Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

Informations sur la décision

Contenu de la décision

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

                                                                    THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2014 COMC 272

Date de la décision : 2014-12-08

TRADUCTION

DANS L'AFFAIRE DE L'OPPOSITION produite par Itlas, S.p.A. à l'encontre de la demande d'enregistrement no 1,555,292 pour la marque de commerce TAVOLE ITALIANE au nom d'eurolegno distribution inc.

[1]               Itlas, S.p.A. (l'Opposante) s'oppose à l'enregistrement de la marque de commerce TAVOLE ITALIANE (la Marque), qui fait l'objet de la demande no 1,555,292.

[2]               La demande a été produite par eurolegno distribution inc. (la Requérante) le 7 décembre 2011 et est fondée sur l'emploi de la Marque au Canada depuis au moins le 31 décembre 2010 en liaison avec les marchandises suivantes [traduction] : « revêtements et revêtements de sol en bois d'ingénierie ».

[3]               L'opposition a été engagée par l'Opposante en vertu de l'article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch. T-13 (la Loi).

[4]               Pour les motifs exposés ci-dessous, j'accueille l'opposition.

Le dossier

[5]               La déclaration d'opposition a été produite par l'Opposante le 5 avril 2013. Il est allégué comme motifs d'opposition que la demande n'est pas conforme aux exigences de l'article 30 de la Loi pour plusieurs raisons, notamment parce qu'avant et même après la date de production de la demande contestée, la Requérante agissait à titre de distributrice canadienne des revêtements de sol en bois de l'Opposante et que, à ce titre, la Requérante ne pouvait pas être convaincue d'avoir droit d'employer la Marque au Canada au titre de l'alinéa 30i) de la Loi; parce que la Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la Marque en vertu des alinéas 16(1)a) et c) de la Loi, comme à la date de premier emploi de la Marque revendiquée (qui est contestée), la Marque créait de la confusion avec la marque de commerce et le nom commercial TAVOLE ITALIANE de l'Opposante qui avaient été employés antérieurement au Canada par l'Opposante ou ses prédécesseurs en titre en liaison avec des revêtements de sol en bois; et parce que la Marque n'est pas distinctive au titre de l'article 2 de la Loi, comme la Marque ne distingue pas véritablement ni n'est adaptée à distinguer les marchandises visées par la demande de la Requérante de celles de l'Opposante.

[6]               La déclaration d'opposition a été contestée par la Requérante dans une contre-déclaration.

[7]               Au soutien de son opposition, l'Opposante a produit l'affidavit de son directeur des exportations, Gilberto Garbin, souscrit le 31 octobre 2013. La Requérante a choisi de ne produire aucune preuve.

[8]               Aucune des parties n'a produit de plaidoyer écrit. La tenue d'une audience a été demandée, mais celle-ci a finalement été annulée par les parties. Le 17 novembre 2014, en réponse à une lettre de l'Office datée du 12 novembre 2014, la Requérante a confirmé au registraire qu'elle souhaitait maintenir la demande en l'espèce et entendre une décision relativement à l'opposition.

Le fardeau de preuve incombant à chacune des parties

[9]               L'Opposante a le fardeau de preuve initial d'établir les faits allégués à l'appui de chacun des motifs d'opposition. Une fois que l'Opposante s'est acquittée de ce fardeau initial, la Requérante doit s'acquitter du fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que la Marque est enregistrable [voir John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst.); et Dion Neckwear Ltd c Christian Dior, SA et al (2002), 20 CPR (4th) 155 (CAF)].

Analyse

Motif d'opposition fondé sur l'article 30i)

[10]           Le motif d'opposition fondé sur l'article 30i), tel qu'il est invoqué par l'Opposante, comporte trois volets.

