Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE
THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2013 COMC 153

Date de la décision : 2013-09-16
TRADUCTION

 

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION produite par Constellation Brands Inc., Constellation Brands Québec, Inc., Constellation Brands Canada, Inc., Sumac Ridge Estate Winery Ltd., et Franciscan Vineyards Inc., à l’encontre de la demande no 1219008 pour la marque de commerce DOMAINE PINNACLE et dessin au nom de Domaines Pinnacle Inc.

 

[1]               Constellation Brands Inc. (Constellation), Constellation Brands Québec, Inc. (Constellation Québec), Constellation Brands Canada, Inc. (Constellation Canada), Sumac Ridge Estate Winery Ltd. (Sumac), et Franciscan Vineyards Inc. (Franciscan) (ci-après appelées collectivement les Opposants) s’opposent à l’enregistrement de la marque de commerce DOMAINE PINNACLE et dessin (illustrée ci-dessous) (la Marque), visé par la demande d’enregistrement no 1219008 soumise par Domaines Pinnacle Inc. (le Requérant).

DOMAINE PINNACLE & DESSIN

[2]               La demande a été produite le 3 juin 2004 en liaison avec les marchandises suivantes, dans sa version révisée par le Requérant en date du 13 juillet 2005 :

Marchandises (1) : Boissons alcoolisées à base de pommes.

Marchandises (2) : Produits non alcoolisés à base de pommes, nommément jus pétillant et non pétillant, cidre doux mousseux, boissons, purées, compotes, gelées, confitures, friandises, tartes, sauces, aliments pour bébés et céréales.

[3]               La demande est basée sur l’emploi de la Marque au Canada depuis au moins le 1er septembre 2001 en liaison avec les Marchandises (1) et l’emploi projeté en liaison avec les Marchandises (2).

[4]               La déclaration d’opposition, soulevée aux termes de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce (L.R.C. [1985], ch. T-13) (la Loi) invoque de nombreux motifs d’opposition s’articulant autour de la probabilité de confusion entre la Marque et l’une ou plusieurs des marques de commerce présumées des Opposants, soit PINNACLE, PINNACLE et dessin, PINNACLES, et PINNACLES RANCHES, toutes utilisées pour la vente de vin. La déclaration d’opposition allègue également des motifs d’opposition de nature technique fondés sur la non-conformité de la demande en vertu de l’article 30 de la Loi.

[5]               L’enjeu décisif, dans la présente cause, est de déterminer si la Marque cause de la confusion avec la marque de commerce PINNACLES de Franciscan, telle qu’utilisée ou enregistrée.

[6]               Pour les raisons énumérées ci-dessous, j’estime qu’il est peu probable qu’une telle confusion ne survienne.

Le dossier

[7]               La déclaration d’opposition a été déposée le 5 août 2008; le Requérant a contesté les allégations dans une contre-déclaration.

[8]               Les Opposants ont déposé les affidavits des personnes ci-dessous comme preuve :

  • Ronald C. Fondiller, premier vice-président, avocat général et secrétaire de Franciscan, secrétaire adjoint de Constellation secrétaire adjoint de Vincor International Inc. (Vincor International), exerçant maintenant sous le nom de Constellation Canada, comme expliqué plus loin (affidavit fait sous serment le 29 avril 2009);
  • Andrew Howard, premier vice-président du Marketing, Canada anglais au sein de Vincor International (affidavit fait sous serment le 30 avril 2009);
  • Michel Langevin, vice-président du Marketing, SAQ au nom de Vincor (Québec) Inc. (Vincor Québec), exerçant maintenant sous le nom de Constellation Québec comme expliqué plus loin (affidavit fait sous serment le 30 avril 2009);
  • Amy Chao, stagiaire en droit au sein du cabinet représentant les Opposants (affidavit fait sous serment le 30 avril 2009);
  • Mary-Ann Hanley, technicienne juridique au sein du même cabinet (affidavit fait sous serment le 1er mai 2009);

[9]               Vincor International et Vincor Québec ont changé leur nom pour Constellation Canada et Constellation Québec, respectivement. Ces changements de noms sont tous deux survenus le 1er juin 2012 et ont été consignés par le registraire le 17 septembre 2012.

[10]           Le Requérant a déposé les affidavits des personnes ci-dessous comme preuve :

  • Charles Crawford, fondateur et président du Requérant (affidavit fait sous serment le 1er septembre 2010);
  • Philippe Brouillette, avocat et ingénieur du cabinet représentant le Requérant (affidavit fait sous serment le 1er septembre 2010);
  • Stéphanie Brouillette, agente de marques de commerce du même cabinet (affidavit fait sous serment le 1er septembre 2010);
  • Simone Ndiaye, technicienne juridique du même cabinet (affidavit fait sous serment le 1er septembre 2010).

[11]           Il n’y a eu aucun contre-interrogatoire. Les deux parties ont produit un plaidoyer écrit et étaient représentées lors d’une audience.

Fardeaux respectifs des parties

[12]           Les Opposants doivent s’acquitter du fardeau de preuve initial pour établir les faits allégués à l’appui de chacun des motifs d’opposition invoqués. Une fois ce fardeau acquitté, le fardeau de persuasion du Requérant exige de prouver par prépondérance des probabilités que la Marque peut être enregistrée [voir John Labatt Ltd c. Molson Companies Ltd (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.); et Dion Neckwear Ltd c. Christian Dior, SA et al (2002), 20 C.P.R. (4th) 155 (CAF)].

[13]           En appliquant ces principes à la cause qui m’est présentée, je peux rejeter sommairement certains des motifs d’opposition.

Motifs d’opposition sommairement rejetés

Motifs d’opposition aux termes de l’alinéa 30a)

[14]           Les Opposants affirment que la demande n’est pas conforme aux dispositions de l’alinéa 30a) de la Loi, car elle ne contient pas une déclaration en termes commerciaux ordinaires des marchandises précises pour lesquelles la Marque a été utilisée ou pourrait l’être.

[15]           Le motif d’opposition, tel qu’invoqué, ne constitue pas un motif approprié puisque les Opposants n’ont présenté aucun fait concret pour l’étayer. En outre, les Opposants n’ont soumis aucune observation en ce sens pour ce motif d’opposition en particulier, que ce soit dans leur mémoire ou à l’audience.

Motifs d’opposition aux termes de l’alinéa 30i)

[16]           Les Opposants ont invoqué que la demande n’est pas conforme aux dispositions de l’alinéa 30i) de la Loi, puisque le Requérant ne peut pas avoir été convaincu d’avoir le droit d’utiliser la Marque au Canada en liaison avec les marchandises visées par la demande, étant donné l’emploi antérieur au Canada des marques de commerce PINNACLE, PINNACLE et dessin, PINNACLES et PINNACLES RANCHES par les Opposants pour la vente de vins.

[17]           Lorsqu’un requérant présente la déclaration requise en vertu de l’alinéa 30i) de la Loi, ce motif ne doit être retenu que dans des situations exceptionnelles, comme lorsqu’il y a preuve de mauvaise foi de la part du requérant [voir Sapodilla Co Ltd c. Bristol-Myers Co (1974), 15 C.P.R. (2d) 152 (COMC)]. Rien n’indique que ce soit le cas dans la présente cause.

