Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

AFFAIRE CONCERNANT L’OPPOSITION de

Pharmacia AB

à la demande no 1,005,697

produite par Braintree Laboratories, Inc.

en vue de l’enregistrement de la marque de commerce MIRALAX

 

 

Le 17 février 1999, la requérante, Braintree Laboratories, Inc., a produit une demande d’enregistrement de la marque de commerce MIRALAX basée sur l’emploi projeté de la marque de commerce au Canada en liaison avec des laxatifs.  La demande a été annoncée, aux fins de toute opposition éventuelle, dans le Journal des marques de commerce du 12 janvier 2000.



Pharmacia & Upjohn AB a produit une déclaration d’opposition le 13 mars 2000.  La requérante a produit et signifié une contre-déclaration le 21 juillet 2000.  À compter du 28 septembre 2000, la dénomination sociale de Pharmacia & Upjohn AB a été changée et est devenue Pharmacia AB (ci-après l’opposante)



L’opposante a produit les affidavits de Britt-Marie Solström et de Luciana Comishen à l’appui de son opposition.  La requérante a produit l’affidavit de Harry P. Keegan, III à l’appui de sa demande.  En réponse, l’opposante a produit l’affidavit de Suzy Torres.

 

Chaque partie a produit des arguments écrits, mais aucune audition orale n’a été demandée.

 

L’opposante a invoqué quatre motifs d’opposition.  Selon le premier motif d’opposition, la demande d’enregistrement n’est pas conforme à l’alinéa 30e) de la Loi sur les marques de commerce.  Les trois autres motifs sont les suivants :  la marque de commerce n’est pas enregistrable; la requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement; et la marque de commerce n’est pas distinctive.  Ces motifs sont tous fondés sur la prétention que MIRALAX crée de la confusion avec la marque de commerce MICROLAX employée antérieurement, connue et enregistrée par l’opposante en liaison avec des préparations pharmaceutiques, notamment un lavement, et excluant les préparations laxatives orales.  Même si dans une procédure d’opposition le fardeau de la preuve ultime incombe à la requérante, l’opposante a un fardeau de la preuve initial de produire assez d’éléments de preuve pour établir la véracité de ses allégations.

 

Mme Solström, vice-présidente des opérations techniques des soins aux consommateurs de l’opposante, indique que l’opposante fabrique le lavement MICROLAX en Suède et exporte le produit au Canada dans un emballage définitif.  Elle fournit les chiffres relatifs au volume et à la valeur des ventes au Canada pour les années 1998, 1999 et 2000 (plus de 30 000 boites ou 300 000 $ U.S. ex-usine chaque année).  Elle mentionne également les autres pays où l’opposante a employé et enregistré la marque MICROLAX et indique les diverses anciennes dénominations sociales de l’opposante.

 

Mme  Comishen, directrice de la conformité réglementaire et de l’assurance de la qualité de Pharmacia Canada Inc., indique que sa société agit comme distributeur du lavement MICROLAX au Canada.  Elle indique que Pharmacia Canada Inc. s’est appelée auparavant Pharmacia & Upjohn Inc. , Pharmacia Inc. et exerce des activités sous le nom de Pharmacia Canada.  Elle indique également que le produit MICROLAX est « fabriqué dans la ville de Helsingborg en Suède par Pharmacia AB, lequel nom est l’ancienne dénomination sociale de Pharmacia & Upjohn AB, et qui exerce des activités sous le nom commercial de Pharmacia & Upjohn ».

 

Mme Comishen a produit des « tubes et des boites similaires ou identiques à ceux utilisés au cours des dernières années au Canada pour le produit [MICROLAX] ».  (L’affidavit de Mme Comishen a été fait sous serment en 2001.)  Sur les tubes et boites figure bien en vue la marque de commerce MICROLAX suivie du symbole ®.  Le produit lui-même est désigné comme un « microlavement ».

 

Mme Comishen a produit également des « listes de prix distribuées au Canada au cours des dernières années » et des copies de pages du Compendium des produits et spécialités pharmaceutiques pour les années 1990 à 2001 sur lesquelles le produit MICROLAX est mentionné.

 

Mme Comishen a produit les mêmes chiffres relatifs aux ventes que ceux fournis par Mme Solström. Elle explique également que le produit MICROLAX est disponible sans ordonnance et que l’on peut se le procurer dans les pharmacies et dans les hôpitaux.  Elle indique que les clients sont « des hôpitaux, pharmacies, cliniques médicales, centres de santé, établissements de soins prolongés, instituts universitaires et l’Armée du Salut ».

