Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

PROCÉDURE PRÉVUE À L'ARTICLE 45

MARQUE DE COMMERCE : DIDI

No D’ENREGISTREMENT : LMC 495802

 

 

À la demande de Coltex B.V. (la « requérante »), le registraire a fait parvenir un avis en vertu de l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce le 15 mars 2007 à Nasri Frères International Inc., le propriétaire inscrit de la marque de commerce mentionnée ci‑dessus.

 

La marque de commerce DIDI est enregistrée en liaison avec :

Marchandises : chandails, tee-shirts, jeans, pantalons, pantalons sports, shorts, chemisiers, robes, costumes, sorties de bain, vestes-chemises, parkas, blousons aviateur, duffel coats, jambières, bas de réchauffement, habits de neige, gilets, manteaux, ponchos, chemises, chandails à col roulé, hauts, jupes, chasubles, capes, châles, pulls molletonnés, léotards, collants, justaucorps, jupes-culottes, gants, mitaines, chapeaux, casquettes, tuques, écharpes, béguins, bandeaux, cagoules-cols, chaussettes, maillots de bain, peignoirs de plage et blousons de plage.

           

L’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13, prévoit que le propriétaire inscrit de la marque de commerce est tenu d’établir que la marque a été employée au Canada en liaison avec chacune des marchandises ou chacun des services que spécifie l’enregistrement, à un moment quelconque au cours des trois ans précédant la date de l’avis et, dans la négative, la date où elle a été ainsi employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour démontrer l’emploi se situe entre le 15 mars 2004 et le 15 mars 2007.

 

L’« emploi » en liaison avec des marchandises est décrit comme suit aux paragraphes 4(1) et 4(3) de la Loi sur les marques de commerce :

4. (1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des marchandises si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces marchandises, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les marchandises mêmes ou sur les colis dans lesquels ces marchandises sont distribuées, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux marchandises à tel point qu'avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

(3) Une marque de commerce mise au Canada sur des marchandises ou sur les colis qui les contiennent est réputée, quand ces marchandises sont exportées du Canada, être employée dans ce pays en liaison avec ces marchandises.

 

Le paragraphe 4(1) s’applique en l’espèce.

 

En réponse à l’avis du registraire, l’inscrivante à produit l’affidavit de Paul Nasri, le président de Nasri Frères International Inc. (le propriétaire inscrit). Les deux parties ont produit des observations écrites. Aucune audience n’a été tenue.

 

Dans son affidavit, M. Nasri explique que l’inscrivante est avant tout importatrice de vêtements et qu’elle revend ces vêtements aux détaillants partout au Canada. Il affirme que la marque visée par la demande a été employée au Canada par l’inscrivante en liaison avec les marchandises enregistrées au cours de la période pertinente par l’entremise d’une étiquette fixée à chaque vêtement ou grâce à une étiquette volante arborant la marque fixée à chaque vêtement ou l’un et l’autre. La pièce 1 est constituée de la photographie d’un échantillon d’une étiquette volante. Je remarque que la marque de commerce DIDI est clairement visible sur l’étiquette volante. M. Nasri affirme également que les étiquettes sont fixées sur les vêtements au lieu de fabrication et que tous les vêtements vendus par l’inscrivante aux détaillants canadiens au cours de la période pertinente portaient de telles étiquettes ou des étiquettes volantes, ou les deux, au moment de la vente et de la livraison dans le cours normal des affaires de ces détaillants.

 

M. Nasri a également joint les pièces 2 à 8, qui consistent en des photographies de différents vêtements, c’est-à-dire un tee-shirt ou un chemisier, un chandail, un gilet, des tee‑shirts et une camisole ou une blouse arborant clairement la marque visée par la demande de la manière décrite ci-dessus. Il est mentionné que ces vêtements sont du même type que ceux vendus et livrés à des détaillants canadiens par l’inscrivante dans le cours normal des affaires au cours de la période pertinente.

 

De plus, M. Nasri a produit les pièces 9 et 10, qu’il décrit comme étant des documents et des factures choisis au hasard et qui visent à établir l’achat et la vente par l’inscrivante auprès de fournisseurs et de détaillants de produits en liaison avec la marque du genre de ceux vendus par NASRI au cours de la période pertinente. M. Nasri affirme que [TRADUCTION] « même si ces documents ne font pas allusion à la marque DIDI, ma participation active aux affaires de l’inscrivante et ma capacité à identifier le style des numéros me permettent d’affirmer que ces documents attestent la vente au Canada de vêtements de marque DIDI au cours de la période pertinente ».