[18]           Le simple fait que le Requérant puisse être au courant de l’existence des marques de commerce des Opposants au moment de la production de la demande ne l’empêchait pas de faire la déclaration exigée aux termes de l’alinéa 30i) de la Loi, puisqu’il estime que la Marque ne crée aucune confusion avec l’une ou l’autre des marques de commerce des Opposants, entre autres.

Motifs d’oppositions fondés sur l’absence du droit à l’enregistrement aux termes des alinéas 16(1)b) et (3)b) de la Loi

[19]           Les Opposants ont invoqué divers motifs d’opposition aux termes de l’article 16 de la Loi. Les deux motifs suivants peuvent être rejetés sommairement.

Motifs d’opposition aux termes de l’alinéa 16(1)b)

[20]           Les Opposants invoquent qu’à la date de premier emploi revendiquée, la Marque créait de la confusion avec les marques de commerce PINNACLE et PINNACLE et dessin de Sumac, pour lesquelles des demandes d’enregistrement avaient été produites antérieurement au Canada, nommément la demande no 1045258 et la demande no 1048356, déposées respectivement le 4 et le 25 février 2000.

[21]           Le paragraphe 16(4) de la Loi prévoit que le droit, pour un requérant, d’obtenir l’enregistrement d’une marque de commerce enregistrable n’est pas atteint par la production antérieure d’une demande d’enregistrement d’une marque de commerce créant de la confusion, par une autre personne, à moins que la demande d’enregistrement de la marque de commerce créant de la confusion n’ait été pendante à la date de l’annonce de la demande du requérant, soit le 5 mars 2008 pour la présente cause.

[22]           Le Requérant a déposé, par l’intermédiaire de l’affidavit Ndiaye, une copie des détails relatifs aux demandes no 1045258 et 1048356 sur lesquels se fondent les Opposants; ce document indique que Sumac avait abandonné les demandes en 2003. En raison du bénéfice possible pour l’intérêt public ressortissant d’une évaluation du motif aux termes de l’alinéa 16(1)b), j’ai fait appel aux pouvoirs discrétionnaires du registraire pour vérifier dans le registre l’état de ces deux demandes [voir Royal Appliance Mfg Co c. Iona Appliances Inc (1990) 32 C.P.R. (3d) 525, à 529]. Je peux confirmer qu’elles ont été abandonnées. Par conséquent, elles ne peuvent pas être utilisées comme fondement pour un motif d’opposition aux termes de l’alinéa 16(1)b), puisqu’elles n’étaient pas en instance en date du 5 mars 2008.

Motifs d’opposition aux termes de l’alinéa 16(3)b)

[23]           Les Opposants invoquent qu’à la date de production de la demande du Requérant, la Marque créait de la confusion avec la marque de commerce déposée PINNACLES de Franciscan (LMC683119), pour laquelle une demande d’enregistrement avait été déposée antérieurement au Canada.

[24]           J’ai encore une fois fait appel au pouvoir discrétionnaire du registraire pour vérifier le registre afin de confirmer l’existence de la demande invoquée par les Opposants. Puisque l’enregistrement LMC683119 a été délivré le 7 mars 2007, la demande sous-jacente utilisée comme fondement par les Opposants n’était pas en instance à la date de publication de la demande du Requérant pour la Marque. Par conséquent, la demande ne peut pas servir de fondement à un motif d’opposition aux termes de l’alinéa 16(3)b).

Autres motifs d’opposition

[25]           Les motifs d’opposition restants s’articulent tous autour de la probabilité de confusion entre la Marque et l’une ou plusieurs des marques de commerce présumées des Opposants, utilisées en liaison avec les vins. Plus précisément, les Opposants ont invoqué les motifs suivants :

  • la Marque n’est pas enregistrable aux termes de l’alinéa 12(1)d) de la Loi, car elle crée de la confusion avec la marque de commerce déposée PINNACLES de Franciscan (LMC683119);
  • le Requérant n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque aux termes des alinéas 16(1)a) et (3)a), puisqu’à la date de premier emploi revendiquée ou à la date de production de la demande, le cas échéant, la Marque créait de la confusion avec les marques de commerce PINNACLE, PINNACLE et dessin, PINNACLES et PINNACLES RANCHES des Opposants, lesquelles ont été utilisées ou révélées antérieurement au Canada;
  • la Marque n’a pas de caractère distinctif, elle ne distingue pas véritablement et n’est pas adaptée à distinguer les Marchandises du Requérant de celles des Opposants vendues en liaison avec les marques de commerce PINNACLE, PINNACLE et dessin, PINNACLES et PINNACLES RANCHES.

[26]           Le test pour la probabilité de confusion est le même pour les motifs d’opposition fondés sur la non-enregistrabilité, l’absence de droit à l’enregistrement et l’absence de caractère distinctif. Cependant, comme il ressort de mon analyse, le fardeau de preuve initial qui incombe aux Opposants varie pour chacun de ces motifs. De même, la date pertinente pour l’évaluation de chacun de ces motifs varie également.

[27]           J’entamerai donc mon analyse en abordant le motif d’opposition relatif à la non-enregistabilité soulevé par les Opposants.

Motif d’opposition fondé sur la non-enregistrabilité

[28]           La date pertinente qui s’applique pour l’examen du présent motif est la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. et le Registraire des marques de commerce (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 (CAF), 413 (CAF)].

[29]           Les Opposants ont déposé, par l’intermédiaire de l’affidavit Hanley, une copie notariée de l’enregistrement no LMC683119 de Franciscan. J’ai fait appel au pouvoir discrétionnaire du registraire pour vérifier le registre afin de confirmer l’état de cet enregistrement. Puisqu’il existe toujours, les Opposants se sont acquittés de leur fardeau de preuve. Le Requérant doit donc démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et la marque de commerce PINNACLES de Franciscan déposée pour la vente de vin.

Test en matière de confusion

[30]           Le paragraphe 6(2) de la Loi indique que

l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

[31]           Ainsi, le paragraphe 6(2) ne vise pas la confusion entre les marques elles-mêmes, mais une confusion qui porterait à croire que les produits ou des services issus d’une source proviennent d’une autre source.

[32]           Le test en matière de confusion relève de la première impression et du souvenir imparfait. Comme le souligne le juge Denault dans Pernod Ricard c Brasseries Molson (1992), 44 C.P.R. (3d) 359 à 369 [TRADUCTION] :

Les marques de commerce devraient être examinées du point de vue du consommateur moyen qui a un souvenir général et imprécis de la marque antérieure. Par conséquent, les marques ne devraient pas être disséquées ou soumises à une analyse microscopique en vue d’évaluer leurs ressemblances ou leurs différences. Plutôt, elles doivent être prises dans leur ensemble et évaluées comme un tout, en fonction de leur effet sur le consommateur moyen.