 

M. Keegan, président de la requérante, atteste que le laxatif MIRALAX est vendu aux États-Unis, mais qu’il n’est pas encore vendu au Canada.  Toutefois, le laxatif MIRALAX est destiné à être vendu par ordonnance et annoncé auprès des médecins, des professionnels de la santé et des consommateurs.  M. Keegan a produit des copies d’annonces parues dans des revues médicales américaines, auxquelles, dit-il, des médecins et des professionnels de la santé canadiens sont également abonnés.  Il fournit le nombre d’abonnements canadiens pour chaque publication dans laquelle les annonces de MIRALAX ont été publiées en 2001.

 

M. Keegan indique que le produit MIRALAX est destiné au traitement de la constipation occasionnelle.  Le laxatif MIRALAX est fourni sous forme de poudre granulée blanche que le patient dissout dans un liquide afin de le consommer.  La posologie est de une fois par jour. M. Keegan fait une comparaison entre le produit MICROLAX vendu aux États-Unis et le produit MIRALAX vendu dans ce pays.  Au paragraphe 14, il affirme : « À mon avis, il y a des différences entre les produits en ce qui concerne leurs modes d’emploi et leurs composantes chimiques, lesquelles différences sont assez importantes pour empêcher tout risque de confusion.»  Je n’accorde aucun poids à cette opinion.  Non seulement M. Keegan n’est pas un expert en ce qui concerne le risque de confusion entre les marques de commerce sous le régime du droit canadien, mais également il n’y a rien dans les états des marchandises des parties qui les obligeraient à n’utiliser leurs marques de commerce seulement de la manière ou seulement avec les produits chimiques spécifiques, en liaison avec lesquels ils ont employé leurs marques aux É.-U. jusqu’à ce jour.

 

M. Keegan a produit également une copie d’une poursuite intentée en ce qui concerne l’enregistrement de MICROLAX par l’opposante.  Le dossier indique qu’à la suite d’une opposition produite par le propriétaire de la marque de commerce MAGNOLAX, le propriétaire de la demande d’enregistrement de MICROLAX a restreint son état des marchandises en excluant les préparations laxatives orales.

 

Mme Torres, analyste en matière de marques de commerce et employée de Thomson & Thomson Canada, a produit les résultats d’une recherche menée dans une base de données sur les noms de médicaments en utilisation et sur les données connexes.  Les résultats qu’elle a obtenus concernent l’emploi de MIRALAX aux États-Unis.

 

Motif d’opposition fondé sur l’article 30

Il n’y a aucun élément de preuve qui appuie l’allégation de l’opposante voulant que la requérante « n’avait pas l’intention, au moment du dépôt de la demande et encore aujourd’hui, d’employer la marque de commerce MIRALAX au Canada en liaison avec des laxatifs.»  Par conséquent, ce motif d’opposition est rejeté.

 

Motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d

L’opposante n’a pas produit de copie de l’enregistrement sur lequel elle se fonde.  Par conséquent, j’ai exercé le pouvoir discrétionnaire du registraire et j’ai consulté le registre pour constater et confirmer que l’enregistrement no 156,802 pour MICROLAX est toujours inscrit au registre et qu’il est inscrit au nom de l’opposante.  [Voir Quaker Oats of Canada Ltd./La Compagnie Quaker Oats du Canada Ltée v. Menu Foods Ltd., 11 C.P.R. (3d) 410 (C.O.M.C.)]

 

La date pertinente en ce qui concerne l’alinéa 12(1)d) est la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corporation v. Wickes/Simmons Bedding Ltd. and The Registrar of Trade Marks, 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.)].  La requérante a le fardeau de la preuve d’établir selon la prépondérance des probabilités qu’il n’y a pas de risque raisonnable de confusion entre sa marque et la marque déposée.

 

Le critère pour déterminer s’il y a confusion est celui de la première impression et de souvenir imprécis.  En appliquant le critère pour déterminer s’il y a confusion énoncé au paragraphe 6(2) de la Loi sur les marques de commerce, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce, y compris celles qui sont expressément énoncées au paragraphe 6(5) de la Loi, à savoir : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus; la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage; le genre de marchandises, services ou entreprises; la nature du commerce; le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'ils suggèrent.  Le poids à donner à chaque facteur peut varier en fonction des circonstances [voir Clorox Co. v. Sears Canada Inc. 41 C.P.R. (3d) 483 (C.F. 1re inst.); Gainers Inc. v. Tammy L. Marchildon and The Registrar of Trade-marks (1996), 66 C.P.R. (3d) 308 (C.F. 1re inst.)].

