Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

  Référence : 2013 COMC 111

Date de la décision : 2013-07-03 TRADUCTION

 

DANS L’AFFAIRE DE L'OPPOSITION produite par Dairy Farmers of Canada/Les Producteurs Laitiers du Canada à l’encontre de la demande d’enregistrement nº 1,436,278 pour la marque de commerce HAM & CHEESERS au nom de Del Monte Corporation

 

I.             Contexte

[1]                  Del Monte Corporation (le Requérant) a produit une demande d’enregistrement de la marque de commerce HAM & CHEESERS (la Marque), fondée sur l’emploi de la Marque au Canada depuis au moins aussi tôt que janvier 2004, en liaison avec les marchandises « nourriture pour animaux de compagnie ».

[2]                 Dairy Farmers of Canada/Les Producteurs Laitiers du Canada (l’Opposant) s’est opposé à la demande sur le fondement de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T‑13 (la Loi).

[3]                 La demande a fait l’objet d’une demande d’opposition pour les motifs que : (i) la demande n'est pas conforme aux exigences de l'article 30 de la Loi; (ii) la marque de commerce n’est pas enregistrable en ce qu’elle constitue une description claire, ou fausse et trompeuse, en langue anglaise, de la nature ou de la qualité des marchandises en liaison avec lesquelles elle a censément été employée; et (iii) la marque de commerce n’est pas distinctive au sens de l’article 2 de la Loi.

[4]                 Les deux parties ont produit des éléments de preuve et des plaidoyers écrits. Aucune audience n’a été tenue.

[5]                 Pour les raisons exposées ci-dessous, tous les motifs d’opposition sont rejetés.

II.            Preuve

Preuve de l'Opposant

[6]                  La preuve produite par l’Opposant consiste dans l’affidavit de Ian MacDonald et les pièces IM-1-IM-6, en date du 1er décembre 2010. M. MacDonald déclare qu’il est le directeur national, Marketing et Nutrition, de l’Opposant, nommément, Dairy Farmers of Canada/Les Producteurs Laitiers du Canada (« PLC »). Il affirme que PLC est un organisme national de promotion, de politiques et de lobby qui représente un certain nombre de fermes laitières canadiennes. Il ajoute également que PLC a intérêt à défendre la terminologie employée pour désigner les produits laitiers et leurs dérivés. Les producteurs laitiers ont chargé PLC de protéger l’emploi de termes comme lait, beurre, crème et fromage.

[7]                 Au paragraphe 8 de son affidavit, M. MacDonald fait remarquer que le fromage est généralement fabriqué à partir de lait de vache fermenté et il décrit brièvement le processus de fabrication du fromage. À titre de pièces IM-1 et IM-2, M. MacDonald fournit quelques définitions du terme anglais « cheese » [fromage]. Selon ces définitions, le terme anglais « cheese » désigne [TRADUCTION] « un aliment fait de lait caillé mis sous presse » et « un aliment dérivé du lait, qui peut être à pâte ferme ou molle et généralement de couleur jaune ou blanche ».

[8]                 À titre de pièce IM-3 a son affidavit, M. MacDonald a joint des imprimés du site Web de PLC qui apportent quelques précisions sur l’histoire du fromage et la façon dont il est fabriqué.

[9]                 M. MacDonald a joint également à son affidavit des extraits de la Loi sur les aliments et drogues, de la Loi sur l’emballage et l’étiquetage des produits de consommation, du Règlement sur les produits laitiers, de la Loi sur les produits alimentaires (Québec) et de l’édition 2003 du Guide d’étiquetage et de publicité sur les aliments de l’Agence canadienne d’inspection des aliments (voir les paragraphes 13 et 14 et les pièces IM-4 et IM-5 de l’affidavit). Il indique que ces extraits sont applicables aux produits laitiers, notamment au fromage. Toutefois, il ne précise pas comment les appliquer.

[10]             Au paragraphe 15 de son affidavit, M. MacDonald déclare que les produits laitiers comme le fromage sont utilisés quotidiennement pas les consommateurs canadiens. À l’appui de cette déclaration, M. MacDonald joint en pièce IM-6 à son affidavit, des statistiques sur la consommation des produits laitiers au Canada, notamment le fromage.