[33]           Lorsqu’il applique le test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles qui sont précisées au paragraphe 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce, et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle chacune des marques de commerce a été en usage; c) le genre de marchandises, services ou entreprises; d) la nature du commerce; e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Cette liste n’est pas exhaustive et tous les facteurs pertinents doivent être pris en compte. En outre, on ne doit pas nécessairement attribuer à tous ces facteurs une valeur égale, puisque le poids qui doit leur être accordé varie selon les circonstances [voir Mattel, Inc c. 3894207 Canada Inc (2006), 49 C.P.R. (4th) 321 (CSC); Veuve Clicquot Ponsardin c. Boutiques Cliquot Ltée (2006), 49 C.P.R. (4th) 401 (CSC); et Masterpiece Inc c. Alavida Lifestyles Inc (2011), 92 C.P.R. (4th) 361 (CSC) pour un examen approfondi des principes généraux qui régissent le test relatif à la probabilité de confusion].

Examen des facteurs énumérés au paragraphe 6(5)

a) Caractère distinctif inhérent des marques de commerce et mesure dans laquelle elles ont été révélées

[34]           J’estime que les marques de commerce concernées par la présente ont un caractère distinctif de valeur semblable et relativement faible.

[35]           En effet, les deux marques de commerce sont constituées du mot « pinnacle » (pinacle en français), lequel est défini comme l’apogée, le point culminant, un sommet ou une formation élevée de forme pointue, comme la cime d’une montagne. Par conséquent, les marques de commerce, lorsqu’examinées dans le contexte des marchandises en litige, peuvent évoquer le summum et ont vraisemblablement une connotation laudative. De même, elles peuvent évoquer une connotation géographique, particulièrement pour la marque dont le premier mot est DOMAINE.

[36]           Le Requérant va plus loin et soutient que le point crucial est que les deux marques de commerce ont effectivement un sens géographique : PINNACLES est le nom d’une formation géologique en Californie qui a été désignée monument national par le Department of the Interior des États-Unis, et le mot PINNACLE fait référence à une montagne située au sud-ouest du Québec.

[37]           Plus précisément, le Requérant souligne que la marque de commerce de Franciscan ne désigne qu’une origine purement géographique, puisque le vignoble Estancia Pinnacles est situé sur l’un des flancs du monument Pinnacles en Californie (l’affidavit Fondiller, traité plus loin, établit que le vin PINNACLES de Franciscan est vendu sous le nom commercial Estancia Estate). À cet égard, le Requérant s’appuie sur les répliques et sur les preuves connexes (notamment des extraits du site Web des Opposants, le www.estanciaestates.com) aux rapports de l’examinateur produits durant le processus d’examen à la présente demande, dont une copie a été déposée par les Opposants eux-mêmes par l’intermédiaire de l’affidavit Hanley [voir la preuve 1 de cet affidavit]. De même, la preuve du Requérant déposée au moyen de l’affidavit Crawford indique que le verger et l’installation cidricole du Requérant sont situés sur le flanc sud du mont Pinnacle, dans les Cantons-de-l’Est, au Québec [voir la preuve CC-3 connexe].

[38]           Lors de l’audience, les Opposants ont allégué que le sens géographique soulevé par le Requérant n’est pas pertinent pour l’examen du caractère distinctif des marques de commerce parties, puisqu’il n’y a aucune preuve que le consommateur moyen des marchandises connaîtrait les deux formations géologiques en question. Les Opposants affirment que la marque de commerce PINNACLES est aléatoire et unique aux Opposants et que la Marque est distinctive seulement dans la mesure où elle adopte le même nom commun que la marque de commerce distinctive des Opposants, PINNACLES.

[39]           Malgré les allégations des Opposants, le fait demeure que la preuve au dossier établit la connotation géographique du mot PINNACLE. Toutefois, je n’affirme pas que ces marques de commerce sont clairement descriptives du lieu d’origine des marchandises concernées dans le présent litige. Plutôt, je crois que cette preuve étaye ma conclusion antérieure, c’est-à-dire que les marques ont un caractère distinctif inhérent plutôt faible. Comme énoncé dans Fox (Kelly Gill et R. Scott Joliffe, Fox on Canadian Law of Trade-marks and Unfair Competition, 4e édition, livre à feuillets mobiles (Toronto : Carswell, 2003) à 4.78 [TRADUCTION] :

Les mots, noms et autres indicateurs utilisés comme marques de commerce ont une valeur distinctive variable, allant d’un caractère distinctif inhérent prononcé à inexistant et, du moins de prime abord, ils sont purement descriptifs d’une fonction. […]

Les indicateurs commerciaux ayant un caractère non distinctif inhérent suggèrent ou décrivent généralement le commerce, la qualité ou la nature, l’origine géographique du produit ou du service désigné. Les indicateurs commerciaux de ce type sont généralement considérés comme étant des indicateurs faibles […].

[40]           Et à 8-27 et 28 [TRADUCTION] :

Les marques qui n’ont pas de caractère distinctif inhérent prononcé, comme APPLE, BEAUTY ou MASTERPIECE, profitent d’une protection réduite par rapport aux mots inventés. Ces marques sont faibles en raison de leur emploi commun dans le langage courant ou de la nuance apportée par leur caractère descriptif, et la portée de la protection varie en fonction de cette faiblesse. Cet aspect [le caractère distinctif inhérent] de l’analyse sur la probabilité de confusion tient compte de la capacité du consommateur ordinaire à discriminer les marques ayant en commun un élément non distinctif.

Les marques qui n’ont pas de caractère distinctif inhérent bénéficient d’une protection moindre. Ainsi, les lieux géographiques, les noms de personnes et les surnoms, les initiales, les termes descriptifs, les préfixes et les symboles communs, et même les marques déposées qui sont devenues génériques n’ont pas de caractère distinctif inhérent et ne devraient pas, en général, profiter d’une protection très étendue.

[41]           Cela m’amène à examiner la mesure dans laquelle les marques de commerce litigieuses ont été révélées.

[42]           Les parties ont toutes deux soumis des preuves de l’emploi de leurs marques de commerce au Canada, particulièrement le Requérant, comme mon examen des points saillants de la preuve versée au dossier pour cette question l’indique.

La preuve du Requérant, déposée par l’intermédiaire de l’affidavit Crawford

[43]           Monsieur Crawford explique d’abord les antécédents des activités du Requérant. Il affirme que le Requérant est une entreprise familiale qui se spécialise dans la confection de cidre de glace depuis 2000 [paragr. 4 de son affidavit].

[44]           Il poursuit en affirmant que le Requérant utilise la Marque au Canada depuis au moins le 1er septembre 2001 en liaison avec des boissons alcoolisées à base de pomme [paragr. 5 de son affidavit]. Il explique que le Requérant distribue et commercialise ses produits au Canada et dans le monde entier à l’aide de divers distributeurs et par diverses voies de commercialisation [paragr. 6-9 de son affidavit].