 

Ni l’une ni l’autre des marques n’a un caractère distinctif inhérent marqué.  La marque de l’opposante suggère que c’est un petit (micro) laxatif (lax), et elle est renforcée par le fait que le produit est lui-même décrit sur l’emballage comme un microlavement.  La marque de la requérante pourrait être considérée comme une contraction de l’expression anglaise « miracle laxative ».

 

La mesure dans laquelle chacune de ces marques est devenue connue au Canada favorise l’opposante, tout comme la période pendant laquelle chacune de ces marques a été en usage au Canada.

 

Les marchandises des parties relèvent de la même catégorie générale, nommément des produits pharmaceutiques utilisés pour traiter la constipation.  Même si l’enregistrement de MICROLAX exclut spécifiquement les laxatifs oraux, c’est-à-dire les marchandises exactes qui sont, selon M. Keegan, vendues sous la marque de commerce MIRALAX, la demande d’enregistrement de MIRALAX vise des marchandises plus étendues, à savoir les laxatifs, lesquels pourraient comprendre les lavements.  Même si l’enregistrement de l’opposante ne lui attribue pas le droit exclusif d’employer sa marque en liaison avec des laxatifs oraux, les laxatifs oraux demeurent étroitement liés aux marchandises de l’opposante.  De plus, même si les marchandises de l’opposante sont vendues sans ordonnance et que la requérante a l’intention de vendre ses marchandises sous ordonnance, leurs réseaux de distribution pourraient se chevaucher.

 

Dans l’ensemble, les marques ont un degré de ressemblance assez élevé.  Cette ressemblance est due en partie à leur suffixe suggestif commun LAX, mais c’est la première partie d’une marque qui est généralement considérée plus importante aux fins de distinction [voir Conde Nast Publications Inc. v. Union des Editions Modernes (1979), 46 C.P.R. (2d) 183 (C.F. 1re inst.) et Park Avenue Furniture Corp. v. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.)].  Si l’on considère que la première partie est la première syllabe, alors la première partie de chaque marque est également identique.  La ressemblance entre les marques sur le plan des idées suggérées est beaucoup moindre que la ressemblance sur le plan de la présentation ou du son, en raison du sens du mot « micro ».

 

Comme autre circonstance de l’espèce, la requérante soulève le fait qu’il n’y a pas eu d’opposition à l’enregistrement de sa marque aux États-Unis.  J’estime que cela n’est pas important, car la situation aux États-Unis peut être très différente de celle au Canada.

 

Dans son argumentation écrite, aux pages 7 et 8, la requérante a souligné les observations faites par le prédécesseur de l’opposante lorsqu’il défendait sa demande d’enregistrement de MICROLAX contre une opposition par le propriétaire de la marque de commerce MAGNOLAX pour des préparations médicinales laxatives.  À cette époque, le propriétaire de la marque de commerce MICROLAX a fait valoir que la confusion n’était pas probable avec MAGNOLAX pour les motifs suivant : MICROLAX était pour usage rectal tandis que MAGNOLAX était une préparation orale; « le suffixe LAX est très fréquent en matière de marques de commerce et ne peut pas en lui-même constituer une caractéristique distinctive des marques »; et les « deux préfixes MAGNO et MICRO ont des prononciations complètement différentes et suggèrent des idées opposées ».  Le registraire n’a pas eu à rendre une décision dans le cadre de la procédure d’opposition, car l’opposante a retiré son opposition une fois que le propriétaire de la demande d’enregistrement de MICROLAX a exclu les laxatifs oraux de son état des marchandises.

 

La requérante fait maintenant valoir que l’opposante doit être liée par la position de son prédécesseur et que, par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d) doit être rejeté.  En d’autres termes, la requérante invoque « l’irrecevabilité fondée sur le dossier de la demande d’enregistrement ».

