime toutefois que la présente situation se distingue de cette affaire, du fait que les lettres DK’S dominent visuellement le reste du dessin.

 

[12]      L’Inscrivante, quant à elle, a invoqué à l’audience diverses décisions se rapportant à des marques nominales employées avec des éléments graphiques surajoutés et concluant qu’il s’agit de l’emploi de la marque telle qu’elle a été enregistrée [voir, par exemple, Laura Ashley Limited c. Ashley Furniture Industries, Inc. 2010 COMC 89, et Westcan Greenhouses Ltd. c. Proven Winners North America LLC 2010 COMC 73].  Dans chacune des affaires citées, il a été jugé que l’enregistrement d’une marque nominale n’imposait pas de restriction à son emploi sous une forme particulière. Selon l’Inscrivante, il n’existe pas de différences marquées entre ces affaires et la présente espèce; le même concept peut s’appliquer bien que chaque affaire soit différente. Compte tenu en outre des conventions de lecture, de gauche à droite et de haut en bas, le public ne pourrait tirer qu’une conclusion : à savoir que la Marque est employée sans variation.

 

 

[13]      Je suis en accord avec l’Inscrivante. En l’espèce, les mêmes caractéristiques dominantes – les lettres DK’S – ont été conservées, et j’estime que les différences sont si minimes qu’elles n’induiraient pas en erreur un acheteur non averti [Promafil Canada Ltée c. Munsingwear Inc. (1992), 44 C.P.R. (3d) 59 (C.A.F.); voir aussi le principe 2, à la page 538 de Nightingale Interloc, précité]. Je suis disposée à cet égard à accepter les commentaires de l’Inscrivante et à prendre acte, par l’effet de ma connaissance d’office, qu’en anglais et en français les écrits se lisent habituellement de gauche à droit et de haut en bas. En conclusion, je suis d’avis que la marque de commerce a été employée de manière telle qu’elle n’a pas perdu son identité et qu’elle est demeurée reconnaissable malgré les différences observées entre la forme sous laquelle elle a été enregistrée et la forme sous laquelle elle a été employée [Registraire des marques de commerce c. Compagnie Internationale pour l’informatique CII Honeywell Bull, Société Anonyme (1985), 4 C.P.R. (3d) 523 (C.A.F.)]. 

 

[14]      Ma conclusion que la Marque figurant sur le matériel d’emballage produit comme pièce B de l’affidavit Williams constitue un emploi de la marque déposée rend inutile l’examen des arguments de la Partie requérante portant sur la variation de la Marque figurant sur les factures. D’ailleurs, quelque conclusion qu’on puisse tirer sur cette question, il reste à tout le moins que les factures démontrent clairement que des opérations commerciales intéressant les Marchandises ont eu lieu au Canada pendant la période pertinente.


 

[15]      Pour ces motifs, je conclus que l’emploi de la Marque a été établi pour les marchandises décrites comme « Produits de tabac, nommément cigarettes ». Par conséquent, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, l’enregistrement sera maintenu conformément aux dispositions de l’article 45 de la Loi.

 

 

 

 

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Kathryn Barnett

Agente d’audience

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

Traduction certifiée conforme

Ghislaine Poitras, LL.L., Trad. a.

 

 

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