[11]             Aux paragraphes 16 à 18 de son affidavit, M. MacDonald fait quelques affirmations selon lesquelles l’inclusion du terme « cheesers » dans la marque de commerce du Requérant donne une description claire ou donne une description fausse et trompeuse de la composition et de la nature des marchandises en liaison avec lesquelles il est employé. En particulier, M. MacDonald estime que, pour ce qui est de la première impression, le consommateur moyen serait susceptible de conclure que la nourriture pour animaux de compagnie du Requérant est fabriquée avec du véritable fromage laitier ou qu’elle contient du véritable fromage laitier. Au paragraphe 18, M. MacDonald déclare que, d’après ses 27 années d’expérience dans le secteur des produits laitiers, il ne fait aucun doute que l’emploi que fait le Requérant de sa marque de commerce HAM & CHEEESERS induit en erreur le consommateur moyen sur les composants et la qualité des marchandises en liaison avec lesquelles elle est employée.

[12]             Je suis d’avis que l’on ne saurait reconnaître à M. MacDonald la qualité d’expert dans la présente procédure. Bien que je ne conteste pas l’expérience professionnelle et l’intégrité de M. Macdonald, il me semble qu’une qualification à livrer un témoignage d’expert inclut nécessairement l’indépendance vis-à-vis des parties en ce qui concerne le résultat de l’affaire [Black Entertainment Television, Inc c. CTV Limited (2008) 66 C.P.R. (4th) 212 (COMC)]. De plus, puisque les affirmations aux paragraphes 16 à 18 de l’affidavit de M. MacDonald équivalent essentiellement à un plaidoyer et/ou une opinion personnelle, je n’accorderai aucun poids à ces affirmations. Les problèmes de caractère descriptif impliquent des questions de faits et de droit que seul le registraire peut trancher.

Preuve du Requérant

[13]             La preuve produite par le Requérant consiste dans l’affidavit de Brad Hatt, souscrit le 1er avril 2011. M. Hatt est directeur de DLM Foods Canada Corp. au Canada (DLM Foods). Il affirme que DLM Foods est une filiale détenue à 100 % par le Requérant et agit à titre d’agent de vente et de distributeur au Canada. M. Hatt ajoute que le produit HAM & CHEESERS du Requérant a été vendu continuellement au Canada depuis janvier 2004, soit par le Requérant, soit par son prédécesseur en titre et que, depuis lors, l’emballage a toujours arboré la marque de commerce HAM & CHEESERS.

[14]              En pièce A à son affidavit, M. Hatt joint l’image d’un emballage utilisé par le Requérant depuis 2006 pour vendre sa nourriture pour animaux de compagnie. La marque de commerce HAM & CHEESERS du Requérant y est représentée.

[15]             En pièce B à son affidavit, est joint un imprimé tiré du site Web du Requérant, montrant comment le Requérant annonce sa nourriture pour animaux de compagnie HAM & CHEESERS.

[16]             M. Hatt indique que, depuis les premières ventes au Canada, le produit du Requérant portant la marque de commerce HAM & CHEESERS a été vendu et continue de l’être dans un certain nombre de commerces de détail au pays, incluant les animaleries et les épiceries comme Loblaws, Wal-Mart et autres. Le Requérant a enregistré au Canada des ventes brutes de sa nourriture pour animaux de compagnie portant la marque de commerce HAM & CHEESERS de 400 000 $ à 600 000 $ pour les années 2006 à 2010. À titre de pièce C à son affidavit, M. Hatt joint un échantillon de factures des années 2006 à 2010.

[17]             Comme preuve supplémentaire, le Requérant a fourni les copies certifiées conformes de 25 enregistrements de marques de commerce contenant les mots CHEESE, CHEESY, ou CHEESER (ou leurs équivalents phonétiques) pour divers produits alimentaires dont le Requérant soutient qu’ils sont aromatisés au fromage. Le Requérant a laissé entendre que ces enregistrements montrent clairement que des variantes du mot CHEESE sont utilisées couramment dans des marques de commerce pour décrire des produits alimentaires qui ont une saveur de fromage, mais qui ne contiennent pas nécessairement du vrai fromage.

[18]             Je note que le Requérant n’a soumis aucun élément probant attestant que les produits alimentaires liés à ces marques de commerce sont véritablement vendus sur le marché ou que ces produits ne contiennent pas de véritable fromage. Toutefois, compte tenu du nombre de marques trouvées par le Requérant, je peux conclure qu’au moins certaines d’entre elles sont employées sur le marché [Old Spaghetti Factory Canada Ltd c. Spaghetti House Restaurants Ltd (1999), 2 C.P.R. (4th) 398 (COMC)].