[45]           Pour étayer ses allégations d’emploi de la Marque, monsieur Crawford joint à son affidavit les preuves suivantes :

  • Preuve « CC-1 » : un extrait du site Web du Requérant, le www.domainepinnacle.com, accompagné de photographies des produits du Requérant et d’exemples de publicités. Après examen des documents déposés, je constate que le site Web porte un avis de droits d’auteur daté de 2001 à 2008 et inclut les photographies des produits du Requérant. La Marque est affichée bien en évidence sur les étiquettes apposées aux bouteilles de cidre de glace, de cidre, d’eau-de-vie de pomme et de crème de cidre de glace. Certaines des étiquettes portent la mention « Récolte 2005 » et une des publicités fait référence aux commentaires d’un sommelier réputé formulés en 2004;
  • La preuve « CC-2 » : un extrait du site Web du Requérant où sont énumérés les distributeurs des produits du Requérant et précisant où les produits peuvent être achetés au Canada et ailleurs dans le monde. Après avoir examiné ce document, je remarque qu’il énumère entre autres les diverses sociétés des alcools partout au Canada, notamment les points de vente de la Société des alcools du Québec (SAQ) et de la Régie des alcools de l’Ontario (LCBO), le magasin du Requérant et des marchés publics;
  • Les preuves « CC-3 » et « CC-4 » : d’autres extraits du site Web du Requérant, lesquels énumèrent entre autres les nombreux prix et distinctions que le Requérant a reçus entre 2004 et 2010 au Canada et à l’étranger. Après avoir examiné ces preuves, je constate que l’un des communiqués de presse mentionnant un prix décerné au Requérant fait référence à un cidre glace de la cuvée 2002 et comporte une photographie de la bouteille et de la boîte arborant la Marque. Un autre communiqué mentionne la disponibilité du cidre de glace de la cuvée 2001 à la SAQ. Monsieur Crawford estime que les produits du Requérant portant la Marque ont acquis une notoriété considérable en matière de confection du cidre de glace, grâce à ces prix et à la couverture médiatique qui les a entourés. Il affirme que le Requérant a mérité, entre autres, le Prix d’excellence à l’Exportation accordé en 2007 par le Ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec et que le Requérant a remporté jusqu’à présent 48 médailles d’or [paragr. 10 à 12 de son affidavit];

[46]           Monsieur Crawford affirme que les ventes annuelles du Requérant oscillent autour de 4 millions de dollars. Il poursuit en expliquant qu’en moyenne, le Requérant investit 1 400 000 dollars pour la promotion et la publicité de ses produits, et que la Marque est le produit local (produit du terroir) le plus populaire à la SAQ. Monsieur Crawford a également mentionné que la vente des produits portant la Marque constitue 37 % du marché du cidre de glace de la SAQ, et que le cidre de glace associé à la Marque est le seul à profiter d’un référencement général régulier dans les points de vente de la LCBO [paragr. 13 à 16 de son affidavit].

[47]           En résumé, je suis convaincu, après mon examen de l’affidavit Crawford, que le Requérant a établi un emploi continu et étendu de la Marque au Canada en liaison avec les Marchandises (1), soit les « boissons alcoolisées à base de pommes », depuis 2001. Contrairement au mémoire des Opposants, le témoignage de monsieur Crawford, que nul n’a contesté, établit clairement la façon dont la Marque a été utilisée et a été révélée au Canada en liaison avec les marchandises. En outre, la preuve des Opposants est loin de contredire l’usage de la Marque, elle confirme plutôt que les Marchandises (1) du Requérant sont en vente dans la province de Québec [consulter les affidavits Chao et Langevin, lesquels visent à prouver la vente du cidre de glace du Requérant portant la Marque et du vin PINNACLES des Opposants, sous le nom commercial Estancia Estates, dans les mêmes points de vente de la SAQ].

La preuve de l’Opposant déposée au moyen des affidavits Fondiller et Howard

[48]           Comme il ressort de mon analyse ci-dessous, les Opposants sont tous des parties interdépendantes et ils se basent sur deux produits différents qui, selon eux, ont été commercialisés et vendus au Canada sous la marque de commerce PINNACLES, c’est-à-dire :

  • le vin PINNNACLES de Franciscan vendu au Canada sous le nom commercial Estancia Estates;
  • la marque de vin PINNACLE (sans le « s ») de Sumac (rouge, blanc et mousseux).

[49]           L’affidavit Fondiller traite des deux produits, alors que l’affidavit Howard corrobore en partie la preuve déposée par l’intermédiaire de l’affidavit Fondiller, en plus de fournir une preuve supplémentaire à l’égard des vins PINNACLE de Sumac. Mon analyse se concentre principalement sur l’affidavit Fondiller et fait référence à l’affidavit Howard lorsque nécessaire.

Vin PINNACLES de Franciscan

[50]           Monsieur Fondiller explique d’abord les antécédents des activités des Opposants. Il explique que Franciscan et Vincor International (maintenant Constellation Canada) sont des filiales en propriété exclusive de Constellation, et que Franciscan est un vignoble qui vend ses produits entre autres au Canada et aux États-Unis [paragr. 2 et 3 de son affidavit].

[51]           Plus précisément, monsieur Fondiller affirme que Franciscan mène ses activités sous divers noms commerciaux, dont Estancia Estates; ce nom en particulier sert à la production et à l’embouteillage de vins vendus au Canada et aux États-Unis en liaison avec la marque de commerce PINNACLES [paragr. 4 de son affidavit].

[52]           Monsieur Fondiller poursuit en indiquant Franciscan est le propriétaire de la marque de commerce PINNACLES, déposée sous le no LMC683119, laquelle a été utilisée selon la pratique normale du commerce en liaison avec les vins au Canada depuis au moins 1993 [paragr. 5 à 7 de son affidavit].

[53]           Monsieur Fondiller souligne que les vins PINNACLES de Franciscan sont vendus et commercialisés partout au Canada dans des magasins d’alcool. En outre, ces vins sont vendus dans l’ensemble des réseaux de distribution de la société mère de Franciscan, Constellations, et de la société affiliée de Franciscan située aux États-Unis, Constellation Wines U.S., Inc. Au Canada, les vins PINNACLES sont représentés dans l’Ouest canadien par Vincor International; en Ontario et dans les provinces atlantiques, par Churchill Cellars Ltd. Certaines ventes effectuées au Québec sont réalisées par Vincor Québec [paragr. 8 de son affidavit].

[54]           Monsieur Fondiller fournit un tableau énumérant le volume approximatif de vin vendu par Franciscan en liaison avec la marque de commerce PINNACLES au Canada pour les années 2007 et 2008, soit un total d’environ 58 000 bouteilles, ainsi que des prévisions pour les années 2009 et 2010, pour lesquelles le total prévu est d’environ 55 000 bouteilles [paragr. 11 de son affidavit]. Monsieur Fondiller affirme qu’en plus de ces ventes, Franciscan a publicisé et a constamment fait la promotion de ses vins portant la marque de commerce PINNACLES partout aux États-Unis; ces campagnes ont régulièrement franchi la frontière canadienne, entre autres par l’intermédiaire de magazines [paragr. 16 de son affidavit]. Toutefois, il ne précise pas le nom de ces magazines, leur distribution, leur circulation, etc.

[55]           Pour étayer ses allégations quant à l’emploi de la marque de commerce PINNACLES par Franciscan sous le nom commercial Estancia Estate au Canada, monsieur Fondiller a joint les preuves suivantes :

  • Preuve 2 : une copie d’un bon de commande et de directives pour le fret représentatifs qui prouvent la vente des vins PINNACLES au Canada par Estancia Estates à la SAQ en 2008 [paragr. 9 de son affidavit];
  • Preuve 3 : une copie d’une facture représentative prouvant la vente des vins PINNACLES au Canada par Constellation Wines U.S., Inc. à la SAQ pour la même année [paragr. 10 de son affidavit];
  • Preuve 6 : un exemple des étiquettes (reproduit ci-dessous) apposées sur les bouteilles de vin PINNACLES vendues au Canada [paragr. 17 de son affidavit].