 

Au paragraphe 14 de son affidavit, M. Nasri a affirmé ce qui suit :

[TRADUCTION] L’examen des pièces jointes à l’affidavit permet de constater que parmi les vêtements de marque DIDI achetés par NASRI et vendus à des détaillants au Canada au cours de la période pertinente se trouvent des chandails, des tee-shirts, des pantalons, des jeans, des shorts, des pantalons sport, des hauts, des gilets, des chemises, des chemisiers, des jupes, des robes et des chandails à col roulé.

 

Bien que plusieurs des factures produites portent une date antérieure à la période pertinente, je remarque qu’un grand nombre de factures présentées à l’appui de la déclaration de M. Nasri reproduite ci-dessus datent visiblement de cette période. Ces factures démontrent clairement que des ventes ont été effectuées par l’inscrivante à des détaillants canadiens et chacune des marchandises susmentionnées y est clairement identifiée dans la colonne d’identification du produit.

 

Cependant, la requérante fait valoir que l’emploi de la marque ne profite pas à l’inscrivante. Plus précisément, elle affirme que la preuve démontre plutôt que DIDI est la marque de commerce du fabricant (ou celle d’un tiers) et que l’inscrivante n’agit qu’à titre de distributeur ou de revendeur des marchandises de marque DIDI. À ce sujet, elle renvoie aux décisions Manhattan Industries Inc. c. Princeton Manufacturing Ltd. (1971), 4 C.P.R. (2d) 6 (C.F. 1re inst.), et Royal Doulton Tableware c. Cassidy’s (1984), 1 C.P.R. (3d) 214 (C.F. 1re inst.).

 

En l’espèce, contrairement à la situation dans l’affaire Manhattan Industries, précitée, le propriétaire inscrit de la marque de commerce n’est pas le fabricant. De plus, je voudrais rappeler que l’article 45 ne doit pas servir à débattre de questions de droits substantiels à l’égard d’une marque de commerce, tel que la propriété. De tels différends inter partes relèvent davantage de la procédure de radiation prévue à l’article 57 de la Loi, comme dans l’affaire Royal Doulton, précitée [voir Philip Morris Inc. c. Imperial Tobacco Ltd. (1987), 13 C.P.R. (3d) 289 (C.F. 1re inst.)]. Par conséquent, comme les factures constituant la pièce 10 font clairement état de ventes effectuées par l’inscrivante à des détaillants canadiens, je suis convaincu, pour les besoins de l’article 45, que cet emploi de la marque a valu emploi à son profit.

 

En ce qui concerne les autres marchandises que spécifie l’enregistrement, M. Nasri invoque des circonstances spéciales pour justifier le défaut d’emploi. Il explique que l’entreprise de l’inscrivante dépend dans une certaine mesure des conditions du marché et fait valoir que la possibilité de trouver des fournisseurs adéquats offrant des prix compétitifs pour les vêtements influe grandement sur le type de vêtements que l’inscrivante est en mesure d’offrir et de vendre aux détaillants canadiens. Au paragraphe 17, il affirme :

[TRADUCTION] Bien que NASRI ait vendu au Canada chacune des marchandises que spécifie l’enregistrement no 495802 depuis au moins décembre 1993, en liaison avec sa marque de commerce DIDI, les conditions du marché, la concurrence et l’impossibilité pour NASRI d’obtenir toutes ces marchandises de fournisseurs fiables à des prix compétitifs explique que NASRI n’a pas vendu d’habits, de robes, de parkas, de blousons d’aviateur, de duffel coats, de jambières, de bas de réchauffement, d’habits d’hiver, de manteaux, de ponchos, de capes, de châles, de justaucorps, de culottes, de gants, de mitaines, de chapeaux, de casquettes, de tuques, de cagoules-cols, de maillots de bain, de peignoirs de plage et de blousons de plage au Canada au cours de la période pertinente, en liaison avec sa marque DIDI.