III.          Analyse

[19]             C’est au Requérant qu’incombe le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. Il incombe toutefois à l'Opposant de faire en sorte que chacun de ses motifs d’opposition soit dûment plaidé et de s’acquitter du fardeau de preuve initial en établissant les faits sur lesquels il appuie ses motifs d’opposition [voir John Labatt Limitée c. Les Compagnies Molson Limitée (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (CF 1ère inst.), à la page 298].

Conformité – Article 30 de la Loi

[20]             La date pertinente pour l’examen de la conformité de la demande aux exigences de l’article 30 de la Loi est la date du dépôt de la demande, nommément le 28 avril 2009 [Georgia-Pacific Corp c. Scott Paper Ltd (1984), 3 C.P.R. (3d) 469 (COMC), page 475].

[21]             J’examinerai successivement chacun des motifs d’opposition soulevés en vertu de l’article 30 de la Loi.

Alinéa 30(b)

[22]             Le Requérant a allégué que la demande n’est pas conforme aux dispositions de l’alinéa 30(b) de la Loi, parce que le Requérant n’a jamais employé la marque de commerce en liaison avec les marchandises, il ne l'a pas employée continuellement, ou il a employé une marque de commerce qui différait de celle qui est visée par sa demande.

[23]             L’alinéa 30(b) de la Loi exige qu’il y ait un emploi continu de la marque de commerce faisant l’objet de la demande, dans la pratique normale du commerce, à compter de la date de revendication et jusqu’à la date de dépôt de la demande [Benson & Hedges (Canada) Ltd c. Labatt Brewing Co (1996), 67 C.P.R. (3d) 258 (CF 1ère inst), page 262].

[24]             Le fardeau de preuve initial qui incombe à une opposante est peu astreignant en ce qui touche à la question de la non-conformité à l’alinéa 30(b) de la Loi, parce que les faits concernant le premier emploi revendiqué par la requérante doivent être prouvés par celle-ci [Tune Masters c. Mr P's Mastertune Ignition Services Ltd (1986), 10 C.P.R. (3d) 84 (COMC), page 89]. En faisant référence à la preuve produite par l’opposante, mais aussi à celle de la requérante, il est possible de s’acquitter de ce fardeau de preuve [Labatt Brewing Co c. Molson Breweries, A Partnership (1996), 68 C.P.R. (3d) 216 (CF 1ère inst.), page 230]. Toutefois, même si une opposante peut s’appuyer sur la preuve de la requérante pour s’acquitter de son fardeau de preuve à l’égard de ce motif d’opposition, elle doit, pour ce faire, démontrer que la preuve de la requérante est « clairement » incohérente avec les revendications dans la demande [Ivy Lea Shirt Co c. Muskoka Fine Watercraft & Supply Co (1999), 2 C.P.R. (4th) 562 (COMC), pages 565-566, confirmé (2001), 11 CPR (4th) 489 (CF 1ère inst)].

[25]             Je ne peux conclure que l'Opposant s’est acquitté de son fardeau initial à l’égard de ce motif, car il n’a produit aucun élément de preuve pour soutenir ce motif d’opposition, ni fait d’observations pour indiquer comment la preuve du Requérant pouvait être considérée comme étant clairement incohérente avec les revendications dans sa demande. Ce motif d’opposition est donc rejeté.

Alinéa 30(h)

[26]             L’Opposant a allégué que la demande n’est pas conforme à l’alinéa 30(h), parce que la marque de commerce, telle qu’elle est employée, diffère de celle qui est visée dans la demande. Premièrement, je remarque qu’un examen de la preuve du Requérant permet de penser que la marque semble, en fait, être employée dans la forme dans laquelle l’enregistrement a été demandé [Hatt, pièce A]. Deuxièmement, je remarque que même si ce n’était pas le cas, la Marque en cause est une marque nominale plutôt qu’une marque graphique. Pour ce motif, l’alinéa 30(h) ne s’applique pas. En conséquence, ce motif d’opposition est également rejeté.

Alinéa 30(i)

[27]             L’Opposant a allégué que la demande n’est pas conforme à l’alinéa 30(i), parce que le Requérant n’a pu se déclarer convaincu de son droit à employer la marque de commerce en raison du [TRADUCTION] « contenu de la présente opposition » et du « contenu des lois fédérales et provinciales sur les produits laitiers ».