[56]           Comme le Requérant le souligne avec insistance, l’étiquette en question fait référence à PINNACLES RANCHES, plutôt que la marque de commerce PINNACLES.

[57]           Comme il est établi dans l’arrêt Registraire des marques de commerce c. Cie Internationale pour l’Informatique CII Honeywell Bull (1985), 4 C.P.R. (3d) 523 (CAF) à 525, lorsque la marque employée dévie de la marque telle qu’elle est déposée, il faut se demander si « la marque a été employée d’une façon telle qu’elle n’a pas perdu son identité et qu’elle est demeurée reconnaissable malgré les distinctions existant entre la forme sous laquelle elle a été enregistrée et celle sous laquelle elle a été employée ». Pour répondre à cette question, il faut vérifier si les caractéristiques dominantes ont été préservées [Promafil Canada Ltée c. Munsingwear Inc (1992), 44 C.P.R. (3d) 59 (CAF)]. Cette question de fait doit être évaluée au cas par cas.

[58]           Dans la présente cause, la marque de commerce telle qu’utilisée est constituée des mots PINNACLES et RANCHES, tous les deux également dominants. De ce fait, l’impression générale créée par la marque telle qu’enregistrée est perdue. Ainsi, j’estime que le public, pour sa première impression, ne percevrait pas la marque de commerce utilisée comme étant la marque déposée [Nightingale Interloc Ltd c. Prodesign Ltd (1984), 2 C.P.R. (3d) 535 (COMC)]. Par conséquent, je conclus que la marque modifiée apposée sur les bouteilles de vin de Franciscan ne constitue pas une utilisation de la marque de commerce PINNACLES telle qu’enregistrée. Ceci étant dit, je conclus que l’emploi démontré par Franciscan ne constitue pas un usage de la marque de commerce PINNACLES.

[59]           Cette conclusion nous pousse donc à l’examen de la marque de commerce PINNACLE de Sumac.

Vins PINNACLE de Sumac (sans le « s »)

[60]           Monsieur Fondiller explique que Franciscan a également conclu un contrat de licence avec sa société filiale canadienne, Sumac, pour vendre du vin au Canada en liaison avec la marque de commerce PINNACLE. (Sumac a depuis fusionné avec Vincor International.) Il affirme à cet égard que Franciscan détient toujours le contrôle direct ou indirect du caractère ou de la qualité du vin vendu par Sumac (Vincor International) et que la société [TRADUCTION] « détient le contrôle direct ou indirect pour l’emploi, la publicité ou l’affichage de la marque PINNACLES et de sa version PINNACLE. » L’absorption de Sumac par Vincor International et l’utilisation autorisée de la marque de commerce PINNACLE sous le contrôle de Franciscan sont tous deux corroborés par monsieur Howard, qui explique plus en détail que Sumac est le plus ancien producteur-éleveur de vin en Colombie-Britannique. La société a été acquise par Vincor International en 2000 [paragr. 2 à 4, ainsi que le paragr. 6 de son affidavit].

[61]           Monsieur Fondiller indique qu’en plus du contrat de licence conclu entre les parties, aux alentours du 1er août 2006, Sumac a cédé tous ses droits, titres de propriété et intérêts détenus dans la marque de commerce PINNACLE et le fonds commercial connexe à Franciscan, comme le prouve la copie de l’acte de cession confirmatoire signé par les parties jointe à son affidavit comme preuve 4. Je reviendrai sur cet acte de cession plus tard, lorsque je me pencherai sur les autres circonstances de l’espèce.

[62]           Monsieur Howard précise qu’au moins depuis octobre 1997, Sumac produit des vins fins très haut de gamme en liaison avec la marque de commerce PINNACLE, et que ce vin est distribué par Vincor International depuis avril 2000. La gamme de vins PINNACLE (vins rouges, blancs et mousseux) de Sumac représente les meilleurs vins produits par la société [paragr. 5, 7 et 9 de son affidavit]. Le vin de Sumac associé à la marque de commerce PINNACLE est vendu et commercialisé partout au Canada dans des magasins d’alcool, par la société elle-même et par le réseau de distribution de Vincor International [paragr. 8 de son affidavit]. Monsieur Howard a également fourni un tableau indiquant le volume et la valeur approximatifs des vins portant la marque PINNACLE de Sumac vendus au Canada et ailleurs sur la planète pour la période de 2001 à 2008. Selon ce tableau, entre 2001 et 2004, Sumac aurait vendu un total de 5 000 litres de vin, pour une valeur totale de 28 500 $. Le nombre de bouteilles vendues de 2005 à 2008 se chiffre à environ 25 000, pour une valeur approximative de 773 000 $. Toutefois, il n’y a aucune ventilation propre au Canada [paragr. 10 de son affidavit].

[63]           Pour appuyer leurs allégations d’emploi la marque de commerce PINNACLE par Sumac, messieurs Fondiller et Howard ont soumis les preuves suivantes :

  • Preuve 5 de l’affidavit Fondiller et preuve 9 de l’affidavit Howard : des copies représentatives de factures datant de 2004 à 2008, démontrant la vente du vin PINNACLE de Sumac au Canada par l’intermédiaire de Vincor International;
  • Preuve 7 de l’affidavit Fondiller et preuve 3 de l’affidavit Howard : une copie représentative d’une étiquette (reproduite ci-dessous) du vin PINNACLE de Sumac vendu au Canada :

  • Preuve 8 de l’affidavit Fondiller et preuve 4 de l’affidavit Howard : un exemple de boîtes et d’emballages dans lesquels les bouteilles de vin PINNACLE étaient vendues au Canada par Sumac;
  • Preuve 8 de l’affidavit Fondiller : il s’agit de la liste des prix accordés à Sumac pour son vin PINNACLE. Après examen de cette preuve, je remarque que certains des communiqués de presse signalant les distinctions décernées à Sumac font référence à une médaille de bronze pour le choix des consommateurs de l’Okanagan Wine Festival, accordée à la cuvée 1997 du vin PINNACLE.

[64]           Monsieur Howard indique que les vins arborant la marque de commerce PINNACLE font constamment l’objet de publicité et de promotion partout au Canada par Sumac et Vincor International, et que le coût annuel approximatif de ces campagnes est d’environ 4 000 $ par année [paragr. 11 de son affidavit]. Pour étayer ses dires, il a joint les preuves suivantes :

  • Preuve 5 : une copie d’un livret (le livret Bocuse) dans lequel figure le vin PINNACLE de Sumac, le Sumac Ridge Estate Winery Pinnacle (red) 2001, dans la section intitulée BOLD;
  • Preuve 6 : une copie du catalogue d’exposition de Vincor International que la société a offert aux consommateurs, à ses distributeurs et à ses clients durant une dégustation de vin qui se tenait le 8 octobre 2008;
  • Preuve 7 : une copie d’une publicité soulignant le 25e anniversaire de Sumac. Monsieur Howard explique que cette publicité a été distribuée en 2006 aux consommateurs canadiens, en plus d’être offerte au vignoble de Sumac [paragr. 17 de son affidavit].