 

En plus d’affirmer que NASRI n’a aucunement l’intention d’abandonner sa marque de commerce en liaison avec les marchandises mentionnées ci-dessus, M. Nasri ajoute que l’inscrivante a trouvé un fournisseur adéquat et qu’elle s’apprête à offrir aux fins de vente au Canada, en liaison avec sa marque de commerce DIDI, des chapeaux, des béguins, des maillots de bain, des peignoirs de plage et des blousons de plage. Il affirme également que l’inscrivante [TRADUCTION] « a également reçu des demandes de la part des détaillants afin qu’elle offre des habits et des vêtements d’hiver que NASRI vendrait au Canada en liaison avec sa marque de commerce DIDI et des efforts sont faits pour déterminer si cela serait profitable pour NASRI ».

 

Pour faire la preuve des circonstances spéciales, le propriétaire inscrit doit fournir la date à laquelle la marque de commerce a été employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date (paragraphe 45(1) de la Loi); lorsque le défaut d’emploi n’est pas attribuable à des circonstances spéciales qui le justifient, l’enregistrement de cette marque de commerce est susceptible de radiation ou de modification en conséquence (paragraphe 45(3)). L’absence d’une date de dernier emploi n’est pas fatale; en général, la date d’enregistrement ou la date de la cession de la marque au propriétaire actuel sera utilisée (GPS (U.K.) c. Rainbow Jean Co. 58 C.P.R. (3d) 535).

 

Il est bien établi en droit que trois critères doivent être pris en compte pour décider s’il y a ou non des circonstances qui justifieraient le non‑emploi; premièrement, la période pendant laquelle la marque de commerce n’a pas été employée; deuxièmement, la mesure dans laquelle les raisons invoquées par le propriétaire inscrit tiennent à des circonstances indépendantes de sa volonté; troisièmement, l’existence d’une intention sérieuse de reprendre l’emploi de la marque à court terme [Registraire des marques de commerce c. Harris Knitting Mills Ltd., 4 C.P.R. (3d) 488 (C.A.F.)].

 

En ce qui concerne le premier et le second critères, il faut soupeser les raisons invoquées pour justifier le non-emploi et sa durée. Essentiellement, ce qui peut constituer des circonstances spéciales justifiant le non-emploi pour une courte période peut ne pas le justifier pour des périodes plus longues (Harris Knitting, précitée, Re Goldwell Ltd. (1974), 29 C.P.R. (2d) 110). De plus, les « circonstances spéciales » concernant le second critère, à savoir la question de savoir si le non-emploi de la marque était dû à des circonstances indépendantes de la volonté de son propriétaire, correspondent à des « circonstances qui sont inhabituelles, peu fréquentes ou exceptionnelles » (John Labatt Ltd. c. The Cotton Club Bottling Co. (1976), 25 C.P.R. 115).

 

Pour que l’argument portant sur les circonstances spéciales soit retenu, le deuxième critère doit être respecté [Scott Paper Limited c. Smart & Biggar et le procureur général du Canada, 2008 CAF 129]. Cela ne signifie pas que les deux autres critères ne sont pas des facteurs pertinents à prendre en compte, mais simplement que ces facteurs, pris isolément, ne constituent pas des circonstances spéciales. Enfin, en ce qui a trait au troisième critère, l’intention de reprendre l’emploi de la marque doit reposer sur des éléments factuels, tels que des bons de commande ou, au moins, une date de reprise [Lander Co. Canada c. Alex Macrae & Co. (1993), 46 C.P.R. (3d) 417 (C.F. 1re inst.)].

 

En ce qui concerne le premier critère, c’est-à-dire la période pendant laquelle la marque de commerce n’a pas été employée, M. Nasri n’a pas indiqué de date spécifique de dernier emploi pour les marchandises en question, mais a plutôt affirmé que [TRADUCTION] « depuis au moins décembre 1993, NASRI a vendu chacune des marchandises ». Cette déclaration serait conforme aux détails fournis dans l’enregistrement, puisque ce dernier était fondé sur l’emploi depuis 1993. Cependant, je remarque que la date d’enregistrement est le 10 juin 1998 et, suivant la décision GPS (U.K.), précitée, je considère que la date d’enregistrement correspond à la date de dernier emploi. Par conséquent, la période pendant laquelle la marque de commerce n’a pas été employée en liaison avec les marchandises restantes est de près de 9 ans. Le défaut d’emploi, pour être justifié, doit donc rendre compte de manière satisfaisante de cette période assez longue.