[28]             Lorsqu’un requérant a produit la déclaration exigée par l’alinéa 30(i), un motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30(i) ne devrait être retenu que dans des cas exceptionnels, comme lorsque la preuve permet d’établir la mauvaise foi du requérant [Sapodilla Co Ltd c. Bristol-Myers Co (1974), 15 C.P.R. (2d) 152 (COMC), page 155] ou lorsque l’on fait la preuve prima facie de non-conformité à une loi fédérale [Interactiv Design Pty Ltd c. Grafton-Fraser Inc (1998), 87 C.P.R. (3d) 537 (COMC), pages 542-543].

[29]             Dans la présente affaire, l’Opposant n’a pas indiqué les éléments de législation particuliers sur lesquels il s’appuie dans son plaidoyer. Le Requérant soutient que cela contrevient à l’alinéa 38(3)(a) de la Loi, parce que le motif d’opposition, tel qu’il est allégué, n’est pas présenté avec suffisamment de détails pour lui permettre d’y répondre. Je suis d’accord. Toutefois, je note que des faiblesses dans les arguments exposés peuvent parfois être palliées par la preuve [Novopharm Ltd c. AstraZeneca AB 2002 CAF 387 (CanLII) (2002), 21 C.P.R. (4th) 289 (CAF)].

[30]             Dans la présente affaire, l’Opposant a, en effet, déposé en preuve des extraits de divers lois, règlements et directives fédéraux et provinciaux (MacDonald, pièces IM4-IM5). Toutefois, l’Opposant n’a pas expliqué la pertinence de ces extraits, et il n’a pas indiqué s’ils sont censés appuyer son motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30(i).

[31]             Même si ces extraits étaient jugés suffisants pour pallier les faiblesses dans les arguments déposés par l’Opposant, comme l’a souligné le Requérant, il n’est pas établi clairement si ces extraits pouvaient être appliqués à la « nourriture pour animaux de compagnie » du Requérant, et la manière dont ils le seraient, et l’Opposant n’a pas produit d’observations détaillées à cet égard. Cela étant, je ne peux conclure qu’il s’agit d’une preuve prima facie de non-conformité à des dispositions réglementaires.

[32]             Ce motif d’opposition est donc rejeté.

Enregistrabilité – Alinéa 12(1)(b) de la Loi

[33]             L’Opposant a fait valoir la marque de commerce du Requérant n’est pas enregistrable en vertu des dispositions de l’alinéa 12(1)(b) de la Loi, parce qu’elle donne une description claire ou donne une description fausse et trompeuse, en langue anglaise, de la nature ou de la qualité des marchandises en liaison avec lesquelles elle a censément été employée. Plus particulièrement, l’Opposant a fait valoir que le consommateur moyen pourrait probablement croire que les marchandises portant la marque de commerce HAM & CHEESERS du Requérant sont fabriquées avec du véritable fromage laitier ou qu’elles contiennent du véritable fromage laitier.

[34]             La date pertinente pour l’examen de l’enregistrabilité de la marque de commerce au sens de l’alinéa 12(1)(b) de la Loi est la date de dépôt de la demande, nommément le 28 avril 2009 [Fiesta Barbeques Ltd c. General Housewares Corp (2003), 28 C.P.R. (4th) 60 (CF 1ère inst.)].

[35]             La question de savoir si une marque donne une description claire ou donne une description fausse ou trompeuse doit être examinée du point de vue de l'acheteur moyen des marchandises ou services liés à la marque. De plus, la Marque ne doit pas être disséquée en éléments constitutifs et soigneusement analysée, mais il faut l’envisager sous l’angle de la première impression qu’elle donne [Wool Bureau of Canada Ltd c. Registraire des marques de commerce (1978), 40 C.P.R. (2d) 25 (CF 1ère inst.) et Atlantic Promotions Inc c. Registraire des marques de commerce (1984), 2 C.P.R. (3d) 183 (CF 1ère inst.)]. « Nature » signifie un attribut, un trait ou une caractéristique du produit et « claire » signifie « facile à comprendre, évident ou simple » [voir Drackett Co of Canada Ltd c. American Home Products Corp (1968), 55 C.P.R. 29 (C. de l’É.)].

[36]             L’Opposant n’a pas fourni d’observations particulièrement détaillées concernant son motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)(b). En l’absence d’observations écrites détaillées ou de représentations soumises oralement à l’audience, il m’est difficile d’émettre des hypothèses sur les arguments sur lesquels l’Opposante s’appuie.