[65]           Messieurs Fondiller et Howard mentionnent également que Sumac exploite un site Web, le www.sumacridge.com, où figurent les vins PINNACLE ainsi que des renseignements quant aux endroits où ils sont offerts au Canada, comme le prouvent les extraits du site Web joints aux affidavits respectifs comme preuves 9 et 10 [paragr. 20 des deux affidavits]. Monsieur Howard ajoute que depuis plusieurs années, le site Web attire un nombre important de visiteurs et qu’en moyenne, le site Web accueille plus de 2 500 visiteurs par mois.

[66]           Lors de l’audience, le Requérant a allégué que l’emploi de la marque de commerce PINNACLE (sans le « s ») ne constitue pas un usage de la marque déposée PINNACLES. Je ne suis pas d’accord.

[67]           En appliquant les principes établis dans Honeywell, Promafil et Nightingale, je suis d’accord avec les Opposants que la variation entre PINNACLE et PINNACLES est mineure, et que le public ne risque pas de se méprendre.

[68]           Compte tenu de ce qui précède, je suis convaincue, après mon examen des affidavits Fondiller et Howard, que les Opposants ont établi l’emploi de la marque de commerce déposée PINNACLES au Canada par l’intermédiaire du porteur de licence de Franciscan, Sumac, depuis 1997. Toutefois, les plus anciens chiffres de vente fournis datent de 2001. En outre, les chiffres de vente pour les années 2001 à 2004 inclus dans l’affidavit Howard sont modestes.

Conclusion à l’égard du caractère distinctif inhérent des marques de commerce et de la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[69]           En comparant les chiffres de vente et les dépenses en commercialisation pour la gamme de vins PINNACLE de Sumac fournis par les Opposants au moyen de l’affidavit Howard et ceux donnés par le Requérant dans l’affidavit Crawford, je conclus que l’examen global de ce premier facteur, qui est une combinaison du caractère distinctif inhérent et acquis, joue en faveur du Requérant.

b) Période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

[70]           Dans leur mémoire et à l’audience, les Opposants ont allégué que la marque de commerce PINNACLES de Franciscan a été utilisée au Canada depuis au moins 1993, c’est-à-dire la date de premier emploi revendiqué dans l’enregistrement no LMC683119 de Franciscan. Toutefois, en l’absence de preuve étayant cette date de premier emploi, la date revendiquée dans l’enregistrement ne me permet d’établir au mieux qu’un usage minimal de la marque et ne soutient pas la conclusion d’un emploi important ou continu.

[71]           Cela étant dit, je suis convaincue que les Opposants ont prouvé l’emploi de la marque de commerce déposée PINNACLES au Canada par l’intermédiaire du porteur de licence de Franciscan, Sumac, dès 1997. En comparaison, la preuve de l’affidavit Crawford indique que l’emploi de la Marque en liaison avec les Marchandises (1) remonte à 2001.

[72]           Par conséquent, l’examen global de ce deuxième facteur favorise les Opposants en lien avec les Marchandises (1) et (2). Toutefois, j’estime que ce facteur est moins important dans le cas des Marchandises (1), puisque les deux marques de commerce sont employées depuis longtemps.

c) Genre de marchandises, de services ou d’entreprises et d), la nature du commerce

[73]           Pour ce qui est du genre des marchandises et de la nature du commerce, je dois comparer l’énoncé des marchandises du Requérant à celui de l’enregistrement de Franciscan [voir Henkel Kommanditgesellschaft auf Aktien c. Super Dragon Import Export Inc (1986), 12 C.P.R. (3d) 110 (CAF); et Mr Submarine Ltd c. Amandista Investments Ltd (1987), 19 C.P.R. (3d) 3 (CAF)].

[74]           Il n’y a aucun doute pour les deux parties que le vin des Opposants et les Marchandises (1) visées par la demande du Requérant entrent tous deux dans la même catégorie générale des boissons alcoolisées et utilisent essentiellement les mêmes voies de commercialisation, ou des voies fort similaires.

[75]           Cependant, le Requérant soulève que la nature même des Marchandises (1) spécifiées dans la demande sont différents de celles des Opposants, car elles consistent en des boissons alcoolisées à base de pommes, alors que les marchandises enregistrées de l’Opposant sont du vin; cela signifie que le sens général des marchandises serait perçu par le consommateur moyen comme étant une boisson alcoolisée confectionnée à partir de jus de raisin fermenté. Cette affirmation est vraie. Néanmoins, conformément à la décision prise dans Carling Breweries Ltd c. Registraire des marques de commerce (1972), 8 C.P.R. (2d) 247 (C.F. 1re inst.), j’estime que les marchandises des parties sont tous des produits d’une même industrie, et que l’examen global des troisième et quatrième facteurs joue en faveur des Opposants, dans la mesure où l’on s’attarde aux Marchandises (1) objet de la demande.

[76]           Pour ce qui est des Marchandises (2) décrites dans la demande comme des « produits non alcoolisés à base de pommes, nommément jus pétillant et non pétillant, cidre doux mousseux, boissons », je suis d’accord avec le Requérant qu’elles ne font pas partie de la même industrie que les produits vendus par les Opposants. Ce fait combiné aux différences existant entre la nature exacte des marchandises spécifiées dans la demande et le vin des Opposants fait pencher la balance en faveur du Requérant.

[77]           Pour ce qui est des Marchandises (2) décrites comme des « produits non alcoolisés à base de pommes, nommément […] purées, compotes, gelées, confitures, friandises, tartes, sauces, aliments pour bébés et céréales », je suis d’accord avec le Requérant lorsqu’il dit que ces produits sont clairement différents du vin vendu par les Opposants. Ceci étant dit, il est raisonnable de déduire que les voies de commercialisation correspondantes seraient également différentes.

e) Le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent

[78]           Il y a une certaine ressemblance entre les marques des parties, du fait que la Marque contient le mot PINNACLE, qui constitue son élément dominant.

[79]           En effet, bien que la Marque inclut également le mot DOMAINE et un élément graphique sophistiqué composé d’un flocon de neige superposé à une pomme, le mot PINNACLE demeure l’élément le plus distinctif, particulièrement si on examine l’aspect phonétique de la Marque.

[80]           Toutefois, en matière de présentation et d’idées suggérées, les marques de commerce concernées sont différentes de la Marque, puisque le dessin de la pomme suggère des produits à base de ce fruit, et le flocon évoque le froid et l’hiver. En comparaison, les marques de commerce PINNACLES des Opposants proposent l’idée d’un grand nombre de sommets.

Autres circonstances de l’espèce

État du registre

[81]           Dans son mémoire, le Requérant rappelle qu’il a mentionné dans sa contre-déclaration l’existence de 66 demandes ou enregistrements de marques de commerce actifs comportant le mot PINNNACLE inscrits au registre des marques de commerce. Plus particulièrement, le Requérant allègue que le mot PINNACLE est communément utilisé en liaison avec, entre autres, les produits alimentaires, les suppléments diététiques, les boissons alcoolisées et non alcoolisées, ainsi que les services de restauration et de bar.