 

Dans S.C. Johnson & Son, Ltd. et al. v. Marketing International Ltd. (1979), 44 C.P.R. (2d) 16 (C.S.C.), la  Cour suprême du Canada a évoqué le dilemme auquel fait face une société qui fait valoir des arguments dans une direction au cours de la poursuite d’une demande, et que celle-ci souhaite faire valoir des arguments contraires au moment d’appliquer l’enregistrement qui en résulte.  Toutefois, dans Domtar Inc. v. Commercial Plastics & Supply Corp. (1990), 30 C.P.R. (3d) 122 (C.O.M.C.), M. Martin, l’agent d’audience, a indiqué ce qui suit à la page 124 :

[TRADUCTION]  Même si la requérante n’a pas produit d’arguments écrits ou n’a pas présenté d’observations orales, il est évident, en se basant sur sa contre-déclaration, qu’elle prenait la position que l’opposante était empêchée d’alléguer la confusion dans la présente affaire en raison des déclarations faites dans le cadre de l’obtention de ses enregistrements.  À cet égard, la requérante s’est fondée sur la décision rendue dans S.C. Johnson & Son, Ltd. v. Marketing Int'l Ltd. (1979), 44 C.P.R. (2d) 16 aux pages 27-28, 105 D.L.R. (3d) 423,  [1980] 1 R.C.S. 99 (C.S.C.).  Toutefois, à mon avis, cette décision n’appuie pas la prétention de la requérante voulant que des déclarations faites par l’opposante dans le cadre de l’obtention de ses enregistrements antérieurs constituent une certaine forme d’irrecevabilité même si on peut donner un certain poids à ces déclarations pour déterminer la question de la confusion : voir la décision dans McDonald's Corp. v. Silcorp Ltd. (1989), 24 C.P.R. (3d) 207 à la p. 212 (C.F. 1re inst.).

 

 

En conséquence, j’ai examiné les observations présentées par le prédécesseur de l’opposante, mais elles ne sont pas déterminantes pour l’issue de la présente procédure.

 

Ayant examiné toutes les circonstances de l’espèce, j’arrive à la conclusion que la requérante ne s’est pas acquittée du fardeau de la preuve d’établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a pas de risque raisonnable de confusion entre la marque de commerce MICROLAX en liaison avec des « préparations pharmaceutiques, notamment des lavements, et excluant les préparations laxatives orales » et MIRALAX en liaison avec des « laxatifs ».  J’arrive à cette conclusion en me basant surtout sur le degré de ressemblance entre les marques, le chevauchement entre les marchandises et entre les réseaux de distribution et l’absence de réputation attachée à la marque MIRALAX.  Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’enregistrabilité est accueilli.

 

Motif d’opposition fondé sur le droit à l’enregistrement

L’opposante s’est acquittée du fardeau de la preuve initial qui lui incombait en vertu des articles 16 et 17 d’établir l’emploi de sa marque au Canada avant le 17 février 1999 et le non-abandon de sa  marque en date du 12 janvier 2000.

 

La date pertinente pour déterminer le risque de confusion en vertu du paragraphe 16(3) est le 17 février 1999.  Toutefois, dans les circonstances de la présente affaire, rien ne porte sur la date à laquelle la question de la confusion est déterminée.  Par conséquent, l’examen des circonstances de l’espèce en date du 17 février 1999 m’amène à la même conclusion à laquelle je suis arrivée ci-dessus en ce qui concerne le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d).  Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur le droit à l’enregistrement est également accueilli.

 

Motif d’opposition fondé sur le caractère distinct

La date pertinente en ce qui concerne un motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinct est la date du dépôt de l’opposition [voir Re Andres Wines Ltd. and E. & J. Gallo Winery (1975), 25 C.P.R. (2d) 126 à la p. 130 (C.A.F.) et Park Avenue Furniture Corporation v. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 412 à la p. 424 (C.A.F.)].  Encore une fois, les différences entre les circonstances de l’espèce à cette date et la date d’aujourd’hui ne sont pas importantes.  La requérante ne s’est pas acquittée du fardeau de la preuve d’établir que MIRALAX peut distinguer ses marchandises de celles de l’opposante.  Par conséquent, ce motif d’opposition est également accueilli.

 

Décision

Conformément au pouvoir qui m’a été délégué par le registraire des marques de commerce en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi sur les marques de commerce, je rejette la demande d’enregistrement en vertu du paragraphe 38(8) de la Loi.

 

 

FAIT À TORONTO, ONTARIO, CE 6e JOUR D’AOÛT 2004.

 

 

Jill W. Bradbury

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

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