[37]             D’après les définitions du dictionnaire, les statistiques sur les produits laitiers et les autres renseignements fournis dans l’affidavit de M. MacDonald en ce qui concerne le mot anglais « cheese », l’Opposant semble estimer que le consommateur moyen connaîtrait le sens du mot « cheese ». De plus, l’Opposant semble considérer que le consommateur moyen est si familiarisé avec le fromage en tant que produit alimentaire que, selon le critère de la première impression, en voyant la marque de commerce HAM & CHEESERS dans le contexte de la nourriture pour animaux de compagnie du Requérant, il présumerait que ces produits contiennent du véritable fromage ou sont fabriqués avec du véritable fromage, alors que ce n’est pas le cas.

[38]         Selon les définitions fournies par l’Opposant, le terme anglais « cheese » désigne [TRADUCTION] « un aliment fait de lait caillé mis sous presse » et « un aliment dérivé du lait, qui peut être à pâte ferme ou molle et généralement de couleur jaune ou blanche » (MacDonald, paragraphes 10 et 11 et pièces IM-1 et IM-2). M. MacDonald décrit le processus de fabrication du fromage, au paragraphe 9 de son affidavit, et indique qu’il est généralement fabriqué à partir de lait de vache fermenté, duquel une partie d’eau et de lactose a été retirée.

[39]             Le Requérant soutient que le consommateur moyen, en voyant la marque de commerce HAM & CHEESERS employée en liaison avec de la « nourriture pour animaux de compagnie » ne présumerait pas que la « nourriture pour animaux de compagnie » est fabriquée avec du véritable fromage laitier, ou il ne serait pas amené à penser qu’elle l’est. Le Requérant estime plutôt que, dans le contexte de la « nourriture pour animaux domestiques », la marque de commerce suggère simplement que les produits du Requérant ont un arôme ou une saveur de fromage.

[40]         À l’appui de sa position, le Requérant fait valoir que des variantes du mot CHEESE sont utilisées couramment dans des marques de commerce pour décrire des produits alimentaires qui ont une saveur de fromage, mais qui ne contiennent pas nécessairement du vrai fromage. À cet égard, le Requérant se fonde sur ses 25 copies certifiées conformes d’enregistrements de marques contenant les mots CHEESE, CHEESY ou CHEESER (ou leurs équivalents phonétiques), pour divers produits alimentaires.

[41]         Le Requérant soutient que l’emploi de ces marques sur des produits alimentaires a habitué les consommateurs aux variantes du mot CHEESE, de sorte que le consommateur moyen, à la première impression, ne penserait pas nécessairement que la nourriture pour animaux de compagnie vendue par le Requérant sous la marque de commerce HAM & CHEESERS contient du véritable fromage.

[42]             À ce stade, j'aimerais rappeler l’importance de ne pas disséquer une marque en éléments constitutifs et de ne pas en examiner chaque élément pour faire une analyse en vertu de l’alinéa 12(1)(b). Il convient de considérer la Marque dans son intégralité. En l’espèce, la Marque est HAM & CHEESERS. Elle n’est pas composée uniquement du mot CHEESE, mais plutôt d’une combinaison du mot HAM, qui est immédiatement reconnaissable en langue anglaise, d’une perluète et du terme CHEESERS, qui est essentiellement un mot inventé.

[43]             Le fait qu’une marque de commerce se compose d’un mot inventé ou d’une combinaison de mots qui ne figure dans aucun dictionnaire n’empêche pas de juger qu’une marque de commerce constitue une description claire ou une description fausse et trompeuse [Oshawa Group Ltd c. Registraire des marques de commerce (1980), 46 C.P.R. (2d) 145 (CF 1ère inst.) et Clarkson Gordon c. Registraire des marques de commerce (1985), 5 C.P.R. (3d) 252 (CF 1ère inst.)]. Toutefois, le juge Reed dans l’affaire Clarkson Gordon a décidé que [TRADUCTION], « il sera toujours plus difficile de prouver que ces mots donnent une description claire de la nature ou de la qualité du produit auquel ils se rapportent que lorsqu’il s’agit de mots non inventés ».

[44]             Il importe de tenir compte du fait qu’il faut aussi considérer la marque de commerce dans son intégralité, dans le contexte des marchandises avec lesquelles elle est employée. Les marchandises, en l’espèce, sont de la « nourriture pour animaux de compagnie ».