[82]           Cependant, le Requérant n’a cité que six enregistrements et une demande de marque de commerce admise sans fournir plus de détail, outre leur numéro d’enregistrement ou de demande. Plus important encore, le Requérant a omis de prouver l’existence des enregistrements et de la demande en instance présumés. Dans de telles circonstances, il n’est pas du devoir du registraire d’utiliser ses pouvoirs discrétionnaires pour vérifier dans le registre les éléments qui ne sont pas suffisamment étayés par la preuve [voir Quaker Oats Co of Canada c. Menu Foods Ltd (1986), 11 C.P.R. (3d) 410 (COMC)]. Ceci étant dit, je me range à l’opinion des Opposants, aucun poids ne sera accordé à cette circonstance de l’espèce additionnelle.

Usage de la marque de commerce PINNACLE par Sumac avant le 1er août 2006

[83]           Comme indiqué plus tôt, Franciscan a conclu un contrat de licence avec Sumac, autorisant cette dernière à vendre du vin au Canada en liaison avec la marque de commerce PINNACLE. Comme susmentionné, en plus de ce contrat de licence, Sumac a cédé tous ses droits, titres de propriété et intérêts détenus dans la marque de commerce PINNACLE et autre fonds commercial connexe à Franciscan autour du 1er août 2006 [consulter la preuve 4 de l’affidavit Fondiller]. La raison sous-jacente pour ces décisions est qu’avant cette date, Sumac était une tierce partie utilisant la marque de commerce PINNACLE au Canada depuis au moins 1997, concurremment à l’usage par Franciscan de la marque de commerce PINNACLES.

[84]           Comme attesté par l’affidavit de Stéphanie Brouillette, Sumac s’était opposée à la demande d’enregistrement de la marque de commerce PINNACLES présentée par Franciscan, une situation qui a finalement débouché sur l’enregistrement no LMC683119 après que Sumac ait décidé de retirer son opposition le 2 août 2006 [consulter la copie des antécédents connexes à cette opposition jointe à l’affidavit de Stéphanie Brouillette comme preuve SB-1].

[85]           En se basant sur cette concurrence antérieure entre le vin PINNACLE de Sumac et le vin PINNACLES de Franciscan, le Requérant soutient que la marque de commerce PINNACLES n’a pas de caractère distinctif. Toutefois, comme l’ont souligné les Opposants lors de l’audience, la cession confirmatoire de la marque de commerce conclue entre Sumac et Franciscan stipulait précisément qu’à la suite de l’accord de règlement et du contrat de licence signé entre les deux parties aux alentours du 1er août 2006, Sumac a cédé, transféré, accordé et donné à Franciscan tous ses droits, titres de propriété et intérêts détenus dans la marque de commerce PINNACLE, ainsi que le fonds commercial connexe. Ainsi, les Opposants ont allégué à juste titre que l’emploi antérieur de la marque de commerce PINNACLE de Sumac ne peut pas être retenu contre Franciscan.

[86]           Conséquemment, je ne suis pas prête à accorder un poids quelconque à cette circonstance de l’espèce.

Coexistence des marques de commerce des parties

[87]           Le Requérant soulève une autre circonstance de l’espèce, soit l’absence de confusion entre les marques de commerce des parties malgré leur coexistence et leur usage concurrent au Canada pendant plusieurs années. Comme on peut lire dans l’arrêt Dion Neckwear, cité plus haut :

En ce qui concerne l’insuffisance des éléments de preuve présentés par l’opposante au sujet de cas concrets de confusion, le registraire s’est dit d’avis qu’un opposant n’a pas à produire ce genre de preuve. C’est vrai en théorie, mais lorsque le requérant a présenté certains éléments de preuve qui pourraient permettre de conclure à l’absence de risque de confusion, l’opposant court un grand danger si, se fiant à la charge de la preuve imposée au requérant, il présume qu’il n’a pas à produire de preuves au sujet de la confusion. Bien que la question à laquelle il faut répondre soit celle de savoir s’il existe un « risque de confusion » et non une « confusion effective », l’absence de « confusion effective » est un facteur auquel les tribunaux accordent de l’importance lorsqu’ils se prononcent sur le « risque de confusion ». Une inférence négative peut être tirée lorsque la preuve démontre que l’utilisation simultanée des deux marques est significative et que l’opposant n’a soumis aucun élément de preuve tendant à démontrer l’existence d’une confusion. (Voir les arrêts Pink Panther [Beauty Corp. c. United Artists Corp. [1998], 80 C.P.R. [3d] 247 [CAF]]; Multiplicant Inc. c. Petit Bateau Valton SA [1994], 55 C.P.R. [3d] 372 [C.F. 1re inst.]; Bally Schuhfabriken AG/Bally’s Shoe Factories Ltd. c. Big Blue Jeans Ltd. [1992], 41 C.P.R. [3d] 205 [C.F. 1re inst.]; Monsport Inc. c. Vêtements de Sport Bonnie [1978] Ltée [1988], 22 C.P.R. [3d] 356 [C.F. 1re inst.]).

[88]           Dans le présent cas, la preuve versée au dossier ne montre pas seulement l’emploi simultané dans les sociétés des alcools provinciales, elle indique également que le Requérant et les Opposants ont participé aux mêmes compétitions au Canada et à l’étranger. En effet, la preuve 8 de l’affidavit Howard et la preuve CC-4 de l’affidavit Crawford indiquent que le Requérant et les Opposants ont tous pris part aux compétitions suivantes, au Canada ou ailleurs dans le monde et y ont remporté des médailles grâce à leurs divers produits : INDY International Wine Competition, The International Eastern Wine Competition, All Canadian Wine Championships, Long Beach Grand Cru.

[89]           Ceci étant dit, je suis d’accord avec le Requérant que la coexistence du cidre de glace arborant la Marque et du vin PINNACLES des Opposants sur le marché canadien depuis au moins 2001 constitue une circonstance de l’espèce qui joue en faveur du Requérant dans la présente cause.

Conclusion concernant la probabilité de confusion

[90]           Comme je le mentionne plus haut, la question est de trancher si un client qui a un souvenir général et imprécis de la marque de commerce PINNACLES des Opposants pourrait, en voyant la Marque, croire que les marchandises l’arborant proviennent d’une même source.

[91]           En ce qui a trait aux commentaires que j’ai formulés plus tôt, je suis convaincue que le Requérant s’est acquitté du fardeau de preuve qui lui incombe, à savoir qu’il lui faut démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe aucune probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et la marque de commerce PINNACLES des Opposants. Bien que les Marchandises (1) spécifiées dans la demande et les vins des Opposants voyagent par les mêmes voies de commercialisation ou par des voies similaires, et même s’ils appartiennent tous deux à la même industrie, j’estime que l’examen global des facteurs restants, compte tenu de la prépondérance des probabilités, fait pencher la balance en faveur du Requérant.

[92]           Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur la non-enregistrabilité est rejeté.