[11]           L'un de ces volets est que la déclaration contenue dans la demande de la Requérante selon laquelle elle est convaincue de son droit à l'emploi de la Marque est fausse, compte tenu de la connaissance qu'avait la Requérante des droits de l'Opposante et de l'illégitimité dudit emploi parce que :

[traduction]
1.3.3 avant et même après la date de production de la demande contestée, la [R]equérante agissait à titre de distributrice canadienne des revêtements de sol en bois de l'Opposante et, à ce titre, tout emploi de la [Marque] allégué par la [R]equérante n'était pas un emploi par ou pour la [R]equérante en tant que propriétaire, mais plutôt en tant que distributrice, agente ou importatrice des marchandises arborant la [marque de commerce TAVOLE ITALIANE] de l'Opposante.

[12]           La date pertinente pour l'examen des circonstances concernant les arguments invoqués en vertu de l'article 30i) de la Loi est la date de production de la demande de la Requérante [voir Georgia-Pacific Corporation c Scott Paper Ltd (1984), 3 CPR (3d) 469, p. 475 (COMC)].

[13]           Ceci m'amène à examiner la preuve produite par l'Opposante à l'appui de ce motif d'opposition.

L'affidavit de M. Garbin

[14]           L'affidavit de M. Garbin fournit les renseignements suivants quant à l'Opposante et à son emploi de la marque de commerce TAVOLE ITALIANE au Canada :

  • l'Opposante est une entreprise de revêtements et de revêtements de sol en bois qui exerce aussi ses activités sous le nom d'Itlas Laborlegno [para. 5];
  • le type de revêtements et de revêtements de sol fabriqués par l'Opposante en liaison avec la marque de commerce TAVOLE ITALIANE est illustré dans les copies de catalogues produites comme Pièce A-1. Ces catalogues sont employés au Canada dans la promotion des revêtements de sol TAVOLE ITALIANE de l'Opposante [para. 6]. Après examen de cette pièce, je souligne que la dernière page de l'un de ces catalogues porte la mention suivante [traduction] :

DISTRIBUÉ PAR

MORUZZI legno

514-863-9416

dino@moruzzi.com

www.moruzzi.com

  • en 2007, l'Opposante et Moruzzi Ltd (Moruzzi) (représentée par Dino Ionescu) ont signé un contrat de distribution prévoyant la distribution de tous les produits d'Itlas Laborlegno sur le territoire du Canada. Le contrat prévoyait, entre autres choses, que Moruzzi devait s'abstenir de vendre tout autre produit de revêtement de sol en bois qui pourrait faire concurrence à ceux d'Itlas Labolergno pendant toute la durée du contrat conclu entre les parties [para. 9; Pièce A-3 – copie du Contrat de distribution, clause 8];
  • en 2010, la Requérante a repris le Contrat de distribution de 2007 présenté dans la Pièce A-3 [para. 10; Pièce A-4 – copie du Protocole d'accord];
  • en 2010, l'Opposante a vendu à Moruzzi et à la Requérante 1 543,57 mètres carrés de ses revêtements de sol TAVOLE ITALIANE, pour un montant total de 86 439,92 €; en 2011, elle a vendu à la Requérante et à Itlas International LTS 2 318,17 mètres carrés, pour un montant de 135 781,62 €; et en 2012, à Itlas International LTS, 31,23 mètres carrés pour un montant de 1 836,32 € [para. 7, 8 et 18; Pièce A-2 – tableau présentant une répartition de ces ventes; et Pièce A-12 – copies de factures émises par l'Opposante à l'intention de la Requérante, de Moruzzi ou d'Itlas International Ltd. (Itlas International) pour, notamment, les revêtements de sol TAVOLE ITALIANE de l'Opposante pour les mêmes années];
  • Dino Ionescu est président, secrétaire et trésorier à la fois de la Requérante et d'Itlas International [para. 12 et 13; Pièces A-6 et 7 – copie d'extraits du Registre des entreprises du Québec concernant la Requérante et Itlas International]. Après examen de ces pièces, je souligne que la Requérante exerce ses activités sous différents noms, dont Moruzzi Legno Distribution. Itlas International exerce aussi ses activités sous un autre nom, à savoir Distributions International Itlas. Je souligne également qu'Itlas International est située exactement à la même adresse que celle qui est fournie pour la Requérante dans les copies des factures produites dans la Pièce A-12;
  • en novembre 2011, l'Opposante a appris que la Requérante ne respectait pas son exclusivité de représentation et le Contrat de distribution n'a pas été renouvelé [para. 14; Pièce A-8 – copie d'une lettre de l'Opposante datée du 2011-11-21 à l'attention de la Requérante];
  • l'Opposante (par l'entremise de [traduction] « Paolo Favaro : chargé de la promotion des produits TAVOLE ITALIANE ») et la Requérante (par l'entremise de Dino Ionescu) ont eu divers échanges de courriels entre l'automne 2009 et l'hiver 2010 en ce qui concerne la conception des catalogues présentés dans la Pièce A-1 [para. 15; Pièce A-9];
  • d'autres documents concernant ces catalogues sont joints, à savoir : la Pièce A-10, qui est formée de copies de factures reçues par l'Opposante le 31 mars 2010 et à l'automne 2011 de deux fournisseurs italiens se rapportant à la conception et à l'impression des catalogues; et la Pièce A-11, qui se compose de factures émises par l'Opposante à l'intention de la Requérante le 14 décembre 2011 et d'Itlas International le 26 janvier 2012 en ce qui concerne, entre autres, la commande de copies de catalogues.