[45]             À mon avis, le simple fait que les consommateurs connaissent le sens du mot anglais « cheese » et l’utilisation de ce « cheese » en tant que produit alimentaire ne permet pas forcément de conclure que l’expression inventée HAM & CHEESERS, conduirait, à la première impression, l’acheteur moyen de nourriture pour animaux de compagnie, à penser que les produits du Requérant contiennent ou sont fabriqués avec du véritable fromage laitier, comme l’a soutenu l’Opposant. Il y a une différence entre la « nourriture des humains » et la « nourriture pour animaux de compagnie » et, dans le contexte de la « nourriture pour animaux de compagnie », j’estime raisonnable de conclure qu’il est plus vraisemblable que la marque de commerce HAM & CHEESERS suggèrerait aux consommateurs que les produits du Requérant ont peut-être un arôme de jambon et de fromage ou une saveur de jambon et de fromage. J’estime donc que la marque de commerce ne constitue pas une description claire.

[46]             Pour que l’on considère qu’une marque de commerce donne une description fausse et trompeuse, la marque doit induire le public en erreur quant à la nature ou la qualité des marchandises et des services. La marque doit être jugée descriptive, de façon à suggérer que les marchandises ou les services sont ou contiennent quelque chose, ce qui n’est pas le cas. Le but de l’interdiction des marques de commerce qui constituent des descriptions fausses et trompeuses est d’empêcher que le public ne soit induit en erreur [Atlantic Promotions, précité; et Provenzano c. Canada (Registraire des marques de commerce) (1977), 37 C.P.R. (2d) 189 (CF 1ère inst.)].

[47]             Puisque j’ai conclu que la Marque n’induirait pas les consommateurs à penser que les produits du Requérant contiennent ou sont fabriqués avec du véritable fromage laitier, il s’ensuit que l’on ne peut considérer que la Marque constitue une description fausse et trompeuse, puisque la Marque n’induirait pas les consommateurs à penser que la nourriture pour animaux de compagnie du Requérant contient quelque chose qu’elle peut ou non contenir.

[48]             Compte tenu de ce qui précède, ce motif d’opposition est rejeté.

Caractère distinctif – Article 2 de la Loi

[49]             La date pertinente pour le motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif est la date de production de la déclaration d’opposition [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c. Stargate Connections Inc (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (CF)].

[50]               La déclaration suivante du juge O’Keefe dans l’affaire Conseil canadien des ingénieurs professionnels c. APA – Engineered Wood Association 2000 CanLII 15543 (FC), (2000), 7 C.P.R. (4th) 239 (CF 1ère inst.), paragraphe 49, est particulièrement pertinente à la présente affaire :

[TRADUCTION]

Bien qu’il puisse être vrai qu'une marque de commerce qui donne une description claire ou une description fausse et trompeuse est nécessairement sans caractère distinctif, il n’est pas exact de soutenir que, du simple fait qu’une marque de commerce est considérée comme ne donnant pas une description simple ou une description fausse et trompeuse, elle est donc distinctive.

[51]             Ayant conclu que la marque de commerce du Requérant ne donne pas une description claire et ne donne pas une description fausse et trompeuse, il serait donc normalement approprié que je continue d’examiner le motif d’opposition de l’Opposant fondé sur le caractère distinctif. Toutefois, en l’espèce, les arguments déposés par l’Opposant en vertu de l’article 2 de la Loi se limitent à une allégation selon laquelle la marque de commerce du Requérant n’est pas distinctive en ce qu’elle elle ne distingue pas véritablement, ni n’est adaptée à distinguer, les marchandises du Requérant de celles d’autres propriétaires, puisque, qu’elle soit sous forme graphique, écrite ou sonore, elle donne une description claire ou donne une description fausse et trompeuse, en langue anglaise, de la nature ou de la qualité des marchandises en liaison avec lesquelles il est allégué qu’elle a été employée.

[52]             Puisque j’ai déjà déterminé que la Marque ne donne pas une description claire ni une description fausse et trompeuse, et puisque les arguments déposés par l’Opposant se limitent à cette allégation, je n’estime pas qu’il soit nécessaire d’examiner davantage ce motif d’opposition. Ce motif d’opposition est donc aussi rejeté.

IV.          Décision

[53]             Exerçant les pouvoirs qui m'ont été délégués en vertu des dispositions du paragraphe 63(3) de la Loi, je rejette l'opposition conformément aux dispositions de l’article 38(8) de la Loi.

 

 

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Cindy Folz

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Geneviève Dard, trad. a.

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