Motif d’opposition fondé sur l’absence du droit à l’enregistrement

[93]           Les Opposants ont invoqué que le Requérant n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque aux termes des dispositions des alinéas 16(1)a) et (3)a) de la Loi, puisqu’à la date de premier emploi de la Marque revendiquée (pour les Marchandises [1]) ou à la date de production de la demande d’usage projeté du Requérant (pour les marchandises [2]), la Marque créait de la confusion avec les marques de commerce PINNACLE, PINNACLE et dessin, PINNACLES et PINNACLES RANCHES des Opposants, lesquelles ont été utilisées antérieurement au Canada en association avec le vin.

[94]           Pour s’acquitter de son fardeau de preuve à l’égard du motif fondé sur l’alinéa 16(1)a) ou sur l’alinéa 3a), l’opposant doit prouver qu’à la date de premier emploi revendiquée par le requérant ou à la date de production de sa demande, selon le cas, la marque de commerce avait été utilisée antérieurement au Canada et qu’elle n’avait pas été abandonnée à la date de publication de la demande du requérant [paragraphe 16(5) de la Loi]. Conformément à mon examen mentionné plus haut des affidavits Fondiller et Howard, les Opposants se sont acquittés de leur fardeau de preuve en lien à la marque de commerce PINNACLE et dessin, puisque cette marque de commerce est illustrée dans la preuve 7 de l’affidavit Fondiller et dans la preuve 3 de l’affidavit Howard. Les Opposants se sont également possiblement acquittés de leur fardeau de preuve pour la marque de commerce PINNACLES RANCHES, puisqu’elle est illustrée dans la preuve 6 de l’affidavit Fondiller. (Lors de l’audience, le Requérant a allégué qu'étant donné que la phrase PINNACLES RANCHES figurait au bas de la bouteille, sous les termes MONTEREY et PINOT NOIR, elle était présentée comme une sous-région du comté de Monterey, contrairement à la marque de commerce indiquant la source du vin. Compte tenu de ma décision définitive, j’estime qu’il n’est pas nécessaire de s’attarder davantage à cet enjeu). Toutefois, les Opposants ne se sont pas acquittés de leur fardeau pour les noms commerciaux PINNACLES et PINNACLE en soi.

[95]           La différence quant aux dates pertinentes influence mon analyse ci-dessus pour le motif d’opposition relatif à la non-enregistrabilité, car la mesure dans laquelle la Marque avait été utilisée en liaison avec les Marchandises (1) à la date pertinente pour l’évaluation du motif aux termes de l’alinéa 16(1)a) n’a pas d’importance. De même, je ne peux pas tenir compte de la période durant laquelle la Marque avait été utilisée au moment de la date de premier emploi revendiqué dans la demande du Requérant, ni de la coexistence des marques des parties. En d’autres mots, les arguments du Requérant sont plus faibles qu’ils ne l’étaient.

[96]           Ceci étant dit, j’estime toujours que le Requérant s’est acquitté de son fardeau de persuasion en établissant qu’il n’y a pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et l’une ou l’autre des marques de commerce PINNACLE et dessin ou PINNACLES RANCHES, en fonction des dates pertinentes pour l’évaluation des motifs d’opposition aux termes des alinéas 16(1)a) et (3)a).

[97]           En effet, les différences entre les Marchandises (2) et les vins des Opposants vendus en liaison avec l’une ou l’autre des marques de commerce PINNACLE et dessin et PINNACLES RANCHES suffisent en elles-mêmes à trancher en faveur du Requérant pour le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 16(3)a).

[98]           Pour ce qui est des Marchandises (1), les différences existant entre la marque de commerce PINNACLES RANCHES des Opposants et la Marque suffisent également en elles-mêmes pour favoriser la cause du Requérant, particulièrement si on tient compte de la faiblesse du caractère distinctif inhérent des marques en litige. Bien que ces différences soient moins importantes lorsqu’on s’attarde à la marque de commerce PINNACLE et dessin des Opposants, je considère quand même qu’elles sont suffisantes pour distinguer les marques de commerce, particulièrement si on considère la nature exacte des marchandises concernées. Puisque le témoignage de monsieur Howard indique que les vins associés à la marque de commerce PINNACLE et dessin représentent les meilleurs vins fins produits par Sumac, la marque de commerce PINNACLE et dessin évoque la connotation élogieuse du mot PINNACLE. En comparaison, la Marque rappelle, comme je l’ai mentionné plus tôt, une connotation géographique et le fait que le froid et l’hiver jouent un rôle dans la confection des produits à base de pomme du Requérant. La preuve au dossier ne me permet pas de conclure que l’une ou l’autre des marques de commerce PINNACLES RANCHES ou PINNACLE et dessin avaient été employées dans une mesure telle qu’à la date de premier emploi revendiquée dans la demande du Requérant, leur usage accentuait leur caractère distinctif inhérent de façon à leur garantir une protection accrue.

[99]           Conséquemment, les motifs d’opposition fondés sur les alinéas 16(1)a) et (3)a) sont rejetés.

Motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif

[100]       Les Opposants invoquent que la Marque ne distingue pas et ne peut pas distinguer les Marchandises spécifiées dans la demande des vins des Opposants, et qu’elle n’a pas été adaptée pour les distinguer aux termes des dispositions prévues à l’article 2 de la Loi, puisque la Marque crée de la confusion avec les marques de commerce PINNACLE, PINNACLE et dessin, PINNACLES et PINNACLES RANCHES des Opposants.

[101]       Pour satisfaire à son fardeau de preuve relativement au motif fondé sur l’absence de caractère distinctif, l’Opposant doit établir qu’à la date de production de l’opposition (dans le présent cas, le 5 août 2008), sa marque de commerce était devenue suffisamment connue pour remettre en cause le caractère distinctif de la Marque visée par la demande [voir Motel 6, Inc c. No 6 Motel Ltd (1981), 56 C.P.R. (2d) 44 (C.F. 1re inst.)]. Encore une fois, les Opposants se sont acquittés de leur fardeau de preuve en lien à la marque de commerce PINNACLE et dessin, puisque cette marque de commerce est illustrée dans la preuve 7 de l’affidavit Fondiller et dans la preuve 3 de l’affidavit Howard. Les Opposants ont possiblement également satisfait au fardeau de preuve pour la marque de commerce PINNACLES RANCHES, puisqu’elle est illustrée dans la preuve 6 de l’affidavit Fondiller. Toutefois, les Opposants ne se sont pas acquittés de leur fardeau pour les noms commerciaux PINNACLES et PINNACLE en soi.

[102]       La différence dans les dates pertinentes n’influence pas de façon significative mon analyse pour le motif d’opposition relatif à la non-enregistrabilité. La mesure dans laquelle les marques de commerce des parties avaient été utilisées à la date pertinente pour l’évaluation du motif d’opposition relatif à l’absence de caractère distinctif joue en faveur du Requérant. Cette observation vaut également pour la coexistence des marques de commerce des parties. Ces facteurs, en parallèle aux différences entre les marques de commerce des parties, font que, selon la prépondérance des probabilités, la balance penche en faveur du Requérant.

Règlement

[103]       Compte tenu de ce qui précède et dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition en application du paragraphe 38(8) de la Loi.

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Annie Robitaille

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

Catherine Dussault, trad. a

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