 

Pour justifier le non-emploi, comme il a été mentionné précédemment, on a invoqué « les conditions du marché, la concurrence et l’impossibilité pour NASRI d’obtenir toutes ces marchandises de fournisseurs fiables à des prix compétitifs ». L’inscrivante s’appuie sur Rogers, Bereskin & Parr c. Registrar of Trade-marks (1987), 17 C.P.R. (3d) 117, et McFadden, Fincham, Marcus & Allen c. Registrar of Trade-marks (1990), 34 C.P.R. (3d) 70, pour faire valoir que ces raisons justifient adéquatement le défaut d’emploi. Cependant, je constate que dans ces affaires « les conditions du marché » ne constituaient pas la seule justification au défaut d’emploi. De plus, je remarque qu’en l’espèce la période de non-emploi est plus longue.

 

Tout comme dans Ridout & Maybee c. A. Lassonde Inc. (2003), 28 C.P.R. (4th) 559 (A.A.P.M.C.), il est difficile en l’espèce d’évaluer si les difficultés éprouvées quant aux détaillants était un facteur qui échappait à la volonté de l’inscrivante. Cette dernière n’a pas donné de détails au sujet des difficultés qu’elle a éprouvées ou sur les mesures qu’elle a prises pendant la période pertinente pour amoindrir l’effet de ces circonstances.

 

De plus, les conditions du marché ou la conjoncture économique ne font d’habitude pas partie des conditions spéciales permettant de justifier le défaut d’emploi, surtout dans les situations où le non-emploi s’étend sur une longue période [Harris Knitting, précité, Lander Co. Canada c. Alex Macrae & Co. (1993), 46 C.P.R. (3d) 417 (C.F. 1re inst.), Belvedere International Inc. c. Sim & McBurney (1993), 53 C.P.R. (3d) 522 (C.F. 1re inst.), Shapiro Cohen Andrews & Finlayson c. I.D. Fashions Ltd. (1998), 87 C.P.R. (3d) 350 (C.O.M.C.)].

 

Quoi qu’il en soit, j’estime que l’intention de reprendre l’emploi de la marque n’a pas été démontrée de manière satisfaisante. À cet égard, je note qu’une date spécifique de reprise des activités n’a pas été fournie et, bien que M. Nasri ait dit qu’un fournisseur fiable avait été trouvé, aucun bon de commande ou autre preuve de ce genre, ni aucun détail précis concernant la reprise de l’emploi de la marque n’ont été fournis. Je m’interroge également au sujet de la déclaration faite au paragraphe 19 de l’affidavit concernant la reprise des ventes d’habits et de vêtements d’hiver, à savoir que [TRADUCTION] « des efforts sont faits pour déterminer si cela serait profitable pour NASRI ». Cette déclaration laisse sous-entendre que le non-emploi pourrait persister indéfiniment.

 

Au vu de ce qui précède, je conclus que l’emploi de la marque de commerce concernée a été établi pour les marchandises décrites comme « des chandails, des tee‑shirts, des pantalons, des jeans, des shorts, des pantalons sport, des hauts, des gilets, des chemises, des chemisiers, des jupes, des robes et des chandails à col roulé »; que l’emploi n’a pas été démontré en ce qui concerne les autres marchandises que spécifie l’enregistrement et que l’inscrivante n’a pas démontré que le défaut d’emploi était attribuable à des circonstances spéciales qui le justifient. L’enregistrement LMC 495802 sera donc modifié afin que les marchandises suivantes en soient retirées :

Habits, robes, vestes-chemises, parkas, blousons d’aviateur, duffel coats, jambières, bas de réchauffement, habits de neige, manteaux, ponchos, chasubles, capes, châles, pulls molletonnés, léotards, collants, justaucorps, culottes, gants, mitaines, chapeaux, casquettes, tuques, écharpes, béguins, bandeaux, cagoules-cols, chaussettes, maillots de bain, peignoirs de plage et blousons de plage.

 

conformément aux dispositions du paragraphe 45(5) de la Loi.

 

FAIT À GATINEAU (QUÉBEC), LE 13 JANVIER 2009.

 

 

K. Barnett

Agent d’audience

Commission des oppositions des marques de commerce

 

 

 

 

 

 

 

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