[15]           J'estime que ce qui précède permet à l'Opposante de s'acquitter de son fardeau de preuve initial.

[16]           Comme l'a rappelé le membre Jean Carrière dans International Clothiers Inc c RBibo (2005) CanLII 78152 (COMC), à la page 5 [traduction] : « Un distributeur ne peut enregistrer la marque de commerce du fabricant des biens qu'il distribue. [Voir Lin Trading Co Ltd c CBM Kabushiki Kaisha Ltd (1987), 14 CPR (3d) 32]. »

[17]           Conformément à mon examen de l'affidavit de M. Garbin, la Requérante a repris le Contrat de distribution de 2007 présenté dans la Pièce A-3. La lettre de la Pièce A-8 reproche expressément à la Requérante de [traduction] « contrevenir à la clause 8 du Contrat de distribution signé par Moruzzi […] et cédé par la suite à [la Requérante]. » Le catalogue de la Pièce A-1 identifiant la Requérante comme distributrice des revêtements de sol TAVOLE ITALIANE de l'Opposante, les échanges de courriels de la Requérante et de l'Opposante présentés dans la Pièce A-9 concernant la conception des catalogues TAVOLE ITALIANE de la Pièce A-1, de même que les factures de la Pièce A-12 émises par l'Opposante à l'intention de la Requérante pour, entre autres, les revêtements de sol TAVOLE ITALIANE de l'Opposante entre le 20 décembre 2010 et le 14 décembre 2011 appuient tous l'argument de l'Opposante selon lequel, à la date de production de la demande, la Requérante agissait comme distributrice canadienne des revêtements de sol TAVOLE ITALIANE de l'Opposante et, à ce titre, ne pouvait pas être convaincue de son droit à l'emploi de la Marque.

[18]           Comme je l'ai déjà indiqué, la Requérante a choisi de ne produire aucune preuve ni plaidoyer écrit. Comme c'était le cas dans International Clothiers, précité, il n'y a aucune preuve au dossier sur laquelle la Requérante pourrait s'appuyer pour s'acquitter du fardeau de preuve ultime qui lui incombe à l'égard de ce motif. Dans les circonstances, je n'ai d'autre choix que d'accueillir le motif d'opposition invoqué à la section 1.3.3 de la déclaration d'opposition.

Motifs d'opposition restants

[19]           Compte tenu des conclusions que j'ai tirées, et étant donné que la Requérante s'est montrée très peu intéressée à la présente procédure, il n'est pas nécessaire que j'examine les autres motifs d'opposition.

Décision

[20]           Compte tenu de ce qui précède, dans l'exercice des pouvoirs qui me sont délégués en vertu des dispositions de l'article 63(3) de la Loi, je repousse la demande d'enregistrement conformément aux dispositions de l'article 38(8) de la Loi.

______________________________

Annie Robitaille

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Marie-Pierre Hétu, trad.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.